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les ingenieurs en syrie modernisation, technobureaucratie et identite

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Au cour de la première partie de c<strong>et</strong>te thèse, nous avons t<strong>en</strong>té de situer <strong>les</strong> ingénieurs dans le<br />

contexte socio-économique <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>tant leurs différ<strong>en</strong>ciations générationnelle, sociale <strong>et</strong> économique<br />

<strong>en</strong> fonction de leurs lieux d'activité : municipalité, <strong>en</strong>treprise publique, administration de l'Etat <strong>et</strong> secteur<br />

privé. Ces différ<strong>en</strong>tes positions professionnel<strong>les</strong> impliqu<strong>en</strong>t d'inéga<strong>les</strong> participations à la définition de<br />

politiques de développem<strong>en</strong>t selon que l'initiateur est l'Etat ou <strong>les</strong> nouveaux <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>eurs du secteur<br />

privé. En examinant la question de la participation des ingénieurs aux mécanismes de prise de décision<br />

<strong>et</strong> de leur capacité à y accéder, nous avons surtout mis l'acc<strong>en</strong>t sur <strong>les</strong> contraintes "extérieures", politiques<br />

<strong>et</strong> économiques. Nous allons maint<strong>en</strong>ant nous intéresser plus aux conceptions que <strong>les</strong> ingénieurs ont de<br />

la <strong>modernisation</strong>, du développem<strong>en</strong>t, de la nation, de la religion pour pouvoir saisir leurs rô<strong>les</strong> effectifs<br />

ou pot<strong>en</strong>tiels <strong>et</strong> le s<strong>en</strong>s de leurs actions.<br />

Dans c<strong>et</strong>te partie <strong>et</strong> la partie suivante (II <strong>et</strong> III) nous allons étudier <strong>les</strong> ori<strong>en</strong>tations des<br />

ingénieurs, définies comme visions du monde <strong>et</strong> modalités d'action, dans leurs formes <strong>et</strong> leurs<br />

combinaisons :<br />

La première ori<strong>en</strong>tation est modernisatrice. Car nous trouvons chez <strong>les</strong> ingénieurs des<br />

référ<strong>en</strong>ces indirectes ou directes à la <strong>modernisation</strong> <strong>et</strong> c'est à notre recherche d'<strong>en</strong> définir le s<strong>en</strong>s. C<strong>et</strong>te<br />

ori<strong>en</strong>tation r<strong>en</strong>voi à la manière dont s'articul<strong>en</strong>t l'expéri<strong>en</strong>ce de participation des ingénieurs à la société<br />

syri<strong>en</strong>ne <strong>et</strong> <strong>les</strong> exig<strong>en</strong>ces de ces acteurs à l'égard de c<strong>et</strong>te société.<br />

Cep<strong>en</strong>dant, dans <strong>les</strong> sociétés à faible historicité, <strong>les</strong> ingénieurs comme d'autres acteurs ont<br />

subi des contraintes historiques, structurel<strong>les</strong> <strong>et</strong> conjoncturel<strong>les</strong> qui limit<strong>en</strong>t leur capacité d'action <strong>et</strong><br />

<strong>en</strong>traîn<strong>en</strong>t un autre type d'ori<strong>en</strong>tations. Les acteurs que sont <strong>les</strong> ingénieurs s'estim<strong>en</strong>t m<strong>en</strong>acés aussi bi<strong>en</strong><br />

par des forces extérieures qu'ils définiss<strong>en</strong>t comme étant "le capitalisme, le colonialisme <strong>et</strong> l'Occid<strong>en</strong>t",<br />

<strong>en</strong> fait la modernité, que par des forces intérieures. Craignant un prés<strong>en</strong>t miné par la crise économique <strong>et</strong><br />

un av<strong>en</strong>ir quasi incertain, leur réaction pr<strong>en</strong>d différ<strong>en</strong>tes formes : soit l'apathie, soit la crispation sur des<br />

intérêts corporatistes <strong>et</strong> sur des privilèges, créant ainsi une id<strong>en</strong>tité socioprofessionnel, soit <strong>en</strong>fin la<br />

référ<strong>en</strong>ce à un passé glorieux de l'islam. Nous allons voir que l'ori<strong>en</strong>tation modernisatrice constitue un<br />

fonds commun pour tous <strong>les</strong> ingénieurs, mais c<strong>et</strong>te ori<strong>en</strong>tation faible, <strong>et</strong> qui fonctionne mal, se<br />

décompose <strong>en</strong> trois niveaux qui lui donn<strong>en</strong>t ainsi des significations éclatées. Ces différ<strong>en</strong>ts niveaux sont<br />

analysés <strong>en</strong> termes d'ori<strong>en</strong>tations: ori<strong>en</strong>tation professionnelle faible, ori<strong>en</strong>tation corporatiste <strong>et</strong><br />

ori<strong>en</strong>tation "esthétiquem<strong>en</strong>t" islamiste.(nous appelons l'<strong>en</strong>semble de ces trois ori<strong>en</strong>tations par l'initial<br />

de chacune [PCI]). Les combinaisons <strong>en</strong>tre <strong>les</strong> deux types des ori<strong>en</strong>tations, modernisatrices <strong>et</strong> PCI,<br />

fera l'obj<strong>et</strong> de la partie III de ce travail.<br />

Nous avons exclu <strong>les</strong> ori<strong>en</strong>tations politiques proprem<strong>en</strong>t dites <strong>en</strong> raison de leur faib<strong>les</strong>se.<br />

El<strong>les</strong> s'épuis<strong>en</strong>t vite chez <strong>les</strong> ingénieurs c<strong>en</strong>trés sur une expéri<strong>en</strong>ce quotidi<strong>en</strong>ne vécue ; car, tr<strong>en</strong>te ans de<br />

domination ba'thiste ont profondém<strong>en</strong>t ancré dans la consci<strong>en</strong>ce des ingénieurs le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t d'exclusion<br />

de la vie politique <strong>et</strong> du pouvoir. Mais tout de même, le politique, comme expression <strong>et</strong> action, se cache<br />

dans l'économique, le social ou dans une id<strong>en</strong>tité religieuse contestataire.<br />

* * * *<br />

Faute de mobilisation <strong>en</strong> tant que groupe socioprofessionnel cohér<strong>en</strong>t <strong>et</strong> faute de capacité à<br />

m<strong>en</strong>er une action de niveau élevé (au s<strong>en</strong>s sue lui donne Alain Touraine), <strong>les</strong> ingénieurs font référ<strong>en</strong>ce à<br />

l'idée de <strong>modernisation</strong>. Ce concept, "<strong>modernisation</strong>", défini comme la capacité qu'a un système social à<br />

produire de la modernité, 194 nous laisse la liberté d'analyser le processus de changem<strong>en</strong>t effectué par <strong>les</strong><br />

ingénieurs soit <strong>en</strong> tant que un groupe, soit composés de sous-groupes, soit <strong>en</strong> tant qu'individus.<br />

Il ne s'agit pas, pour aborder <strong>les</strong> ori<strong>en</strong>tations modernisatrices, de décrire le processus de<br />

<strong>modernisation</strong> <strong>en</strong>tamé par <strong>les</strong> ingénieurs eux-mêmes, mais d'analyser <strong>les</strong> avatars de c<strong>et</strong>te ori<strong>en</strong>tation sous<br />

la forme de leurs visées technocratique <strong>et</strong> techniciste. Ensuite, nous allons montrer <strong>les</strong> limites <strong>et</strong> la<br />

194 - Alain Touraine, "Qu'est-ce que le développem<strong>en</strong>t?", in L'Année sociologique, Paris, 1992, nø 42,<br />

p. 48.

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