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KB : Maint<strong>en</strong>ant, on peut analyser pourquoi, mais à l'époque on ne pouvait pas savoir, on<br />
était complètem<strong>en</strong>t dedans.<br />
CV : J'ai s<strong>en</strong>ti qu'il se préparait un truc, mais dans quel s<strong>en</strong>s ?<br />
KB : Quand tu es parti dans une foulée, tu continues ton rythme, et c'est seulem<strong>en</strong>t après que<br />
tu t'aperçois qu'au bout de cinquante mètres tu as eu un creux. Et il y a un mom<strong>en</strong>t où il faut<br />
que tu t'arrêtes quand même.<br />
CV : Parce que déjà, il faut repréparer la nouvelle chose, et comme on n'arrêtait jamais on ne<br />
pouvait pas. Et alors, faire des morceaux courts, ce n'était pas la solution ; on avait des petits<br />
morceaux, j'<strong>en</strong> avais créé quelques uns, mais qui n'étai<strong>en</strong>t pas dans l'esprit de ce qu'on allait<br />
faire maint<strong>en</strong>ant. Je savais qu'il fallait faire des morceaux courts, et puis je n'avais pas le filon<br />
pour les faire courts, je ne savais pas comm<strong>en</strong>t les diriger. Et je n'ai pas eu besoin de chercher,<br />
c'est v<strong>en</strong>u comme la musique était v<strong>en</strong>ue la première fois, sauf qu'il y avait tout l'acquis<br />
derrière. Si maint<strong>en</strong>ant on joue comme ça, des trucs simples même, c'est parce que derrière, il<br />
y a tout. Même si tu <strong>en</strong>t<strong>en</strong>ds la basse qui fait "deudeumtoutoutoutur", derrière il y a Coltrane,<br />
il y a tout ça. La différ<strong>en</strong>ce, c'est que maint<strong>en</strong>ant elle est jouée, aah…<br />
KB : Il faut dire que la musique qu'on joue maint<strong>en</strong>ant elle existait déjà. Ce qu'il y a, c'est<br />
qu'on n'a jamais osé ou c'est jamais v<strong>en</strong>u évid<strong>en</strong>t. Mais la musique était là, <strong>en</strong> fait. Les<br />
morceaux qu'on joue maint<strong>en</strong>ant, moi j'ai l'impression de les avoir toujours connus.<br />
"Tamla Zeuhl"<br />
CV : Oublie les mots, je sais même pas, tu vois, on dit des trucs… Moi je p<strong>en</strong>sais toujours<br />
quand je fais un morceau : la partie de basse, ça doit comme John Coltrane qui joue, la partie<br />
de piano, c'est comme Coltrane qui joue, la partie de chant, c'est comme Coltrane ; mais<br />
seulem<strong>en</strong>t, on voudrait l'<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre comme si c'était eux qui jouai<strong>en</strong>t. Alors, tu vois la difficulté<br />
pour les musici<strong>en</strong>s qui arriv<strong>en</strong>t, quand même, il faut leur expliquer : "Non, mais tu<br />
compr<strong>en</strong>ds, la partie de basse, comme ça" - "Mais je vi<strong>en</strong>s de la jouer" - "Non, plus, euh, et<br />
puis plus…". Pr<strong>en</strong>ds la partie de basse de "Maahnt" dans le disque ("Attahk") ou des trucs<br />
comme ça, les g<strong>en</strong>s qui vont s'y attaquer, ils vont voir la difficulté pour la réalisation de ça !<br />
C'est dans Best que le truc était écrit au sujet du bassiste du disque…<br />
ML : Oui, c'est moi qui l'ai écrit. (J'avais dit dans ma chronique de "Attahk" que "le<br />
bassiste manque s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t de subtilité")<br />
CV : C'est toi qui l'a écrit… pr<strong>en</strong>ds les parties de basse du disque, elles n'ont jamais été aussi<br />
d<strong>en</strong>ses. Pr<strong>en</strong>ds un bassiste, le bassiste qui joue avec nous maint<strong>en</strong>ant par exemple ; il n'<strong>en</strong> est<br />
pas à son coup d'essai, il a dit : "Jamais de ma vie je n'ai joué une partie aussi dure". Mais ce<br />
n'est pas dans le s<strong>en</strong>s dur que ça a été fait, c'est dans le s<strong>en</strong>s d'un mec, d'un fou qui joue.<br />
Imagine-toi, ça va être inhumain à jouer, tu ne peux pas t'imaginer… Ca a été fait avec un<br />
amour, ce disque, déjà… Par exemple, on n'a pas mis le paquet au niveau synthétiseurs, au<br />
niveau trucs, dans le disque. On a laissé le truc pur, parce que… je t'explique un truc qui est<br />
vachem<strong>en</strong>t important. Je ne devrais peut-être pas l'expliquer, parce que j'ai peur que ça mettre<br />
la puce à l'oreille à des mecs, dans le s<strong>en</strong>s où ça leur ferait gagner du temps ; et il n'y a pas à<br />
aider, parce que personne n'aide. Moi, je vais te dire une analyse : pr<strong>en</strong>ds les mecs comme<br />
Tamla Motown, par exemple.<br />
(la maison de disques qui depuis près de vingt ans a dominé le marché du rhythm'n'blues avec<br />
les Supremes, les Four Tops, Marvin Gaye, Stevie Wonder, etc.)<br />
Berry Gordy (le fondateur de Tamla Motown) disait qu'ils s'étai<strong>en</strong>t installés dans un garage et<br />
qu'ils avai<strong>en</strong>t un son ; et que le fait d'être toujours avec ce son a créé ce climat pour les<br />
disques Tamla. Après, il y avait Booker T., qui accompagnait Otis Redding, qui avait un son