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La patelle géante - La pointe du Cap Corse

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L’ actualité à la Pointe !<br />

Dossier<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong><br />

Les tours<br />

littorales<br />

1. <strong>La</strong> Giraglia<br />

Numéro 2 • Hiver 2002-2003 • Gratuit


2<br />

3<br />

Edito<br />

Couverture :<br />

Dessin de N. Müller-Sbriglio<br />

Parc national de Port-Cros<br />

Synthèse d’une<br />

saison écoulée<br />

Parce qu’il représente un endroit unique, beau<br />

et sauvage,<br />

Parce qu’il véhicule une formidable image de<br />

liberté et d’évasion en phase constante avec le<br />

milieu naturel,<br />

Parce qu’il a la capacité de rassembler une<br />

étonnante diversité de faune et de flore dans le<br />

même espace, le site de <strong>Cap</strong>an<strong>du</strong>la méritait bien<br />

une incursion dans le Journal n°2.<br />

Résumer en quelques lignes serait même une<br />

offense pour le lieu ; cette fameuse Pointe <strong>du</strong><br />

<strong>Cap</strong> battue par tous les vents, ce fameux doigt<br />

tranchant Méditerranée et Tyrrhénienne mériterait<br />

un éternel journal de bord.<br />

Juin prometteur, juillet peu fréquenté, août très<br />

perturbé, septembre alterné.<br />

Des saisonniers qui commençaient leur tâche le<br />

15 juin. Connaissance <strong>du</strong> milieu, explications,<br />

informations, comptages et nettoyages, telles<br />

étaient leurs missions.<br />

Plusieurs interventions : médicales pour des<br />

évacuations, mentales pour des réconciliations,<br />

verbales pour de la répression. Métier éclectique<br />

que celui de “Guardia Parco” où l’on doit<br />

tout le temps s’adapter. Fréquentation en baisse,<br />

chiffres à l’appui. L’euro, les RTT, le mauvais<br />

temps, les algues… qui détient la vérité ?<br />

Barcaggio, toujours adoré, a la plage la plus fréquentée<br />

(et la plus grande aussi).<br />

Tamarone c’est sur la <strong>du</strong>rée avec le sentier des<br />

douaniers.<br />

Le Moulin et sa perspective vers l’autre côté.<br />

Recrudescence cette année de promeneurs non<br />

identifiés, essayant, en toute illégalité, les<br />

vacances en liberté. Problème permanent<br />

d’un pays se vendant médiatiquement,<br />

d’une <strong>pointe</strong> sauvage qui incite au<br />

camping… sauvage.<br />

Affluence juste au cœur d’août, ne<br />

<strong>du</strong>rant que quelques jours (<strong>du</strong> 15 au 22).<br />

Orages (mais pas désespoir) qui<br />

voyaient des touristes hébétés se retrouver<br />

bien rincés.<br />

Septembre arrivant “enfin”, des saisonniers<br />

ren<strong>du</strong>s à leurs facultés, le sentier<br />

retrouve ses abonnés, et sur le parking<br />

plus que des “2B”.<br />

Ca y est, c’est “déjà” terminé. <strong>La</strong><br />

Pointe a retrouvé sa ligne de flottaison,<br />

en attendant une nouvelle saison.<br />

Irrémédiablement pointé vers le nord, juste<br />

équilibre entre mer et montagne, inaliénablement<br />

protégé,<br />

<strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong> merci d’exister.<br />

Alain CAMOIN<br />

Conservateur de l’association Finocchiarola-<br />

Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong><br />

www.<strong>pointe</strong><strong>du</strong>capcorse.org<br />

Téléchargez le magazine<br />

Le Journal de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong> est publié par l’association<br />

Finocchiarola pour la gestion des espaces naturels de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong><br />

<strong>Corse</strong>. Mairie, 20247 Rogliano.<br />

Direction de la publication : Michel Delaugerre (AGENC)<br />

Edition et mise en page : Karibu Editions (J. Nicoli, O. Nicoli, A. Baconnier)<br />

Maquette : C. Steffan.<br />

Impression : Imprimerie Bastiaise.<br />

ISSN en cours. Périodicité : Semestriel.<br />

Crédit photo : AGENC : 4, 8, 9, 10, 11, 13 et 4 e de couverture ; <strong>La</strong> <strong>Corse</strong>,<br />

images et cartographie (Ed. Alain Piazzola) : 7 ; J.M. Culioli (OEL) : 13 ;<br />

sauf mentions spéciales.<br />

Nous remercions tout spécialement pour leur contribution à ce numéro :<br />

Antoine-Marie Graziani, Jean-Michel Culioli, l'Office de l'Environnement<br />

de la <strong>Corse</strong> et le Parc national de Port-Cros.<br />

<strong>Corse</strong>-Matin, 21 août 2002<br />

Réponse au jeuconcours<br />

n°1<br />

• Jeannine Graziani (Tomino)<br />

• Pierre <strong>La</strong>ffilé (Centuri)<br />

• Roger Bour (Paris)<br />

ont… gagné le livre “<strong>Cap</strong><br />

<strong>Corse</strong>”. En effet les chutes <strong>du</strong><br />

Niagara aux Etats-Unis, la<br />

<strong>pointe</strong> <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong> et l’île<br />

d’Hokkaido au Japon ont en<br />

commun d’être situées sur<br />

la même latitude :<br />

43° de latitude nord.<br />

Hiver 2002-2003<br />

Hiver 2002-2003


4<br />

5<br />

bref<br />

en<br />

à la <strong>pointe</strong><br />

de l’actualité<br />

Elèves-ingénieurs<br />

de l’ISARA-LYON<br />

<strong>La</strong> petite dernière<br />

D’avril à novembre<br />

Ils nous ont aidé... merci à eux !<br />

Sébastien, Alexandra, Benoît et Vanessa, recrutés<br />

comme saisonniers, étaient présents chaque<br />

jour à Barcaggio, à Tamarone, au Moulin Mattei et au<br />

Plan de l’Ilot. Leur travail : surveillance, entretien et<br />

information des visiteurs.<br />

Quatre mois <strong>du</strong>rant, Ségolène a noté les faits et gestes<br />

des goélands d’Audouin et a participé au suivi de la<br />

colonie de puffins cendrés de la Giraglia.<br />

Dans le cadre d’un BTS au lycée agricole de Sartène,<br />

Arnaud a étudié les pratiques agro-pastorales et la protection<br />

des espaces.<br />

Konstantina et Wolfgang, étudiants-architectes, ont<br />

cartographié et relevé (en juin) les fours à chaux.Carole<br />

et Tatiana leur ont succédé pour faire l’inventaire des<br />

moulins à vent.<br />

Sophie, Marie-<strong>La</strong>ure, Pierre et Paul élèves-ingénieurs<br />

(ISARA, Lyon) ont rencontré en juin puis en septembre<br />

de nombreux acteurs de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> pour recueillir<br />

leurs avis et leurs impressions sur la protection des sites.<br />

En octobre, Jean-Jacques (BTS Annecy) a dressé la liste<br />

des propriétaires des parcelles traversées par la future<br />

boucle <strong>du</strong> sentier <strong>du</strong> Moulin Mattei au sentier douanier.<br />

Une partie des saisonniers était logée à la “Canava di u<br />

Mezziornu” (Maison des Oiseaux de l’association des<br />

Amis <strong>du</strong> Parc) de Barcaggio. Merci à tous. Merci à<br />

l’Office de l’Environnement, au Conseil Général et à la<br />

DIREN pour leur aide. Merci à la population <strong>du</strong> <strong>Cap</strong><br />

pour l’accueil qui leur a été réservé.<br />

Carte postale<br />

<strong>La</strong> petite nouvelle vient de sortir<br />

Notre carte postale <strong>du</strong> sentier des douaniers a<br />

déjà été diffusée à 60 000 exemplaires ! (Offices<br />

de Tourisme de Macinaggio,Bastia,Saint-Florent,socioprofessionnels…).<br />

Cette année, une nouvelle carte voit<br />

le jour : un format plus allongé, des photographies et<br />

plus de place pour la correspondance. Comme d’habitude,<br />

sa diffusion est absolument gratuite.<br />

Médias<br />

<strong>La</strong> Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> vue par les médias<br />

<strong>La</strong> Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> a fait l’objet d’une bonne<br />

couverture médiatique : presse , radio (RCFM,<br />

France Inter) et télévision (TF1, France 3). <strong>La</strong> beauté de<br />

ses paysages et ses attraits touristiques autant que la<br />

gestion exemplaire de ses espaces naturels y étaient<br />

évoqués.<br />

1. <strong>La</strong> <strong>Corse</strong>, votre hebdo,<br />

édition spéciale, été 2002<br />

2. Journal de la <strong>Corse</strong>,<br />

8-14 novembre 2002<br />

3. <strong>Corse</strong> matin, 28 août 2002<br />

Ornithologie<br />

Carnet de naissances<br />

Le bilan de la saison estivale est très positif<br />

pour le goéland d’Audouin (cet oiseau symbole<br />

de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> a fait l’objet d’un dossier<br />

complet dans notre n°1). 28 jeunes à l’envol ont, en<br />

2002, rassuré tous ceux qui suivent l’oiseau rare. Ces<br />

goélands se repro<strong>du</strong>isent habituellement sur les îles<br />

Finocchiarola, sur la Giraglia et sur <strong>Cap</strong>ense. Ils ont,<br />

cette saison, jeté leur dévolu sur <strong>Cap</strong>ense abandonnant<br />

totalement les autres sites. L’îlot a en effet<br />

accueilli tous les couples repro<strong>du</strong>cteurs.Ce comportement<br />

erratique n’est pas nouveau, mais les ornithologues<br />

n’en connaissent pas avec certitude les<br />

raisons. Le puffin cendré, un autre oiseau rare, mais<br />

encore plus discret (il vit en pleine mer et ne vient<br />

sur la Giraglia que pour se repro<strong>du</strong>ire), a lui aussi vu<br />

la naissance d’une vingtaine de jeunes à l’envol.<br />

Enfin le balbuzard, le fameux aigle pêcheur, a réussi sa<br />

repro<strong>du</strong>ction à la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong>,avec un jeune à l’envol.<br />

1<br />

bref<br />

en<br />

à la <strong>pointe</strong><br />

de l’actualité<br />

2<br />

Goéland d’Audouin<br />

3<br />

Hiver 2002-2003<br />

Hiver 2002-2003


6<br />

7<br />

Naissance des tours littorales /1<br />

<strong>La</strong> tour<br />

de la Giraglia<br />

A la demande <strong>du</strong> Conservatoire <strong>du</strong> Littoral, l’historien<br />

Antoine-Marie Graziani a réalisé une étude encore inédite sur<br />

la construction de plusieurs tours littorales dont celles de<br />

Finocchiarola, Santa-Maria, Agnellu et Giraglia. Cet article,<br />

le premier d’une série, retrace l’histoire de leur édification.<br />

Le personnel<br />

de la tour<br />

Au XVI e siècle, le personnel<br />

d’une tour littorale se compose<br />

d’un chef et de trois défenseurs.<br />

Parmi les trois soldats, on doit<br />

compter au moins un bombardier.<br />

A la Giraglia, un homme<br />

est en plus chargé <strong>du</strong> ravitaillement<br />

et <strong>du</strong> transport (en<br />

barque) des gardes de l’édifice.<br />

Jusqu’à la fin <strong>du</strong> XVII e siècle,<br />

le personnel de la tour est cap<br />

corsin ou bastiais puis exclusivement<br />

<strong>du</strong> <strong>Cap</strong> corse. Certains<br />

sont même chefs de père en fils,<br />

à l’instar de Domenico de<br />

Urbanis (chef entre 1720 et<br />

1730) et de son fils qui lui<br />

succède entre 1730 et 1732.<br />

Hiver 2002-2003<br />

Antoine-Marie Graziani précise d’emblée que la documentation<br />

relative à la tour de la Giraglia est très dispersée.<br />

Cependant, les dessins de l’architecte<br />

Domenico Pelo, la correspondance <strong>du</strong> gouverneur<br />

génois, Cattaneo de Marini, et <strong>du</strong> surintendant à la<br />

construction, Don Cristofaro Tagliacarne, permettent<br />

de retracer l’histoire de la construction de la tour.<br />

Décider et construire<br />

<strong>La</strong> Giraglia apparaît, dès 1573, dans la liste des tours à<br />

construire sur le littoral corse. Mais c’est presque dix<br />

ans plus tard, en 1582, que le seigneur Don Cristofaro<br />

Tagliacarne et le gouverneur Stefano Passano décident<br />

l’édification d’une tour sur l’îlot. Au XVI e siècle, la<br />

majorité des chantiers de construction <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> corse<br />

est dirigée par un seigneur. D’autre part, toute décision<br />

de construction doit être validée par un accord<br />

entre les seigneurs cap corsins et les représentants de<br />

la population. L’Office de construction des tours<br />

formalise le 16 avril 1583 l’accord passé pour la<br />

construction de la tour de la Giraglia ; elle doit être<br />

achevée en juillet 1584.<br />

Bâtir sur un îlot<br />

L’édification d’une tour sur une île pose de nombreux<br />

problèmes logistiques, susceptibles de retarder la<br />

construction. <strong>La</strong> correspondance entre le gouverneur<br />

Cattaneo de Marini (le successeur de<br />

Stefano Passano) et Don Cristofaro<br />

Tagliacarne, en témoigne. Ce dernier, dans<br />

une lettre <strong>du</strong> 29 juillet 1584, dresse au<br />

Génois un état des difficultés liées au<br />

transport de la nourriture et <strong>du</strong> matériel<br />

entre Bastia et la Giraglia. Il demande<br />

d’ailleurs des délais supplémentaires pour<br />

achever l’édification de la tour. Antoine-<br />

Marie Graziani rapporte que l’architecte<br />

Domenico Pelo, qui doit achever l’édifice,<br />

s’est ren<strong>du</strong> sur le chantier à la même<br />

période.<br />

Bon gré, mal gré, les travaux avancent. Le<br />

16 novembre 1584, la deuxième voûte de<br />

la tour est achevée. L’édifice est même<br />

presque terminé le 10 décembre 1584.<br />

Mais, le problème d’approvisionnement<br />

en nourriture et en matériel subsiste,<br />

menaçant l’achèvement final. Le gouverneur<br />

Cattaneao de Marini ne semble guère s’en soucier et se<br />

préoccupe davantage <strong>du</strong> personnel de la tour : il<br />

adresse au Sénat de Gênes une lettre désignant<br />

Bartolomeo de Sarzana comme futur chef de l’édifice.<br />

Fin décembre 1584, le surintendant Don Cristofaro<br />

Tagliacarne envoie enfin à Cattaneo de Marini l’avis de<br />

fin des travaux.<br />

L’heure des comptes<br />

Ce dessin de la tour a été réalisé,<br />

avant même sa construction, par<br />

l’architecte Domenico Pelo.<br />

Il ressemble de façon étonnante<br />

à l’édifice actuel.<br />

Le seigneur cap corsin Don Cristofaro Tagliacarne a dépensé 9 311 lires pour<br />

la construction de la tour de la Giraglia. Par une assignation des agents <strong>du</strong> Trésor<br />

(6 février 1585), il demande le remboursement de cette somme – qu’il obtient.<br />

C’est le prélèvement d’un droit d’ancrage qui doit permettre de financer<br />

la construction de l’édifice.<br />

Hiver 2002-2003


Les quatre <strong>patelle</strong>s de <strong>Corse</strong><br />

Voici les quatre espèces de <strong>patelle</strong>s de <strong>Corse</strong>*. <strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> est protégée : la récolte de cette espèce gravement menacée est strictement interdite.<br />

P R O T É G É E<br />

Patelle <strong>géante</strong><br />

ou <strong>patelle</strong> ferrugineuse<br />

ou <strong>patelle</strong> foncée,Patella ferruginea<br />

C’est la plus grande des <strong>patelle</strong>s de notre littoral. Elle<br />

atteint 5, 5 à 7,5 cm de diamètre (10 cm maximum). Sa<br />

coquille épaisse et solide comporte 30 à 50 grosses<br />

côtes saillantes. Cette <strong>patelle</strong> est fixée uniquement au<br />

niveau de la mer, sur les rochers exposés aux vagues.<br />

C’est une espèce qualifiée de coriace, au pied très <strong>du</strong>r.<br />

Elle est protégée en France depuis 1992 et ne doit<br />

donc, en aucun cas, être ramassée.<br />

Maccinaghju : A Patella. Centuri : l’Ochje di prete.<br />

Bastia : A <strong>La</strong>ppera grande. Calvi : A <strong>La</strong>bbera maio-U Prete.<br />

Aiacciu : A Patella sumirina. Bunifaziu : A Patilla muntagnata.<br />

Patelle pointue<br />

ou <strong>patelle</strong> ponctuée, Patella rustica<br />

C’est une petite <strong>patelle</strong> (moins de 4 cm de diamètre), à coquille<br />

épaisse, brunâtre, finement striée et conique. Cette espèce est très<br />

résistante,capable de monter assez haut par rapport au niveau de<br />

la mer.Elle vit en populations nombreuses (des centaines au mètre<br />

carré). Cette <strong>patelle</strong> est appréciée au printemps pour ses qualités<br />

gastronomiques.<br />

Maccinaghju : A <strong>La</strong>bbara pinzuta. Centuri : A Ghjighjanzula di marina.<br />

Bastia : A <strong>La</strong>ppera cuputella. Calvi : A <strong>La</strong>bbera culumbrina- A <strong>La</strong>bbara liscia.<br />

Aiacciu : A Patella gaotta. Bunifaziu : A Patilla culumbina.<br />

Patelle plate<br />

ou <strong>patelle</strong> bleue, Patella caerulea<br />

Cette grosse espèce atteint parfois 6 cm de diamètre.<br />

Sa coquille est mince et aplatie. On la trouve dans les flaques<br />

d’eau de mer. <strong>La</strong> <strong>patelle</strong> plate peut se développer en abondance<br />

jusqu’à quelques mètres de profondeur. Les pêcheurs<br />

pensent que c’est la moins comestible des trois espèces non<br />

protégées.<br />

Maccinaghju : A <strong>La</strong>bbara scudellina. Centuri : A Ghjighjanzula.<br />

Bastia : A <strong>La</strong>ppera negra-<strong>La</strong>ppera murzosa. Calvi : A <strong>La</strong>bbara chjappata.<br />

Aiacciu : A Patella liscia. Bunifaziu : A Patilla ciatella.<br />

Patelle moussue<br />

ou <strong>patelle</strong> rude, Patella ulyssiponensis<br />

Elle est petite, à coquille mince et aplatie marquée de grosses<br />

côtes plates et blanchâtres. Cette espèce vit au même niveau<br />

que Patella ferruginea, mais peut descendre plus bas sous<br />

l’eau. Elle est moins abondante que Patella rustica. Elle est<br />

généralement couverte par un feuillage d’algues photophiles<br />

(qui aiment la lumière). Attention, on peut trouver des <strong>patelle</strong>s<br />

<strong>géante</strong>s couvertes d’algues. Dans la crainte d’une confusion<br />

entre les deux espèces, ne prélevez pas l’animal. Patella ulyssiponensis<br />

est ramassée en hiver par les pêcheurs à pied.<br />

Maccinaghju : A <strong>La</strong>bbara murzosa. Centuri : A <strong>La</strong>ppara murzosa. Bastia : A <strong>La</strong>ppera murzosa.<br />

Calvi : A <strong>La</strong>ppara murzosa. Aiacciu : A Patella murzosa. Bunifaziu : A Patilla erbusa.<br />

www.<strong>pointe</strong><strong>du</strong>capcorse.org<br />

*D’après les descriptions <strong>du</strong> professeur <strong>La</strong>borel et <strong>du</strong> recueil des savoirs populaires sur les fruits de mer de Roger Miniconi (éditions Albiana).<br />

Dossier <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong>


10<br />

11<br />

De la Giraglia à Pertusato<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong><br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> est menacée de disparition à brève échéance<br />

en Méditerranée. Mais ce mollusque est bien présent sur les<br />

côtes rocheuses de notre île. Jean-Michel Culioli s’attache à<br />

l’étudier et à le faire connaître pour mieux le protéger.<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> risque<br />

de rejoindre rapidement<br />

la trop longue liste des<br />

espèces disparues.<br />

Jean-Michel Culioli est responsable<br />

scientifique de la réserve<br />

naturelle des Bouches de<br />

Bonifacio, Service Parc<br />

marin international,<br />

Office de l’Environnement<br />

de la <strong>Corse</strong><br />

Hiver 2002-2003<br />

En Méditerranée, il y a 2 026 espèces<br />

de mollusques dont 1 850 élaborent<br />

des coquilles pour se protéger.<br />

Beaucoup ont une adaptation originale<br />

à certaines formes de vie, de<br />

la terre ferme aux eaux douces<br />

jusqu’aux milieux marins.<br />

Vous avez dit Patella<br />

ferruginea ?<br />

Comme tous les coquillages, la<br />

<strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> est un mollusque. Elle<br />

appartient à la classe des gastéropodes.<br />

Ces derniers ont très peu évolué<br />

dans le temps et les <strong>patelle</strong>s font partie des moins<br />

mobiles d’entre eux.<br />

Un mollusque dans le vent<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> vit dans la zone intertidale, cet espace<br />

que la mer couvre et découvre sans cesse. Elle partage<br />

son habitat avec trois autres espèces de <strong>patelle</strong> : la<br />

<strong>patelle</strong> pointue, la <strong>patelle</strong> moussue et la <strong>patelle</strong> plate.<br />

Aux îles <strong>La</strong>vezzi, le suivi réalisé depuis 1992 a montré<br />

que les secteurs orientés aux fortes houles d’ouest sont<br />

les plus densément peuplés. Dans le <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong>, les<br />

zones les plus battues par la mer sont aussi les plus<br />

favorables.<br />

Bien dans sa coquille<br />

On ne connaît pas grand-chose sur la croissance<br />

de la coquille qui protège l’animal. On suppose<br />

que celle des jeunes indivi<strong>du</strong>s grandit rapidement.<br />

Cette augmentation de la taille répond<br />

sans doute à deux rythmes distincts. Le premier<br />

correspond à la croissance biologique normale.<br />

Le second est lié aux changements de domicile.<br />

A chaque “déménagement” , l’animal secrète les<br />

matériaux nécessaires à l’ajustement de sa<br />

coquille à un emplacement nouveau. Le plus<br />

grand exemplaire de <strong>patelle</strong> connu mesurait 11 cm de<br />

diamètre.<br />

Quant à l’espérance de vie des <strong>patelle</strong>s, elle est estimée<br />

de 10 à 12 ans environ.<br />

<strong>La</strong> ra<strong>du</strong>la de Patella<br />

Sous la coquille de la <strong>patelle</strong>, la tête est nettement indivi<strong>du</strong>alisée<br />

avec une bouche ventrale près de laquelle se<br />

trouvent deux tentacules sensoriels. Cette bouche est<br />

dotée d’une ra<strong>du</strong>la, un organe permettant à l’animal de<br />

brouter les algues des rochers.<br />

Le pied de la <strong>patelle</strong> adhère au substrat comme une<br />

ventouse. Il lui permet aussi de se déplacer, mais Patella<br />

ferruginea est très peu mobile. Deux types de mouvements<br />

sont observables. Le premier est lié à la respiration<br />

de l’animal. Le second est constitué par les déplacements<br />

proprement dits, limités à quelques mètres de<br />

son domicile.<br />

Une espèce hermaphrodite<br />

On pense que sa période de repro<strong>du</strong>ction s’étend de<br />

septembre à décembre.Les œufs,lâchés dans l’eau,sont<br />

trop gros pour se disperser en mer. Par conséquent, la<br />

repro<strong>du</strong>ction reste très localisée. On manque de données<br />

en ce qui concerne le cycle de la larve. Mais on sait<br />

que les <strong>patelle</strong>s sont hermaphrodites protandres : les<br />

petits indivi<strong>du</strong>s sont d’abord mâles puis deviennent<br />

Les rochers exposés aux vagues<br />

sont le domaine de prédilection<br />

de la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong>.<br />

Peau de chagrin<br />

<strong>La</strong> taille moyenne de la <strong>patelle</strong><br />

<strong>géante</strong> a diminué sur les îles<br />

<strong>La</strong>vezzi entre le XIV e et le<br />

XVII e siècle. Cette ré<strong>du</strong>ction<br />

et la raréfaction de l’animal<br />

à cette époque est imputable à<br />

une intense collecte effectuée<br />

par les pirates et les corsaires<br />

présents dans les criques de<br />

l’île <strong>La</strong>vezzi. Depuis, l’aire<br />

de répartition de la <strong>patelle</strong><br />

<strong>géante</strong> n’a cessé de diminuer.<br />

Au XIX e siècle, elle était<br />

présente sur le littoral français<br />

continental, et abondante en<br />

<strong>Corse</strong>. Au début <strong>du</strong> XX e siècle,<br />

elle se raréfie sur le rivage<br />

français continental. En 1932,<br />

l’espèce est déjà limitée aux<br />

côtes algériennes, marocaines,<br />

espagnoles et corses.<br />

Hiver 2002-2003


12<br />

13<br />

Repas<br />

préhistoriques<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> était<br />

présente à l’est de Gibraltar<br />

et dans les Alpes maritimes<br />

il y a 3 millions d’années. Des<br />

coquilles ont été découvertes<br />

dans des restes de repas<br />

d’humains, datés entre<br />

70 000 et 35 000 ans<br />

avant J-C. On retrouve<br />

la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> dans les<br />

fouilles <strong>du</strong> pré-néolithique<br />

(9 000-7 000 avant J-C) <strong>du</strong><br />

site de l’Araguina à Bonifacio.<br />

En France continentale,<br />

en Sardaigne, en Sicile<br />

et en Espagne, des restes<br />

de coquille ont également<br />

été mis au jour dans des<br />

gisements <strong>du</strong> paléolithique<br />

et <strong>du</strong> néolithique.<br />

Elle figurait aussi au menu<br />

des romains qui occupaient<br />

le site de Barcaghju.<br />

femelles. Les jeunes se fixent souvent sur la coquille des<br />

grands indivi<strong>du</strong>s.<br />

<strong>La</strong> <strong>patelle</strong> en voie de disparition<br />

L’aire de distribution originelle de Patella ferruginea est<br />

la Méditerranée occidentale. Mais elle a disparu de<br />

nombreuses parties de cette zone.<br />

Actuellement, la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> est encore présente sur<br />

les côtes corses, dans quelques localités de Sardaigne,<br />

sur les îles toscanes, algériennes et marocaines.<br />

L’espèce semble relictuelle en Espagne, probable aux<br />

Baléares. Enfin, des indivi<strong>du</strong>s subsistent dans les îles<br />

d’Hyères à Port-Cros.<br />

En <strong>Corse</strong>, on peut trouver la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> sur les côtes<br />

rocheuses <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> aux Bouches de Bonifacio ainsi que<br />

sur toute la façade occidentale. Les plus belles populations<br />

se trouvent aux îles <strong>La</strong>vezzi et à Scandola.<br />

Les prédateurs en cause<br />

Outre les crabes et les goélands, le prédateur le plus<br />

redoutable est sans doute le coquillage Thais haemastoma.<br />

Son pied puissant lui permet de décoller les<br />

petites <strong>patelle</strong>s lorsqu’elle elles sont en déplacement.<br />

Les indivi<strong>du</strong>s de plus grande taille n’ont pratiquement<br />

pas de prédateurs naturels… hormis l’homme.<br />

<strong>La</strong> raréfaction de la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong> est en effet surtout<br />

<strong>du</strong>e à la cueillette.Elle a toujours été recherchée pour sa<br />

chair et pour la fabrication de souvenirs décoratifs.<br />

Protégée en France depuis 1992, elle est inscrite à l’annexe<br />

IV de la directive européenne “Habitat”. Les<br />

espèces appartenant à cette liste sont considérées<br />

comme nécessitant une protection stricte.<br />

Etudier pour mieux protéger<br />

Des études ont été menées afin de mieux connaître sa<br />

répartition sur notre île ainsi que les densités des zones<br />

les plus favorables. Les côtes ont été quadrillées en secteurs<br />

d’étude longs de 10 à 20 m.Chaque rocher est ins-<br />

pecté et toutes les <strong>patelle</strong>s <strong>géante</strong>s sont<br />

comptabilisées et mesurées avec un pied à<br />

coulisse. Tous les résultats sont ensuite intégrés<br />

dans des bases de données.<br />

En 1997,Vanina Lentali, étudiante en DESS de<br />

l’Université de <strong>Corse</strong>, a étudié la côte entre<br />

Centuri et Macinaghju. D’avril à juillet, elle a<br />

prospecté (avec palmes, masque et tuba)<br />

12 020 mètres de côtes rocheuses et mesuré<br />

1267 <strong>patelle</strong>s ! Les résultats de cette courageuse<br />

étudiante indiquent que les <strong>patelle</strong>s<br />

<strong>géante</strong>s peuvent être abondantes localement<br />

(principalement dans les endroits battus par les<br />

vagues et difficiles d’accès) ; que les animaux de grande<br />

taille (âgés) sont rares mais que la population compte<br />

de nombreux jeunes, ce qui est encourageant pour son<br />

avenir.<strong>La</strong> Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> se révèle donc une zone importante<br />

pour la conservation de l’espèce dans l’île.<br />

Protéger et conserver<br />

Dans toutes les zones connues où vit la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong>,<br />

y compris dans les espaces protégés depuis plus de<br />

20 ans (<strong>La</strong>vezzi et Scandola), elle s’est cantonnée dans<br />

les endroits les plus inaccessibles. A partir des années<br />

1990, les gestionnaires de ces espaces ont mis en place<br />

des actions de conservation pour la protection de l’espèce.<br />

Les activités touristiques ont été mieux encadrées,<br />

informées et surveillées. Le résultat des suivis<br />

menés aux <strong>La</strong>vezzi montre une spectaculaire augmentation<br />

des populations : 4,7 fois plus de <strong>patelle</strong>s en 2000<br />

qu’en 1992 et un effectif actuel supérieur à 7 000 spécimens<br />

de plus de 2 cm de diamètre.<br />

Les <strong>Corse</strong>s ont un niveau de responsabilité mondiale<br />

envers la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong>.Il est aujourd’hui essentiel d’informer<br />

les touristes et la population locale, comme de<br />

faire respecter la réglementation interdisant de mutiler<br />

et de prélever Patella ferruginea.<br />

Jean-Michel Culioli<br />

Géante, la <strong>patelle</strong> !<br />

Le thaïs est un prédateur<br />

naturel de la <strong>patelle</strong> <strong>géante</strong>.<br />

Hiver 2002-2003<br />

Hiver 2002-2003


14<br />

15<br />

Elles s’empilent, on ne les comprend pas,<br />

elles rassurent ou elles horripilent…<br />

Les protections<br />

<strong>La</strong> qualité des paysages de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong>,<br />

le caractère remarquable de son patrimoine écologique et<br />

culturel sont aujourd’hui reconnus. C’est pour les préserver<br />

que, depuis une trentaine d’années, des protections ont<br />

été mises en place.<br />

Elles sont variées,diverses,nombreuses.<br />

Trop ? Cette situation a au moins un<br />

avantage, celui de pouvoir mo<strong>du</strong>ler,<br />

adapter les mesures en fonction des<br />

sites. Ainsi, une Réserve naturelle, très<br />

protectrice, est utile pour les fragiles<br />

îlots Finocchiarola. Mais pour reconnaître<br />

le caractère patrimonial de la chapelle<br />

Santa Maria, l’inscription comme<br />

Monument Historique est plus adaptée.<br />

L’inconvénient de cet empilement est<br />

de former un arsenal juridique très complexe,<br />

difficilement compréhensible.<br />

<strong>La</strong> Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong><br />

les collectionne !<br />

Que l’on en juge : Site classé, Site inscrit,<br />

Réserve naturelle, Réserve de biotope,<br />

zone de préemption, Conservatoire <strong>du</strong><br />

littoral, acquisitions <strong>du</strong> Département,<br />

Monument Historique classé ou inscrit,<br />

ZICO, ZNIEFF, Sanctuaire marin des cétacés,<br />

Loi littoral, Zone de protection spéciale,<br />

Site d’importance communautaire,<br />

Natura 2000. On retrouve à la<br />

Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> la quasi totalité des protections<br />

existant en droits français et<br />

européen ! Mis à part quelques spécialistes<br />

intéressés par ce joli cas d’école,<br />

peu de gens s’y retrouvent.<br />

D’autant plus que le rôle des organismes<br />

chargés de faire respecter les<br />

réglementations ou de gérer les espaces<br />

n’est pas toujours clair. Et les lois successives<br />

de décentralisation n’arrangent<br />

rien. Qui fait quoi ? Le Préfet, l’Office de<br />

l’Environnement, la Diren, la DDE,<br />

l’Inspection des sites, l’Architecte des<br />

Bâtiments de France, le Conservatoire<br />

<strong>du</strong> littoral, les communes, le Conseil<br />

Général, l’AGENC…<br />

Pour tenter<br />

d’y voir plus clair<br />

L’Association Finocchiarola Pointe<br />

<strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong> a pour mission générale<br />

de gérer les espaces naturels de la<br />

Pointe. Elle est un interlocuteur privilégié<br />

des différentes institutions qui y<br />

interviennent. L’Association considère<br />

aussi qu’elle doit expliquer aux habitants<br />

l’intérêt et le fonctionnement<br />

de ces protections, d’en démêler<br />

l’imbroglio juridique. Parce que le<br />

concours des <strong>Cap</strong>-corsins de<br />

la Pointe est indispensable<br />

pour la réussite d’un projet<br />

de territoire.<br />

Avec l’espoir de clarifier les choses, une<br />

série d’articles présentera successivement<br />

chacune des protections,ainsi que<br />

le rôle des institutions. N’hésitez pas à<br />

nous écrire pour nous poser des questions<br />

: nos articles n’en seront que plus<br />

adaptés et utiles.<br />

Michel Delaugerre<br />

Hiver 2002-2003<br />

Hiver 2002-2003


www.<strong>pointe</strong><strong>du</strong>capcorse.org<br />

Téléchargez le magazine<br />

Photo mystère<br />

D’où a été prise cette photo ?<br />

Quel est l’objet au premier plan ?<br />

Les trois premières bonnes réponses à parvenir à l’Association<br />

gagneront le livre photographique “<strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong> - <strong>Cap</strong>an<strong>du</strong>la”<br />

de Marcel Fortini.<br />

Envoyez une carte postale avec vos noms et adresses à :<br />

“Association Finocchiarola - Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong><br />

Mairie, 20247 Rogliano”.<br />

Publié par<br />

Association Finocchiarola<br />

pour la gestion des espaces naturels<br />

de la Pointe <strong>du</strong> <strong>Cap</strong> <strong>Corse</strong>

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