Soins palliatifs - MedQual
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<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong><br />
Sélections:<br />
La douleur<br />
• analgésiques classiques:<br />
- palier 1: paracétamol<br />
- palier 2: paracétamol + codéine<br />
- palier 3: morphine ou fentanyl (système transdermique, en cas d’effets<br />
indésirables de la morphine non contrôlés ou troubles de la déglutition)<br />
• douleur neuropathique, après échec des opioïdes:<br />
- 1 er choix: amitriptyline<br />
- 2 nd choix: carbamazépine<br />
- causée par compression tumorale ou œdème: dexaméthasone<br />
- douleur nociceptive: pas de médicament sélectionné<br />
Dépression, angoisse, confusion, insomnie<br />
• dépression: citalopram, nortriptyline<br />
• anxiété et agitation aigüe: lorazépam, midazolam<br />
• confusion et délire: halopéridol, éventuellement complété par midazolam<br />
• insomnies: lorazépam<br />
Dyspnée, toux, stridor, râles terminaux<br />
• dyspnée: oxygène, lorazépam, midazolam, morphine éventuellement<br />
complété par midazolam<br />
• toux:<br />
- non productive, invalidante: codéine<br />
- toux particulièrement violente et rebelle: morphine<br />
- hypersalivation: scopolamine<br />
- hémoptysie: acide tranexamique<br />
• stridor: dexaméthasone<br />
• râles terminaux: scopolamine ou butylhyoscine<br />
Nausées, vomissements, constipation et occlusion intestinale<br />
• nausées - vomissements:<br />
- métoclopramide ou halopéridol<br />
- origine métabolique: halopéridol<br />
- parésie gastrique fonctionnelle: métoclopramide<br />
- hypertension intracrânienne: dexaméthasone ou cyclizine<br />
- maladies vestibulaires: cyclizine, scopolamine
• hoquet:<br />
- 1 er choix: métoclopramide<br />
- si inefficace: halopéridol<br />
• constipation: sorbitol, bisacodyl<br />
• obstruction intestinale: association de morphine + butylhyoscine +<br />
halopéridol<br />
Anorexie, cachexie et fatigue<br />
• anorexie: dexaméthasone<br />
<strong>Soins</strong> de bouche<br />
• rinçage: chlorhexidine<br />
• xérostomie: pilocarpine<br />
• candidose: nystatine<br />
• aphtes: lidocaïne<br />
<strong>Soins</strong> cutanés<br />
• démangeaisons cutanées: crème au menthol, hydrocortisone en crème,<br />
cétirizine<br />
La fièvre<br />
• en général: paracétamol<br />
• fièvre tumorale: AINS (par ex. ibuprofène) et corticostéroïdes (par ex.<br />
dexaméthasone) si le paracétamol est inefficace<br />
• fièvre terminale: pas de médicament sélectionné<br />
Modifications dans les sélections par rapport à l’édition 2010:<br />
• la nystatine est préférée au miconazole pour le traitement des candidoses<br />
orales en raison du risque d’interactions avec le miconazole
Introduction<br />
Sur le plan de la prise en charge médicamenteuse, il importe de distinguer soins<br />
<strong>palliatifs</strong> et soins en fin de vie. Les soins <strong>palliatifs</strong> concernent les patients atteints<br />
d’une maladie potentiellement mortelle.<br />
La sélection des médicaments dans les traitements en soins <strong>palliatifs</strong> est, surtout en<br />
phase terminale, rarement basée sur des preuves irréfutables. Ceci est, en effet,<br />
souvent impossible. Le contexte particulier des soins <strong>palliatifs</strong> rend souvent plus<br />
difficile la réalisation d’études contrôlées pour chaque traitement spécifique en<br />
raison de considérations éthiques. Ainsi, un grand nombre d’options<br />
thérapeutiques, présentées dans la littérature et utilisées dans les derniers<br />
moments de la vie, s’appuient sur des expériences pratiques, des opinions<br />
d’experts ou des consensus. L’extrapolation de résultats issus de la recherche en<br />
dehors du cadre palliatif strict est courante.<br />
1. Contrôle de la douleur en soins <strong>palliatifs</strong><br />
En principe, l’échelle thérapeutique antalgique mise au point par l’OMS est utilisée.<br />
• Palier 1: non opioïdes avec ou sans adjuvants (c.-à-d. des substances n’ayant<br />
pas l’analgésie comme indication première, mais pouvant exercer un effet<br />
antalgique)<br />
• Palier 2: opioïdes faibles (avec ou sans analgésiques du palier 1 - avec ou<br />
sans adjuvants)<br />
• Palier 3: opioïdes forts (avec ou sans analgésiques du palier 1 mais jamais<br />
avec le palier 2 - avec ou sans adjuvants)<br />
Il existe toutefois des arguments pour omettre le 2 ième palier de cette échelle lors du<br />
traitement de la douleur dans le cadre palliatif.<br />
L’intensité de la douleur peut être évaluée en interrogeant directement le patient<br />
et/ou en l’observant. Au mieux, la douleur doit être décrite selon sa nature<br />
(perçante, rongeante, brûlante, …), selon sa localisation et ses irradiations en<br />
raison des répercussions que ces caractéristiques peuvent avoir sur le type de<br />
traitement.<br />
Quand l’expression de la douleur se complique, il est indiqué d’utiliser des échelles<br />
d’évaluation de la douleur et de préférence, une échelle visuelle analogique (EVA).<br />
Cette intervention s’avère souvent difficile chez les personnes atteintes de troubles<br />
cognitifs bien qu’il ressort d’études que la plupart de ces personnes peuvent<br />
comprendre l’une ou l’autre échelle de douleur. Ainsi, il existe notamment des<br />
échelles verbales, visuelles horizontales, verticales et des ‘échelles des visages’.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 103
1.1. Principes de base du traitement palliatif de la douleur 1<br />
1. La réflexion éthique centrée sur les attentes du patient est préalable à toute<br />
décision. Le patient est le meilleur juge de sa douleur; ses plaintes<br />
douloureuses doivent donc être prises au sérieux 2 .<br />
2. Le traitement médicamenteux de la douleur n’est qu’un aspect de la prise en<br />
charge de la douleur. Il faut également prendre en considération les éléments<br />
psychosociaux et spirituels.<br />
3. Une anamnèse précise de la douleur et l’observation du patient sont<br />
importantes pour une analgésie adéquate. Un dialogue franc du soignant<br />
avec le patient et son entourage sur ce sujet est indispensable.<br />
4. Dans la mesure du possible, il faut faire les choix de médicaments et de leur<br />
mode d’administration en respectant l’autonomie du patient.<br />
5. Il faut traiter une douleur d’origine spécifique avec un (ou des) médicament(s)<br />
approprié(s). Il faut aussi penser aux causes ‘mécaniques’ de la douleur (p. ex.<br />
rétention urinaire, constipation).<br />
6. Une réévaluation continue doit être faite de préférence, et si possible, au<br />
moyen d’une échelle de douleur (p. ex. une échelle visuelle analogique [EVA]),<br />
adaptée aux capacités de communication du patient. En phase aiguë, cette<br />
évaluation doit pouvoir être faite plusieurs fois par jour, si nécessaire. Il est<br />
essentiel, en phase terminale, chez les patients incapables d’utiliser une EVA,<br />
d’observer attentivement les signes suggestifs de douleur. Il importe de<br />
convenir de qui effectuera cette évaluation.<br />
7. Ne pas oublier la possibilité d’associer un traitement adjuvant à un traitement<br />
de fond.<br />
8. Il faut préférer des médicaments qui permettent un passage rapide à d’autres<br />
médicaments plus forts. (Il faut éviter les substances pouvant antagoniser<br />
l’effet d’un médicament plus puissant, p. ex. l’association fixe de tilidine et de<br />
naloxone, combinée à de la morphine ou l’association de buprénorphine et de<br />
morphine.)<br />
9. Il faut anticiper la douleur par une administration des analgésiques à des<br />
moments fixes (dépend de la durée d’action de la préparation administrée). Il<br />
faut veiller à ce que le patient reçoive son traitement 24h sur 24h.<br />
10. Il faut informer des effets indésirables et les anticiper.<br />
11. Il faut oser aborder les résistances du patient et celles du prescripteur quant à<br />
l’utilisation et la posologie des opioïdes forts (peur notamment de la<br />
dépendance ou de précipiter la fin de vie).<br />
12. Assurer la continuité des soins en remplissant correctement le dossier médical<br />
du patient.<br />
1.2. Analgésiques en soins <strong>palliatifs</strong><br />
Si un traitement étiologique est possible, il reste une priorité. Ceci nécessite<br />
souvent l’intervention d’un spécialiste.<br />
104 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
Il faut éviter d’utiliser des analgésiques qui ont le même mécanisme d’action ou un<br />
mécanisme d’action similaire: il est préférable d’administrer une seule substance à<br />
une dose plus élevée plutôt que 2 substances similaires à dose réduite.<br />
Tous les patients en soins <strong>palliatifs</strong> qui présentent une douleur modérée à sévère,<br />
de quelque origine que ce soit, devraient bénéficier d’un essai thérapeutique avec<br />
de la morphine 3 .<br />
1.2.1. Palier 1: non-opioïdes<br />
Paracétamol<br />
Le paracétamol reste la base du traitement de la douleur chez les personnes<br />
âgées (voir aussi chapitre ‘Douleur et inflammation’).<br />
Anti-inflammatoires non stéroïdiens<br />
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont souvent utilisés en cas de douleur<br />
cancéreuse. S’il existe un risque élevé d’effets gastro-intestinaux indésirables, il est<br />
souhaitable d’associer un IPP 3 . Le Formulaire MRS opte pour l’ibuprofène 4<br />
en<br />
raison de son bon profil efficacité/sécurité. Les doses recommandées chez les<br />
personnes âgées sont inférieures à la dose maximale recommandée.<br />
1.2.2. Palier 2: opioïdes faibles<br />
Paracétamol + codéine<br />
La codéine potentialise l’effet du paracétamol et sera utilisée sous forme<br />
d’association. L’équivalence analgésique de cette substance par rapport à la<br />
morphine est estimée à un dixième (soit 10 mg de codéine = 1 mg de morphine).<br />
La codéine atteint son plafond analgésique à la dose de 360 mg. Cela signifie que<br />
des doses plus importantes n’entrainent pas d’effet antalgique supplémentaire<br />
mais amplifient légèrement les effets indésirables.<br />
Autres<br />
Le tramadol est approximativement cinq fois moins efficace que la morphine 5<br />
(5 mg de tramadol = 1 mg de morphine) et n’est pas plus actif que l’association de<br />
codéine et paracétamol 6 . Il peut néanmoins provoquer des interactions<br />
médicamenteuses 6 et des effets indésirables multiples 7 , comme les autres opioïdes.<br />
Sa place dans cette indication semble étroite 1 . De plus, le tramadol est limité par<br />
une dose plafond (400 mg/jour). Il ne constitue pas une alternative à la morphine<br />
en cas de douleur sévère 8 . Il n’existe pas suffisamment d’arguments pour<br />
recommander l’usage du tramadol 3,5 .<br />
Le dextropropoxyphène 9,10 , la pentazocine 9 et la tilidine sont à déconseiller.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 105
1.2.3. Palier 3: opioïdes forts<br />
Morphine<br />
La morphine par voie orale est la référence dans le traitement de la douleur<br />
cancéreuse modérée à sévère 5,8 . L’introduction de formes retard de morphine (au<br />
départ, de courte durée d’action) a considérablement facilité l’administration de ce<br />
médicament. Ces formes retard ne peuvent être administrées qu’après avoir atteint<br />
une sédation adéquate de la douleur grâce à des doses de morphine à action<br />
normale, non prolongée (‘titration’ de la morphine).<br />
La dose initiale recommandée chez les personnes âgées est de 2 à 5 mg PO toutes<br />
les 4 heures. Chez les personnes âgées très affaiblies, la dose initiale recommandée<br />
est encore inférieure. En cas de contrôle insuffisant de la douleur (à évaluer après<br />
24h) 4 , la dose de base peut être augmentée progressivement par palier de 25 à<br />
50% de la dose quotidienne (= titration). Il importe d’observer de près les<br />
personnes âgées fragiles lors de l’instauration d’un traitement par morphine. Elles<br />
sont alors exposées à un risque d’hypopnée. L’apparition de nausées ou de<br />
vomissements après l’administration de la première dose peut indiquer un<br />
surdosage.<br />
En cas d’accès douloureux paroxystique (c.-à-d. une exacerbation transitoire de la<br />
douleur, d’intensité modérée à sévère, survenant sur une douleur de fond<br />
habituellement contrôlée par opioïdes) 5,11 , une dose supplémentaire de morphine à<br />
action directe peut être administrée 12 . On peut administrer, sur base empirique,<br />
une dose équivalente à un sixième de la dose quotidienne totale 13 . Si des doses<br />
intercurrentes multiples doivent être administrées pour des accès douloureux<br />
paroxystiques spontanés, les doses de morphine retard seront augmentées en<br />
fonction de la dose quotidienne totale (traitement de fond + doses ajoutées)<br />
nécessaire pour une sédation de la douleur.<br />
Autres médicaments oraux<br />
L’oxycodone est disponible sous la forme de comprimés à libération prolongée et<br />
n’est remboursé qu’après accord du médecin conseil, si d’autres opioïdes forts<br />
sont inefficaces ou mal supportés. Vu ces conditions de remboursement, il est<br />
conseillé de n’utiliser ce médicament qu’après avis du spécialiste. Une dose de 10<br />
mg d’oxycodone oral équivaut à 20 mg de morphine orale. L’oxycodone est<br />
disponible sous forme de comprimés fondants instantanés. Cette forme,<br />
remboursée sans l’accord du médecin conseil, n’a d’avantage ni par rapport à la<br />
morphine à libération immédiate, ni par rapport à l’oxycodone à libération<br />
prolongée 14 . La forme parentérale n’est pas remboursée.<br />
La méthadone peut servir de relais à la morphine en cas de douleur cancéreuse<br />
lorsque la morphine n’est pas efficace ou si elle provoque trop d’effets<br />
indésirables 5 . Il est indiqué que la méthadone soit prescrite par ou en concertation<br />
avec des médecins expérimentés dans ce domaine 1 .<br />
L’hydromorphone, mise sur le marché dans l’indication de soulagement de la<br />
douleur sévère et persistante, n’a fait l’objet que d’un nombre très limité d’études<br />
dans cette indication 15-17 . L’hydromorphone pourrait faire l’objet d’un essai<br />
thérapeutique en cas d’effets indésirables intolérables avec la morphine 18 .<br />
106 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
Systèmes transdermiques<br />
Le fentanyl est disponible sous forme de systèmes transdermiques (à libération<br />
prolongée). Il peut servir d’alternative à l’administration sous-cutanée de<br />
morphine, voire à l’administration orale de celle-ci, en cas de douleur stable et<br />
uniquement si certains effets indésirables de la morphine ne peuvent être contrôlés<br />
(constipation, somnolence diurne) 19 . L’utilisation de systèmes transdermiques en<br />
cas de troubles de la déglutition est également justifiée si une administration souscutanée<br />
de morphine n’est pas envisageable, comme p. ex. quand on peut encore<br />
espérer une durée de vie appréciable (plusieurs semaines). Il doit être clair que<br />
l’administration orale d’un opioïde fort doit être préférée à toutes les autres<br />
formes d’administration: la titration de doses peut se dérouler de façon optimale<br />
et ainsi mieux répondre aux doses nécessaires et variables. Notons aussi que le<br />
risque d’intoxication est limité par rapport à l’administration transdermique 20 .<br />
Le passage d’un traitement par morphine au fentanyl nécessite un respect strict de<br />
l’équivalence des doses (voir notice médicamenteuse: ratio de conversion entre<br />
morphine et fentanyl de 2,4 à 3,8; la quantité de morphine est exprimée en mg<br />
per os et celle du fentanyl en μg libérée par heure, c.-à-d. que 2,4 à 3,8 mg de<br />
morphine per os équivaut à 1 μg de fentanyl libéré par heure). Une fois la douleur<br />
atténuée, il est indiqué d’administrer une dose de fentanyl comprise entre 50 et<br />
75% de la dose équivalente à la dose de morphine de départ. En cas d’un contrôle<br />
insuffisant de la douleur, on peut passer à 100% de la dose équivalente.<br />
La concentration sérique efficace ne sera atteinte que 12 à 17 heures après<br />
l’application du premier système transdermique, ce qui nécessite l’administration<br />
des doses habituelles de morphine pendant au moins 12 heures après la mise en<br />
place du système transdermique. Initier un traitement par patches sans utiliser<br />
auparavant d’autres opioïdes est difficilement justifiable. Le coût du produit est<br />
relativement élevé.<br />
La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs aux opiacés et peut<br />
interférer avec d’autres analgésiques opioïdes, même administrés ultérieurement<br />
(pas d’entredose de morphine possible, lors du passage aux autres opioïdes forts<br />
tel que la morphine: besoin temporaire de dose de morphine plus élevée). La place<br />
éventuelle de la buprénorphine transdermique reste à déterminer 21,22 .<br />
1.3. Les analgésiques adjuvants<br />
Les analgésiques adjuvants (ou co-analgésiques) sont des substances n’ayant pas<br />
l’analgésie comme indication première. Ils peuvent être utilisés en soins <strong>palliatifs</strong><br />
pour la prise en charge de la douleur, mais, dans ce cas, en complément des ‘vrais’<br />
analgésiques, voire même comme seul traitement en cas de douleurs très<br />
spécifiques et plus rares. Ils sont utilisés en cas de douleurs nociceptives<br />
(somatiques et viscérales) et de douleurs neuropathiques. Dans le cadre du<br />
traitement antalgique en soins <strong>palliatifs</strong>, il est préférable de ne pas administrer<br />
d’adjuvant avant une optimalisation du traitement par opioïdes, qui constitue la<br />
base de l’analgésie.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 107
1.3.1. Douleur neuropathique<br />
Opioïdes<br />
Au point de vue traitement, la douleur neuropathique chronique (lancinante) n’est<br />
pas dissociée de la douleur neuropathique paroxystique (fulgurante). Les opioïdes<br />
restent la référence dans le traitement antalgique en soins <strong>palliatifs</strong>. La douleur<br />
neuropathique est souvent, du moins partiellement, réputée ‘résistante’ à un<br />
traitement par opioïdes. On utilise alors des analgésiques adjuvants.<br />
Antidépresseurs tricycliques<br />
Les antidépresseurs tricycliques sont les substances ayant démontré le plus<br />
d’efficacité pour soulager certaines douleurs neuropathiques 5<br />
(douleur ‘centrale’<br />
post-AVC, neuropathie post-herpétique, polyneuropathie diabétique, syndrome<br />
post-mastectomie). Il y a très peu d’études sur l’efficacité des antidépresseurs en<br />
cas de douleur neuropathique d’origine maligne 5 .<br />
L’action antalgique des antidépresseurs tricycliques est indépendante de leur effet<br />
antidépresseur. Elle peut déjà se manifester après quelques jours, mais un résultat<br />
optimal peut aussi n’être atteint qu’après plusieurs semaines.<br />
L’amitriptyline est la substance qui a fourni les meilleures preuves d’efficacité 23 .<br />
Elle est ainsi sélectionnée comme premier choix. L’efficacité antalgique des ISRS ou<br />
d’autres antidépresseurs plus récents (comme la duloxétine) repose sur des preuves<br />
trop étroites 5,23 pour en justifier la sélection.<br />
Anticonvulsivants<br />
Les anticonvulsivants constituent, selon certaines directives, une alternative aux<br />
antidépresseurs tricycliques, sans différence démontrée d’efficacité ou de<br />
tolérance 4,5 . Il n’y a pas de données directes comparant les anticonvulsivants entre<br />
eux 5 .<br />
La carbamazépine est prouvée efficace dans les neuropathies chroniques 24<br />
et<br />
peut être sélectionnée. La dose doit être augmentée progressivement.<br />
La gabapentine, un autre anticonvulsivant, est également prouvée efficace 25<br />
dans<br />
cette indication. Les effets indésirables liés à l’utilisation de carbamazépine peuvent<br />
faire pencher la balance en faveur de la gabapentine 26 . Si le choix se porte sur la<br />
gabapentine, il faut alors que la dose soit minutieusement titrée. Cela peut durer<br />
plusieurs semaines 4 .<br />
Un effet antalgique a été attribué à la phénytoïne 27 , mais les données sont minces.<br />
La prégabaline a prouvé son efficacité dans de nombreuses conditions de douleurs<br />
neuropathiques, et elle est parfois utilisée comme premier choix dans le traitement<br />
de la douleur neuropathique, mais cette préférence ne repose pas sur des preuves<br />
scientifiques 28 .<br />
Autres<br />
La capsaïcine, en utilisation topique, a montré une efficacité dans certaines<br />
neuropathies 29 mais entraine plusieurs troubles (e.a. irritation cutanée) et n’est pas<br />
pratique à utiliser puisqu’elle doit être appliquée plusieurs fois par jour.<br />
108 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
L’efficacité des emplâtres de lidocaïne à usage transdermique dans la neuropathie<br />
post-herpétique a été démontrée. Nous ne disposons pas de données quant à leur<br />
efficacité en cas de douleur d’origine cancéreuse 5 .<br />
Il a été suggéré que les cannabinoïdes s’avèrent efficaces en cas de douleurs<br />
neuropathiques 5 . Nous manquons certes d’arguments pour leur attribuer une place<br />
dans le traitement de la douleur chez les patients atteints de cancer 5 .<br />
Douleurs par compression<br />
La douleur neuropathique causée par une compression tumorale et par un œdème<br />
répond généralement aux corticostéroïdes. Il est recommandé d’instaurer le<br />
traitement avec une dose relativement élevée, d’en évaluer la réponse après une<br />
semaine et de diminuer le dosage jusqu’à ce que les plaintes réapparaissent. La<br />
dexaméthasone est sélectionnée dans cette indication et est à doser en fonction<br />
de la réponse clinique. Le traitement doit être arrêté si aucun effet ne se manifeste<br />
dans la semaine 1 .<br />
1.3.2. La douleur nociceptive somatique et viscérale 30<br />
L’efficacité des myorelaxants, comme les benzodiazépines, et celle des<br />
neuroleptiques en cas de douleur nociceptive chronique n’ont pas été démontrées.<br />
Ces deux classes de médicaments ne sont donc pas recommandées dans cette<br />
indication.<br />
Peu d’arguments convaincants attribuent aux antidépresseurs, et plus<br />
spécifiquement les antidépresseurs tricycliques, un effet antalgique dans différents<br />
types de douleur chronique (la douleur neuropathique étant exclue). Ainsi, les<br />
directives concernées n’attribuent pas de place aux antidépresseurs en cas de<br />
douleur chronique maligne.<br />
Pour les douleurs osseuses d’origine métastatique, il existe des preuves limitées en<br />
faveur de l’efficacité (modérée) des bisphosphonates (uniquement ceux par voie<br />
intraveineuse). Ils pourraient momentanément soulager certains patients 31 . La<br />
complexité de la mesure de la douleur complique l’interprétation de la pertinence<br />
clinique de cette efficacité 32 et leur rôle, comme traitement de première intention,<br />
n’est pas suffisamment prouvé. Ce traitement peut être envisagé, mais seulement<br />
en cas d’inefficacité des autres traitements. De plus, ce traitement n’est pas sans<br />
danger en termes d’effets indésirables, comme le prouve une éventuelle<br />
ostéonécrose de la mâchoire 5 . La pertinence de cette remarque dans le cadre<br />
palliatif peut être remise en question. L’intervention d’un spécialiste est de toute<br />
façon requise.<br />
A ce jour, aucune étude de méthodologie correcte n’a pu, tout comme pour les<br />
AINS, apporter la preuve de l’utilité des corticostéroïdes dans les douleurs<br />
osseuses. Les corticostéroïdes trouvent toutefois une indication dans les douleurs<br />
provoquées par des métastases hépatiques au niveau de la capsule de Glisson et<br />
en cas de céphalées dues à une tumeur cérébrale primaire ou à des métastases 1 .<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 109
2. Contrôle des symptômes (autres que la douleur)<br />
Le traitement symptomatique doit respecter les accords discutés préalablement<br />
avec le patient. Il n’est jamais trop tard pour s’enquérir des souhaits du patient. Il<br />
est conseillé de faire appel aux équipes de seconde ligne à temps. Leurs expertise<br />
et aide pratique revêtent souvent une valeur inestimable.<br />
2.1. Dépression, anxiété, agitation aigüe, confusion et délirium,<br />
insomnie<br />
Le soutien psychologique est judicieux, non seulement pour le patient mais aussi<br />
pour l’entourage.<br />
2.1.1. Dépression<br />
Le diagnostic de dépression est souvent sous-évalué en phase palliative; il n’est pas<br />
évident. D’autant plus que pas mal de symptômes physiques qui font partie des<br />
critères diagnostiques de la dépression (DSM-IV: insomnie, anorexie, perte de<br />
poids, fatigue, apathie) peuvent être causés par la maladie elle-même 1 ou encore<br />
par les traitements de celle-ci.<br />
Les mesures préventives dans ce domaine reposent essentiellement sur un<br />
accompagnement pluridisciplinaire adéquat: social, médical et psychologique.<br />
Dans ces circonstances, le patient a principalement besoin d’un environnement<br />
apaisant et confortable.<br />
Mentionnons expressément la valeur très relative des médicaments dans cette<br />
problématique. Le manque de preuves concernant la dépression et son traitement<br />
médicamenteux en soins <strong>palliatifs</strong> nous renvoie au chapitre ‘Système nerveux’. La<br />
nortriptyline et le citalopram entrent, ici aussi, en ligne de compte.<br />
2.1.2. Anxiété et agitation aigüe<br />
Il n’existe pas d’étude de méthodologie éprouvée qui évalue un traitement<br />
médicamenteux de l’anxiété en fin de vie 33 . Une benzodiazépine peut être utilisée.<br />
En fonction de l’espérance de vie du patient et du moment d’introduction du<br />
traitement, elle sera utilisée de préférence sur une période courte ou de façon<br />
intermittente afin de prévenir une altération progressive de son effet anxiolytique.<br />
Préconisé dans le chapitre ‘Système nerveux’, le lorazépam peut constituer un<br />
bon premier choix dans cette indication. Au besoin, il peut être administré par voie<br />
parentérale. Le midazolam, par voie sous-cutanée (ou intramusculaire), peut être<br />
une alternative. Il faut s’attendre à voir apparaitre des accès d’agitation<br />
(paradoxale) suite à l’utilisation de ces médicaments.<br />
110 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
2.1.3. Confusion et délirium<br />
Le délire est très courant chez les mourants 1,34 . L’utilisation de substances sédatives<br />
ou anticholinergiques, p.ex., augmente ce risque. De plus, l’arrêt soudain d’un<br />
traitement prolongé à base de benzodiazépines est une cause importante de<br />
manifestations délirantes. Les opioïdes peuvent également déclencher un délirium.<br />
Lorsqu’on interprète erronément ces symptômes comme une réaction inhérente<br />
aux douleurs, l’augmentation de la dose d’opioïdes peut entrainer une aggravation<br />
du délirium.<br />
D’autres causes d’agitation sont: globe vésical, fécalome, douleur insuffisamment<br />
soulagée et dyspnée, mais aussi les effets secondaires extrapyramidaux des<br />
neuroleptiques et antiémétiques 1 .<br />
Encadrement et prise en charge non médicamenteuse<br />
Il faut veiller à rassurer le patient et à le laisser seul le moins possible. Lui garantir la<br />
compréhension de chaque acteur de soins et un environnement sécurisant sont<br />
des étapes essentielles 1 . Il est important de bien informer et encadrer les proches<br />
quant à l’origine et à l’évolution probable de cette situation, en principe réversible.<br />
Prise en charge médicamenteuse<br />
Si aucun traitement étiologique ne peut être mis en place (p.ex. à cause d’une<br />
interruption ou diminution d’un traitement), il peut parfois être nécessaire de<br />
mettre en place un traitement médicamenteux de très courte durée (p.ex. jusqu’au<br />
contrôle des causes réversibles comme une infection ou une déshydratation). Ce<br />
traitement peut en d’autres cas parfois rester nécessaire jusqu’au décès.<br />
Les neuroleptiques, comme l’halopéridol, peuvent être indiqués en cas de<br />
troubles du comportement, psychotiques ou confusionnels. Les effets secondaires,<br />
surtout à long terme, sont négligeables chez les patients dont l’espérance de vie<br />
est très réduite.<br />
Une association de doses élevées d’halopéridol (10 à 30 mg par jour) et de<br />
midazolam (15 à 60 mg par jour), tous deux administrés en perfusion souscutanée,<br />
peut être nécessaire en cas d’épisode grave de confusion aiguë.<br />
L’utilisation de benzodiazépines seules au cours d’un épisode de délire n’est pas<br />
recommandée à cause de la survenue de réactions paradoxales.<br />
2.1.4. Troubles du sommeil<br />
Dans les troubles du sommeil, il ne s’agit pas toujours d’insomnies, il est aussi<br />
question d’hypersomnies, de troubles circadiens et de parasomnies (comme la<br />
somniloquie, les cauchemars et les terreurs nocturnes). L’insomnie est cependant le<br />
trouble le plus courant.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 111
Prise en charge non médicamenteuse<br />
La plupart des approches non médicamenteuses de l’insomnie deviennent<br />
inopportunes en phase palliative. Créer des circonstances favorables et un<br />
environnement optimal au sommeil (pièce suffisamment sombre, matelas adapté,<br />
température ambiante adéquate, éventuellement massage relaxant,…) restent une<br />
pierre angulaire de la prise en charge.<br />
Prise en charge médicamenteuse<br />
L’efficacité, dans l’insomnie, des benzodiazépines ou de médicaments apparentés,<br />
ne repose pas sur des preuves solides 35 . La plupart des benzodiazépines entrent, en<br />
principe, en ligne de compte. Une benzodiazépine de courte ou de moyenne durée<br />
d’action (p.ex. le lorazépam) pourrait être utilisée.<br />
2.2. Dyspnée, toux, stridor, râles terminaux<br />
2.2.1. Dyspnée<br />
Vu les causes nombreuses, malignes ou non, et les facteurs intriqués, une prise en<br />
charge individualisée de la dyspnée est indispensable 36 . Une approche étiologique<br />
est indiquée, dans la mesure du possible, pour un traitement optimal (p.ex.<br />
bronchodilatateurs, transfusion sanguine,…). Le recours au spécialiste est souvent<br />
nécessaire.<br />
Mesures non médicamenteuses<br />
Le bon positionnement du patient, des mesures physiothérapeutiques, des<br />
techniques de relaxation et d’apaisement sont des attitudes justifiées. Un degré<br />
suffisant d’humidité de l’air ambiant et une température environnante pas trop<br />
élevée sont indiqués.<br />
L’utilité de l’oxygène est très limitée chez les patients dyspnéiques qui ne<br />
présentent pas d’hypoxémie 37 . L’administration (en continu ou intermittente)<br />
d’oxygène peut être considérée comme une prise en charge non spécifique de la<br />
dyspnée 36 .<br />
Prise en charge médicamenteuse<br />
Les benzodiazépines, même à faibles doses, peuvent parfois, par leur effet<br />
anxiolytique et sédatif, améliorer la dyspnée de façon substantielle. Dans ce cas, le<br />
lorazépam constitue une bonne option 36 . Si l’administration parentérale est<br />
nécessaire, le midazolam peut être pris en considération.<br />
L’administration systémique (p.ex. sous-cutanée) d’opioïdes, comme la morphine,<br />
(à faible dose, si pas d’administration en cours) a un effet favorable en cas de<br />
dyspnée 38,39 . Une évaluation soigneuse de l’effet est essentielle 40 . L’administration<br />
transdermique de fentanyl semble être moins adéquate étant donné le besoin<br />
variable en opioïdes 41 .<br />
L’association d’un anxiolytique et de morphine est également une option pour<br />
atténuer les dyspnées sévères. Ainsi, l’administration continue de morphine et de<br />
112 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
midazolam (5 mg toutes les 4 heures) semble influencer positivement la sensation<br />
de dyspnée 42 .<br />
Les corticostéroïdes s’avèrent utile en cas d’obstruction prononcée des voies<br />
respiratoires. L’avis d’un spécialiste est souvent requis 36 .<br />
2.2.2. Toux<br />
L’étiologie de la toux est très variée et plusieurs causes peuvent coexister chez le<br />
même patient 43 . Lors du traitement, il importe en premier lieu de veiller à une<br />
humidité suffisante de l’air.<br />
Toux non productives gênantes<br />
En cas de toux ‘sèche’ et rebelle, un sirop de codéine (voire même un simple<br />
sirop sans codéine) 43<br />
est un bon choix comme traitement symptomatique. La<br />
morphine (p.ex. 2,5 mg jusqu’à 5 mg toutes les 4 heures) par voie orale peut être<br />
utile en cas de toux persistante. Si le patient utilise déjà de la morphine, la dose<br />
peut alors être augmentée d’un tiers, voire de moitié 1 .<br />
Sécrétions<br />
Si l’abondance des sécrétions devient problématique, la nébulisation d’une<br />
solution physiologique peut apporter une solution. Le tapotage n’est d’aucune<br />
utilité 1 .<br />
Hypersalivation<br />
En cas d’hypersalivation incontrôlable, l’administration d’un anticholinergique<br />
comme la scopolamine (hyoscine) (prescription magistrale à la dose de 0,25 mg<br />
par ampoule) peut s’avérer utile. Le bromure de glycopyrronium est une alternative<br />
(coûteuse). Sa demi-vie est plus courte et l’absorption plus incertaine 44 .<br />
Hémoptysie<br />
Le traitement de l’hémoptysie est entièrement dépendant de la sévérité du<br />
saignement, de sa cause et du pronostic de l’affection déclenchante. Un<br />
traitement étiologique est bien sûr préférable, s’il est possible et justifié. En cas<br />
d’hémorragie mineure, l’acide tranexamique peut être utile.<br />
2.2.3. Le stridor<br />
Le positionnement correct du patient, c.-à-d. le plus droit possible, peut le<br />
soulager.<br />
En cas d’échec, des corticostéroïdes, comme la dexaméthasone (à une dose de<br />
16 mg par jour), peuvent améliorer rapidement la situation. Certains experts y<br />
associent le midazolam pour réduire l’anxiété. L’intervention d’un spécialiste (p.ex.<br />
pour poser un stent) est souvent nécessaire.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 113
2.2.4. Les râles terminaux<br />
Les râles terminaux, dits «du mourant», peuvent être diminués par la réduction de<br />
l’apport de liquide, par un positionnement en coucher latéral, thorax relevé, et par<br />
une aspiration.<br />
L’utilisation d’un anticholinergique, comme la scopolamine (hyoscine) (250 à<br />
400 μg, au total 1,5 mg/jour) ou la butylhyoscine (20 mg, au total 60 mg/jour)<br />
tous deux en sous-cutané, est efficace 1,44 . L’atropine (0,5 mg, jusqu’à 3 mg/jour) en<br />
sous-cutané s’avère d’une efficacité équivalente à celle des produits précités 45 .<br />
Le glycopyrronium (200 μg SC) est une alternative 46 . Il a une action plus lente que<br />
les autres produits mais semble causer moins de troubles du système nerveux<br />
central et moins de tachycardie 47 .<br />
Un traitement précoce (préventif) se révèle, dans la pratique, beaucoup plus<br />
efficace qu’un traitement tardif.<br />
2.3. Nausées et vomissements, hoquet, constipation et occlusion<br />
intestinale<br />
2.3.1. Nausées et vomissements<br />
Une prise en charge étiologique est souhaitable mais pas toujours réalisable.<br />
La voie d’administration du traitement médicamenteux est choisie en fonction de<br />
l’état du patient.<br />
Vomissements causés par les opioïdes<br />
Les nausées et les vomissements peuvent être un problème en cas d’introduction<br />
d’un traitement par morphinique (première semaine) ou en cas d’administration<br />
d’une dose trop élevée ou d’une augmentation trop rapide de celle-ci. Une<br />
constipation causée par les opioïdes peut également être responsable.<br />
Après une adaptation des doses de morphine ou éventuellement après un<br />
changement d’opioïdes, le métoclopramide (4dd, 10 à 20 mg PO; 40 à 100 mg<br />
SC) peut être utilisé 48 . Partant d’une documentation casuistique, l’halopéridol<br />
(2dd, 1à 2 mg PO ou SC) serait une alternative 49,50 .<br />
Vomissements d’origine métabolique ou gastro-intestinale<br />
L’halopéridol (2 dd 1 à 2 mg SC) est efficace en cas de nausées et vomissements<br />
d’origine métabolique, comme lors d’une insuffisance rénale ou d’une<br />
hypercalcémie (p.ex. chez des patients avec des métastases osseuses).<br />
En cas de parésie gastrique fonctionnelle, un procinétique (en parentéral) comme<br />
le métoclopramide constitue un premier choix 1 .<br />
Vomissements d’autre origine<br />
En cas d’hypertension intracrânienne, il faut préférer la dexaméthasone<br />
(commencer par 8 à 16 mg/jour, pour ensuite redescendre à 4 à 6 mg/jour).<br />
114 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
L’antihistaminique cyclizine (uniquement disponible en préparation magistrale, 3<br />
fois 25 à 50 mg par jour) constitue une alternative.<br />
En cas de nausées et de vomissements induits par un trouble vestibulaire, la<br />
cyclizine ou la scopolamine (hyoscine) sont indiqués 1,49 .<br />
La prise en charge des nausées et vomissements induits par la chimiothérapie est<br />
du ressort du spécialiste 48,52,53 .<br />
Les données actuelles ne permettent pas encore d’attribuer une place aux<br />
cannabinoïdes dans cette indication 48,51 .<br />
2.3.2. Le hoquet<br />
Plusieurs mesures non médicamenteuses sont envisageables mais ne sont pas<br />
toujours réalisables; toutes ont des effets variables et dépendent de l’état du<br />
patient: retenir sa respiration avec le cou en extension, stimuler le nez ou le<br />
pharynx, pratiquer une manœuvre de Valsalva,… 54<br />
Le métoclopramide (3 fois 10 mg/jour) constitue un bon choix de traitement du<br />
hoquet s’il est causé par une stase gastrique (gastroparésie/plégie) ou une<br />
dilatation pathologique de l’estomac (gastromégalie) 54 .<br />
En cas d’échec du métoclopramide, ou si l’origine du hoquet n’est pas évidente ou<br />
encore si un traitement étiologique est impossible, l’halopéridol est alors à<br />
prendre en considération 54 .<br />
L’utilisation d’autres médicaments (baclofène, chlorpromazine, gabapentine,<br />
midazolam) entre dans le cadre des compétences des spécialistes 54 .<br />
2.3.3. Constipation<br />
Il existe des mesures médicamenteuses et non-médicamenteuses, tant dans la<br />
prévention que dans le traitement de la constipation.<br />
Mesures non médicamenteuses<br />
Il importe de créer un environnement ‘sanitaire’ qui respecte la vie privée et<br />
l’autonomie du patient. Il faut aussi veiller, dans la mesure du possible, aux prises<br />
de liquide et aux activités physiques suffisantes.<br />
Mesures médicamenteuses préventives<br />
Un traitement préventif de la constipation doit être envisagé lors de l’instauration<br />
de plusieurs sortes de médicaments (en particulier lors de l’initiation d’un<br />
traitement par opioïde, forts et faibles confondus). On utilisera de préférence un<br />
laxatif osmotique (sorbitol ou lactulose).<br />
Les études concernant l’efficacité de la naltrexone en cas de constipation causée<br />
par des opioïdes ont montré un effet légèrement supérieur à celui du placebo. La<br />
durée des études en double aveugle était par ailleurs très courte (max. 14 jours),<br />
sur un nombre restreint de patients. Ce produit est qualifié d’«éventuellement<br />
utile» 55,56 . Il semble prématuré de se prononcer de façon crédible sur cette<br />
approche.<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 115
Prise en charge médicamenteuse<br />
La cause de la constipation peut être liée à la maladie (p.ex. hypercalcémie due à<br />
des métastases osseuses), mais aussi provoquée par la médication. D’autres<br />
affections peuvent également être responsables (diabète, hypothyroïdie,<br />
hypokaliémie, hémorroïdes, fissure anale,…) 1 . Une occlusion intestinale doit être<br />
exclue. En cas de doute, il est indiqué d’utiliser uniquement des laxatifs<br />
osmotiques (sorbitol ou lactulose).<br />
Rappelons qu’une fausse diarrhée (ou diarrhée paradoxale) peut indiquer la<br />
présence de fécalome. En cas de doute, il est conseillé d’effectuer un toucher<br />
rectal.Si le rectum est encombré par un fécalome fort compact, envisager un<br />
curage digital, éventuellement après un ramollissement de celui-ci par un (ou des)<br />
suppositoire(s) de glycérine ou encore associé à du bisacodyl rectal. Un petit<br />
lavement avec p.ex. du docusate de sodium ou du citrate de sodium peuvent<br />
également être utiles 57 .<br />
Si le rectum contient des selles molles, il est conseillé d’administrer un laxatif<br />
stimulant le péristaltisme (bisacodyl) par voie orale et éventuellement, en plus, par<br />
voie rectale.<br />
En cas d’absence de selles dans le rectum, il est conseillé de prescrire un laxatif<br />
stimulant le péristaltisme (bisacodyl) par voie orale et un laxatif osmotique<br />
(sorbitol).<br />
Occlusion intestinale<br />
La chirurgie est, en principe, le traitement de référence. Si elle est impossible ou<br />
non souhaitable, des mesures alternatives doivent être proposées (sonde gastrique<br />
par exemple pour les occlusions hautes).<br />
Une place est réservée aussi au traitement médicamenteux 58<br />
(en sachant que<br />
l’obstruction ne sera pas levée!). Ce dernier est toujours parentéral. L’association<br />
suivante est recommandée: morphine + butylhyoscine + halopéridol. Les deux<br />
premiers produits sont destinés à combattre les douleurs de coliques associées à<br />
une constipation, l’halopéridol est utilisé pour son effet antiémétique. La<br />
dexaméthasone est souvent ajoutée pour son effet anti-œdémateux, mais ce sujet<br />
est controversé.<br />
2.4. Anorexie, cachexie et fatigue<br />
2.4.1. Anorexie, cachexie<br />
Avant d’instaurer un traitement chez un patient cachectique et/ou anorexique, il<br />
est important de faire comprendre au patient, à son entourage et aux soignants ce<br />
qu’on peut en attendre 59 . Ni une alimentation intensive, ni une prise en charge<br />
médicamenteuse de l’anorexie n’influencent réellement la durée de survie en cas<br />
de stade avancé de la maladie. Des mesures simples, comme une présentation<br />
attrayante des repas, sont parfois préférables à des approches techniques ou<br />
médicamenteuses sophistiquées.<br />
116 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
Alimentation et hydratation médicalement assistées<br />
Il y a peu d’arguments qui pourraient justifier l’alimentation sous assistance<br />
médicale dans le cadre palliatif et les études fiables en la matière sont trop rares 60 .<br />
C’est également valable pour l’hydratation médicalement assistée 61 .<br />
La situation particulière de soins <strong>palliatifs</strong> chez les personnes âgées, atteintes de<br />
démence avancée, qui ne parviennent plus bien à manger ou à déglutir, impose<br />
une réflexion quant au recours possible à une alimentation par sonde, soit<br />
nasogastrique, soit par gastrostomie. Il n’a pas été démontré que cette approche<br />
prolonge la durée de vie, améliore sa qualité ou l’état de dénutrition. De plus,<br />
aucun effet favorable n’a été démontré dans la prévention de l’apparition<br />
d’escarres 62 .<br />
Dans cette situation, nous recommandons de ne pas contraindre les patients à une<br />
alimentation et/ou une hydratation forcées.<br />
Options médicamenteuses<br />
Les corticostéroïdes ont un effet favorable purement subjectif sur l’anorexie et sur<br />
la l’état de fatigue du patient. En général, une dose quotidienne de ou équivalente<br />
à 5 mg de dexaméthasone (pouvant être administrée en injection sous-cutanée)<br />
est préconisée. L’effet ne perdure souvent que quelques semaines 63 . Une telle<br />
mesure ne s’avère réalisable que chez les patients avec une courte espérance de<br />
vie ou comme traitement symptomatique de durée assez brève (maximum 4<br />
semaines) chez ceux qui ont une espérance de vie plus longue et un état de<br />
fatigue passager (par ex. pendant ou directement après une chimiothérapie) 59 . Les<br />
effets indésirables à long terme et l’atténuation de l’effet en cas de traitement<br />
prolongé motivent ces options.<br />
En cas d’anorexie, des doses très élevées de progestagènes (acétate de<br />
médroxyprogestérone, acétate de mégestrol) auraient une utilité restreinte. Leur<br />
efficacité en termes d’amélioration de qualité de vie n’est cependant pas<br />
prouvée 64 , ni leur efficacité pour stimuler l’appétit 65 . Ces produits ne sont<br />
également pas enregistrés en Belgique pour cette indication. La décision d’utiliser<br />
quand même ces produits pourrait être envisagée lors d’une concertation avec le<br />
spécialiste. Une revue de la littérature 66<br />
montre que l’utilisation de mégestrol<br />
pourrait augmenter l’appétit et la prise de poids mais pousse à s’interroger sur son<br />
effet sur la qualité de vie.<br />
L’administration de gastroprocinétiques (métoclopramide ou dompéridone) peut<br />
être justifiée chez des patients anorexiques qui, de plus, sont nauséeux ou se<br />
plaignent d’une sensation rapide de satiété.<br />
Il n’y a pas de données sérieuses et solides disponibles au sujet des «stimulants<br />
d’appétit» (comme p.ex. l’antihistaminique cryptoheptadine).<br />
2.4.2. Fatigue<br />
Prise en charge non médicamenteuse<br />
Des interventions psychosociales ont montré un effet modéré sur la fatigue chez<br />
des patients cancéreux 67 .<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 117
Prise en charge médicamenteuse<br />
Une revue systématique de la littérature suggère l’efficacité clinique pertinente du<br />
méthylphénidate (et des produits hématopoïétiques) en cas de fatigue liée au<br />
cancer 68 . Les données sont toutefois limitées et ne nous permettent pas de<br />
sélectionner ces produits, mais leur utilisation peut être justifiée après un avis<br />
spécialisé.<br />
Une méta-analyse montre que les produits hématopoïétiques ont certes un effet<br />
bénéfique sur la qualité de vie des patients cancéreux anémiques, mais d’autre<br />
part, ils augmentent de manière significative le risque de décès et la survenue<br />
d’effets indésirables graves (évènements thrombotiques entre autres) 68,69 .<br />
Les corticostéroïdes ont un effet favorable purement subjectif sur l’anorexie et<br />
sur l’état de fatigue du patient (voir plus haut).<br />
2.5. <strong>Soins</strong> de bouche<br />
Toutes sortes d’affections buccales peuvent survenir chez les patients en phase<br />
palliative: xérostomie, halitose, dysgueusie, infections et douleurs de la cavité<br />
buccale 1,70,71 .<br />
2.5.1. Principes généraux<br />
L’inspection régulière de la muqueuse buccale et le maintien d’une hydratation<br />
adéquate sont primordiaux. Le nettoyage des dents, des gencives et de la langue<br />
(au moins deux fois par jour) avec une brosse à dents douce est une mesure simple<br />
mais efficace. Il faut veiller à ce qu’il soit effectué avec prudence. Un bain de<br />
bouche régulier avec de l’eau (tiède) ou du sérum physiologique, éventuellement<br />
avec de la chlorhexidine à 2%, est également utile. Ceci permet d’éliminer des<br />
débris. Sucer des morceaux d’ananas non sucrés (frais ou en boîte) peut<br />
rapidement nettoyer une langue chargée. Il faut toujours être attentif au risque de<br />
fausse déglutition.<br />
2.5.2. Xérostomie<br />
La xérostomie ou sécheresse de bouche peut être provoquée par une affection<br />
systémique, par une déshydratation, par le fait de respirer continuellement par la<br />
bouche, par inspiration d’oxygène non humidifié, par l’effet anticholinergique<br />
d’une médication, par une chimiothérapie ou par une radiothérapie locale. Il faut<br />
de toute évidence, si possible, avoir recours à un traitement étiologique.<br />
Mesures non médicamenteuses<br />
Sucer des glaçons (entourés d’une compresse) ou prendre régulièrement de petites<br />
gorgées d’eau froide peut soulager les symptômes. Les gommes à mâcher ou les<br />
bonbons (sans sucre) peuvent apporter un soulagement tout comme la salive<br />
artificielle. L’utilisation de bâtonnets de glycérine et de citron est déconseillée 1 .<br />
118 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
Prise en charge médicamenteuse<br />
L’efficacité de la pilocarpine (préparation magistrale en gélules de 5 mg, 3 fois<br />
par jour) est démontrée surtout si la xérostomie est induite par une médication ou<br />
par une affection des glandes salivaires 72,73 . Ce produit peut toutefois provoquer<br />
des effets indésirables gênants: transpiration profuse, plaintes urinaires et<br />
digestives.<br />
2.5.3. Halitose<br />
L’halitose (ou foetor ex ore) n’est pas un problème particulier pour le patient<br />
palliatif mais survient régulièrement et, dans la majorité des cas, trouve son origine<br />
dans la bouche. Un traitement étiologique est de rigueur. Une bonne hygiène<br />
bucco-dentaire est un must (voir plus haut) 74-76 . Les infections doivent être traitées.<br />
L’halitose d’origine tumorale au niveau de la bouche, de la gorge, de l’œsophage<br />
ou encore causée par une infection par germes anaérobies peut être traitée par<br />
métronidazole (ou éventuellement par clindamycine) par voie orale. Une odeur<br />
fécale peut indiquer une obstruction (débutante).<br />
2.5.4. Dysgueusie<br />
Les troubles du goût peuvent être causés par des problèmes d’hygiène buccodentaire,<br />
mais aussi par plusieurs affections sous-jacentes, des traitements<br />
médicamenteux, des infections buccales… Si un traitement étiologique n’est pas<br />
réalisable, les possibilités thérapeutiques se limitent au maintien d’une bonne<br />
hygiène bucco-dentaire.<br />
2.5.5. Infections buccales<br />
Les infections buccales sont d’origine mycosique dans la plupart des cas <strong>palliatifs</strong>;<br />
le Candida étant souvent l’agent responsable.<br />
En cas de candidose orale, le miconazole (en gel buccal) est généralement<br />
considéré comme un premier choix 77 . Il a un spectre plus large et une plus grande<br />
efficacité que la nystatine (usage local). La nystatine permet également de traiter<br />
avec succès la plupart des candidoses orales 77 . Ce traitement de candidose n’a pas<br />
prouvé son efficacité versus placebo chez des patients sous chimiothérapie ou<br />
radiothérapie 78 . Le risque d’interaction avec le miconazole nous fait opter pour la<br />
nystatine (voir aussi le chapitre ‘Infections’).<br />
Chez les patients immunodéprimés ou ceux présentant une infection à Candida et<br />
qui ne répondent pas suffisamment au traitement topique dans la semaine, il est<br />
recommandé d’administrer du fluconazole (50 mg/jour pendant 1 semaine).<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 119
2.5.6. Douleur buccale<br />
Dans les cas de douleurs des muqueuses buccales provoquées par une stomatite<br />
(avec ou sans ulcère) ou par des aphtes, la cause est parfois évidente (p.ex.<br />
cytostatiques ou radiothérapie), mais on ne peut pas toujours y remédier ou<br />
encore la traiter.<br />
Les recommandations 1,71<br />
sont équivoques. En cas d’ulcères ou d’aphtes, l’usage<br />
d’un gel contenant de la lidocaïne est préconisé.<br />
En cas de lésions plus diffuses et d’une sensation de brûlure dans la bouche ou<br />
dans la gorge, il est recommandé, en plus d’une analgésie systémique, d’utiliser<br />
une suspension de sucralfate ou éventuellement une préparation magistrale de<br />
morphine en bain de bouche (morphine 0,2%) 1 . Un rinçage régulier (toutes les<br />
heures) au moyen de sérum physiologique stérile s’avère aussi utile. L’avis d’un<br />
spécialiste est indiqué.<br />
2.6. <strong>Soins</strong> cutanés<br />
2.6.1. Ulcérations cutanées<br />
Des soins infirmiers corrects sont primordiaux pour éviter les escarres 70 . Des<br />
moyens techniques (p.ex. matelas et coussins spéciaux) et les mesures qui<br />
permettent de diminuer les pressions locales et les frottements (p.ex.<br />
positionnement) sont les plus importants 79 .<br />
Les meilleurs soins ne peuvent cependant pas toujours empêcher l’apparition de<br />
plaies de décubitus.<br />
Le traitement des escarres a été largement discuté dans un numéro du Formul R/<br />
info 80 .<br />
Les ulcères cutanés doivent bien évidemment être traités selon les règles de l’art:<br />
au besoin, nettoyer la surface de la plaie à l’aide de sérum physiologique ou d’eau<br />
du robinet tiède (p.ex. sous la douche) afin d’évacuer le débris. Les pansements<br />
destinés à traiter les plaies fortement exsudatives (p.ex. les pansements<br />
hydrocellulaires, …) peuvent être nécessaires.<br />
Les plaies malodorantes peuvent être traitées par des pansements absorbants<br />
d’odeurs au charbon 81 .<br />
Le métronidazole par voie orale ou comme topique peut considérablement réduire<br />
la concentration des bactéries anaérobies qui sont souvent responsables de l’odeur<br />
gênante 81 . Le métronidazole topique peut être préparé en gel carbomère à 1%.<br />
La prise en charge d’ulcérations cutanées malignes exige des soins particuliers, à<br />
réaliser de préférence par ou en accord avec le spécialiste.<br />
120 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
2.6.2. Démangeaisons<br />
Les démangeaisons peuvent, en plus des causes générales (ictère, insuffisance<br />
rénale, lymphome, traitements médicamenteux…), être la conséquence d’une<br />
sécheresse cutanée. Dans ce cas, l’utilisation régulière de lotions ou de crèmes<br />
hydratantes est indiquée. L’application locale de menthol (1% en crème ou dans<br />
de la pâte à l’eau) ou d’hydrocortisone (1% en crème) est profitable, tout<br />
comme l’administration d’un antihistaminique tel que la cétirizine (ou la<br />
loratadine).<br />
2.7. La fièvre<br />
La fièvre tumorale est un phénomène paranéoplasique et survient chez 5% des<br />
patients cancéreux 1 . Bien évidemment, les infections ou une embolie pulmonaire<br />
par exemple peuvent également et fréquemment provoquer de la fièvre.<br />
Si on retient finalement le diagnostic de fièvre tumorale, les anti-inflammatoires<br />
non stéroïdiens à faible dose (p.ex. ibuprofène 200-400 mg 3 fois par jour;<br />
diclofénac 25 mg 3 fois par jour) et les corticostéroïdes (p.ex. dexaméthasone 4-<br />
8 mg/jour, PO ou SC) sont efficaces si le paracétamol ne l’est pas 1 . La fièvre peut<br />
être apaisée en adaptant la température environnante à l’aide de ventilation, etc.;<br />
les poches de glace sont inconfortables et donc peu indiquées.<br />
Les fièvres terminales ne sont généralement pas traitées sauf en cas de risque réel<br />
de convulsions. Les effets secondaires subséquents au traitement peuvent être plus<br />
lourds à supporter par le patient que la fièvre elle-même. L’expérience montre, par<br />
ailleurs, que la fièvre terminale ne cède pas devant les fébrifuges et qu’elle est un<br />
signe de fin de vie proche.<br />
3. Décisions en fin de vie dans le cadre MRS<br />
Quelles que soient les décisions qui seront prises concernant la fin de vie, elles<br />
doivent respecter la volonté du patient qui sera, dans tous les cas, informé au<br />
préalable. Les soins <strong>palliatifs</strong> de confort accompagneront la majorité des patients<br />
jusqu’à leur décès. Certains patients souhaiteront néanmoins des prises en charge<br />
plus interventionnistes comme la sédation palliative ou l’euthanasie.<br />
Pour une discussion plus détaillée des décisions en fin de vie, nous vous référons<br />
au Formul R/ info sur ce sujet 82 .<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 121
3.1. Sédation palliative<br />
3.1.1. Définition et principes généraux<br />
Nous définissons la sédation palliative comme une réduction intentionnelle de<br />
l’état de conscience d’une personne en fin de vie qui présente des symptômes qui<br />
provoquent une souffrance insupportable, impossible à soulager par tous les<br />
moyens habituellement mis à notre disposition (c.-à-d. des symptômes<br />
réfractaires). Les symptômes réfractaires les plus fréquents sont la douleur, la<br />
dyspnée ou le délirium. Il faut s’assurer qu’il s’agisse bien de symptômes qui ne<br />
répondent plus à aucun traitement traditionnel. L’administration de substances<br />
sédatives a pour objectif premier d’obtenir une réduction de l’état de vigilance du<br />
patient afin qu’il ne soit plus conscient de l’ampleur des symptômes responsables<br />
de sa souffrance 83 .<br />
Dans la sédation palliative, théoriquement réversible, on part du principe qu’une<br />
fois la sédation amorcée, elle sera maintenue jusqu’au décès. La décision<br />
d’entamer une sédation palliative implique donc toujours un choix concernant la<br />
fin de vie 84 . Toutes les personnes concernées doivent en être informées<br />
préalablement, laissant ainsi la possibilité aux proches de faire leurs adieux.<br />
3.1.2. Réalisation pratique<br />
Tout acte ou intervention doit impérativement être débattu préalablement avec le<br />
patient ou, s’il en est incapable, avec son mandataire thérapeutique. Les modalités<br />
de la sédation en termes de procédure à suivre, de dosage des médicaments et<br />
autres doivent être discutées de façon explicite et convenue avec les autres<br />
soignants. Le médecin doit être présent dès le début et doit assurer sa présence,<br />
ou du moins sa disponibilité, jusqu’à ce que le patient soit serein. L’intervention<br />
d’une équipe spécialisée en soins <strong>palliatifs</strong> est indiquée en cas de problématique<br />
complexe.<br />
Toute alimentation ou hydratation (artificielle) et tout traitement médicamenteux<br />
oral doit être stoppé. Poursuivre l’hydratation peut altérer le confort du patient et<br />
ainsi être qualifié d’acte médical inutile 85 . Toute analgésie doit être administrée par<br />
voie sous-cutanée.<br />
Le midazolam sera utilisé en premier lieu. L’administration continue en souscutané<br />
à l’aide d’une pompe est la méthode la plus adéquate. Des doses plus<br />
faibles, p.ex. 10 à 15 mg par 24h, sont recommandées chez les patients plus âgés,<br />
affaiblis et amaigris (< 60 kg). Si une dose de midazolam, supérieure à 50 mg par<br />
24h, est nécessaire pour atteindre le niveau de sédation souhaité, il est indiqué de<br />
passer à l’étape suivante (c.-à-d. l’ajout d’un produit). Il est dès lors recommandé<br />
de faire appel à une équipe de support palliatif. Par ailleurs, la nécessité d’avoir<br />
recours à des substances autres que le midazolam est plutôt limitée. On peut<br />
éventuellement ajouter de l’halopéridol à la dose de 5 à 10 mg SC par 24h en cas<br />
d’agitation marquée.<br />
122 <strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong>
Pour la majorité des patients résidant en MRS, fortement affaiblis par une affection<br />
préexistante, par des apports liquidiens et alimentaires réduits et compte tenu de<br />
leur âge, la sédation ne dépassera guère 2 jours avant que le décès ne survienne. Il<br />
arrive cependant qu’elle dure plus longtemps que prévu; il faut alors veiller à<br />
prendre les mesures nécessaires afin de gérer notamment l’incontinence et les<br />
escarres qui iraient à l’encontre du respect de la dignité du patient et/ou de son<br />
entourage. Cet aspect de la sédation doit également être discuté au préalable avec<br />
le patient.<br />
Il est toujours possible que la sédation palliative échoue: on ne parvient parfois pas<br />
à obtenir une sédation suffisamment profonde. Paradoxalement, une agitation<br />
peut survenir et se révèle souvent difficile à contrôler, même lors de l’utilisation de<br />
doses très élevées de sédatifs.<br />
La morphine n’occupe, en tant que sédatif, aucune place dans la sédation<br />
palliative. Des doses élevées de morphine entrainent une certaine somnolence mais<br />
ne permettent pas nécessairement d’obtenir une réduction adéquate de l’état de<br />
conscience comme on l’entend dans la sédation palliative. Par ailleurs,<br />
l’administration de morphine comme analgésique ou en cas de dyspnée doit être<br />
poursuivie 84 .<br />
3.2. Euthanasie<br />
3.2.1. Définition et principes généraux<br />
L’euthanasie est définie comme un acte pratiqué par un tiers qui met<br />
intentionnellement fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci. Cet acte<br />
n’est pas considéré comme un délit si les conditions spécifiques, relatives à la loi,<br />
sont respectées, et si le médecin suit la procédure définie. Le médecin qui croit<br />
disposer d’une expérience insuffisante pour pratiquer une euthanasie peut faire<br />
appel à des médecins qui disposent de cette expertise (p.ex. médecins EOL (‘End<br />
Of Life') ou aux médecins référents des équipes palliatives de seconde ligne. Dans<br />
le cadre MRS (mais également au domicile), le médecin peut se faire assister par un<br />
infirmier référent en soins <strong>palliatifs</strong> et il est recommandé, et aussi imposé par le<br />
législateur qu’une concertation étroite entre les différentes disciplines concernées<br />
par les soins (moyennant le consentement du patient) ait lieu.<br />
Les procédures à suivre diffèrent et dépendent de la situation dans laquelle le<br />
patient se trouve. Nous référons aux instructions et aux données provenant de<br />
l’état belge 86 .<br />
3.2.2. Réalisation pratique<br />
L’euthanasie est pratiquée par induction d'un coma médicamenteux, suivie d’un<br />
arrêt cardio-respiratoire d’origine médicamenteuse. Cette approche doit être<br />
exposée au patient (et à ses proches si le patient le souhaite). Il faut discuter avec<br />
<strong>Soins</strong> <strong>palliatifs</strong> 123
le patient (et éventuellement ses proches) du choix des produits euthanasiques et<br />
de leurs modes d’administration.<br />
Tout traitement médicamenteux et tout autre matériel nécessaire doivent être<br />
prescrits au nom du patient avec la mention qu’il s’agit d’une prescription dans le<br />
cadre d’une euthanasie. En principe, il revient au médecin d’aller récupérer<br />
personnellement ces produits à l’officine. Le pharmacien est en droit de ne pas<br />
vouloir collaborer et refuser ainsi la délivrance de ces produits. Il doit alors référer<br />
le médecin à un confrère pharmacien. Toutes les dispositions nécessaires doivent<br />
être prises au préalable. Les produits restants doivent par la suite être rapportés à<br />
la pharmacie par le médecin traitant.<br />
Il est important de s’assurer que la voie d’accès en intraveineux (soit par cathéter<br />
pour perfusion, soit par aiguille papillon IV) soit correctement posée. Commencer<br />
par le thiopenthal: 20 mg/kg (1 g dilué dans 10 ml de sérum physiologique) et<br />
administré en bolus IV. Ce barbiturique peut parfois induire un coma profond en<br />
quelques secondes et souvent provoquer le décès dans les 5 minutes.<br />
(Prescription: R/ Pentothal DT. Un flacon IV d’1 g)<br />
Les curarisants vécuronium (0,3 mg/kg) ou atracurium (0,5 mg/kg) peuvent y<br />
être ajoutés (uniquement si le patient est plongé dans un coma profond et qu’il<br />
respire encore). Ces substances provoquent un arrêt respiratoire dans les 2<br />
minutes, entrainant à son tour un arrêt cardiaque 87 .<br />
(Prescription: R/ Norcuron DT. Un emb. 10 x 4 mg + solv. ou R/ Tracrium DT. Un<br />
emb. 10 x 25 mg)<br />
L’administration d’un barbiturique en potion, que le patient peut éventuellement<br />
avaler lui même, est également une option. Le patient doit pouvoir ingérer cette<br />
préparation sur un court laps de temps. Le médecin doit être présent lors de<br />
l’ingestion. On peut administrer du métoclopramide pour prévenir l’apparition de<br />
vomissements.<br />
Il s’agit d’une préparation magistrale sous forme de sirop (à conserver au<br />
réfrigérateur):<br />
R/ Pentobarbital 9g<br />
Alcool à 96%<br />
16,2 g (20 ml)<br />
Aqua purificata<br />
15 g<br />
Propylène glycol<br />
10,4 g (10 ml)<br />
Saccharinum natricum 250 mg<br />
Sirupus simplex<br />
65 g<br />
Anisi aetroleum<br />
1g<br />
Les opioïdes et les benzodiazépines n’ont pas de place comme produits<br />
euthanasiques. Ils peuvent parfois être à l’origine d’effets indésirables imprévisibles<br />
(p.ex. vomissements, agitation) et causeront rarement le décès du patient.<br />
Date de recherche dans la littérature: fin juillet 2010.<br />
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