Innovations agricoles au service du développement durable

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08.11.2014 Views

Le succès de tout programme de développement durable est en grande partie déterminé par le niveau de participation des agriculteurs (Axinn, 1997). Étant donné que les systèmes de vulgarisation sont de plus en plus décentralisés et fragmentés, les organisations non gouvernementales (ONG) et le secteur privé sont en train de redéfinir leurs rôles pour occuper certains créneaux. Pour renforcer l’apprentissage en milieu rural et soutenir la multitude de prestataires de services existants et émergents, le Centre du riz pour l’Afrique (AfricaRice) a confectionné une série de vidéos d’agriculteurs s’adressant à d’autres agriculteurs selon la méthode zoom avant/zoom arrière (ZIZO) 2, qui permet d’obtenir des vidéos appropriées au niveau local et pertinentes au niveau régional (Van Mele, 2006). La vidéo intitulée « Cashing In with Parboiled Rice » a été confectionnée selon l’approche ZIZO, en collaboration avec les femmes transformatrices de riz au Bénin, qui ont principalement été impliquées dans une mise au point participative de technologies axées sur l’étuvage. À partir de 2005, quatre ONG locales ont utilisé une méthodologie conventionnelle consistant en des ateliers communautaires d’une durée de deux jours, au cours desquels des experts ont fait des démonstrations du processus d’étuvage amélioré devant des femmes. En plus des ateliers, avec le soutien technique et financier d’AfricaRice, des ONG ont organisé dans la région centrale du Bénin des projections publiques de la vidéo sur l’étuvage, suivies de discussions en groupe sous la conduite d’animateurs dans 80 villages, vers la fin de l’année 2006. Dans le présent article, nous comparons l’efficacité de la formation classique et de la vidéo comme approche d’apprentissage en milieu rural et examinons les écueils auxquels se heurtent de telles vidéos dans la création de changements technologiques et institutionnels chez les prestataires de services et les entrepreneurs ruraux. Innovations agricoles au service du développement Matériels et méthodes Des enquêtes sur le terrain ont été menées de novembre 2007 à mai 2008 dans cinq municipalités du Département des collines, au Bénin, où des ONG locales (Castor, LDLD, Rabemar et Un Monde) interviennent pour renforcer le secteur du riz. Les enquêtes ont porté sur 16 villages où la vidéo a été projetée vers la fin de l’année 2006 et où la formation classique a été conduite une fois, de 2005 à 2007, plus quatre villages de contrôle où n’a été effectuée aucune intervention. Au total, 200 femmes étuveuses de riz (10 par village) et 17 groupes de femmes ont été interviewés. Les villages et les femmes ont été sélectionnés de manière aléatoire. Des artisans locaux ont été formés à la fabrication d’étuveuses et des agents d’ONG ont également été interviewés. On a utilisé aussi bien des méthodologies qualitatives que quantitatives. Les données qualitatives ont été recueillies à travers des discussions en groupe (pour se faire une idée du rôle de l’étuvage au niveau villageois) ; l’observation des participants (pour analyser la manière dont les femmes appliquaient dans la pratique les enseignements tirés de la vidéo) ; la photographie (pour illustrer les innovations technologiques et en discuter) ; les entretiens semistructurés (pour comprendre, par exemple, diverses dimensions sociales influençant l’étuvage en tant qu’entreprise rurale). 2. ZIZO est une méthode vidéo qui est axée sur cinq principes directeurs : i) identifier un thème générique d’intérêt régional ; ii) se renseigner sur la diversité contextuelle à travers une recherche participative ; iii) faire des vidéos avec des acteurs locaux ; iv) tester les vidéos dans des contextes variés et les adapter à ces contextes ; v) les mettre à l’échelle et les faire évoluer. 18

Quant aux données quantitatives, elles ont été recueillies au moyen de questionnaires structurés s’adressant à 200 femmes. La motivation des femmes pour l’étuvage du riz a été évaluée, tant par une mesure subjective de l’intérêt avec lequel les femmes se sont exprimées à propos du riz étuvé que par un auto-classement organisé par les femmes pour se classer elles-mêmes en fonction de leur degré de motivation à pratiquer l’étuvage du riz. Les changements de comportements à l’égard de l’étuvage ont été évalués au ratio de riz étuvé par rapport au paddy produit ou acheté par saison de récolte par chaque femme, afin de nous faire une idée de l’état d’esprit entrepreneurial des femmes. Pour comprendre la manière dont la cohésion sociale a été bâtie et renforcée, certains indicateurs (tels que le niveau de participation des femmes au travail de groupe, ainsi que le niveau de collaboration entre les femmes, les ONG, les institutions formelles et informelles de crédit et les commerçants intervenant dans la filière du riz étuvé) ont été évalués à travers des observations régulières d’activités de femmes, des groupes de discussion et des entretiens. Les données quantitatives ont été analysées à l’aide de l’analyse de variances (ANOVA), des modèles de régression logistique binomiale, des tests de Wilcoxon et du chi-carré. Trois mois après ces travaux de recherche initiaux, les résultats ont été évalués lors d’un atelier au Centre du Riz pour l’Afrique (AfricaRice), avec le personnel de terrain des ONG et des collègues scientifiques. Ceci a permis de faire des rétroactions additionnelles et de stimuler l’apprentissage entre partenaires. Résultats Efficacité de la formation classique et de la vidéo La formation classique a impliqué des agents de terrain d’ONG, qui ont directement formé un nombre restreint de femmes sélectionnées (26 % des femmes enquêtées) dans un village central et espéraient que celles-ci partageraient ce qu’elles avaient appris avec d’autres femmes à leur retour dans leur village. La participation a été affectée par le paiement d’un per diem et le fait que les dirigeants des groupes d’agriculteurs existants choisissaient en général leurs amies ou parentes pour participer à la formation, laissant de côté le groupe de femmes véritablement ciblé. La plupart des femmes qui ont participé aux ateliers de formation étaient principalement intéressées par le versement d’un per diem (80 %). Étant donné que la sélection de femmes pour participer à la formation n’était pas basée sur la motivation à promouvoir l’étuvage du riz dans leur localité, près de deux tiers des femmes enquêtées ne savaient même pas que des ateliers de formation classique avaient eu lieu. L’apprentissage par le biais de la vidéo a permis de surmonter le biais lié à la sélection des participants à travers les structures locales de pouvoir et a réduit les conflits au niveau des communautés. Toutefois, d’autres facteurs peuvent avoir influencé la participation éventuelle ou non des femmes aux projections vidéos. En conséquence, nous avons introduit certains facteurs socioéconomiques (groupe ethnique, âge, nombre de personnes à charge dans le ménage, niveau d’éducation des femmes, importance de l’activité d’étuvage du riz, expérience, religion, appartenance à une organisation d’agriculteurs, connaissance de l’importance de l’étuvage du riz et leur motivation pour l’activité) dans un modèle de régression logistique binomiale (Tableau 1) afin de mieux apprécier les facteurs qui pourraient avoir une incidence sur la participation à la projection publique de la vidéo au niveau du village. L’analyse a démontré qu’aucun de ces facteurs n’a influencé le fait de regarder la vidéo (P>0,1). Les femmes des villages ont eu une chance égale de regarder la vidéo, confirmant le caractère démocratique de l’apprentissage à base communautaire et par le biais de la vidéo. La vidéo a atteint 74 % des femmes enquêtées et a été fort bien appréciée, aussi bien par les ONG que par les populations cibles, comme bon moyen de diffuser la technologie à large échelle et de divertir les communautés rurales. Les femmes dans les concours scientifiques 19

Quant <strong>au</strong>x données quantitatives, elles ont été recueillies <strong>au</strong> moyen de questionnaires structurés s’adressant à 200 femmes. La<br />

motivation des femmes pour l’étuvage <strong>du</strong> riz a été évaluée, tant par une mesure subjective de l’intérêt avec lequel les femmes se<br />

sont exprimées à propos <strong>du</strong> riz étuvé que par un <strong>au</strong>to-classement organisé par les femmes pour se classer elles-mêmes en fonction<br />

de leur degré de motivation à pratiquer l’étuvage <strong>du</strong> riz. Les changements de comportements à l’égard de l’étuvage ont été évalués<br />

<strong>au</strong> ratio de riz étuvé par rapport <strong>au</strong> paddy pro<strong>du</strong>it ou acheté par saison de récolte par chaque femme, afin de nous faire une idée<br />

de l’état d’esprit entrepreneurial des femmes.<br />

Pour comprendre la manière dont la cohésion sociale a été bâtie et renforcée, certains indicateurs (tels que le nive<strong>au</strong> de<br />

participation des femmes <strong>au</strong> travail de groupe, ainsi que le nive<strong>au</strong> de collaboration entre les femmes, les ONG, les institutions<br />

formelles et informelles de crédit et les commerçants intervenant dans la filière <strong>du</strong> riz étuvé) ont été évalués à travers des<br />

observations régulières d’activités de femmes, des groupes de discussion et des entretiens.<br />

Les données quantitatives ont été analysées à l’aide de l’analyse de variances (ANOVA), des modèles de régression logistique<br />

binomiale, des tests de Wilcoxon et <strong>du</strong> chi-carré. Trois mois après ces trav<strong>au</strong>x de recherche initi<strong>au</strong>x, les résultats ont été<br />

évalués lors d’un atelier <strong>au</strong> Centre <strong>du</strong> Riz pour l’Afrique (AfricaRice), avec le personnel de terrain des ONG et des collègues<br />

scientifiques. Ceci a permis de faire des rétroactions additionnelles et de stimuler l’apprentissage entre partenaires.<br />

Résultats<br />

Efficacité de la formation classique et de la vidéo<br />

La formation classique a impliqué des agents de terrain d’ONG, qui ont directement formé un nombre restreint de femmes<br />

sélectionnées (26 % des femmes enquêtées) dans un village central et espéraient que celles-ci partageraient ce qu’elles avaient<br />

appris avec d’<strong>au</strong>tres femmes à leur retour dans leur village. La participation a été affectée par le paiement d’un per diem et le fait<br />

que les dirigeants des groupes d’agriculteurs existants choisissaient en général leurs amies ou parentes pour participer à la<br />

formation, laissant de côté le groupe de femmes véritablement ciblé. La plupart des femmes qui ont participé <strong>au</strong>x ateliers de<br />

formation étaient principalement intéressées par le versement d’un per diem (80 %). Étant donné que la sélection de femmes pour<br />

participer à la formation n’était pas basée sur la motivation à promouvoir l’étuvage <strong>du</strong> riz dans leur localité, près de deux tiers des<br />

femmes enquêtées ne savaient même pas que des ateliers de formation classique avaient eu lieu.<br />

L’apprentissage par le biais de la vidéo a permis de surmonter le biais lié à la sélection des participants à travers les structures<br />

locales de pouvoir et a ré<strong>du</strong>it les conflits <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> des commun<strong>au</strong>tés. Toutefois, d’<strong>au</strong>tres facteurs peuvent avoir influencé la<br />

participation éventuelle ou non des femmes <strong>au</strong>x projections vidéos. En conséquence, nous avons intro<strong>du</strong>it certains facteurs<br />

socioéconomiques (groupe ethnique, âge, nombre de personnes à charge dans le ménage, nive<strong>au</strong> d’é<strong>du</strong>cation des femmes,<br />

importance de l’activité d’étuvage <strong>du</strong> riz, expérience, religion, appartenance à une organisation d’agriculteurs, connaissance de<br />

l’importance de l’étuvage <strong>du</strong> riz et leur motivation pour l’activité) dans un modèle de régression logistique binomiale (Table<strong>au</strong> 1)<br />

afin de mieux apprécier les facteurs qui pourraient avoir une incidence sur la participation à la projection publique de la vidéo <strong>au</strong><br />

nive<strong>au</strong> <strong>du</strong> village. L’analyse a démontré qu’<strong>au</strong>cun de ces facteurs n’a influencé le fait de regarder la vidéo (P>0,1).<br />

Les femmes des villages ont eu une chance égale de regarder la vidéo, confirmant le caractère démocratique de l’apprentissage à<br />

base commun<strong>au</strong>taire et par le biais de la vidéo. La vidéo a atteint 74 % des femmes enquêtées et a été fort bien appréciée, <strong>au</strong>ssi<br />

bien par les ONG que par les populations cibles, comme bon moyen de diffuser la technologie à large échelle et de divertir les<br />

commun<strong>au</strong>tés rurales.<br />

Les femmes dans les concours scientifiques<br />

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