Analyse de la dynamique d'intégration des connaissances ... - Inra
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Plusieurs hypothèses peuvent être faites quant aux raisons <strong>de</strong> cette faible appropriation. En ce<br />
qui concerne l’administration, Bemisia et ses virus ont pu être perçus comme <strong>de</strong>s enjeux<br />
économiques d’importance re<strong>la</strong>tivement faible et <strong>de</strong>s problèmes phytosanitaires qui, parce que<br />
trop complexes et ne présentant pas <strong>de</strong> solutions simples en termes <strong>de</strong> gestion, n’ont pas<br />
réussi à susciter un fort investissement 63 . En ce qui concerne les organisations<br />
professionnelles, <strong>la</strong> nature moins centralisée <strong>de</strong> leurs re<strong>la</strong>tions au niveau national a pu à <strong>la</strong> fois<br />
affaiblir leur capacité à inscrire le problème comme enjeu à l’agenda <strong>de</strong>s pouvoirs publics et<br />
en même temps rendre <strong>la</strong> construction collective d’une vision partagée du problème difficile.<br />
Rappelons également que <strong>la</strong> production maraîchère est commercialisée sur <strong>de</strong>s marchés où les<br />
prix, et non <strong>la</strong> qualité sanitaire, sont l’enjeu principal. Aux vues du coût économique <strong>de</strong><br />
l’application <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> lutte obligatoire en cas <strong>de</strong> découverte <strong>de</strong> foyers <strong>de</strong> TYLCV, les<br />
organisations professionnelles ont pu estimer qu’il était préférable <strong>de</strong> ne pas donner trop<br />
d’importance au problème. Pour les <strong>de</strong>ux types d’acteurs, les données épidémiologiques<br />
disponibles sur Bemisia et ses virus ont pu faire douter <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> l’enjeu. L’aleuro<strong>de</strong><br />
Bemisia est un insecte petit, qui peut se confondre avec d’autres insectes et les différents virus<br />
dont il est porteur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt, pour être i<strong>de</strong>ntifiés, <strong>la</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> tests dont les résultats<br />
peuvent être controversés. Après l’épiso<strong>de</strong> canicu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> 2003, il est beaucoup moins observé<br />
dans les serres <strong>de</strong> culture et en milieu naturel 64 .<br />
Pour les acteurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> recherche qui se mobilisent sur Bemisia et Viroses, cette fragilité<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> constitution du pathosystème comme enjeu sanitaire a une conséquence double : en<br />
même temps qu’elle leur <strong>la</strong>isse ce qu’on pourrait appeler un espace <strong>de</strong> problématisation<br />
beaucoup plus ouvert <strong>de</strong> <strong>la</strong> situation sanitaire, elle les incite à entreprendre un travail<br />
important <strong>de</strong> production d’arguments, <strong>de</strong> traces, <strong>de</strong> discours, pour « faire exister » le problème<br />
et intéresser les autres acteurs à son traitement.<br />
b) De <strong>la</strong> crise au risque <strong>de</strong> réémergence : produire <strong>de</strong>s <strong>connaissances</strong> <br />
pour faire exister un problème <br />
Dans les cas Ralstonia et Diabrotica, par ailleurs étudiés, les orientations <strong>de</strong> recherche<br />
se construisent dans <strong>la</strong> prise en compte <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tions avec <strong>de</strong>s acteurs propriétaires d’un enjeu<br />
sanitaire, que ce soit pour répondre à <strong>de</strong>s interrogations précises, <strong>de</strong>s besoins en termes<br />
d’outils qu’ils pourraient avoir et, au moins, <strong>de</strong> manière à s’inscrire dans leur problématisation<br />
<strong>de</strong> cet enjeu et <strong>de</strong>s incertitu<strong>de</strong>s qu’il soulève.<br />
Dans le cas Bemisia, cette problématisation extérieure <strong>de</strong> l’enjeu est beaucoup plus floue. Les<br />
chercheurs n’ont pas face à eux un représentant incontournable du pathogène avec lequel il<br />
faudrait négocier <strong>la</strong> problématisation <strong>de</strong> l’enjeu. La mobilisation scientifique repose sur<br />
l’assemb<strong>la</strong>ge d’un nombre important d’équipes <strong>de</strong> recherche qui problématisent le<br />
pathosystème Bemisia/virus comme enjeu sanitaire <strong>de</strong> manière très diverse et explorent <strong>de</strong><br />
puissance <strong>de</strong>s expérimentations sur Bemisia à partir <strong>de</strong> 2002, mais également son intégration à <strong>de</strong>s<br />
problématiques plus générales <strong>de</strong> protection intégrée <strong>de</strong>s cultures et <strong>de</strong> lutte contre les aleuro<strong>de</strong>s, notamment<br />
après que les popu<strong>la</strong>tions trouvées aient été faibles en 2004/2005.<br />
63 Plusieurs éléments ren<strong>de</strong>nt le problème plus complexe par rapport à Diabrotica : Bemisia, <strong>de</strong> petite taille,<br />
arrivant sans cesse dans le cadre <strong>de</strong> <strong>la</strong> circu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s marchandises, vecteur <strong>de</strong> multiples virus, est un insecte<br />
beaucoup plus difficile à éradiquer que Diabrotica.<br />
64 Cf. résultats <strong>de</strong> l’enquête <strong>de</strong> <strong>la</strong> PV. On pourra justement souligner que c’est également parce qu’on ne veut pas<br />
le constituer comme enjeu que les moyens qui seraient nécessaires à l’observation <strong>de</strong> son maintien et <strong>de</strong> son<br />
développement ne sont pas mis en p<strong>la</strong>ce : il y a un renforcement <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong> <strong>la</strong> faible appropriation.<br />
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