Programme Saison Video 2006 - saison vidéo
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SAISON VIDEO <strong>2006</strong><br />
numéro trente
E d i t o r i a l<br />
La <strong>Saison</strong> Vidéo <strong>2006</strong> est résolument anglaise. Des artistes originaires<br />
de Brighton mais aussi d’Ascott, Bath, Bracknell, Cardiff, Cranleigh,<br />
Exeter, Ilford, Keighley, Londres, Liverpool, Manchester, Newcastle…<br />
nous ont adressé leurs films à la suite d’un travail de prospection<br />
mené en partenariat avec la galerie Fabrica à Brighton qui en diffusant<br />
largement l’information a été un relais efficace et attentif.<br />
L’occasion est donnée de découvrir ces films, présentés pour la<br />
première fois en France, sur tout le territoire du Nord-Pas-de-Calais.<br />
Le programme POINT OF VIEW qui donne une lecture subjective de<br />
la diversité des productions, inauguré l’année dernière, est poursuivi<br />
cette année au LAAC (Lieu Art et d’Action Contemporaine) à<br />
Dunkerque. Ce partenariat avec la Grande-Bretagne va se poursuivre<br />
au-delà de cette <strong>Saison</strong> ; en octobre <strong>2006</strong>, à Brighton dans le cadre<br />
de la Biennale de la Photographie. Des programmes de films anglais<br />
et français seront présentés conjointement.<br />
Le LAAC accueille aussi un programme d’artistes qui renouvellent<br />
dans leurs films la pratique du dessin. Celui-ci est conçu en vis-à-vis<br />
du cabinet de dessins comme une version d’autant d’images en mouvement.<br />
Il se poursuit par une interview consacrée à Jeanne Susplugas,<br />
qui nous livre très expressément sa perception du corps.<br />
Deux rencontres avec des artistes sont organisées. Camille Henrot<br />
présente aux étudiants de l’IUT infocom à Tourcoing ses films et sa<br />
conception du cinéma avec notamment ses derniers Room Movies.<br />
Serge Le Squer interroge notre rapport à l’histoire avec Les pas perdus<br />
au Lycée Jean Rostand à Roubaix. Le partenariat avec l’enseignement<br />
supérieur est renforcé. À l’Ecole des Beaux Arts de<br />
Valenciennes est projeté Silenzio de Christian Merlhiot dont on<br />
pourra aussi apprécier Le Journal de l’Atlantique au Musée des<br />
Beaux Arts et de la Dentelle à Calais. Un focus lui est à cette occasion<br />
consacré. L’ERSEP à Tourcoing bénéficie d’un autre programme<br />
anglais UNTITLED. L’ESAAT et l’Ecole Supérieure d’Infographie à<br />
Roubaix, nouveaux partenaires de la <strong>Saison</strong> Vidéo, ont choisi l’une<br />
des traversées de villes élaborées par des artistes PARCOURS # 1 et<br />
l’autre MYSTERIES ARE BLUE, des films qui ménagent une ambiance<br />
énigmatique.<br />
Plus d’une cinquantaine de films sont ainsi à découvrir cette année<br />
autour de programmes thématiques ou d’autres programmes composés<br />
en concertation avec nos partenaires.<br />
Mo Gourmelon<br />
1
4 FEVRIER – 1 AVRIL <strong>2006</strong>. ROUBAIX, ESPACE CROISÉ<br />
GRAND PLACE - 59100 ROUBAIX - +33 3 20 66 46 93 - www.espacecroise.com<br />
M I C H E L L E N A I S M I T H<br />
EXPOSITION : DU MARDI AU SAMEDI DE 14 H A 18 H<br />
vernissage le vendredi 3 février à 18 H.<br />
2<br />
I S E E T H E F A C E<br />
L’Espace Croisé, Zoo Galerie et <strong>Video</strong>zarts à Nantes présentent<br />
I see the face, exposition personnelle de Michelle Naismith, artiste<br />
écossaise qui travaille entre Nantes et Glasgow. L’exposition est le<br />
prolongement d’une première présentation à la Zoo Galerie en<br />
octobre 2005. Utilisant principalement le médium vidéo, Michelle<br />
Naismith élabore des univers fictionnels dans lesquels des personnages<br />
singuliers voire baroques évoluent au sein d’environnements<br />
urbains hyperréalistes. La plupart du temps immobiles, hiératiques,<br />
les protagonistes de ses contes vidéographiques restent le<br />
plus souvent silencieux. La narration s’y déploie en décalage du<br />
jeu des acteurs (Puis je caresser l’espoir… 2004, Au revoir Moodle<br />
Pozart, 2003) par le biais d’un sous-titrage ou d’une bande-son<br />
omniprésente qui emprunte à des registres aussi différents que la<br />
pop et la grande musique.<br />
Pour sa dernière œuvre vidéo, Michelle Naismith a planté sa<br />
caméra sur les collines d’Hollywood. Situé à la frontière entre<br />
reportage people et fiction, I see the face, 2005 met en scène plusieurs<br />
poncifs en vigueur dans les productions made in USA : le décor -<br />
palmiers, piscine…-, les personnages - le scénariste, la productrice -,<br />
sans oublier l’intrigue, axée sur la présentation d’un projet de film<br />
comme il s’en conçoit et défait des dizaines dans La Mecque du<br />
cinéma. Déviant le récit par une succession d’incongruités et de<br />
détails insolites qui vient en ruiner l’illusion réaliste, I see the face<br />
nous convie sur la scène de cet univers - impitoyable ? - de l’industrie<br />
du film et de son corollaire, le show-business.<br />
L’installation présentée à l’Espace Croisé inscrit cette réalisation<br />
vidéographique dans un environnement qui se construit comme en<br />
écho, lisse et cosmétique tel ce masque blanc et poudré qui orne<br />
l’espace customisé “Côte Ouest”. À travers cette virtuose mise en<br />
abyme de nos fantasmes de papier glacé, Michelle Naismith pose<br />
un regard mi-amusé mi-désenchanté sur cet imaginaire formaté<br />
par le star-system. Épinglant le cinéma comme art de l’artifice,<br />
elle interroge subtilement nos propres pratiques, qui, du namedropping<br />
à la consommation culturelle frénétique, influencent<br />
l’art d’aujourd’hui. Cette dernière vidéo est mise en perspective<br />
de travaux antérieurs.<br />
Un catalogue est édité à cette occasion :<br />
Michelle Naismith, Roubaix : éditions Espace Croisé, <strong>2006</strong>, 64 p.<br />
17 x 24 cm, bilingue<br />
Exposition organisée dans le cadre de 3 en 1, programme européen<br />
Interreg IIIA
6 - 12 FEVRIER <strong>2006</strong>. SOLRE LE CHATEAU, VITRINE PAULIN<br />
2 RUE DE BEAUMONT - 59740 SOLRE LE CHATEAU<br />
P R E D R A G PA J D I C<br />
EXPOSITION VISIBLE UNIQUEMENT DE LA RUE DE 19 H A 20 H 30<br />
G A R D E N<br />
Garden réalisé en 2003 est une projection en boucle. Le film présente<br />
dans un condensé d’une dizaine de minutes les variations du jardin de<br />
l’artiste qui se découvre comme le sanctuaire privé de sa nouvelle<br />
demeure en Grande-Bretagne. Cet enregistrement capte pendant<br />
douze mois et du même emplacement le changement des <strong>saison</strong>s. Ce<br />
constat tout aussi poétique qu’implacable stipule symboliquement que<br />
l’artiste tourne constamment le dos au passé, attendant l’advenue des<br />
transformations dans son tranquille jardin. On connaît l’attachement<br />
des Anglais à leur jardin. Ici, il ne s’agit pas de contempler et de jouir<br />
de l’instant présent mais d’inscrire des mouvances sur la pellicule et se<br />
laisser porter par ces éternels renouvellements.<br />
4<br />
exposition organisée en collaboration avec Cent lieux d’art<br />
7 hameau d’Offies, F-59216 Dimont<br />
+33 3 27 61 66 19, centlieuxdart@wanadoo.fr
9 FÉVRIER – 9 MARS <strong>2006</strong>. TOURCOING, LE FRESNOY, STUDIO NATIONAL DES ARTS CONTEMPORAINS<br />
22 RUE DU FRESNOY – 59200 TOURCOING – +33 3 20 28 38 00 - www.lefresnoy.net<br />
T H I E R RY K U N T Z E L<br />
EXPOSITION<br />
L U M I È R E S D U T E M P S<br />
L’art de Thierry Kuntzel vient, revient de très loin. De temps quasi<br />
immémoriaux qu’il s’agit d’éclairer pour croire au moins les retrouver.<br />
Ils composent autant de “blocs d’enfance”. Des blocs de temps à l’état<br />
pur autour desquels l’imagination tourne et qu’il faut éclairer chacun<br />
selon leur lumière. Ainsi se forment des lumières du temps.<br />
Time Smoking a Picture : le temps qui se consume et part en fumée<br />
libère des couleurs, une à une changeante et mêlées. Le temps que<br />
l’image met à changer est aussi celui d’un suspens qui se matérialise<br />
entre le déroulement lent d’une action minimale sur l’écran moniteur<br />
(marcher, s’accouder, fumer) et d’innombrables pauses que la photographie<br />
permet d’en extraire. L’action de la photographie, saisie dans<br />
son rapport avec le mouvement qui de façon alternative l’anime et<br />
qu’elle fixe, est ici cruciale dans l’invention de la vidéo : empilement,<br />
effeuillage de Nostos II, face à face des deux photos de Nostos III, série<br />
réanimée des huit portraits de Tu, image unique de Retour dans la<br />
neige, soumise à la vibration plastique de particules de fiction.<br />
Toujours il s’agit d’arrêter et de remettre en mouvement l’image,<br />
comme The Waves en fait au visiteur l’invite interactive.<br />
L’art de la vidéo est ainsi un art vivant des fantômes ; les temps qu’il<br />
fait revenir sont également ceux des mots rares et d’autres images…<br />
Raymond Bellour<br />
5
JEUDI 9 FEVRIER <strong>2006</strong> À 10 H. ROUBAIX, ESAAT.<br />
539 AVENUE DES NATIONS UNIES - 59100 ROUBAIX - +33 3 20 24 27 77<br />
PA R C O U R S # 1<br />
LA VILLE EST UN ESPACE MOUVANT DONT LES ARTISTES SAISISSENT<br />
LES TRANSFORMATIONS ET CAPTENT LES BRÊCHES. ILS S’IMMISCENT<br />
DANS LE FLUX DES PASSANTS ET LE RALENTISSENT.<br />
6<br />
Patrice Goasduff<br />
31 Bd. Magenta<br />
2004, 14 mn, production : 40mcube/Vivement lundi<br />
Un film d’observation de l’espace urbain en mutation. C’est un<br />
point de vue unique sur la transformation d’un parking en gigantesque<br />
chantier qui donnera naissance à un bâtiment. Peu à peu le chantier<br />
déborde de son périmètre pour modifier les habitudes et les comportements<br />
de chacun. 31 Bd. Magenta est un film dont la matière<br />
est une série photographique que j’ai réalisée pendant deux ans<br />
depuis mon balcon, devant lequel s’est déroulée la construction<br />
d’un bâtiment de l’architecte Christian de Portzamparc. 180 photographies<br />
de cette série ont été présentées dans le cadre de l’exposition<br />
Chantier public à Rennes en 2003. Dans une seconde<br />
étape, cette série d’images, mises en film retracent la vie d’un<br />
quartier et sa transformation par un chantier vivant et mouvant.<br />
Entre technique lourde de construction et attitudes humaines, ce<br />
film prend une dimension sociologique.<br />
Patrice Goasduff
Annis Joslin<br />
there there<br />
2003, 2 mn<br />
Une captation ordonnée et quasi obsessionnelle de panneaux<br />
de signalétique urbaine tous bancals. Un rythme soutenu au<br />
son d’un métronome.<br />
Nick Jordan<br />
Havanazephyr<br />
2005, 6 mn 10<br />
Un plan large sur la ville de la Havane écrasée sous la torpeur<br />
introduit l’ambiance du film. Des plans successifs cadrent le même<br />
coin de rue ou des linges aux fenêtres immobiles. Une attente<br />
s’installe, mais de quelle attente s’agit-il ? Une ville sans habitant,<br />
sans mouvement. Puis le vent se lève, et avec lui la caméra se<br />
déplace, envisage le rivage. La ville réanimée est suspendue aux<br />
déplacements réguliers des ventilateurs. Avec le souffle du vent, le<br />
film rend palpable et visible l’air si difficile à définir.<br />
7
Yu-Chen Wang<br />
River Islington<br />
2005, 4 mn 20<br />
L’artiste remonte une rupture de canalisation d’eau et capte par<br />
hasard cette fêlure urbaine nocturne. Cet écoulement habituellement<br />
invisible est une force vive, un élément naturel empruntant<br />
ses propres voies. Le film serait une sorte d’ode à la nature dans<br />
un environnement qui ne la contient plus.<br />
Spark<br />
2005, 2 mn<br />
La nuit toujours. Spark détient la même lumière que River<br />
Islington. Des travaux sur une ligne de tramway livrent des images<br />
d’ouvriers au travail en prise avec leurs machines, mais aussi des<br />
étincelles flamboyantes irradiant la pénombre dans une résurgence<br />
d’éléments naturels.<br />
8
José Pedro Cortes<br />
Platforms<br />
2004, 4 mn 33<br />
Les environnements urbains contemporains nous apparaissent<br />
comme des zones de réalités multiples. Images en puzzle, ces<br />
espaces sont de moins en moins attitrés à une simple histoire<br />
définitive. La ville tend à créer le concept de la continuité<br />
urbaine. Une scène banale de piétons circulant indifféremment<br />
dans la rue. Les figures apparaissent subrepticement d’une alternance<br />
d’obscurité et de lumières délicatement étudiée. Formes<br />
anonymes elles révèlent la beauté de leur découpe. Tout ce que<br />
nous voyons est familier, mais en même temps, pratiquement<br />
inexistant. Le film enfreint la ligne de partage transparente et<br />
imperceptible entre réalité et fiction.<br />
Amy Sharrocks<br />
Pause<br />
2005, 8 mn 45<br />
Des passants sont arrêtés au hasard dans la rue, il leur est demandé<br />
de ne plus respirer devant la caméra… Cette intervention énigmatique<br />
expose à la fois la diversité ethnique de la rue et isole chacun<br />
dans un acte personnel qui le révèle, le suspend à ses limites et<br />
l’abstrait du contexte ambiant.<br />
9
MERCREDI 22 FEVRIER <strong>2006</strong> À 15 H 30. ROUBAIX, POLE3D - ÉCOLE SUPÉRIEURE D’INFOGRAPHIE<br />
78 BOULEVARD DU GENERAL LECLERC - 59100 ROUBAIX - +33 3 28 38 93 80<br />
M Y S T E R I E S A R E B L U E<br />
UN PROGRAMME QUI IMPLIQUE LE CORPS DANS SA DIMENSION<br />
FRAGMENTÉE OU FANTASMÉE ET PLUS GLOBALEMENT MYSTÉRIEURE…<br />
Alexandra Sà<br />
La Roda<br />
2005, 3 mn 30<br />
Alexandra Sà se met très souvent en scène dans ses vidéos. Dans cette<br />
nouvelle trajectoire, elle tourne en rond dans un espace urbain vaguement<br />
délimité faisant référence à une arène. Figure humaine ou animale, ou<br />
les deux ? Incarnation d’un Minotaure ni poursuivant, ni poursuivi et<br />
qui s’écroule dans cette indétermination. La discordance des sons<br />
participe à cette irrésolution.<br />
Oui<br />
2004, 2 mn<br />
Un Oui engageant qui se transforme en Non. Une bouche filmée en très<br />
gros plan envahit l’écran prononçant un Oui sous plusieurs intonations.<br />
Le son se désolidarise petit à petit de l’image qui continuant à esquisser<br />
un Oui verbalise un Non de façon de plus en plus insistante, montrant<br />
ainsi un décalage entre l’apparence, l’acquiescement continu, et la<br />
pensée, qui elle, amorce petit à petit un refus dans un mouvement<br />
contradictoire.<br />
Alexandra Sà<br />
10
Jeanne Susplugas<br />
Come to me<br />
2003-04, 1 mn 30<br />
sound : Ramuntcho Matta<br />
Cette vidéo, tout en étant un hommage à l’esthétique et aux poupées<br />
érotisées d’Hans Bellmer, évoque des questions actuelles, préoccupantes<br />
comme le clonage ou le développement technologique. Le film<br />
commence par un gros plan sur un rideau de verre blanc. Le rideau<br />
s’ouvre et donne à voir un corps monstrueux. Ce corps, doté d’une<br />
double paire de jambes articulées d’une “boule de ventre”, avance<br />
vers le spectateur. Ce corps renvoie aux manipulations infinies qu’on<br />
lui fait subir. On le désire plus grand (pilule de croissance), plus<br />
rapide (dopage), plus beau (cils qui doublent de volume, soutiengorge<br />
rembourré), plus musclés (anabolisants)... Les limites de ce<br />
corps sont sans cesse repoussées parfois, c’est le cas ici, jusqu’au<br />
grotesque !<br />
Jeanne Susplugas<br />
Entretien p. 29<br />
Tobias Sternberg<br />
Atlas<br />
2003, 5 mn 58<br />
Soulever les bras tendus une grosse pierre aussi longtemps<br />
que possible ; tel est l’enjeu de ce film. La caméra enregistre<br />
la tension physique du performeur qui résiste puis<br />
s’affaisse sous la lourde charge. Un acte qui revisite la<br />
performance des années soixante et la mythologie sans<br />
craindre une pathétique attitude machiste.<br />
11
Houri der Stepanian-Abdalian<br />
Hands Up Motherfucker<br />
2005, 7 mn<br />
production Le Fresnoy, Studio national des arts contemporains<br />
Cette vidéo relate la performance réalisée avec André S. Labarthe<br />
et Hraïr Hratchian qui a consisté en la synchronisation des altérations<br />
dans la taille de l’image en rétroprojection avec le souffle du<br />
comédien. Deux personnages se font face. L’un menace l’autre<br />
d’une arme, le tient sous sa coupe, accuse des pauses. Le développement<br />
technique a été assuré par Massimiliano Simbula et la performance<br />
vocale revient à Julien Tarride.<br />
Houri der Stepanian-Abdalian<br />
Livingman<br />
2005, 3 mn<br />
production Le Fresnoy, Studio national des arts contemporains<br />
Eléonore de Montesquiou<br />
Narva-Irvangorod<br />
2005, 6 mn<br />
musique extraite de “tribute to Sun Ra” Francois Robert Lloyd &<br />
Grégoire Garrigues<br />
L’artiste filme un no-man’s land, zone limite de l’Europe entre<br />
l’Estonie et la Russie. Les gens qui passent derrière le grillage sont<br />
des Russes qui vivent en Estonie et qui ont le passeport de leur pays<br />
d’origine. Ils vont faire leurs courses en Russie parce que c’est<br />
moins cher et vivent de ce trafic. Il y a aussi ceux qui parviennent<br />
à franchir cette frontière si difficile - parce que stratégique - qui<br />
séparent les deux pays si lointains et si proches. La caméra répondant<br />
aux stridences d’un son électrique s’approche de plus en plus gommant<br />
le grillage.<br />
Un homme est visé de coups de feu qui ne l’atteignent pas.<br />
12
Agnieszka Kalinowska<br />
Personal doping<br />
2003, 7 mn<br />
Une chaîne humaine traverse verticalement l’écran, filles et garçons<br />
indifférenciés. Ils viennent de nulle part et n’ont pas de destination<br />
plus définie. Tête en bas et de dos, ils glissent se tenant par les<br />
pieds, dans une progression solidaire. Chacun relié et assimilé à<br />
l’autre. Leur évolution mystérieuse est recouverte d’un chant de<br />
grillons.<br />
13
Camille Henrot<br />
Metawolf<br />
2002, 2 mn<br />
Michelle Naismith<br />
Palais de Justice (I choose also black)<br />
2002, 14 mn<br />
Au tout début du film une enseigne rose surplombe le toit du palais<br />
de justice. Ambiance disco. Dans la nuit, cette lumière spectrale,<br />
à la typographie élaborée et clignotante racole comme les entrées<br />
de boîte de nuit. L’atmosphère du film est campée sans se soucier<br />
de vraisemblance. Aux abords de cet édifice imposant, un œuf noir<br />
doté de jambes déambule sans but apparent, personnage fantasque<br />
empêtré et emprisonné dans une nuit trop longue. Dans cet<br />
univers trouble et indéfini, des textes surgissent en bas de l’image.<br />
Ce ne sont ni des sous-titres de dialogues absents, ni des commentaires<br />
de l’action en cours. L’action est plutôt maigre, elle traîne<br />
une lente progression dans la nuit. Ils introduisent une percée de<br />
pensées moroses inspirées de l’univers de Soren Kierkegaard.<br />
Images et textes se déroulent indépendamment. La relative lenteur<br />
des images, leur quiétude - il ne s’y passe pas grand chose en définitive<br />
- permet de s’imprégner à son aise des deux univers parallèles.<br />
Le film est réalisé à partir de la bande 35 mn d’un film de sciencefiction.<br />
Ce recyclage, ce réemploi crée une narration nouvelle<br />
totalement libre qui réinterprète le scénario originel, lui donne un<br />
nouvel essor et transporte ce film de science-fiction d’un genre<br />
très codé et connoté vers le champ de l’art.<br />
14
VENDREDI 3 MARS <strong>2006</strong> A 12 H 30. ROUBAIX, LYCÉE JEAN ROSTAND - BÂTIMENT AUDIOVISUEL<br />
361 GRANDE RUE – 59100 ROUBAIX – +33 3 20 66 46 93<br />
S E R G E L E S Q U E R<br />
RENCONTRE AVEC LʼARTISTE<br />
L E S P A S P E R D U S<br />
IDEAL # 7 (<strong>Saison</strong> Vidéo 2005) rassemblait sans préméditation<br />
Pas à pas, les arpenteurs, 2003, de Serge le Squer et La Colonie,<br />
2004, de Vincent Roux. Serge le Squer nous apprenait que le<br />
bagne d’Aniane filmé par Vincent Roux dans La Colonie faisait<br />
l’objet d’un plan dans l’un de ses films précédents Les pas perdus.<br />
Il ne nous en fallait pas davantage pour désirer voir ce film.<br />
Les pas perdus de vingt-quatre minutes a été réalisé en 1999<br />
pour son diplôme de l’Ecole Nationale de la Photographie à<br />
Arles. Ce travail combine un arpentage des lieux et des recherches<br />
aux archives départementales. Ce film interroge notre rapport<br />
à l’Histoire. Il analyse la façon de rassembler et de parquer les<br />
“indésirables”.<br />
“Depuis 1940, le camp militaire Joffre, près de Rivesaltes,<br />
contient une histoire de l’enfermement des “indésirables” sous<br />
des appellations différentes : centre d’hébergement, d’internement,<br />
de rassemblement, de séjour surveillé, de transit, de<br />
rétention administrative. Cette histoire n’a jamais été celle<br />
d’un centre, mais d’une dispersion acharnée, organisée, de milliers<br />
d’individus coupables d’exister. Pour certains, la mort fut<br />
au rendez-vous. Leur pas résonnent dans L’Histoire”.<br />
Serge le Squer<br />
15
LUNDI 6 MARS <strong>2006</strong> A 11 H. TOURCOING, ECOLE RÉGIONALE SUPÉRIEURE D’EXPRESSION PLASTIQUE<br />
36 BIS RUE DES URSULINES - 59200 TOURCOING – +33 3 20 27 23 97<br />
U N T I T L E D<br />
CE PROGRAMME ÉMANE D’UN REGARD PORTÉ SUR LA CRÉATION ARTISTIQUE ANGLAISE DANS<br />
LE CADRE D’UN PARTENARIAT (INTERREG IIIA) ENTRE LA GALERIE FABRICA, LA BIENNALE DE<br />
LA PHOTOGRAPHIE DE BRIGHTON, L’ESPACE CROISÉ ET LA SAISON VIDÉO.<br />
IL PRIVILÉGIE DES FILMS QUI METTENT EN JEU LE LANGAGE.<br />
Michael Cousin<br />
Suspicion<br />
2003, 10 mn<br />
Ce film fonctionne selon le mode de la supercherie. Une liste complète des activités<br />
d’un homme placé sous surveillance a été confiée à l’ancien inspecteur en chef<br />
Wallace. L’identité du “suspect”, qui s’avère être une célébrité ne lui a pas été<br />
préalablement révélée.<br />
À partir de ces données, il détermine et énonce la psychologie de la personne<br />
“filée”.<br />
16
Markus Soukup<br />
Support to fly<br />
2004, 2 mn 30<br />
Ce film d’animation est basé sur la retranscription<br />
d’un rêve réel. Les images absentes sont relayées par<br />
des mots, selon un script détaillé et découpé en<br />
treize plans. L’apparition des mots, leur typographie,<br />
leur différence de taille, leur défilé suggèrent les scènes<br />
et font largement appel à l’imagination. Eux seuls ont<br />
en charge le récit filmique, le positionnement des<br />
objets et des personnages dans l’action en cours.<br />
By two feathers<br />
2004, 4 mn<br />
Ce second film fournit la version visuelle du rêve, confrontée à l’animation<br />
textuelle de Support to fly. Cette approche complète les projets<br />
d’exploration et de traduction du rêve initial. Cette vidéo peut être comprise<br />
comme une tentative cinématographique de traduction de la<br />
mémoire du rêve particulier en un artefact audiovisuel. La narration de la<br />
version vidéo a été étendue à une construction dans laquelle le rêveur<br />
expérimente une histoire qui a trait à la façon de finir son travail artistique.<br />
Les deux dernières plumes manquantes de sa sculpture acquièrent<br />
une dimension symbolique.<br />
17
The Miller and McAfee Press<br />
Dear Linda Harrison<br />
2005, 10 mn<br />
18<br />
James Stokes<br />
Converse<br />
2005, 10 mn<br />
Cette vidéo est une étude de la notion de conversation comme moyen<br />
de communication. “Converse” a, en anglais, deux significations. Il<br />
peut vouloir dire s’entretenir avec quelqu’un et en second lieu l’opposé<br />
de quelque chose. Dans la vidéo, l’artiste explore ces deux significations<br />
dans un contexte précis. Converse met en présence deux<br />
sujets : un homme et une femme qui se livrent à un jeu d’association<br />
d’idées. Ils disent le premier mot qui leur vient à l’esprit en liaison à<br />
un autre. Chacun est filmé séparément par une caméra placée devant<br />
eux et qui les saisit en temps réel. Ils ne se situent pas dans le même<br />
espace et sont chacun hors de vue de l’autre. Ils ne s’entendent pas.<br />
Pour communiquer entre eux ils ont besoin d’un médiateur. L’artiste<br />
lui-même joue entre eux un rôle de messager en passant derrière chaque<br />
caméra. Il s’infiltre dans le jeu en transformant les réponses de chacun.<br />
Andrew Miller et Duncan Macafee ont commencé à<br />
travailler ensemble en 1999. En 2002, ils ont fondé le<br />
label “The Miller and McAfee Press” sous lequel des<br />
publications, des pièces sonores, des performances et<br />
des vidéos sont produites. Dear Linda Harrison est un<br />
travail basé sur un sondage national de consommation<br />
(Linda Harrison en est la directrice) et les acteurs<br />
jouent les rôles de Linda Harrison et du consommateur.<br />
Ils sont filmés en plan très serré et partiel ; la femme<br />
de face, l’homme de profil quasi anonyme. Le consommateur<br />
parle à l’oreille de Linda Harrison lui révélant<br />
les détails personnels de ses préférences de style de<br />
vie, cochés parmi un choix multiple de propositions.<br />
Celui-ci a répondu honnêtement aux options limitées<br />
et définies des questions, livrant en fin de compte un<br />
autoportrait assez imparfait. Quand il parle, elle est<br />
éveillée ; quand il est silencieux, elle est assoupie.<br />
L’intimité des acteurs dans leur proximité est contredite<br />
par l’aspect aliénant de ce sondage.
DU 6 AU 11 MARS <strong>2006</strong>. ROUBAIX, MAISON DES ASSOCIATIONS<br />
24 PLACE DE LA LIBERTÉ - 59100 ROUBAIX - +33 3 20 73 46 64<br />
L O O P S<br />
DIFFUSION EN CONTINU LE LUNDI DE 13 H À 18 H, DU MARDI AU VENDREDI DE 9 H À 19 H, LE SAMEDI DE 9 H À 18 H<br />
UNE RENCONTRE AVEC LE PUBLIC EST ORGANISÉE LE VENDREDI 10 MARS À 17 H<br />
DES FILMS QUI TOURNENT EN BOUCLE ET DONNENT UNE AUTRE<br />
APPRÉCIATION DU TEMPS ET DE NOTRE ENVIRONNEMENT DIRECT :<br />
TRANSFORMER UN DÉTAIL EN PAYSAGE ABSTRAIT, SE LAISSER<br />
SUBMERGER PAR LES ÉLÉMENTS OU PRENDRE LE TEMPS DE SAISIR<br />
L’IMPERCEPTIBLE.<br />
DES VISIONS QUI RELÈVENT AUTANT DE LA PRISE DE VUE QUE DU<br />
PAYSAGE INTERIEUR.<br />
Simon Warner<br />
20<br />
River Gauge<br />
2004, 3 mn 10<br />
Un point de vue fixe dans un port. La caméra, qui à l’origine frôle<br />
l’eau, se trouve peu à peu immergée donnant l’impression au<br />
regardeur d’être lui-même plongé dans cet environnement. La mer<br />
reprend ses droits, noyant tout sur son passage : le port s’efface.<br />
Il n’y a d’autres issues possibles que de contempler le nouveau<br />
paysage aquatique envahissant que la mise en boucle fait revenir<br />
incessamment.
Rashad Omar<br />
I always seem to find myself here<br />
2004, 8 mn 45<br />
Russell Webb<br />
Several Billion Years<br />
2004, 26 mn 02<br />
Ce film suggère la naissance et la mort d’une étoile, montrant<br />
l’union de minuscules bulles, qui moussent et pétillent avec une<br />
violence croissante jusqu’à se solidifier dans une seule masse pour<br />
ensuite se désagréger. Les échelles sont ici renversées, nous ne<br />
savons plus si nous nous trouvons face à l’infiniment petit ou au<br />
gigantesque. Le cycle infini de la vie est mis en boucle et emprisonné<br />
par la vidéo, médium tout puissant qui permet ici de saisir<br />
l’intouchable.<br />
Mes films arrivent souvent par accident, je peux me trouver dans un<br />
endroit pour une toute autre raison et je remarque quelque chose,<br />
je le filme et enregistre le son cela dans un laps de temps très<br />
court. J’aime le fait que les choses que je filme puissent arriver<br />
n’importe où. Je n’ai qu’à être là pour les capturer. Je fais le portrait<br />
de lieux dans les limbes. Lieux en attente d’un événement, et<br />
c’est là que je remarque ces minuscules détails. La lumière du<br />
soleil et le vent sont très importants du fait qu’ils animent les<br />
choses que je filme et qu’ils leur donnent de la vie et du caractère.<br />
On n’y voit pas de gens, seulement des lieux par lesquels ils sont<br />
passés ou alors les bruits distants de leur présence. Parfois, le film<br />
traite juste des rayons du soleil sur des objets ou de sensations face<br />
à un paysage.<br />
Les sons apportent au film un contexte et donne l’impression de s’y<br />
trouver soi-même.<br />
Rashad Omar<br />
21
MERCREDI 15 MARS <strong>2006</strong> A 13 H 30. TOURCOING, IUT B LILLE INFOCOMMUNICATION<br />
35 RUE SAINTE BARBE – 59200 TOURCOING – +33 3 20 76 25 00<br />
22<br />
C A M I L L E H E N R O T<br />
RENCONTRE AVEC LʼARTISTE<br />
R O O M<br />
M O V I E S<br />
Les films que je présente sont tous fabriqués sur la bande 35 mn<br />
d’un film commercial existant. En recyclant des films, j’oppose<br />
une intervention individuelle à une image “publique”. Ainsi je<br />
superpose deux fictions l’une sur l’autre. Le film final sera le résultat<br />
de l’addition de deux modes de fabrication opposées, l’un technologique<br />
(le tournage) l’autre artisanal (l’intervention sur la pellicule).<br />
Ce parasitage d’un film déjà existant ne représente pas une critique<br />
de l’industrie du cinéma. L’objectif n’est pas de rejeter le monde<br />
du film “commercial” mais plutôt de l’absorber doucement, de<br />
l’engloutir, comme on le fait des choses qui nous font envie. Ces<br />
films sont une réponse du spectateur que je continue à être, y<br />
compris, quand je les réalise (puisque pour dessiner sur le film, je<br />
dois faire défiler les photogrammes un par un sur ma table<br />
lumineuse).<br />
“J’échappe à la nostalgie en faisant le film, même si le film est<br />
nostalgique. Le cinéma provoque notre adhésion à un personnage,<br />
à une histoire, suscite des émotions parfois intenses et nous abandonne<br />
négligemment après la fin du générique. Ce qui s’y passe est<br />
plus intense que dans le réel, souvent plus beau, de quel droit le<br />
film nous abandonne-t-il ensuite à la réalité ? Mes films seront<br />
une réponse à la domination qu’exerce le cinéma sur la vie.<br />
Que devient le temps passé à être spectateur ? Je veux transformer<br />
ce temps en expérience active.<br />
L’expression “Home Cinema” contient une sorte de miracle : on a<br />
enfin, à la maison et rien que pour soi, cette chose grande et<br />
collective qu’est le cinéma. La suite pourrait être d’avoir chacun<br />
un home Luna Park, un home musée, une home disco… Mais le<br />
Home Cinema reste un des rares exemples d’intrusion d’un espace<br />
collectif (le grand écran) dans un espace privé (le salon ou la<br />
chambre) qui soit un peu démocratique.<br />
Mon projet ROOM MOVIES se définit comme une parfaite réplique<br />
de cette réalité : l’intrusion d’un individu anonyme dans l’espace<br />
collectif et public qu’est le film.<br />
Les films sont “home made” : la technique de grattage de la pellicule<br />
permettant de faire des films à la maison (sans tournage, ni opérateur,<br />
ni équipe). Ils ne se passent pas des moyens mais des habitudes de<br />
fabrication du film.<br />
En ce qui concerne le mode de diffusion, ce sont des “films de<br />
chambre”, (l’expression “room movies” désigne les films expérimentaux<br />
anglais). Les “room movies” ne sont pas conçus pour être<br />
vus par un large public. Ils ne s’imposent pas et offrent la possibilité<br />
de niveaux de lectures multiples. Ils sont “pour moi et quelques<br />
autres”.<br />
Ces films sont réalisés sans tournage et pourraient être fabriqués<br />
par pure gourmandise, plaisir des yeux… Le point de départ serait<br />
alors le même que celui du cinéma à grand spectacle “making food<br />
for the eyes”.<br />
Camille Henrot
JEUDI 16 MARS <strong>2006</strong> À 18 H 30. DUNKERQUE, LAAC<br />
JARDIN DES SCULPTURES - 59140 DUNKERQUE – + 33 3 28 29 56 00 - musee@ville-dunkerque.fr<br />
L O O S I N G M Y M I N D<br />
DES FILMS QUI ALLIENT DES FORMES HYBRIDES DE REPRÉSENTATIONS<br />
Mathias Delfau<br />
Nous sommes tous des danseurs de disco<br />
2001, 4 mn 21<br />
En hommage à Fat Boy Slim et à tous les sons et images qui font<br />
mon quotidien. Nous sommes tous des danseurs de disco est un<br />
montage d’éléments récupérés subjectivement en vue de fabriquer<br />
un film bavard qui n’aurait rien à dire. La musique a son propre<br />
déroulement. Un clip n’a pas besoin d’histoire, il accepte la<br />
succession de plans s’ils sont au service du rythme.<br />
Ce jour-là, il y avait deux présents, un présent au ralenti dans la<br />
station MIR, un présent en lecture normale sur terre et la musique<br />
de Fat Boy Slim. Boum. Quand je vois une foule, je ne peux pas<br />
m’empêcher de voir pleuvoir des bombes.<br />
Mathias Delfau<br />
Jooh<br />
2004, 4 mn 48<br />
avec Nicolas Ray<br />
Le temps, pas celui de l’action, celui nécessaire à l’action ou pourquoi<br />
15 secondes durent-elles 4 minutes ? Jooh, c’est confronter deux partitions,<br />
celle du trait noir qui redessine inlassablement chaque image<br />
de la scène, et celle de l’histoire ralentie aux limites de la compréhension.<br />
Pour ceux qui ont manqué le début : d’un côté c’est Dancing Kid et sa<br />
bande, de l’autre c’est Mc Ivers, le shérif et les volontaires du village.<br />
La tension est à son comble, la diligence a été attaquée, le Kid est<br />
soupçonné, mais il ne veut pas suivre le shérif, il dit qu’il n’a rien à<br />
voir avec cette histoire… C’est ce moment que choisit Johnny Guitar<br />
pour s’adresser au Kid et lui demander une cigarette. Puis il se<br />
retourne, regarde Mc Ivers dans les yeux, et lui demande une allumette.<br />
Mathias Delfau<br />
24
Lansky<br />
2002, 3 mn<br />
Lansky est un petit bijou d’animation musicale. Grattés directement<br />
sur la pellicule ce sont des points, des lignes floues, des circonvolutions,<br />
des fantômes qui surgissent, disparaissent et reviennent...<br />
Branding<br />
2002, 3 mn<br />
Des silhouettes, des cercles, des lignes comme inscrites au pochoir<br />
se superposent, se disjoignent… Correspondances colorées d’une<br />
musique tout autant électronique que lancinante.<br />
Hey bonus<br />
2003, 3 mn<br />
Camille Henrot a réalisé un clip pour le groupe electro Octet (label<br />
DiamondTrax). Elle est intervenue directement sur la pellicule.<br />
Elle a superposé des dessins aux prises de vues et a animé des figures<br />
à même le support filmique. Ce déroulé flou déborde de sensualité et<br />
d’onirisme.<br />
Dying living woman<br />
2005, 10 mn<br />
Camille Henrot<br />
Dying living woman gratté sur pellicule utilise des images d’un film<br />
très connu : La nuit des morts vivants, une référence dans le genre<br />
du film d’épouvante. Dans le film original, une jeune fille est poursuivie<br />
par une armée de morts vivants. Dans le film Dying living<br />
woman, l’image de l’héroïne en fuite, Barbara a été effacée image<br />
par image. Disparue mais semblable à une apparition, elle irradie<br />
d’une lumière surnaturelle puisqu’elle n’est plus qu’une image<br />
photographique. Le personnage de fiction est rejeté hors du film.<br />
Il “apparaît” tel un fantôme mais ce qui est apparent c’est son<br />
absence (qui révèle le support du film).<br />
Ce qui est ainsi révélé est un ailleurs, une autre dimension<br />
(l’image photographique renvoie à la fiction mais la tache blanche<br />
a un élément hors-fiction : le matériau filmique).<br />
Camille Henrot<br />
25
Gilles Balmet<br />
Story-board<br />
2002, 3 mn<br />
Story-board est une vidéo qui alterne les images d’une scène d’arrestation d’un jeune voleur d’une paire de basket avec des dessins proches<br />
de ceux que l’on peut trouver dans les story-boards de cinéma. Le montage des images est assez rapide et montre tout au long de la vidéo<br />
une image dessinée de la scène puis son pendant, capturé dans le réel par ma caméra. L’intérêt de la vidéo réside dans le fait que la séquence<br />
vidéo a été tournée en premier et donc, que son story-board a été réalisé à la suite par mes soins. La vidéo constitue l’inversion du processus<br />
créatif classique et jette le spectateur dans le trouble en lui faisant croire à la reconstitution par des acteurs d’une simple scène d’action.<br />
La séquence en question montre l’arrestation d’un jeune voleur par le vigile d’un magasin et la confrontation qui suit avec des spectateurs<br />
de la scène. Ils n’ont pas remarqué que le voleur mime un état de manque en se roulant par terre pour les prendre en pitié et ils s’en prennent<br />
au vigile en croyant qu’il a maltraité le jeune voleur.<br />
J’ai filmé cette séquence d’un balcon en m’improvisant journaliste-reporter. Le caractère théâtral des visages des “acteurs” de cette terrible<br />
scène m’a mis sur la voie du story-board et du plaisir de lier vidéo et dessins tout en interrogeant le spectateur sur le statut et la “réalité”<br />
d’une image.<br />
Gilles Balmet<br />
26
Jeanne Susplugas<br />
For your eyes<br />
2005, 3 mn 43<br />
Music : Ramuntcho Matta<br />
En gros plan, de grands yeux orange étonnés nous regardent.<br />
Ce sont des yeux en plastique, ceux d’une poupée. Elle cligne des<br />
yeux. Ce clignement ouvre une scène, une courte animation dans<br />
laquelle une petite fille brandit un animal ensanglanté. Avec ses<br />
couettes blondes et son petit short sexy, elle sourit avec satisfaction.<br />
Puis à nouveau, gros plan sur les yeux de la poupée. Cette fois,<br />
deux grands yeux verts regardent de côté. Légèrement inquiète,<br />
elle cligne des yeux et une nouvelle scène s’ouvre. Une petite<br />
fille innocente, armes à la main, découpe de petits poussins noyés<br />
dans le sang. Ces animations, réalisées à base de dessins, jouent<br />
du contraste. Contraste technique, puisque à l’intérieur d’un<br />
même dessin, des styles différents cohabitent, allant du graphisme<br />
acidulé, parfois proche du dessin d’enfant aux mangas. Contraste<br />
émotionnel entre innocence et cruauté. Quatre animations<br />
s’enchaînent, scandées par des clignements d’yeux. Celles-ci,<br />
apparemment coquines, espiègles, amusantes et séduisantes,<br />
révèlent vite des détails inquiétants. Elles évoquent des thèmes à<br />
la limite du tabou tels le suicide, la violence envers les enfants…<br />
Jeanne Susplugas<br />
Emma Hart<br />
(title at end of video)<br />
2004, 2 mn<br />
Un regard fixe profond en plan très rapproché, s’absorbe à une<br />
tâche qui ne sera révélée qu’à la fin du film…<br />
Entretien p. 29<br />
27
Jenny Mellings<br />
For your eyes<br />
2003, 12 mn 27<br />
Le point de départ est une gravure représentant la Lune réalisée par<br />
Claude Melan au seizième siècle. Elle appartient à la collection<br />
Cotonian du Musée des Beaux-Arts de la ville de Plymouth. Crisium est<br />
réalisé selon les procédés de l’animation à l’aide de dessins à la craie<br />
et au charbon appliqués sur des photos agrandies et sur d’autres supports<br />
comme des fragments de gravures, ou encore les propres prises<br />
de vue de l’artiste. Le support d’origine est parfois totalement recouvert.<br />
Le film présente un voyage imaginaire sur la Lune. Son esthétique est<br />
donc influencée par des gravures du seizième siècle représentant la<br />
surface de la Lune. Dans cet univers étranger constitué de cratères et<br />
de pâles paysages désertiques apparaissent des projections familières<br />
d’éléments terrestres. Ces images qui peuplent cette planète illustrent<br />
l’intériorité de chacun face à un milieu méconnu ici figuré par la Lune.<br />
28
Jeanne Susplugas<br />
à la limite<br />
Mo Gourmelon : L’ambiance de For your eyes est douce amère. J’ai en<br />
tête un dessin d’Alain Séchas. Dans la famille Les chats : le père<br />
Peace, la mère Love et les enfants Murder, Suicide, Bitch, Gore… Un<br />
sarcasme, un rire jaune. Ton film associe également la candeur à la<br />
violence…<br />
Jeanne Susplugas : C’est amusant que tu me parles d’Alain Séchas car<br />
je l’ai rencontré hier à un dîner et j’ai beaucoup aimé discuter avec<br />
lui !<br />
J’essaie toujours dans mon travail de me placer à la limite des choses.<br />
Que ce soit dans les dessins, les photographies, les installations ou la<br />
vidéo, il existe souvent un aspect séduisant au premier abord, engendré<br />
par les couleurs, la sensualité, les formes douces et arrondies… mais<br />
au second, les images que j’offre à voir se changent en quelque chose<br />
de beaucoup plus inquiétant.<br />
Dans ce film, mêlant vidéo et animation, les protagonistes – fillettes<br />
un peu étranges – sont séduisantes et innocentes. Deux caractéristiques<br />
que l’on associe précisément et communément à cette époque<br />
de la vie. Mais finalement chaque petite scène se révèle cruelle et sanglante.<br />
Ici, on pourrait en effet faire une sorte d’analogie avec les prénoms<br />
d’Alain Séchas, deux des petites filles pourraient être Murder, l’une<br />
Suicide !<br />
Même si j’aborde des thèmes pas toujours très drôles, j’essaie de les<br />
traiter avec un soupçon d’humour, voire de cynisme.<br />
Très souvent les spectateurs rigolent face à ce film, notamment lors<br />
du gros plan sur les jambes poilues d’une des jeunes protagonistes !<br />
MG : Ce film ne me fait pas spécialement rire peut-être parce que<br />
j’écoute avec beaucoup d’attention les paroles de la chanson. Le<br />
lancinant Nobody cares quelle que soit la tentative d’épanchement<br />
avoue un insistant sentiment de solitude et cela malgré les dessins<br />
29
apparemment réjouissants. Ces yeux de la poupée de couleurs<br />
différentes qui s’ouvrent et se ferment jouent aussi le rôle d’un<br />
couperet.<br />
JS : Non il n’est pas spécialement drôle, mais il me fait rire ! enfin<br />
ça dépend des moments ! Si on le regarde vraiment en écoutant la<br />
musique et les paroles, alors il est franchement déprimant.<br />
Je voulais qu’une chanson soit spécialement écrite pour ce film.<br />
J’avais déjà collaboré plusieurs fois avec le compositeur Ramuntcho<br />
Matta, avec qui j’entretiens par ailleurs une relation privilégiée,<br />
pour des sons et installations sonores. Dans les années 80, il s’est<br />
fait connaître, entre autres, grâce à des tubes pop qu’il a écrit et<br />
composé. J’avais envie qu’il renoue avec la chanson et je savais<br />
que cet univers lui plairait. On a beaucoup parlé de ce que je voulais<br />
et de ce qui devait se dégager. Il a parfaitement collé à ma<br />
demande. Il est parti de phrases que je prononce quasi-quotidiennement<br />
! Car j’ai souvent l’impression que “nobody cares, nobody<br />
cares”.<br />
Paroles qui révèlent un sentiment certain de solitude ; solitude qui<br />
transparaît de manière récurrente dans mon travail. En 1999, par<br />
exemple, j’ai fait une vidéo intitulée Solitude. C’est un gros plan<br />
sur un médicament qui tombe dans un verre d’eau et qui se dissout<br />
lentement dans un bruit familier, comme un chuchotement. On<br />
sent la solitude liée à la maladie car finalement, dans la douleur,<br />
on est toujours seul, face à soi-même. Cette solitude est aussi présente<br />
dans bien d’autres vidéos telles The bath, In the plane ou encore<br />
Remote.<br />
Les yeux de la poupée s’ouvrent et se ferment, rythmant ainsi les<br />
mini narrations. Ce sont des histoires courtes, des rêves, des<br />
fantasmes, des sortes de carnets intimes. Ces yeux de couleurs<br />
différentes appartiennent-ils à la même ou à différentes fillettes ?<br />
Traduisent-ils différentes humeurs ou sont-ils l’expression des différentes<br />
facettes de nos personnalités ?<br />
30<br />
MG : Tu considères Come to me, 2003-04, comme un hommage à la<br />
poupée d’Hans Bellmer. En plus de cette indéniable référence, je<br />
pense aussi aux <strong>Video</strong>freex de David Cort, 1973 qui selon des
manipulations propres au matériel vidéo de l’époque et parfaitement<br />
expérimentales, qui m’échappent, parvient à formuler des<br />
figures grotesques. L’ambiance est plus cavalière, mais me fait<br />
aussi rebondir sur un de tes dessins : Triplet, 2004. Le corps érotisé<br />
de la femme est sans visage. Le corps démantelé est présent dans<br />
ton travail, tu m’as aussi évoqué ton intérêt pour l’univers<br />
d’Annette Messager…<br />
JS : Oui la référence à Bellmer est évidente. J’aime beaucoup son<br />
travail sur la poupée, cette ambiance à la fois ludique et perverse.<br />
Come to me est une sorte d’hommage à la poupée de Hans<br />
Bellmer. Forme plastique par excellence, la poupée est ici une chimère<br />
: corps de poupée et de femme, fragmentés, reflétés dans un<br />
miroir à l’horizontale, déployant sa théâtralité par la levée d’une<br />
porte de verre qui devient rideau de scène. Femme et<br />
poupée/baudruche se mêlent et se reflètent recréant la fameuse<br />
“boule de ventre” de Bellmer dont il a théorisé l’application –<br />
boule qui lui a été inspirée par le mécanisme de poupées en bois<br />
du XVI e siècle découvertes au Kaiser Friedrich Museum de Berlin.<br />
L’une des poupées a deux bassins et deux paires de jambes. C’est<br />
cette poupée en particulier qui est prise pour référence, évoquant<br />
la sensualité, la sexualité, la femme et ses paradoxes, ses ambiguïtés.<br />
C’est intéressant que tu mettes mon travail en relation aux années<br />
70 ; années que j’affectionne particulièrement. Je n’avais jamais<br />
fait le rapprochement avec les recherches de David Cort et de son<br />
groupe New Yorkais <strong>Video</strong>freex. Mais c’est vrai que leur langage<br />
pictural, totalement expérimental grâce au nouveau médium de la<br />
caméra vidéo est aussi lié à mon univers. Face à des séquences<br />
comme Expanding body parts, je me retrouve dans un univers<br />
familier : ce gros corps sur ces toutes petites jambes et cette<br />
jambe à la place du nez !<br />
Le corps démembré, disloqué, décousu, m’a toujours fasciné.<br />
C’est une des raisons pour laquelle je me suis fortement intéressée<br />
au travail d’Annette Messager car je retrouvais dans son travail<br />
beaucoup de choses proches du mien.<br />
Ce corps en morceaux ou rafistolé est omniprésent dans mon travail.<br />
Il est présent depuis toujours, surtout sous forme de métaphore<br />
avec l’utilisation à outrance du jouet. Les barbies se retrouvent avec<br />
des têtes de chiens en peluches, les ours avec des têtes de poupées…<br />
Du ludique, il s’érotise dans Made in Japan (c’est une série de photographies<br />
réalisée au Japon, à partir de porte-clés). Le corps est toujours<br />
montré en morceaux, en gros plan. Déformé.<br />
Mais c’est sûrement dans le dessin que ce corps se transforme le plus<br />
car ce médium permet une grande liberté. Mes dessins oscillent entre<br />
grotesque – la série des Petits monstres est issue de l’imagerie médiévale<br />
où humain et animal se mêlent, fantasmagorique, cru, sanglant, mais<br />
aussi sensuel voire érotique comme tu le soulignes. Dans Triplet, les<br />
corps sont sans tête et s’emboîtent comme un corps unique. Pour moi<br />
ce dessin est très poétique, l’ondulation des corps suggère une musique.<br />
Beaucoup de mes dessins tournent autour de ce corps que l’on pique,<br />
que l’on découpe, que l’on pend, que l’on électrocute… Mais la plupart<br />
du temps avec une certaine distance et une forme d’humour !<br />
31
32<br />
En fait, le corps même absent est toujours présent – comme dans<br />
tous les travaux que j’appelle “aliénation”. Quand je travaille sur<br />
le médicament, c’est du corps dont je parle. Ce corps malade, ce<br />
corps des XX e et XXI e siècles ! Ce corps que l’on soigne, que l’on<br />
vitamine, que l’on maltraite, que l’on corrige, qu’on lipo-suce,<br />
que l’on botoxe !<br />
Dans La maison malade ou Salle capitonnée, le corps est partout,<br />
derrière toutes ces boîtes collectées auprès des hôpitaux, de particuliers…<br />
qui ont circulé de main en main. Ou encore derrière ces<br />
coussins transparents qui suggèrent toutes nos obsessions pour<br />
nous rendre mieux, plus “beau”, plus jeune… qui évoquent nos<br />
rituels quotidiens.<br />
Finalement, quel que soit le médium, c’est de la même chose dont<br />
je parle.<br />
MG : La modification du corps est au cœur de tes préoccupations…<br />
JS : Mais ce fantasme du corps modifié n’est pas nouveau puisque<br />
depuis toujours, l’Homme a cherché à se transformer - déformation<br />
du cou et des épaules (les femmes Padaung en Birmanie), des<br />
pieds en Asie… La meilleure représentation de ce fantasme se<br />
matérialise en “nos” super-héros . Car ceux-ci sont bien des êtres<br />
sans intérêt particulier qui se muent en d’incroyables créatures<br />
dotées de pouvoirs exceptionnels ! Ou encore anti-héros, puisque<br />
le Frankenstein de Mary W. Shelley du début XIXe est l’incarnation<br />
même du fantasme de toute-puissance ! Dans Come to me, ce<br />
corps/baudruche n’est plus que partiellement humain. Cet être<br />
monstrueux se pose en réaction aux délires de la biotechnologie<br />
qui pousse sans cesse les limites du corps. Interventions de nature<br />
mécanique visant à améliorer la vie ou de nature esthétique<br />
– augmentations mammaire, ponctions de graisse… ou encore corrections<br />
du nombril ! L’homme ne cherche donc pas seulement à<br />
rétablir un état “naturel” mais à élever le corps au-dessus de ses<br />
propriétés naturelles. Le jeu de miroir qui dédouble les paires de<br />
jambes pose quant à lui la question du clonage. Ce corps érotisé,<br />
théâtre de manipulations illimitées avance au ralenti : que deviendrons-nous<br />
?<br />
MG : La dimension érotique du corps est particulièrement jouée<br />
dans Dissolution…<br />
JS : Oui c’est vrai, dans Dissolution le corps est érotisé. Un jour, à<br />
l’étranger, je découvre ce produit – c’est un dissolvant – et je suis<br />
tout de suite fascinée par cet objet que je trouve complètement<br />
incongru, étonnant et drôle. Dans le film, on voit juste les mains<br />
d’une femme aux ongles rouges. Ces doigts plongent un par un dans<br />
un pot de manière très sensuelle, voire hypnotisante. La métaphore<br />
est évidente. Mais tout au long de cette sorte de narration, je pose<br />
des questions sur la place de la femme et de la relation à l’autre<br />
sexe ; de solitude – celle de la femme confuse dans son rôle de<br />
femme, entre acceptation et refus.<br />
Le choix de la couleur rouge est significatif. C’est la couleur de<br />
l’amour, de la fatalité mais c’est aussi la couleur du sang. Ce rouge<br />
renvoie au corps, au rythme qui lui est chaque mois imposé. Il renvoie<br />
à la vie et à la douleur. C’est un film sensuel et séduisant mais<br />
aussi très froid et très violent… tout en étant une ode au plaisir.<br />
entretien réalisé en juin 2005
MERCREDI 22 MARS <strong>2006</strong> A 13 H 30. TOURCOING, IUT B LILLE INFOCOMMUNICATION<br />
35 RUE SAINTE BARBE – 59200 TOURCOING – + 33 3 20 76 25 00<br />
W H AT ’ S A B O U T<br />
UTILISER LE MÉDIUM VIDÉO<br />
Ellie Rees<br />
She<br />
2003, 3 mn 10<br />
Elvis Costello entonne de sa voix sirupeuse She : “She/May be<br />
the face I can’t forget./… May be the beauty or the beast./…<br />
May turn each day into heaven or a hell/… A smile reflected in<br />
a stream… She may not be what she may seem/ Inside her<br />
shell…”. Face à l’écran, immobile et impassible, l’artiste se<br />
livre à une libre interprétation des paroles. Ce classique de la<br />
séduction féminine fantasmée est revisité par l’artiste dans un<br />
autofilmage qui ne craint pas la défiguration…<br />
Erica Scourti<br />
Trailers I, II and III<br />
2004, 2 x 2 mn<br />
Les trois films sont réalisés à partir de bandes-annonces de<br />
cinéma. Dans un flot continu et agressif, sans nuance, le nouveau<br />
montage d’Erica Scourti propose une narration qui pointe<br />
le formatage du langage cinématographique. Chaque message<br />
emprunté à des annonces de films différentes s’enchaîne sans<br />
distinction ni rupture.<br />
33
Nick Jordan<br />
Fury<br />
2003, 5 mn<br />
34<br />
Le film débute par des images d’un village français et insensiblement<br />
la caméra pénètre dans une maison. Une jeune femme à la<br />
fenêtre matérialise la lisière entre l’intérieur et l’extérieur et<br />
ponctue ce point de vue classique. Une scène paisible, la jeune<br />
femme est endormie. Des mouches s’affairent autour de restes et<br />
d’ustensiles dispersés sur la table. Les cigales chantent. Mais peu<br />
à peu dans cette “nature morte”, aux fruits rutilants, les mouches<br />
sont menacées par une lutte pour leur survie. Certaines d’entre<br />
elles s’esquintent déjà sur un ruban adhésif suspendu au plafond<br />
comme une potence avant de périr. Le film a gagné son titre Fury,<br />
comme Havanazephir, p.7, qui tire son nom de la marque du ventilateur.<br />
Dans son film Nick Jordan utilise comme point de départ<br />
un élément de la vie de tous les jours. Il observe une scène a priori<br />
banale et lui insuffle une dimension dramatique. D’une apparente<br />
simplicité, ce film est tout sauf anodin.<br />
Cécile Paris<br />
Bianca<br />
2002, 3 mn 18<br />
Dans Bianca, le skateur glisse devant la caméra dans une lumière<br />
crépusculaire, saute de son skate et s’en va en courant. Il y a toujours<br />
un flottement puis une accélération finale… Cette disparition<br />
de la figure à la fin du film est une récurrence dans les dernières<br />
productions de Cécile Paris. “C’est cette idée d’entrer dans un<br />
autre monde que le changement de rythme amène, le skateur de<br />
Bianca s’enfonce dans la nuit pour ne devenir qu’un point blanc.<br />
Il quitte la représentation figurative pour aller vers une forme<br />
d’abstraction, un point blanc sur fond noir. Ce sont les limites de<br />
la vision qui sont posées là aussi tout simplement. Et l’accélération<br />
arrive toujours avant la chute, la disparition”.<br />
Cécile Paris, extrait d’un entretien à paraître
Luke Marsh<br />
Switches,<br />
20 , 7 mn 20<br />
Le film d’animation de Luke Marsh développe un espace imaginaire<br />
et un récit autour de la notion d’interruptions. L’interrupteur est<br />
une métaphore. Être connecté, déconnecté ; entrer, sortir ; s’arrêter,<br />
démarrer ; toute action est suivie d’une pause. Le glissement d’un<br />
espace à un autre soutient une réflexion sur un mode interrogatif<br />
où il est avant tout question de filiation.<br />
Ilka Schulz<br />
Europacup<br />
2005, 7 mn<br />
Le 29 mai 1985, la Juventus de Turin rencontre l’équipe de<br />
Liverpool au stade Heysel à Bruxelles, en coupe européenne. Le<br />
bilan est lourd : 39 morts. Vingt ans plus tard, en 2005, Liverpool<br />
rencontre une autre équipe italienne Milan toujours en coupe européenne…<br />
Des images fixes, des noirs, des textes s’entrecroisent et<br />
des enregistrements médiatiques de 1985 sont plaqués sur des images<br />
de 2005. Tout au long du film une tension est ménagée en réactualisant<br />
une rencontre sportive qui a précédemment tourné au<br />
drame. À tout moment le même débordement peut resurgir.<br />
35
JEUDI 23 MARS <strong>2006</strong> A 15 H. VALENCIENNES, ÉCOLE SUPÉRIEURE DES BEAUX ARTS<br />
132 AVENUE DU FAUBOURG DE CAMBRAI - 59300 VALENCIENNES - 03 27 22 57 59 - eba@ville-valenciennes.fr<br />
C H R I S T I A N M E R L H I O T<br />
S I L E N Z I O<br />
36<br />
Silenzio (2005, 75 mn) de Christian Merlhiot n’est pas un film parlant<br />
pas plus qu’un film muet. C’est un film au cours duquel l’échange<br />
de paroles ne constitue pas l’essentiel. Une fillette à l’orée de<br />
l’adolescence atterrit seule à l’aéroport de Fukuoka. Dès les<br />
premières images plane une dimension onirique. Un jeune garçon<br />
la rejoint et la mène à la résidence de son père, au sud de l’archipel.<br />
Ils ne partagent pas de langue commune. Cependant voyager<br />
ensemble forge entre eux des formes de connivences de plus en<br />
plus élaborées. La fillette lit dans un train, il glisse incidemment<br />
dans son livre ouvert une peau de banane qu’elle saisit imperturbable<br />
tout en continuant sa lecture. Cette subtile approche n’est<br />
qu’une amorce d’une intimité partagée qui, à la fin du film, trouve<br />
son apogée dans la quête des arbres sacrés à Yakushima. Ensemble,<br />
d’un pas accordé et déterminé, ils cheminent rattrapés épisodiquement<br />
par la brume ; unis tout autant que dissous. Le corps<br />
incliné, les mains pressées contre les troncs ; le voyage ne se limite<br />
plus à l’atteinte d’une destination. Il recouvre une communion<br />
quasi-initiatique. Cet accord se libère graduellement. Une traversée<br />
en bateau, en plan serré, rapproche les deux personnages. “J’ai besoin<br />
de te voir sourire, de t’entendre rire”… égrène le jeune homme,
le livre de l’adolescente à la main. L’élocution s’avère tout<br />
d’abord à peine compréhensible. Elle est corrigée, ajustée et en<br />
définitive comme traduite par la fillette. En reprenant possession de<br />
sa langue, c’est elle qui cette fois montre le chemin et qui délicatement<br />
guide le jeune homme. Ce n’est pas la première fois que<br />
Christian Merlhiot filme au Japon. Cet instant “hors de la langue”<br />
et rétabli par la fille fait écho au film Le voyage au Japon réalisé<br />
en 1999. Des étudiants japonais lisent phonétiquement des textes<br />
français qui dépeignent leur pays, sans pouvoir les décrypter. Ces<br />
lectures s’éloignent autant de notre langue que de la réalité du<br />
pays décrit. Christian Merlhiot s’attache ainsi à de purs instants<br />
flottants. Le jeune homme qui déchiffre quelques lignes du livre de<br />
l’adolescente sans préméditation s’aventure sur un terrain qui<br />
n’est pas en jeu entre eux. Il est rattrapé à son insu par quelques<br />
mots qui lui échappent. Plus loin vers la fin du voyage, en attendant<br />
l’arrivée du père, la fillette écoute de la musique sur le pas<br />
de la porte. D’un geste contrariant, le jeune homme éteint. Elle<br />
rallume. Il réagit à la musique et se met à danser. C’est elle qui<br />
éteint. S’instaure un jeu : l’adéquation du corps du jeune homme<br />
qui s’ébranle sur la musique et se fige sans le son comme une<br />
résurgence d’un chassé-croisé du jeu enfantin “un deux trois<br />
soleil”. L’écart des personnages se lit entre le balancement balbutiant<br />
du corps de la fille encore trop jeune pour organiser sa sensualité et<br />
les déplacements chorégraphiés du jeune homme, maîtrisés. C’est<br />
en l’absence de paroles que le corps se délie et cette réjouissance<br />
est communicative.<br />
MG
MERCREDI 3 MAI <strong>2006</strong> A 16 H 30. CALAIS, MUSÉE DES BEAUX-ARTS ET DE LA DENTELLE<br />
25 RUE RICHELIEU - 62100 CALAIS – 03 21 46 48 40<br />
C O M E A S Y O U A R E<br />
DES PORTRAITS FILMÉS : DÉPLACEMENTS, CONFRONTATIONS...<br />
Armelle Aulestia<br />
Trump Tower<br />
2004, 6 mn 30<br />
Trump Tower est agencé selon un ballet de mouvements et de croisements<br />
dans les différents plans de la scène : la profondeur (avec la déambulation<br />
des visiteurs), la largeur (à l’arrière-plan, avec la circulation<br />
urbaine), complétées par les deux portes à tambour vitrées qui font<br />
tourner l’espace à 360° sur lui-même. Le caractère de mise en scène<br />
propre à ce petit mélodrame ready-made en deux parties est souligné<br />
par un changement d’ambiance musicale. La première partie présente<br />
une conversation animée entre deux personnes, qui se conclut de<br />
manière plutôt véhémente. La seconde partie est un retour à la solitude<br />
et à la mélancolie du portier du Trump Tower.<br />
Armelle Aulestia<br />
38
Cécile Paris<br />
Le doorman<br />
2005, 4 mn 30<br />
Le bel été<br />
2004, 10 mn<br />
Mon scénario était d’imaginer des majorettes dans un autre contexte<br />
que celui de la rue, celui du défilé. J’ai pensé cette séquence sur<br />
une route de campagne. Elles sont comme tombées là, perdues. C’est<br />
la raison pour laquelle elles marchent normalement malgré leurs costumes.<br />
C’était difficile à réaliser, à croire que ce costume et le fait<br />
d’être ensemble renvoient automatiquement aux pas qu’elles connaissent.<br />
J’ai dû leur expliquer mon “histoire” et puis à force de recommencer<br />
les prises, elles sont devenues naturelles, elles ont réussi à<br />
oublier la caméra, le contexte et leurs costumes. C’est ce moment<br />
que j’ai gardé, d’ailleurs elles ont l’air fatiguées et c’est vrai, il faisait<br />
très chaud et ce tournage était dur pour elles. Quand je parle<br />
de libération, c’est par rapport à la contrainte du spectacle, celui des<br />
mouvements et de la performance qu’elles doivent réaliser quand elles<br />
défilent. Là, c’est plus une marche simple, où le groupe et la chorégraphie<br />
ne les contraignent plus.<br />
Cécile Paris, extrait d’un entretien à paraître<br />
J’ai travaillé avec Jim Hale autour d’un scénario qui tient en une<br />
ligne : un doorman, en uniforme marche le long de Battery Park (une<br />
promenade touristique à New York). Le soleil se couche et cet<br />
homme décide sans raison apparente de laisser tomber sa veste<br />
avant de quitter le champ de l’image. Jim s’est vraiment emparé du<br />
rôle, il a projeté plein de choses personnelles sur cette veste abandonnée<br />
au sol. Ensuite avec les images, j’ai repris ma collaboration<br />
avec Renaud Rudloft, musicien. On a travaillé par mail, je lui ai<br />
décrit l’ambiance, les couleurs, le rythme de la marche la durée et<br />
des qualificatifs comme western urbain… Renaud a composé à Paris<br />
une première ébauche, me l’a envoyée et j’ai pu travailler sur le<br />
montage en fonction de cette musique.<br />
Cécile Paris, extrait d’un entretien à paraître<br />
39
Christian Merlhiot<br />
Journal de l’Atlantique<br />
1995, 26 mn<br />
F o c u s<br />
Ce journal est filmé le long du littoral français entre la Belgique et<br />
L’Espagne. Il confronte des descriptions de bunkers allemands du<br />
“Mur de l’Atlantique” et des portraits d’habitants de l’arrière-pays.<br />
Est-ce l’absence de paroles qui nous autorise à y apposer les nôtres ?<br />
Le Journal de l’Atlantique, filmé en noir et blanc, se déploie tel un<br />
soubresaut de plans percutés. Ils défilent sans répit comme les archives<br />
d’un paysage sur le point de disparaître et qu’il serait urgent de retenir.<br />
Le film de Christian Merlhiot s’attaque à cela : la mémoire. Il semble<br />
répondre à l’impératif d’une impulsion qui ne nous est pas révélée.<br />
Mais l’invention d’un film est davantage soutenue par sa forme que par<br />
son intention. De la Mer du Nord à l’Atlantique un périple insatiable<br />
est entrepris. Systématiquement la caméra heurte, cogne comme ces<br />
vagues qui courent ou se déchaînent sous le vent. Aucun bunker édifié<br />
le long de cet insensé “mur de l’Atlantique” n’est épargné. Ils sont<br />
tous évalués à l’identique, d’après un relevé scrupuleux, méthodique<br />
et exhaustif malgré la transformation sensible du paysage à chaque<br />
prise. La caméra est engagée dans une lutte âpre avec les éléments.<br />
Le Havre, ville rasée pendant la deuxième guerre mondiale est livrée<br />
selon les axes orthogonaux de l’urbanisme de sa reconstruction emblématique.<br />
Ce type de pause qui exclut tout sentimentalisme est une des<br />
rares exceptions du film. Le parti pris d’images en saccades se déroule<br />
le long du vaste territoire littoral avec l’urgence de ne pas s’attarder<br />
et de s’en tenir strictement à la poursuite inextinguible de l’itinéraire<br />
répertorié. L’apparition soudaine de la Pointe Saint Mathieu ravive<br />
des mots entendus et si souvent répétés : “En face c’est l’Amérique”.<br />
À Brest, plus qu’ailleurs s’inventer un avenir tenait de la nécessité.<br />
Aller de l’avant cet impératif inculqué est directement éprouvé<br />
par le film. Le long de ce littoral inouï entre Belgique et Espagne<br />
le cheminement haletant façonne un rythme appuyé et soutenu.<br />
Toute la détermination de ces images ne supporte aucun arrêt. Le<br />
voyage de retour moins exalté s’accorde un répit dans la saisie de<br />
portraits d’habitants de l’arrière-pays. L’enregistrement fixe évalue<br />
d’autant mieux l’aspect temporel du portrait filmé. Les individus :<br />
hommes, femmes et enfants de tous âges accordent à la caméra<br />
quelques instants ni suspendus, ni dérobés. La diversité de ces<br />
visages animés et discrets constitue un pendant régénéré à ces<br />
architectures défensives imposantes et uniformes : stigmates<br />
bétonnés dont la caméra déduit peu à peu et d’un édifice à l’autre<br />
la dissolution dans le paysage. “Seul celui qui a du mal à parler a<br />
besoin d’un journal”, (Aharon Appelfeld, Histoire d’une vie, 2004).<br />
Le Journal de l’Atlantique dans son absence de paroles et sa mouvance<br />
exhale une grande pudeur. Le film éprouvé par le corps définit<br />
des formes abruptes et se focalise sur le mouvement de l’image.<br />
Les bruits de pas scandent l’arpentage de la côte et la respiration<br />
palpitante soutient l’existence des portraits. Le Journal de<br />
l’Atlantique est habité d’un présent brûlant prompt à une quête<br />
qui sans viser l’éternité l’ébranle.<br />
MG<br />
40
MERCREDI 3 MAI <strong>2006</strong> A 20 H 30. LILLE, CENTRE D’ARTS PLASTIQUES ET VISUELS<br />
4 RUE DES SARRAZINS - 59000 LILLE – 03 20 54 71 84<br />
1 + 1<br />
DANS UN NUMERO PRÉCÉDENT CONSACRÉ AUX “CORPS CÉLESTES”, (SAISON VIDEO N°23), DES<br />
DUOS D’ARTISTES ETAIENT ENVISAGÉS SELON L’ANGLE POSSIBLE DU DUEL. ICI IL S’AGIT DE LE<br />
PENSER EN TERME DE “NARRATION ENRICHIE”. L’OCCASION DE RETROUVER FRANCK TURPIN,<br />
MAIS CETTE FOIS ASSOCIÉ À FRÉDÉRIQUE LECERF ET DE POURSUIVRE L’EXPÉRIMENTATION<br />
AMORCÉE AVEC LES JEUNES ARTISTES BÉNEDICTE FOUQUE ET PERRINE BUTZ, LA SAISON<br />
DERNIÈRE, AU MÊME ENDROIT.<br />
Frédérique Lecerf & Franck Turpin<br />
Fantasy<br />
2005, 30 mn<br />
Fantasy est un film réalisé lors d’une résidence au “Once Upon a<br />
Time art foundation château” de la Napoule. À travers cette nouvelle<br />
collaboration, le film constitue une poursuite du travail de<br />
Frédérique Lecerf mais un déplacement pour Franck Turpin. En<br />
effet, pour la première fois il ne collabore pas avec son jumeau et<br />
part en résidence. Ce film recèle d’accords, de sympathies et de<br />
défiances. Frédérique Lecerf relate la collaboration avec les écrivains<br />
résidants, livrant leur expérience du lieu dans lequel se<br />
déplacent en harmonie, s’évitant pour mieux se retrouver, les deux<br />
artistes.<br />
42
Fantasy<br />
Fantasy a été élaboré à la suite d’un projet de “cachotteries sans<br />
visage”, lié entre autres à ce que nous vivions chacun dans notre<br />
vie. Puis sur place le projet a évolué. Le château nous a semblé de<br />
manière évidente le décor de cette narration. Narration de deux<br />
personnages aux visages cachés qui se ressemblent tout en étant<br />
tellement différents et qui donne lieu à des passages, des déambulations,<br />
des croisements, des mystères...<br />
Nous avons demandé aux résidents écrivains et anglophones de<br />
collaborer par des textes à cette narration visuelle. Nous étions<br />
onze résidents de nationalités différentes et étions les deux seuls<br />
français. Les cinq écrivains anglophones ont donc collaboré : certains<br />
en écrivant spécialement des textes liés aux images et d’autres liés<br />
au château et à leur propre résidence d’écrivains.<br />
Mariko Nagai, japonaise et écrivaine anglophone de fiction, avait<br />
une voix grave et incroyablement belle. Nous lui avons demandé de<br />
faire le voice-over de tous les textes. Son anglais est juste mais<br />
avec un petit accent ni anglais ni américain. C’est la raison pour<br />
laquelle la prononciation n’est pas parfaite, mais cela participait à<br />
la constitution du mystère. Le poète Richard Foerster est américain<br />
du Maine, il nous a proposé ses poèmes écrits sur place et a<br />
écrit aussi le texte de présentation du film. Hillary Jordan de New-<br />
York est une écrivaine de fiction mais qui s’inspire toujours d’un<br />
fond d’Amérique profonde. Elle a spécialement écrit sur la notion<br />
de cachotterie et de déception. Elle nous a beaucoup aidé sur le<br />
projet car elle parlait très bien français. Les écrits de la japonaise<br />
Mariko Nagai sont totalement liés au Japon de son enfance et les<br />
relations entre les êtres. Elle nous a proposé des textes écrits en<br />
relation directe avec les images et la narration est aussi en relation<br />
à nos vies à tous les deux. Se situant entre la nouvelle et la poésie ;<br />
les écrits de l’Indienne Sharmistha Mohanty parlent de l’Inde et<br />
des relations familiales. Elle nous a proposés des textes déjà existants<br />
liés à la cachotterie. Anne Fessenden est une écrivaine de<br />
92 ans vivant à New York, elle a une écriture très “british”.<br />
Shakespearienne elle a proposé sa collaboration et a partagé son<br />
écriture entre les images du film et le château. Ce fut une très<br />
belle expérience. Les textes existent en parallèle aux images. Ils<br />
ne sont pas des commentaires. Il n’y aura donc jamais de soustitres…<br />
Cachotteries sans visage demeure le projet et de l’expérience<br />
est né le film Fantasy.<br />
Frédérique Lecerf<br />
43
Michael Cousin & Steve Brown<br />
Intraviolence<br />
2003, 10 mn<br />
Travailler en duo n’est pas un postulat pour Michael Cousin. Cette<br />
collaboration avec Steve Brown est exceptionnelle. En temps réel<br />
et simulant le ralenti, ils se livrent à des combats empruntés à cinq<br />
films classiques (Cape Fear, The Maltese Falcon, Point Blank, Scum<br />
et Shane) sans le risque et la réalité de la douleur, de l’humiliation,<br />
et de la mort. Cinq combats d’acteurs sont réinterprétés :<br />
Gregory Peck contre Robert Mitchum en 1962 ; Ray Winstone contre<br />
John Blundell en 1979 ; Alan Ladd contre Ben Johnson en 1953 ;<br />
Humphrey Bogart contre Peter Lorre en 1941 et Lee Marvin contre<br />
Angie Dickinson en 1967. Il s’agit avant tout de perpétuer des duos<br />
et des combats eux-mêmes fictionnels et le jeu entre les artistes<br />
accentuent dans le ralenti cette fiction.<br />
44
Butz & Fouque<br />
Fontaine<br />
2005, 4 mn<br />
Dans le décor de l’EPSM d’Armentières, Fontaine nous expose à une<br />
schizophrénie du quotidien : un dédoublement de la personnalité se<br />
traduisant, pour l’une, à une sage passivité (im)mobilière et, pour<br />
l’autre, à une suractivité lors d’un pantomime de tâches ménagères.<br />
Les gestes se succèdent toujours plus absurdes et obsessionnels<br />
jusqu’au rejet. Butz & Fouque illustrent dans un univers glacial<br />
une scène de la petite folie ordinaire que le vernis des accessoires<br />
féminins ne parvient pas à dissimuler.<br />
Aérobic<br />
2005,1 mn 40<br />
Un jeu de cache-cache ou une autre obsession domestique pour le<br />
rangement ? Ici, ce ne sont pas des fantômes que cache le placard<br />
mais une multiplication d’entités perruquées qui envahissent l’espace<br />
et l’habitent. Il n’y a plus d’individu ni de personnalité mais des<br />
pantins qui se plient parfaitement au cadre de l’étagère et disparaissent<br />
derrière les portes. Mais cet ordre n’est qu'apparent, le<br />
débordement menace.<br />
46
Paulagabriela<br />
Tubtunel<br />
2003, 4 mn 27<br />
La théorie géométrique déclare qu’une ligne droite n’est qu’un<br />
segment de la courbe d’un rayon infini. Ainsi, chaque élément d’un<br />
espace est inséré dans des courbes, ou plus simplement, dans des<br />
tubes. Dans le champ des arts, nous sommes l’unité, devenant une<br />
seule artiste, Paulagabriela ; ensemble nous représentons une<br />
union/connexion comme un point de départ à la vie elle-même.<br />
Nous dépendons en permanence de ce lien. Ces tubes relient et<br />
entourent, de l’intérieur vers l’extérieur, de l’extérieur vers l’intérieur,<br />
du corps vers l’immatérialité et vice versa.<br />
Nous sommes unies par la chance, par le fait même d’être de ce<br />
monde, et nous sommes arrivées ici par des voies qui sont elles<br />
aussi des tubes, associant et séparant les vies, les lieux… Pour nous<br />
tubes = tout.<br />
Paulagabriela<br />
Nas nuvens<br />
2001, 4 mn 27<br />
Cette vidéo déborde d’énergie. Cette constante des implications<br />
duelles de Paulagabriela met en jeu des forces attractives. Des<br />
mouvements ascensionnels accordés élèvent les corps des deux<br />
femmes vers les nuages. Une tentation d’échapper à la force de<br />
gravité dans un élan sans cesse reconduit.<br />
47
JEUDI 4 MAI <strong>2006</strong> A 18 H 30. DUNKERQUE, LAAC<br />
JARDIN DES SCULPTURES - 59140 DUNKERQUE – +33 3 28 29 56 00 - musee@ville-dunkerque.fr<br />
P O I N T O F V I E W # 2<br />
CE PROGRAMME EMANE D’UN REGARD PORTE SUR LA CREATION ARTISTIQUE ANGLAISE DANS LE CADRE D’UN PARTENARIAT (INTERREG IIIA)<br />
ENTRE LA GALERIE FABRICA ET LA BIENNALE DE LA PHOTOGRAPHIE DE BRIGHTON, L’ESPACE CROISE ET LA SAISON VIDÉO. CE PROGRAMME<br />
NE REPOND A AUCUNE THEMATIQUE PARTICULIERE ET SE LIVRE A LA PROSPECTION, AU DESIR DE FAIRE VOIR.<br />
48<br />
Konrad Johan Welz<br />
Seagull<br />
2001, 1 mn 54<br />
Une vue de Brighton d’un point de vue très particulier et très en<br />
hauteur. Vision plongeante de la mer sur le front côtier et la plage.<br />
Nontope / Ontope<br />
2001, 6 mn 23<br />
Afin de rendre les courts séjours dans les aéroports internationaux aussi<br />
plaisants que possible, les terminaux contiennent plus au moins toutes les<br />
commodités nécessaires aux besoins de tous les jours. Si l’on doit passer<br />
un moment plus long dans ces espaces de transit ; l’étrangeté de cette<br />
simulation de ville s’avère de plus en plus apparente. Statistiquement le<br />
terminal est constamment occupé par des gens, mais personne n’y réside<br />
suffisamment longtemps pour y laisser une marque et l’édifice demeure<br />
l’enveloppe fonctionnelle que les architectes et les ingénieurs ont planifiée.<br />
Cette vidéo enregistrée dans la nuit du 19 au 20 juillet 2000 oscille<br />
entre les sensations de présence et d’absence. Un son spécifique a été<br />
créé proche de la vibration d’un cœur. Il accompagne l’apparition des<br />
images fixes utilisées afin d’éviter la distraction du mouvement.
Ben Judd<br />
I remember (Cindy Sherman)<br />
2000, 4 mn 50<br />
L’artiste observe des passantes anonymes dans la rue et décrit leurs<br />
gestes, leurs attitudes, leurs accessoires. Chacune est dotée par l’artiste<br />
d’un visage découpé représentant Cindy Sherman, l’artiste anglaise<br />
qui dans ses photographies se crée un personnage de fiction. Cette<br />
intervention discrète subtilise l’identité de chacune à son insu.<br />
Theodore Tagholm<br />
The persistence of vision<br />
2004, 6 mn<br />
Le titre du film fait référence à un effet optique qui permet au cerveau<br />
de voir des images fixes comme si elles étaient animées. Le film est<br />
réalisé avec une caméra numérique selon un principe d’imbrication<br />
d’images successives. Son principe de l’espace public à l’espace privé<br />
repose sur l’observation d’un objet et sa mise au point. La caméra<br />
tourne autour des différents objets et révèle des détails que les films<br />
généralement négligent. Theodore Tagholm reconnait l’influence de<br />
George Perec dans cette observation fine. Le film interroge l’acte de<br />
percevoir, la problématisation de la photographie et la nature de la<br />
mémoire.<br />
Mateo Willis<br />
2EYESopen<br />
2004, 4 mn 53<br />
Mateo Willis se place dans la foule. D’un côté il est un observateur subjectif,<br />
mais de l’autre son travail est partiellement réalisé d’après le<br />
point de vue objectif de sa caméra. 2EYESopen est élaboré à l’occasion de<br />
la première du film de Tom Cruise Collateral. La foule s’agite dans l’attente<br />
de l’arrivée de l’acteur. Tout le monde se presse pour approcher<br />
au plus près la star. Les éventuels débordements d’hystérie semblent<br />
contrôlés par le service d’ordre. Mais à la fois l’apparition d’une star<br />
dans l’espace public ne serait rien sans cela. Ce film teste la permissivité<br />
des comportements. Un jeune homme contrevenant – mais dont l’allure<br />
finalement n’est pas si différente de celle de Tom Cruise - est entraîné<br />
à l’écart par des policiers. Mains liées dans le dos il est maintenu au sol.
Christian Glaeser<br />
Mostar Bridge<br />
2004, 6 mn<br />
Deux collages de Films super 8 des années cinquante et soixante.<br />
Compétition annuelle de plongeon du pont historique de Mostar en<br />
Bosnie Herzégovine. Détruit pendant la guerre des Balkans, ce pont<br />
reliait le quartier musulman de la ville au quartier chrétien. Ce<br />
film tient à célébrer l’histoire de la compétition.<br />
Jonas Halfmeyer<br />
Bridge<br />
2004, 2 mn 16<br />
Le film en noir et blanc très sensitif, grainé,<br />
tramé expérimente la traversée d’un pont. Il<br />
enregistre des lignes superposées et croisées.<br />
Aucun véhicule n’est visible. La circulation est<br />
un souffle, une abstraction dans laquelle se<br />
confondent les véhicules et le vent.<br />
Nick Jordan<br />
Highwater everywhere part 2<br />
2003, 6 mn 30<br />
words & music by Charley Patton<br />
50<br />
La voix mystérieuse de Charley Patton, laissé-pour-compte et cependant à l’origine<br />
de la tradition du Blues du Mississippi berce les berges du marécage d’un<br />
parc de Manchester et transporte cette vision proche vers un ailleurs lointain,<br />
exotique. Elle transforme ces points de vues stables en visions lancinantes.
James Stokes<br />
Joining their forces and singing along<br />
2003, 2 mn 50<br />
Le film noir et blanc est découpé en deux verticalement, horizontalement<br />
et en diagonale. Il met en parallèle les différences de<br />
textures entre le film 16 mn et la vidéo, diffusés en même temps<br />
et retraçant des sujets similaires. Les deux tournages comparables<br />
révèlent cependant dans cette juxtaposition la qualité relative de<br />
chaque médium. Des fragments de paysages et de corps, des<br />
images télévisées se succèdent. Des lignes parallèles circulent d’un<br />
espace intime à l’espace public. Une voix fredonne une chanson,<br />
oubliant certains mots et accentuant d’autres, dans cette approximation<br />
personnelle elle participe à la poursuite du film.<br />
Annis Joslin<br />
Suppose<br />
2004, 3 mn 24<br />
Le film révèle les pensées d’une jeune femme couchée. À<br />
chaque changement de plan, son visage fait place à un objet et<br />
la même voix déclare sans trop y croire “suppose ceci… suppose<br />
cela”. Toute nouvelle supposition est une orientation qui<br />
dévie de la précédente. Le réel désir est mis à mal par le désœuvrement.<br />
L’infinie possibilité des choix est soldée par une<br />
impossibilité de prise de décision.<br />
51
Monserrat Rubio<br />
Mnemographs<br />
2005, 7 mn 27<br />
Le film partagé en deux séquences musicales a trait à la mémoire.<br />
Le récit glisse sur des rails et se remémore des littoraux surexposés<br />
où des couchers de soleil sont imprimés sur les images griffées, de<br />
super 8. Des souvenirs lancinants soutenus tout autant par l’image<br />
que la chanson laconique. La mélancolie recouvre les paysages<br />
hispaniques qui tentent de ne pas s’effacer.<br />
52<br />
Steve Hines<br />
8 x 8<br />
2002, 12 mn 35<br />
Ce film est une version raccourcie d’une performance filmée en<br />
temps réel et qui a duré dix heures. Dans ce condensé une minute<br />
de l’action est captée chaque heure. L’artiste s’est inspiré d’expériences<br />
de la vie courante dans lesquelles des efforts physiques ou<br />
psychiques nous conduisent vers des situations infructueuses. Le<br />
sens commun devrait nous exhorter à arrêter mais cependant<br />
quelque chose d’indéfinissable, un acharnement stupide nous<br />
incite à poursuivre jusqu’à l’impasse. Creuser son trou est ici interprété<br />
par l’artiste au premier degré avec un certain brillo. Au final<br />
l’acharnement du geste rend la sortie impossible.
6 MAI - 17 JUIN <strong>2006</strong>. ARMENTIERES, LE VIVAT<br />
PLACE SAINT-VAAST - 59280 ARMENTIÈRES – +33 3 20 77 18 77<br />
E L S A G A U D E F R O Y<br />
EXPOSITION<br />
vernissage le vendredi 5 mai à 19 H.<br />
Personne naît parfait est une installation vidéo dont la question<br />
principale est l’identité de l’être humain dans un corps collectif ;<br />
va et vient constant entre l’adaptation biologique et l’adaptation<br />
sociale. Ce projet s’inscrit dans le cadre de ma résidence d’artiste<br />
au Vivat d’Armentières. Les vidéos ont été créées à partir d’un<br />
tournage de film* avec les habitants d’Armentières, dans l’architecture<br />
de la Maison des artistes, ancien pavillon psychiatrique qui<br />
abritait des patients. Ce projet est influencé par les événements<br />
extérieurs et les rencontres, par l’histoire du lieu. Le montage<br />
final est constitué presque essentiellement de plans-séquences<br />
sous la forme d’improvisations collectives à la croisée de la performance,<br />
de la danse et du théâtre. Les participants sont invités à<br />
jouer des scénarios plutôt burlesques liés à des situations de jeux<br />
collectifs, en portant un masque d’un seul et même individu.<br />
L’idée du jeu collectif permet ainsi à chaque personne de mieux<br />
s’effacer derrière le groupe et de toucher à quelque chose de franc<br />
et ludique. Il s’agit, au-delà de mettre les gens en situation, de les<br />
inviter à être dans une dimension “active” de la sensibilité en se<br />
concentrant sur l’inconscience des corps, avec la générosité nécessaire<br />
pour une véritable réciprocité. L’ensemble de ces vidéos est<br />
intégré à une scénographie : une installation conçue spécialement<br />
pour le hall du Vivat.<br />
Elsa Gaudefroy<br />
* Tournage du 14 au 17 février <strong>2006</strong> en collaboration avec une artiste<br />
vidéaste de Marseille, Virginie Hochedez.<br />
53
13 MAI – 20 MAI <strong>2006</strong>. ROUBAIX, ESPACE CROISÉ<br />
GRAND PLACE - 59100 ROUBAIX - +33 3 20 66 46 93 - www.espacecroise.com<br />
I D E A L # 0 8<br />
DU MARDI AU SAMEDI DE 14 H A 18 H<br />
NOUS AVONS AIMÉ… CES FILMS QUE NOUS AVONS VU DANS DES OCCASIONS DIVERSES OU QUI NOUS<br />
SONT PARVENUS. UNE TOTALE SUBJECTIVITÉ.<br />
Laurent Mareschal<br />
Ligne verte<br />
2005, 4 mn<br />
production Le Fresnoy, Studio national des arts contemporains<br />
Une fresque peinte sur un mur défile lentement en gros plan sous<br />
nos yeux, comme un énième épisode de Palette. Cette peinture en<br />
trompe-l’œil représente le paysage derrière ce mur. Elle le nie.<br />
Mais en plus, elle se rebelle contre lui, quand les cactus et les oliviers<br />
qui la composent se mettent à vivre et à bouger (animation<br />
en images de synthèse). Ils détruisent leur support. C’est comme<br />
si la végétation poussait à l’intérieur de l’obstacle pour mieux le<br />
dynamiter… Ce mur, est celui qui sépare Israël de la Palestine. À<br />
aucun moment du film, on ne sait de quel côté on se trouve, aucun<br />
bâtiment ni personne ne nous l’indique clairement, jusqu’à la fin<br />
où l’on entend des voix s’exprimer en hébreu et arabe…<br />
Laurent Mareschal<br />
54
Agnieszka Kalinowska<br />
Emergency exit<br />
2003, 10 mn<br />
L’image est fixe et obscure. Seul un fronton de cheminée<br />
dégage une peu de lumière. À intervalle régulier, et<br />
l’un après l’autre, des corps parcourent à la force des<br />
mains accrochés à l’imposte et les jambes ballantes<br />
cette zone faiblement éclairée. Cette traversée horizontale<br />
de l’image s’avère tout aussi énigmatique que<br />
la progression verticale de la chaîne humaine dans<br />
son autre film Personal doping (p. 13). D’où viennent<br />
ces jeunes gens et où vont-ils ? Le film se déroule hors<br />
temps, hors contexte. Malgré le titre qui pourrait laisser<br />
supposer un état de panique ; leur progression est<br />
constante mais volontaire et appuyée. Une énergie se<br />
déploie sans faille. Des voix de l’extérieur semblent<br />
s’adresser à eux : "Hey people ! "<br />
55
Fanny Adler<br />
Transhumance<br />
2005, 1 mn<br />
Jessika Laranjo<br />
L’inopiné<br />
2005, 16 mn 20<br />
Une situation incongrue : sous couvert de dentelles blanches.<br />
Un importun clinquant en costume trois pièces ; vêtement ambigu,<br />
oscillant entre le proprement ridicule et le très certainement joli.<br />
Du Dandy aux personnages burlesques, on regarde un individu qui<br />
ne fait rien, observe, qui pose, se déplace ou s’excite tout au plus.<br />
Dans sa ballade, il arpente des territoires complètement déserts<br />
comme abandonnés, comme s’il s’agissait d’en prendre possession,<br />
de les mesurer ou d’y chercher un adversaire.<br />
Comme s’il s’agissait de se sentir : s’anime, se meut, s’incite, se<br />
stimule, s’encourage à tous vents. Une représentation silencieuse,<br />
dans l’attente. Un protagoniste du vide, qui meuble, remue les<br />
nappes d’air. Un temps indéfinissable, se situant entre silence et<br />
tintamarre, baigné de paysages, habité par l’incongru.<br />
Le champ d’action se déploie presque maladivement, l’acte est là,<br />
sans suite, étrangement dérisoire.<br />
Jessika Laranjo<br />
Transhumance est une odyssée, un travelling en décor artificiel.<br />
Une fresque à travers la faune, la flore et la géographie de<br />
l’Amérique du Nord : on y rencontre des animaux naturalisés et mis<br />
en scène dans différentes attitudes, des paysages peints en trompe<br />
l’œil qui résonnent comme autant de clichés cinématographiques.<br />
Nature et culture, illusion et réel, un peu du cinéma des grands<br />
espaces et du mythe du jardin d’Eden.<br />
Fanny Adler<br />
56
Armelle Aulestia<br />
Cache-cache Voice-over 1<br />
2004, 4 mn 40<br />
Jean Baptiste Delannoy<br />
L’ascenseur<br />
2005, 9 mn 43<br />
Ce court-métrage raconte les (més)aventures au petit matin d’une<br />
équipe de tournage partie chercher “le silence” dans un ascenseur polonais.<br />
J’ai réalisé cette vidéo dans le cadre d’un Master de Réalisation<br />
de film, section documentaire, à l’Andrzej Wajda Master School of Film<br />
Directing, à Varsovie, grâce à une bourse du CNC, l’année dernière.<br />
Le dispositif simple du film (plan fixe frontal et face à la porte) permet,<br />
au sein de ce no man’s land du quotidien, dans cet espace minimal, de<br />
montrer sous un angle original le visage d’une Pologne dont le basculement<br />
récent dans l’ultralibéralisme engendre, comme chez nous et ailleurs,<br />
une perte de communication entre individus. Au-delà de ce<br />
constat, il s’agissait pour moi, français pratiquant mal le Polonais, de<br />
trouver une situation universelle me permettant de questionner cinématographiquement<br />
la relation public/privé, d’interroger la frontière.<br />
À ce titre, en raison des réactions que le dispositif dans l’ascenseur suscite,<br />
le film dépasse le simple documentaire, pour devenir un objet drôle,<br />
absurde et tragique à la fois.<br />
Jean Baptiste Delannoy<br />
À partir du jeu de cache-cache (hide and seek), ces pièces sont des<br />
variations d’inspiration psychédélique, où les rythmes des sons et<br />
des couleurs se croisent, se décalent, se dissocient ou bien se<br />
rejoignent, provoquant une sensation hypnotique, presque hallucinatoire.<br />
Expérience d’absorption, d’englobement du spectateur,<br />
d’étirement et de distorsion du temps et de la couleur.<br />
Armelle Aulestia<br />
57
20 MAI – 1 JUILLET <strong>2006</strong>. CAMBRAI, MAISON FALLEUR<br />
39 RUE SAINT GEORGES - 59400 CAMBRAI – +33 3 27 82 93 85 / 03 27 82 93 88<br />
PA R C O U R S # 2<br />
TROIS PROGRAMMES ACCOMPAGNENT L’EXPOSITION TRAVERSER LA<br />
VILLE SELON DIFFÉRENTS MODES D’APPROCHES : PRÉLÈVEMENTS ET<br />
TRANSFORMATION DU RÉEL, LIEUX D’ACTION ET DE FICTION.<br />
Rémi Ucheda<br />
Tapis Rouge<br />
2005, 3 mn 45<br />
DIFFUSION EN CONTINU DU MARDI AU SAMEDI DE 14 H A 18 H<br />
du 20 mai au 2 juin <strong>2006</strong><br />
Nick Jordan<br />
12 dogs<br />
2004, 3 mn 45<br />
words & music by Johnny Dowd<br />
“Across the mighty plains of Oklahoma blow the winds of insignificance”…<br />
Tout au long du film, les paroles d’une chanson de Johnny Dowd scandent<br />
les visions de trottoirs, de rues, de plaques d’égouts, et tous les sols<br />
urbains fréquentés par les résidents canins.<br />
58<br />
La vidéo, tournée à Bangkok, est ce passage qui vous mène de l’entrée<br />
vers l’intérieur. Ou plutôt la mise en place de ce tapis rouge, de ce<br />
chemin réservé à un meilleur accueil, pour des hôtes de prestige.<br />
Le paradoxe est qu’il prend place sur un sol mobile, flottant. Un ponton<br />
propice au mouvement, au déséquilibre des personnages installés. Ce<br />
tapis rouge, joue-t-il aussi, l’anti-dérapant, prévient-il d’un passage<br />
sans encombre garantissant une bonne tenue, un pied marin ? Tout est<br />
fait pour ne pas se prendre le pied dans le tapis.<br />
Rémi Uchéda
Anton Hecht<br />
Blinking Ballet<br />
2005, 5 mn 43<br />
Des personnes âgées sont sollicitées dans la rue. Leurs gestes sont<br />
chorégraphiés selon des déplacements simples qui donnent à la<br />
danse une dimension ludique et participative. Lever le bras, se<br />
tenir la main, faire quelque pas, ce qui relève du quotidien en définitive<br />
acquiert une dimension plastique. Une interprétation très<br />
libre et drôle de la réalité.<br />
Rokhshad Nourdeh<br />
I<br />
2003, 6 mn<br />
Un parcours urbain le long d’une ligne jaune. La caméra oscille et se déplace de part et d’autre<br />
de cette ligne. Dans ce tracé rectiligne apparaissent des réminiscences de paysages : la mer, la<br />
campagne, les nuages, parfaitement délimités… Autre élément naturel, le feu surgit et rompt<br />
l’uniformité des surfaces foulées.<br />
59
du 3 juin au 16 juin <strong>2006</strong><br />
Steve Hines<br />
Speakers<br />
2005, 4 mn 16<br />
Le film Speakers représente la confusion d’une société dans<br />
lequelle un nombre inqualifiable tout autant que diversifié<br />
de groupuscules religieux et politiques tente de persuader le<br />
reste du monde du bien fondé de sa pensée divergente.<br />
Chaque faction, la plupart du temps minoritaire tente de<br />
communiquer la supériorité de son mode de croyance. Ces<br />
prises de paroles publiques à Speakers Corner, Hyde Park,<br />
sont une véritable tradition à Londres. Le parti pris de montage<br />
sous forme de Kaleidoscope et d’images à tendance<br />
impressionniste, délibérément floues, ajoute à la confusion.<br />
17 juin au 1 juillet <strong>2006</strong><br />
Céline Huyghebaert<br />
Week-end à Zuydcoote, etc<br />
2005, 12 mn<br />
production Le Fresnoy, Studio national des arts contemporains<br />
Une jeune femme, une journée d’hiver, dans une ville engourdie,<br />
marche. Au cours de sa balade, et en travers, elle projette de passer<br />
prochainement un week-end à Zuydcoote sans avoir vu le film<br />
qui porte son nom. Ce film donne à voir en dix séquences le parcours<br />
d’une jeune femme sur une place publique entre un regroupement<br />
d’une douzaine de personnes autour d’un homme mort et<br />
un café ; dans lequel elle va entrer, puis duquel elle va ressortir.<br />
Faire d’un film (celui de Verneuil) un prétexte pour faire un film<br />
sans sujet qui ne s’intéresserait qu’à sa propre narrativité, une fiction<br />
qui ne renverrait qu’à elle-même…<br />
Céline Huyghebaert<br />
Armelle Aulestia<br />
Second Ride<br />
2004, 9 mn 25<br />
Un parcours en taxi dans Manhattan, de Soho à<br />
Chelsea, en écho au déplacement des galeries<br />
d’art durant les années 90. Assemblage de<br />
modules musicaux préfabriqués, la bande-son<br />
recrée l’ambiance intensément urbaine de ce<br />
trajet. Cette œuvre doit être diffusée avec un<br />
fort volume sonore.<br />
Armelle Aulestia<br />
60
24 JUIN <strong>2006</strong> À 21 H. LILLE, LA MALTERIE<br />
42 RUE KULHMANN – 59000 LILLE – +33 3 20 78 28 72<br />
A N TO I N E D E F O O RT<br />
ANTOINE DEFOORT EST UN ANCIEN ETUDIANT DE L’ÉCOLE DES BEAUX-ARTS DE VALENCIENNES. UN ATELIER<br />
EST ACTUELLEMENT MIS A SA DISPOSITION A LA MALTERIE. LA SAISON VIDEO LUI CONSACRE UNE SOIREE EN<br />
PROJETANT UNE SELECTION DE SES TRAVAUX (VIDEOS, CAPTATIONS DE PERFORMANCES, VIDEOS-PERFOR-<br />
MANCES) ET “D’EXPERIENCES EN DIRECT” (TERME QU’IL PREFERE EMPLOYER EN PLACE DE PERFORMANCE).<br />
Des chorales contraintes ou décalées, des bricolages autofictionnels ;<br />
des extractions des musiques de Psychose et du Mépris mises en scène<br />
dans des situations qui font plus que frôler l’absurde mais toujours parfaitement<br />
maîtrisées, minutieusement réécrites ; des relents de Bill<br />
Viola et de Boris Achour au travers de ses vidéos et performances…<br />
autant d’emprunts dans des créations ou des micro-phénomènes qui<br />
ont croisé sa route mais aussi celles de nombre d’entre nous. Antoine<br />
Defoort y pioche des éléments, interroge les interactions entre<br />
l’image, le langage et la musique. Confronter jusqu’à faire surgir des<br />
contradictions. Manipuler à l’extrême lors de vastes digressions. La<br />
diversité de ses références se retrouve dans la pluralité des formes de<br />
sa création : musique improvisée, performance, vidéo lui permettent<br />
toujours de tester, associer, dissocier des éléments disparates pour<br />
mieux en faire surgir les liens, faire éclater la conformation du<br />
contenu au contenant… “Ce qui m’intéresse, dans la vie, c’est faire<br />
des connexions. Des connexions de formes, de sens, de médias, de<br />
matériaux. Je suis une sorte de collectionneur de connexions. Je fais<br />
des collexions, quoi.” Ainsi donc, il “collexionne” jusqu’à tester le<br />
degré de porosité de la mince frontière entre son art et sa vie quotidienne.<br />
Comment le définir ? Sans doute par la ligne directrice qu’il a luimême<br />
énoncée : “l’inconstance est de rigueur”, exploiter jusqu’au<br />
bout son incapacité chronique à se fixer et en faire une source de<br />
création intarissable.<br />
HD<br />
61
Les artistes<br />
Fanny Adler, vit à Paris<br />
Armelle Aulestia, vit à Paris<br />
Gilles Balmet, vit à Paris<br />
Butz&Fouque, vivent à Saint-Omer<br />
José Pedro Cortes, vit à Lisbonne<br />
Michael Cousin, vit à Cardiff<br />
Antoine Defoort, vit à Lille<br />
Jean Baptiste Delannoy, vit à Paris<br />
Mathias Delfau, vit à Colombes<br />
Elsa Gaudefroy, vit à Lille<br />
Christian Glaeser, vit à Londres<br />
Patrice Goasduff, vit à Rennes<br />
Jonas Halfmeyer, vit à Londres<br />
Emma Hart, vit à Londres<br />
Anton Hecht, vit à Newcastle<br />
Camille Henrot, vit à Paris<br />
Steve Hines, vit à Londres<br />
Cécile Huyghebaert, vit à Lille<br />
Nick Jordan, vit à Manchester<br />
Annis Joslin, vit à Brighton<br />
Ben Judd, vit à Londres<br />
Agnieszka Kalinowska, vit à Varsovie<br />
Jessica Laranjo, vit à Dunkerque<br />
Frédérique Lecerf, vit à Paris<br />
Serge le Squer, vit à Marseille<br />
Laurent Mareschal, vit à Paris<br />
Luke Marsh, vit à Alderley Edge, Cheshire<br />
Jenny Mellings, vit à Exeter<br />
Christian Merlhiot, vit à Paris<br />
Eléonore de Montesquiou, vit entre Tallinn et Berlin<br />
Michelle Naismith, vit entre Nantes et Glasgow<br />
Rokhshad Nourdeh, vit à Paris<br />
Rashad Omar, vit à Brighton<br />
Predrag Pajdic, vit à Londres<br />
Paulagabriela, vivent à Sao Paulo<br />
Cécile Paris, vit à Paris<br />
Ellie Rees, vit à Londres<br />
Montserrat Rubio, vit à Ascot<br />
Alexandra Sà, vit à Montreuil<br />
Erica Scourti, vit à Seven Kings<br />
Amy Sharrocks, vit à Londres<br />
Ilka Schulz, vit à Liverpool<br />
Markus Soukup, vit à Liverpool<br />
Houri der Stepanian-Abdalian, vit en France et au Canada<br />
Tobias Sternberg, vit à Londres<br />
James Stokes, vit à Bath<br />
Jeanne Susplugas, vit à Paris<br />
Theodore Tagholm, vit à Londres<br />
The Miller and McAfee Press, vivent à Londres<br />
Franck Turpin, vit à Paris<br />
Rémi Ucheda, vit à Paris<br />
Yu-Chen Wang, vit à Londres<br />
Simon Warner, vit dans le West Yorshire<br />
Russell Webb, vit à Brighton<br />
Konrad Johan Welz, vit à Bracknell<br />
Mateo Willis, vit à Cranleigh<br />
62
Pour recevoir le programme <strong>Saison</strong> Vidéo à domicile :<br />
Prénom :<br />
Nom :<br />
Adresse :<br />
Code Postal :<br />
Ville :<br />
Pays :<br />
63
La <strong>Saison</strong> Vidéo a été créée en 1988<br />
Ce numéro est le trentième.<br />
S A I S O N V I D E O<br />
BP 71<br />
F - 59370 MONS EN BAROEUL<br />
Tel. +33 3 20 04 38 16 - email : <strong>saison</strong>video@netcourrier.com<br />
La <strong>Saison</strong> Vidéo remercie les artistes sans qui ces programmes vidéos n’auraient pas lieu :<br />
Fanny Adler, Armelle Aulestia, Gilles Balmet, Butz&Fouque, José Pedro Cortes, Michael Cousin, Antoine Defoort, Jean Baptiste<br />
Delannoy, Mathias Delfau, Elsa Gaudefroy, Christian Glaeser, Patrice Goasduff, Jonas Halfmeyer, Emma Hart, Anton Hecht, Camille<br />
Henrot, Steve Hines, Cécile Huyghebaert, Nick Jordan, Annis Joslin, Ben Judd, Agnieszka Kalinowska, Jessica Laranjo, Frédérique<br />
Lecerf, Serge le Squer, Laurent Mareschal, Luke Marsh, Jenny Mellings, Christian Merlhiot, Eléonore de Montesquiou, Michelle<br />
Naismith, Rokhshad Nourdeh, Rashad Omar, Predrag Pajdic, Paulagabriela, Cécile Paris, Ellie Rees, Montserrat Rubio, Alexandra Sà,<br />
Erica Scourti, Amy Sharrocks, Ilka Schulz, Markus Soukup, Houri der Stepanian-Abdalian, Tobias Sternberg, James Stokes, Jeanne<br />
Susplugas, Theodore Tagholm, The Miller and McAfee Press, Franck Turpin, Rémi Ucheda, Yu-Chen Wang, Simon Warner, Russell<br />
Webb, Konrad Johan Welz, Mateo Willis…<br />
ainsi que les personnes, les responsables d’espaces culturels, des lieux d’expositions, musées, associations,collectifs d’artistes,<br />
écoles d’art, lycées et établissements d’enseignement supérieur et qui ont en rendu possible l’élaboration ou la lisibilité :<br />
Dominique Agnès, Florence Albaret, Ann Bernachin, Aude Cordonnier, Nathalie Cogez-Poisson, Amanda Crabtree, Sonia Criton,<br />
Valérie Detournay, Yves Ducrocq, Arnaud Dupond, Lisa Finch, Gilles Fournet, Jacqueline Gueux, Amandine Gaignaire, Laurent<br />
Grasso, Jessica Laranjo, France Latournerie, Virginie Maes, Lisa Maddigan, Laurent Moszkowicz, Françoise Pierard, Marie Joseph<br />
Pilette, Thierry Pochet, Pascale Pronnier, Marek Ribicky, Gilles Rose, Hélène Roussel, Linda Senadji, Francine Taraska, Philippe<br />
Tavernier, Natalia Trebik, Gaëlle Vasseur, Jean-François Veran, Sophie Warlop…<br />
Crédits photographiques :<br />
Les artistes, Laurent Mareschal/le Fresnoy, Houri der Stepanian-Abdalian/le Fresnoy, Elsa Gaudefroy, La <strong>Saison</strong> Vidéo <strong>2006</strong>.<br />
rédaction et ligne éditoriale : Mo Gourmelon assistée de Hélène Dantic<br />
La SAISON VIDEO est soutenue par le Ministère de la Culture - DRAC Nord Pas de Calais, le Conseil Régional Nord<br />
Pas de Calais, le Conseil Général du Nord, l’Union Européenne à travers le projet Interreg IIIA<br />
64<br />
Conception graphique : nocrea <strong>2006</strong><br />
Impression : SNEL Grafics, Liège, Belgique<br />
directeur de publication : Eric Deneuville<br />
dépot légal 1er trimestre <strong>2006</strong><br />
Couverture : photographies extraites de For your eyes, 2005, de Jeanne Susplugas p. 27<br />
Intérieurs 1 et 2 : Brighton, <strong>Saison</strong> Vidéo <strong>2006</strong>