Je me souviens… - Mennonite Central Committee Canada

Je me souviens…
Dimanche de la Paix 2010
Comité
central
mennonite
®

À propos du thème, Je me souviens!
L’année 2010 vient de marquer le 65ème anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale dont le bilan est extrêmement
lourd : pertes en vies humaines et potentiel économique quasi détruit. Ce conflit militaire global a impliqué une cinquantaine
de pays. Les estimations du nombre total de morts sont de 40 millions de civils et 20 millions de soldats. Pour la première
fois dans l’histoire, l’arme atomique a été utilisée.
La fin de la Deuxième Guerre mondiale avait ouvert la voie à un nouvel espoir, qui s’est concrétisé par la création de
l’Organisation des Nations Unies. Celle-ci fut fondée sur l’engagement de préserver les générations futures du fléau de la
guerre et destinée à garantir la paix et la sécurité dans le monde afin que des affrontements comme la Première et la Seconde
Guerres mondiales ne se reproduisent plus jamais.
«Se souvenir du passé, pour mieux préparer l’avenir», a insisté le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, dans
son intervention devant l’Assemblée générale de l’ONU le 7 mai dernier à New York où les États membres ont rendu un
hommage solennel aux victimes tant militaires que civiles. C’est aussi dans la même logique du souvenir que nous avons
choisi le thème de «JE ME SOUVIENS» pour célébrer le dimanche de la paix 2010.
En effet, Je me souviens est une courte phrase largement utilisée et désignée qui figure sur les plaques d’immatriculation de la
province de Québec depuis 1978. Depuis des décennies, ces trois mots sont gravés au fronton des monuments et des édifices
publics comme la devise de la Belle Province. Nous nous sommes inspirés du Je me souviens pour la simple raison que nous
le trouvons ouvert, il ne peut pas être lié à un souvenir particulier et, surtout, il ne comporte pas de jugement de valeur.
Imaginé par Eugène-Étienne Taché, dont les raisons profondes, les circonstances, la nature, la signification et les intentions
de cette formulation ne font pas l’objet de question dans le présent document, Je me souviens n’a pas de complément précis.
Il apparaît comme une invitation à se souvenir que chacun peut interpréter à sa guise et en toute liberté, raison pour laquelle
plusieurs auteurs donnent d’ailleurs à Je me souviens diverses interprétations dont, avouons-le, le sentiment nostalgique ou
encore le sentiment revanchard qu’on lui associe parfois.
Je me souviens comporte un caractère qui peut évoquer si éloquemment en trois mots, le passé comme le présent et le futur.
Oui, nous devons « nous souvenir du passé et de ses leçons, du passé et de ses tragédies, du passé et de ses espoirs perdus».
Alors que nous dénonçons les idéologies basées sur la haine, l’intolérance, le racisme et l’antisémitisme et plus généralement
contre toutes les formes d’exclusion, le devoir de mémoire nous place devant l’obligation de nous rappeler qu’il existe
toujours des dizaines d’autres conflits armés qui continuent d’ensanglanter la planète et que les populations civiles en paient
toujours le plus lourd tribut.
En célébrant le dimanche de la paix 2010, nous voudrions, en tant que communauté humaine, insister sur notre devoir de
mémoire d’honorer les victimes des diverses tragédies et faire en sorte qu’elles n’aient pas donné leurs vies en vain. Je me
souviens est donc porteur d’un message de solidarité envers les hommes, les femmes et les enfants de partout dans le monde
qui sont victimes de barbarie. Cette année nous avons eu à cœur de porter un regard particulier aux groupes frappés de
plein fouet par la violence arbitraire et qui endurent de grandes souffrances. Il s’agit, entre autres, des réfugiés de guerre, des
enfants orphelins de la guerre, des femmes et jeunes filles violées et abusées sexuellement pendant les conflits, des populations
émotionnellement traumatisées par des luttes armées, des familles séparées par la guerre, des populations affamées à cause de
la guerre ainsi que de tous ceux qui ont perdu l’espoir en un monde de justice et de paix.
Somme toute, les commémorations sont des moments privilégiés, non en ce qu’elles renseignent sur l’histoire; mais surtout,
en ce qu’elles manifestent fortement à la face du monde la façon dont le passé est perçu et les usages de ce passé. Un acte de
souvenir est un acte d’honneur envers ceux qui subissent ou qui portent en eux les stigmates de la guerre; mais aussi un acte
d’honneur envers ceux qui luttent contre le militarisme et le bellicisme. Alors que les Églises et artisans de la paix s’unissent
dans la prière, l’action éducative et le plaidoyer pour la paix dans le monde dans l’esprit de Jésus-Christ, gardons vivant
notre idéal de faire du monde un lieu bien meilleur à vivre. Bon dimanche de la paix 2010!
Jean-Calvin KM Kitata
Coordonnateur du programme Justice et Paix
MCC Québec
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Textes proposés pour le service
1. Prière
La suite été écrite par Muriel Queval.
Seigneur, tu te souviens
Seigneur, toi le Dieu Créateur de la mémoire et de l’histoire…
Tu te souviens… d’un jardin…
Nous, les êtres humains, nous nous souvenons de ce lieu commun…
Nous y avions été placés pour y vivre en toute quiétude… en toute liberté…
Nous n’avons pas tenu compte de la seule restriction qui nous ait été donnée…
Depuis nous errons, nous tenant à la porte, tout contre la porte…
Dans l’espoir de la voir s’ouvrir, pour ne plus jamais se refermer.
Seigneur, nous nous souvenons des conséquences…
Et du prix qu’il t’a fallu payer…
Loin de nous abandonner, tu as ainsi pris part à notre tragédie
Seigneur, toi le Dieu Sauveur de la race humaine…
Tu te souviens… De notre condition… Des guerres et des combats… de l’injustice
et de la haine…
Seigneur, toi le Dieu compatissant…
Tu te souviens… De cet enfant blessé qui a perdu la faculté de rire et de jouer…
Tu te souviens de ce jeune homme enrôlé de force dans l’armée
Tu te souviens de cette femme humiliée
Tu te souviens de ces familles séparées, déplacées, affamées, traumatisées en quête
de liberté
Seigneur, toi le Dieu Rédempteur…
Donne-nous la faculté de savoir tirer des leçons du passé
Que nous sachions bâtir un avenir meilleur
Donne-nous de savoir éradiquer la violence
Et que dans un élan de solidarité
nous nous reconnaissions frères et sœurs sur un même pied d’égalité
Toi, Seigneur Dieu … Tu te souviens… Combien tu nous aimes…
Que nous sachions nous en souvenir aussi…
Donne-nous de revenir vers toi et de vivre de ta paix.
Paix que tu as toujours voulu nous accorder si généreusement
Garde-nous de l’indifférence ou pire… de la cruauté…
Fais de nous, ton peuple racheté, des artisans de paix…
Que partout, dans le monde, nous répandions cette bonne Nouvelle : Christ est
ressuscité, l’espoir nous est redonné
Et qu’à l’unisson, tous ensemble, des quatre coins de l’horizon, à l’exemple de
Jésus,
Ton fils bien-aimé, nous puissions dire d’un même cœur :
Notre Père, toi qui es aux cieux,
Que ton nom soit respecté.
Que ton règne s’établisse
et que ta volonté s’accomplisse
sur la terre,
comme elle s’accomplit dans le ciel.
Donne-nous aujourd’hui la nourriture
dont nous avons besoin.
Pardonne-nous nos torts envers toi,
comme nous avons nous-mêmes pardonné
à ceux qui avaient des torts envers nous.
Et ne nous soumets pas à l’épreuve,
mais au contraire, délivre-nous du Tentateur.
Car c’est à toi qu’appartiennent pour toujours
le règne, la puissance et la gloire.
Amen. (Parole vivante)
Le rétablissement de la paix
repose sur le fait que nous
sommes tous enfants de Dieu,
tous frères et sœurs égaux au
même titre, tous fils et filles de
Dieu. De cette vision du monde
et de cette perspective découlent
tous nos gestes en faveur de la
paix et de la justice. Se souvenir
de notre filiation constitue la
pierre angulaire de notre identité
et de nos actions subséquentes.
Nous pouvons ainsi nous tourner
constamment vers Dieu, Lui
permettre de désarmer notre
cœur et d’accepter la paix
intérieure qu’Il nous offre.
Ce faisant, nous devenons de plus
en plus conformes à ce que nous
sommes déjà : les fils et filles
bien-aimés de Dieu. Le réaliser
jour après jour nous permet de
vivre dans l’esprit de Dieu et
de sentir à chaque instant la
présence active de Dieu en nous,
dans la famille humaine, dans le
monde entier.
En nous rappelant qui nous
sommes, nous réalisons que nous
ne pourrions jamais faire du mal
et encore moins tuer quelqu’un.
Nous ne pourrions jamais faire
la guerre, rester indifférent
alors que la famine décime des
millions de gens ou participer à la
violence systémique qui conduit
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2. Lecture bibliques
Zacharie 8:4-5, 12, 16-17
Michée 6:8
Matthieu 5:8-10
3. Suggestion de prédication
La suite été écrite par Claude Queval.
Tout comme nous, Zacharie, Michée, et Jésus vivaient dans un monde violent
et injuste. Les décisions politiques des dirigeants, motivées par des facteurs
divers, qu’ils soient économiques, idéologiques ou autre ont eu de tous temps des
répercussions dévastatrices sur les populations civiles et en particulier sur leurs
membres les plus vulnérables.
Zacharie et d’autres prophètes à sa suite nous invitent à rêver d’un monde
meilleur où les membres de la communauté pourront jouir d’un « Shalom » qui
est plus, dans la compréhension du peuple juif de l’Ancien Testament, qu’une
absence de conflits. Une vraie paix dans la cité, en somme, où chacun peut aller
et venir librement sans peur d’être agressé ni violenté et où chacun est traité avec
respect, bienveillance et dignité. Une société où chacun a accès aux ressources
nécessaires à sa subsistance (Zacharie 8 :12). Une société où les plus âgés comme
les plus jeunes goûtent ensemble le calme et la stabilité qui leur donnent accès
au rire, au jeu et à la fête, important élément de l’équilibre humain (Zacharie 8 :
4-5).
à la pauvreté et à la course aux
armements. Ce souvenir constant
de l’unité de toute vie nous
appelle à renoncer à la violence,
même si la cause nous en parait
noble.
– John Dear, Disarming the Heart:
Toward a Vow of Nonviolence,
revised edition (Waterloo, ON:
Herald Press, 1993)
Cette vision n’a pourtant rien de romantique ni de magique. Zacharie, tout
comme Michée et Jésus invitent à l’action. « Voici ce que vous devez faire.»
La béatitude de Matthieu ne dit pas de vivre en paix mais de faire la paix. Dans
ce sens, on pourrait considérer les « artisans de paix » comme des « pacificateurs
». Mais les pacificateurs sont des gens qui ont un certain pouvoir pour imposer
aux autres de vivre dans la paix. Au temps de Jésus, le monde romain vivait en
paix (c’est ce qu’on appelle la pax romana, la paix romaine) parce que quelques
décennies auparavant l’empereur Auguste l’avait imposée par la force des armes.
L’artisan de paix ou le « travailleur de la paix », pourrait-on dire, dispose bien
souvent de peu de moyens autre que son engagement, sa présence aimante auprès
de ceux qui souffrent, auprès des victimes. Il se tient « debout avec », ce qui
amène le plus naturellement qui soit à la prochaine béatitude : « Persécuté pour la
justice… »
L’artisan de paix qui favorise la réconciliation entre les gens se modèle lui-même
sur Dieu qui réalise par Jésus la paix entre les hommes. C’est une démarche
quotidienne et humble (Michée 6 : 8) « Au nom du Christ ».
Questions pour accompagner le message:
Faites un inventaire des solutions, des interventions et des moyens proposés par la
société en général pour établir la paix ou la maintenir, et répondre à la souffrance
des victimes. Qu’en pensez-vous?
Quel est le degré d’efficacité de chacune de ces réponses?
A votre niveau, de quelle manière contribuez-vous à redonner aux victimes des
conflits leur capacité d’espérer, de rire et jouer?
Dans quelle mesure votre style de vie favorise-t-il la paix (selon la définition du «
Shalom ») dans votre environnement immédiat et dans le monde?
Dans quelle mesure avez-vous trouvé le rôle d’artisan de paix exigeant?
Dans quelle mesure avez-vous trouvé votre rôle d’artisan de paix gratifiant?
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4. Histoires pour enfants
La suite été écrite par Muriel Queval.
Option A : 2 Rois 5, 2
Contexte historique
Lors d’une incursion de l’armée ennemie dans son pays, cette petite fille, jeune fille selon d’autres écrits, est capturée et
déportée. Dans un pays étranger, elle se retrouve au service d’une femme, dont le mari, Naaman, général en chef de l’armée
(qui a emmenée captive cette jeune fille,) est très malade. Il a la lèpre. Une maladie pour laquelle, à l’époque, il n’y avait
aucun remède. Pour ne pas contaminer les autres, cet homme doit se tenir loin de chacun. Il doit vivre isolé et reclus.
Cette jeune fille esclave se souvient que dans son pays d’origine, il y a un homme, Élisée, qui pourrait apporter la guérison à
son maître. N’écoutant que son grand cœur, sans considération pour tout le mal qui lui a été donné de vivre, elle en parle à
sa maîtresse.
Ce général ira rendre visite à ce prophète et rentrera guéri.
Elle aurait pu garder cette information pour elle et jamais Naaman n’aurait été guéri. Elle a préféré la partager. Cette jeune
fille se souvient du principe de bénir ses ennemis et faire du bien à ceux qui nous persécutent.
Récit romancé
Même si je suis encore très jeune, je suis toujours bien occupée. Pas de place pour le jeu ou les distractions comme pour les
autres jeunes de mon âge. Je me dois de travailler. Je suis au service de ma maîtresse. Gare à moi si je ne lui obéis pas en tous
points. Je dois me lever tôt pour aller chercher de l’eau fraîche et puis le bois pour le feu, préparer le déjeuner, prendre soin
des vêtements et des bijoux de ma maîtresse, lui apporter ses onguents, lui faire couler son bain, veiller à ce que tout soit en
place, etc. etc. C’est comme ça toute la journée et c’est bien épuisée que je me couche tard le soir pour recommencer la même
routine le lendemain.
Quand il m’arrive d’avoir quelques minutes, je dis bien quelques minutes de repos, je rêve à mon pays. Je me souviens de mes
parents, mes frères et mes sœurs, mes amis. Oh comme ils me manquent! Comme j’aimerais les revoir. Les serrer dans mes
bras. Savent-ils au moins que je suis vivante? Rien que d’y penser j’en ai les larmes aux yeux. Je me souviens des confiseries
que maman nous préparait en cachette et des blagues de mon frère; je me souviens des rigolades autour de la table; je me
souviens des récits que papa nous faisait à la veillée; je me souviens de la célébration des fêtes en famille avec mes tantes, mes
oncles et mes cousins et la montée au temple chaque année avec tous ces chants de louange à notre Dieu que nous entonnions
en chœur.
Et puis il y eut ce jour sombre où la guerre est arrivée dans notre village. Je préfère ne plus penser aux détails bien que
souvent, la nuit, ils viennent habiter mes rêves au point de me réveiller prématurément en me laissant tremblante de peur. Je
me souviens d’avoir été capturée et emmenée de force. Nous avons dû marcher pendant des jours et des jours sans presque
rien manger et boire. Il faisait si chaud…
Mon maître Naaman, le mari de ma maîtresse, a été très malade. C’est le général en chef de l’armée qui a attaqué mon pays.
Il avait la lèpre. Une maladie pour laquelle il n’y a pas de remède. Et comme il était contagieux, il devait se tenir loin de tous.
Il avait des plaies sur les mains, sur les pieds, sur le visage, qui ne guérissaient pas. Avec le temps cette maladie l’aurait fait
mourir. Tout le monde en était bien triste ici.
Alors j’ai pris mon courage à deux mains, je suis allée voir ma maîtresse et je lui ai dit à peu près ceci : « Je me souviens
que dans mon pays, il y a un homme, Élisée, un prophète, un homme de Dieu comme on dit chez nous. Lui seul pourrait
apporter la guérison à notre maître Naaman. » Elle m’a écouté. Son mari est allé dans mon pays (oh! Mon pays!) voir cet
homme et il en est revenu guéri.
Je me souviens que papa et maman m’ont appris à ne pas rendre le mal pour le mal mais plutôt de bénir mes ennemis et de
leur faire du bien.
Pensées
Se souvenir que peu importe la situation dans laquelle on se trouve, il y a toujours possibilité de faire du bien et d’être des
artisans de paix.
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Option B: 2 Samuel 4:4, 2 Samuel 9
Contexte historique
Il n’avait que cinq ans quand soudain toute sa vie a basculé. En une seule
échauffourée, il perd son père, son grand-père et ses deux oncles à la guerre. Un
peu plus tard, conséquence d’un acte violent résultant de ce même événement, il
perdra le dernier membre de sa famille.
En apprenant la nouvelle, pensant avec raison la vie de Mephibocheth menacée,
dans sa précipitation pour fuir et mettre à l’abri cet enfant, sa nourrice le fait
tomber. Ce qui a pour conséquences de le laisser estropié des deux jambes.
Mephibocheth vivra caché pendant de nombreuses années, craignant toujours
pour sa vie. Croyant personnellement qu’il n’a pas plus de valeur qu’un chien
mort.
Quand David, le roi en place, va le faire chercher et l’amener à la cour royale,
Mephibocheth, a de nouveau toutes les raisons de craindre pour sa vie.
Pourtant, David veut honorer la promesse qu’il a faite à Jonathan, le père de
Mephibocheth. Il prendra donc son fils sous sa protection, le fera manger à sa
table et lui restituera tous les biens de ses pères. Mephibocheth pourra enfin vivre
en paix.
Se souvenir qu’on peut utiliser son
pouvoir pour faire du bien, pour
libérer, pour bénir et redonner la
joie à ceux qui l’ont perdue. Se
souvenir qu’on peut utiliser ses
capacités pour être des artisans
de paix.
David se souvient :
• qu’une promesse se doit d’être honorée;
• qu’un roi peut utiliser son pouvoir pour faire du bien, libérer, restituer,
apporter la paix. (Il a tant souffert lui-même d’avoir à fuir à maintes et
maintes reprises et vivre caché pour sauver sa vie, qu’il peut comprendre
la situation.)
Récit romancé
Assis à l’ombre sur la terrasse, mes béquilles tout près de moi, j’observe les
enfants qui jouent, courent, crient et rient en contrebas. Leurs joyeux ébats me
rappellent cruellement que je n’ai jamais eu ce bonheur d’être libre et de courir à
ma guise.
Je me souviens : C’est arrivé quand j’avais cinq ans. En un seul jour, mon père,
mon grand-père et mes deux oncles ont été tués à la guerre. Je me suis donc
retrouvé orphelin. Je me suis aussi retrouvé handicapé parce que ma nourrice,
fuyant avec moi dans ses bras pour me protéger, m’a laissé tomber par accident,
ce qui a eu pour conséquences de me laisser estropié des deux jambes. Il faut dire
que dans ce temps là, quand un roi venait à perdre son trône, on exterminait
souvent tous les membres de sa famille pour être bien sûr que personne de
proche ne lui succède. C’est pour cette raison que mon oncle, qui lui, n’était pas
à la guerre ce jour-là, a été assassiné un peu plus tard dans son lit. Je suis donc
le seul survivant de ma famille et c’est pour cela que je suis resté caché, vivant
constamment dans la peur qu’on me découvre, jusqu’au jour où le nouveau roi,
David, ayant appris mon existence, m’a convoqué au palais royal. Pendant le
voyage, des tas de questions et d’émotions me perturbaient. Même si je n’avais
jamais voulu faire de politique ou revendiquer quoi que ce soit. Même si je
ne désirais en rien mettre en place un complot pour faire valoir mes droits, je
demeurais, malgré mon handicap, une menace pour la royauté. Je craignais, avec
raison, d’être la prochaine victime.
Quand on m’a amené devant le roi, je me suis prosterné pour le saluer. J’étais
secoué par des tremblements de peur que j’avais du mal à contrôler. On m’a aidé
à me relever. Le roi a prononcé mon nom avec gentillesse et m’a affirmé que je
n’avais aucune raison de craindre pour ma sécurité. Il m’a dit avec émotion: «Je
me souviens de ma profonde amitié avec ton père et la promesse que je lui ai faite
5

de prendre soin des siens. Je désire agir avec bienveillance envers toi.» Il m’a invité à manger avec lui et depuis ce jour-là, je
vis paisiblement et librement sous sa protection. Enfin, pour la première fois de ma vie, je suis libéré de la peur.
Pensées
Se souvenir qu’on peut utiliser son pouvoir pour faire du bien, pour libérer, pour bénir et redonner la joie à ceux qui l’ont
perdue. Se souvenir qu’on peut utiliser ses capacités pour être des artisans de paix.
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Je me souviens: État des lieux de notre
mémoire collective
La suite été écrite par Jean-Calvin Kitata.
«Plus jamais de guerre »! Voici un slogan évocateur apparu à la suite de
la Première guerre mondiale qui a profondément marqué les populations
européennes. Entre cette merveilleuse intention et sa mise en œuvre, la réalité est
demeurée toute autre sur la planète. L’histoire nous démontre à bien des égards
que l’apaisement généralisé que l’on avait espéré à travers l’expression «Plus
jamais ça!» ou encore «Plus jamais de guerre!» est devenu un vœu pieux et vide
de sens.
En effet, les dépenses militaires à travers le monde n’ont jamais été aussi
importantes. Malgré la crise financière qui vient de frapper la planète au cours des
dernières années, au nom de la nouvelle guerre contre le terrorisme, l’enveloppe
consacrée aux dépenses militaires a augmenté de 4% en un an, atteignant, en
2008, le niveau record de 1 464 milliard de dollars à travers le monde. L’afflux
massif d’armes (classiques, nucléaires et biologiques), encore alimenté par les
stocks considérables constitués pendant la guerre froide, a notamment alimenté
des groupuscules de toutes tendances.
Malgré la crise financière qui
vient de frapper la planète au
cours des dernières années,
au nom de la nouvelle guerre
contre le terrorisme, l’enveloppe
consacrée aux dépenses militaires
a augmenté de 4% en un an,
atteignant, en 2008, le niveau
record de 1 464 milliard de dollars
à travers le monde.
Le commerce des armes a connu une expansion gigantesque. Les ressources
générées par le trafic d’armes sont aussi régulièrement utilisées pour déstabiliser
d’autres régions. Dans diverses parties du monde, des affrontements armés
continuent d’infliger à l’humanité d’indicibles souffrances. Bref, l’évolution de
l’armement, des techniques et des stratégies s’est naturellement traduite par une
hausse substantielle du nombre de victimes civiles. Globalement, on peut donc
considérer qu’il y a aujourd’hui une multiplication des conflits et une croissance
de la guerre. Plusieurs théories et expressions ont même été mises de l’avant pour
justifier les interventions armées. Pour justifier le recours à la force, les stratèges
militaires mettent de l’avant les diverses notions et théories sur la guerre à savoir
: guerre juste, guerre préventive, guerre préemptive, guerre d’agression, guerre
défensive, guerres propres, frappes chirurgicales, etc. Quelle qu’elle soit et en
quelque endroit qu’elle se passe, la guerre laisse dans son sillage, horreurs et
désolations.
Dans notre propre cour, le Canada est toujours en guerre en Afghanistan. Les
efforts du gouvernement canadien visant à susciter un soutien public à la guerre
menée en Afghanistan en invoquant entre autres l’atrocité des attentats terroristes
du 11 septembre 2001 sont loin de convaincre. La plupart des canadiens n’ont
jamais compris le bien-fondé de cette guerre qui s’est transformée au fil des ans
en guerre contre les talibans, ces fanatiques religieux qui dirigeaient le pays et
qu’on dépeint comme étant des monstres qui martyrisaient le peuple afghan,
d’où la ferme détermination de les combattre en vue d’instaurer la démocratie.
Malheureusement, depuis le début de la mission en 2002, le nombre de soldats
canadiens morts en Afghanistan a tristement atteint 151 le 20 juillet dernier.
Par ailleurs, en marge des conflits fortement médiatisés et qui se déroulent
sous le feu des projecteurs nationaux ou internationaux, la majorité d’entre
eux s’éternisent malheureusement dans l’indifférence de la communauté
internationale. Pendant que l’opinion publique se concentre un temps sur un
petit nombre de conflits et ignore les autres, dans plusieurs zones de désintérêt
international, la population civile paie dans sa chair le tribut de la haine et de
l’intolérance dans la plus totale indifférence. Les conflits civils dans ces pays du
Sud ont redoublé d’intensité.
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La guerre civile qui se déroule majoritairement dans les pays du Tiers Monde
fait corps avec la criminalité la plus abjecte. Le nombre de victimes provoqué
par les conflits s’est accru considérablement. Des massacres de civils, des viols
de femmes et jeunes filles, la paupérisation des populations civiles dont les
orphelins de guerre, le désespoir des réfugiés, les assassinats politiques, la torture,
les traitements dégradants ainsi que la détention arbitraire, souvent dans des
conditions d’extrême dénuement, sont le lot d’innombrables victimes dans les
zones de conflits.
Il convient aussi de souligner que la plupart des guerres civiles qui ravagent de
vastes contrées tombées dans le chaos, l’anarchie et l’insécurité la plus totale, sont
livrées non pas pour satisfaire des motifs idéologiques, mais plutôt pour obtenir la
maîtrise de la richesse économique d’un pays. La bénédiction de Dieu que sont les
ressources minérales d’un pays devient alors une malédiction pour la population
innocente. Des crimes contre l’humanité sont commis à longueur de journée et les
personnes présumées responsables de ces crimes ne seront probablement jamais
traduites en justice.
Les causes et circonstances
du déclenchement des guerres
sont certes nombreuses,
variables et parfois
contradictoires. Mais les
dommages des guerres ne
s’arrêtent pas avec la fin
des conflits.
Les causes et circonstances du déclenchement des guerres sont certes nombreuses,
variables et parfois contradictoires. Mais les dommages des guerres ne s’arrêtent
pas avec la fin des conflits. Alors que les dégâts matériels semblent réparables,
par contre, le coût humain ainsi que les séquelles sur les survivants perdurent
après plusieurs générations, bien après que les armes se sont tues. Voilà pourquoi
nous voulons nous attarder sur l’impact de la guerre, particulièrement en ce qui
concerne les victimes civiles sans armes et sans défense.
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1. Je me souviens des réfugiés de guerre.
Qu’est-ce qu’un réfugié?
Selon la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, «un réfugié est une personne qui, craignant avec raison d’être
persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses
opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se
réclamer de la protection de ce pays ».
Comment devient-on réfugié?
Chaque année, des millions de personnes sont forcées de quitter leurs foyers pour échapper aux persécutions, aux conflits
armés ou à des violences politiques et chercher refuge ailleurs. Au cours de l’histoire, les événements guerriers, les désastres
écologiques, la faim, les régimes totalitaires, l’intolérance idéologique, les répressions et les persécutions ont contraint les
gens à se déplacer pour sauvegarder leur vie ou leur liberté. Chassés de leurs terres, éloignés de leurs êtres chers, les réfugiés
errant se voient accrochés à des lambeaux d’espérance, à la recherche d’un refuge pour se refaire une vie.
Les réfugiés de guerre sont des personnes dépourvues de moyens de subsistance et de droits. Chargés de souffrances et
d’exigences immédiates dans des situations de malheur inimaginables, avec des problèmes de tout genre, les réfugiés se
retrouvent généralement dans une situation de grande vulnérabilité. Leur dignité et la valeur de la personne humaine
sont offensées et mortifiées. Bref, les réfugiés sont les êtres les plus faibles et sans défense assujettis à une existence sombre
et intolérable.
Les réfugiés dans le monde
Selon le rapport annuel Global Trends du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) rendu public le
16 juin 2009, le nombre de personnes dans le monde contraintes de quitter leur foyer et leur pays, à la suite des conflits et
des persécutions atteignait 42 millions à la fin 2008. Ce chiffre comprend 16 millions de réfugiés et de demandeurs d’asile et
26 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, précise le rapport. 80% des réfugiés dans le monde se
trouvent dans les pays en voie de développement, de même que la grande majorité des personnes déplacées à l’intérieur de
leur propre pays.
Les besoins des réfugiés
Les personnes réfugiées ont besoin d’un havre de paix pour se remettre de leurs traumatismes et pour que renaisse en eux
l’espoir en un monde meilleur. Leur accueil est non seulement un devoir moral évident, mais une obligation internationale
reconnue par la convention de Genève du 28 juillet 1951 ratifiée par la quasi-totalité des pays industrialisés (dont le Canada)
sur le Statut de réfugié. La Journée mondiale des réfugiés est célébrée le 20 juin de chaque année.
La réponse de l’Église à cette tragédie
Le Pape Jean-Paul II a exhorté l’Église en ces termes: « Partout où un homme souffre, là se trouve le Christ qui souffre à
sa place. Partout où un homme souffre, l’Église doit se trouver là à son côté. L’homme considéré dans son unité et dans sa
totalité, l’homme corps et âme est le but principal de la sollicitude pastorale de l’Église. Lorsque l’étranger frappe à la porte
de notre société, l’Église est concernée. Au nom de l’évangile du Christ, elle ne peut se taire lorsque la dignité de tant d’êtres
humains se trouve bafouée par des procédures et des réglementations qui perdent de vue le sens de la personne. L’Église doit
continuer à faire entendre sa voix pour défendre la dignité humaine des réfugiés partout où ils se trouvent. Les chrétiens
doivent s’engager au service des réfugiés et voir en eux des frères et des sœurs victimes des inégalités et des injustices.»
9

2. Je me souviens des enfants orphelins
de la guerre.
Les enfants et la guerre
La guerre est une réalité quotidienne pour des millions d’enfants dans le monde.
Des milliers de civils sont tués ou blessés chaque jour dans le cadre de conflits
armés et la majorité de ces victimes innocentes sont des enfants. Vulnérables aux
ravages de la guerre et souvent séparés de leurs familles, les enfants sont rendus
orphelins ou handicapés à vie. De nombreux enfants restent traumatisés par le
spectacle de morts brutales et de violences inouïes, par la terreur et les difficultés.
Nombreux sont ceux qui meurent aussi de faim, de malnutrition ou de l’absence
de soins médicaux.
ils sont au moins 300 000 à
participer aux hostilités dans
le cadre d’une trentaine de
conflits différents.
État de la situation des orphelins de guerre
Le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) rapporte que deux millions
d’enfants ont été tués, six millions ont perdu leur foyer, douze millions ont été
blessés ou mutilés au cours des dix dernières années. Les violences physiques,
sexuelles et émotionnelles auxquelles ils sont exposés ébranlent les fondements
de leur univers. La guerre détruit leurs foyers, désintègre leurs communautés et
mine leur confiance dans les adultes. Actuellement, ils sont au moins 300 000 à
participer aux hostilités dans le cadre d’une trentaine de conflits différents.
Conditions de vie des orphelins de guerre
On retrouve dans ces enfants-là ceux qui ont choisi d’aller se battre, et, pour
la plupart, ceux qui ont été recrutés de force et qui n’ont pas le choix : absence
de travail, famille disparue. « Il ne reste plus que le “choix” du combat au sein
d’une unité, avec un uniforme pour se vêtir et de quoi manger. Une fois recrutés,
les enfants deviennent des éléments essentiels dans la guerre. Ils apprennent vite
à combattre, à tuer, sont violés et utilisés comme esclaves sexuels. Un enfant
est un outil plus maniable, il ne se rend pas bien compte de ses actes, il est
facile à façonner. On peut lui faire faire ce que l’on veut. Très vite, il devient un
instrument de guerre parfait qui ne se pose plus de questions et fait ce qu’on
lui dit de faire. Pour mieux contrôler la population, on ordonne aux enfants de
terroriser, de torturer ou de massacrer leur propre famille dans le village où ils ont
grandi. Ensuite les enfants coupables, salis, maudis par leurs parents deviennent
des parias, sont exclus de leur communauté et sont condamnés à rester avec leur
groupe politique. Les orphelins de guerre sont toujours hantés par les violences
du passé » souligne une étude des Nations Unies dirigées par Graça Machel.
Confession d’une orpheline de guerre
Theresa, une adolescente de 16 ans pleine d’entrain, a vu ses parents pour la
dernière fois le jour où ils ont été emportés loin d’elle, dans la cohue, alors qu’ils
fuyaient pour se réfugier en Guinée voisine à la suite d’une attaque menée par
les rebelles dans leur ville, pendant la guerre civile (1991-2000). La jeune fille,
qui n’a jamais retrouvé ses parents, a vécu la guerre et ses conséquences dans
des camps de réfugiés, mendiant et vendant son corps à des soldats et à d’autres
contre un peu de nourriture ou un peu d’argent. Aujourd’hui, la paix est revenue
en Sierra Leone et Theresa vit avec sa tante à Koindu, une ville du sud-est de la
Sierra Leone, ancien bastion principal des rebelles, pendant la guerre civile. La
jeune fille est mère d’un enfant de deux ans, dont elle ne connaît pas le père, car
elle a eu de nombreux partenaires sexuels depuis qu’elle est rentrée chez elle.
Il lui a rarement semblé, dit-elle, que sa vie valait la peine d’être vécue. «J’ai
l’impression de ne servir à rien, que ma vie n’a pas de sens », a-t-elle expliqué.
«Je n’ai aucune idée de l’identité du père de l’enfant. Je dois lutter rien que pour
nous trouver des vêtements. Je mendie pour avoir de quoi manger».
10

3. Je me souviens de la douleur des femmes
et jeunes filles violées et abusées pendant
la guerre.
«Nos corps…leur champ de bataille!»
Un des éléments horrifiant des conflits est l’utilisation de la violence sexuelle
comme arme de guerre. Les femmes vivent un véritable drame. Elles voient la
violence physique et morale des seigneurs de guerre s’exercer sur elle en termes
de viol, de massacre, d’assassinat, d’arrestation arbitraire et de détention illégale,
de coups et blessures, de prostitution forcée, d’esclavage sexuel. Des milliers de
femmes sont abusées, humiliées, agressées, violées, battues, exploitées et tuées.
Les mutilations génitales, l’infanticide, les mariages forcés, le proxénétisme,
le crime d’honneur, le femicide [meurtre des femmes], le viol collectif, les viols
systématiques, le trafic sexuel, la pornographie, le proxénétisme organisé,
l’esclavage, etc.
Dans un grand nombre de conflits, des filles sont enlevées par des soldats
qui les forcent à devenir leur « épouse ». En plus de devoir faire la cuisine, le
ménage, la lessive et de transporter des munitions, ces filles sont également
victimes d’esclavage sexuel. En effet, un des éléments horrifiants de ce
conflit est l’utilisation de la violence sexuelle comme stratégie de guerre par
pratiquement toutes les parties. Le viol des femmes et des filles congolaises par
des soldats durant la guerre est horrifiant à la fois par l’étendue et la brutalité
extraordinaires de ces crimes. Les viols ont souvent lieu en public et les femmes
sont habituellement battues, fouettées ou autrement abusées physiquement par les
violeurs, avant, pendant et après le conflit. Dans plusieurs cas, les femmes ont été
violées de multiples fois par une multitude d’assaillants.
Le viol des femmes et des filles
congolaises par des soldats
durant la guerre est horrifiant à
la fois par l’étendue et la brutalité
extraordinaires de ces crimes.
Les viols ont souvent lieu
en public et les femmes
sont habituellement battues,
fouettées ou autrement abusées
physiquement par les violeurs,
avant, pendant et après le conflit.
Dans plusieurs cas, les femmes
ont été violées de multiples fois
par une multitude d’assaillants.
État de la situation en République Démocratique du Congo
Bien qu’il soit difficile d’obtenir des chiffres exacts, les organisations non
gouvernementales et les institutions des Nations Unies présentent à l’Est de
la RDC estiment à 14 000 le nombre de viols en 2005 et à 13 000 en 2006.
Récemment, en 2007, le Coordonnateur des secours d’urgence de l’ONU, John
Holmes, a évoqué la situation des victimes de viol d’un hôpital de la province
du Sud-Kivu (République Démocratique du Congo); il a affirmé avoir vu les
preuves et entendu les témoignages des victimes décrivant une “violence sexuelle
si brutale que cela dépasse l’imagination”. Il a déclaré que plus de 32 000 cas de
viol et de violence sexuelle ont été enregistrés pour la seule province du Sud-Kivu
depuis 2005 — et que cela ne représente qu’une fraction du nombre total de
femmes victimes de souffrances aussi extrêmes. [John Holmes, Secrétaire général
adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, ONU.
Congo’s Rape War. Los Angeles Times,
11 octobre 2007]
Témoignage de première ligne
Justine Masika Bihamba de la Synergie des femmes pour les victimes des violences
sexuelles dans la région du Nord-Kivu décrit la situation: « De la guerre qui se
déroule dans les brousses congolaises, la femme en porte des cicatrices encore
saignantes. Si elle n’est pas violée, elle est séparée de son mari, qui a fui ou s’est
engagé dans les bandes armées. La pauvre femme est aussi séparée de ses fils
qui, emportés également par les bandes armées ne reviendront peut-être plus
jamais à la maison. Ses filles sont obligées de contracter des mariages précoces
pour que leurs ignobles tortionnaires n’aillent pas jouir de leur virginité car,
pour les mères, mieux vaut cela que de voir leurs filles enlevées vers les brousses
inconnues. Les filles, en plus de tout cela sont une main d’œuvre facile pour les
11

travaux serviles et viles: elles sont enlevées pour tamiser les minerais en faveur
des exploitants illégaux, pour le transport des munitions, pour faire la cuisine
pour des bourreaux qui finissent par abuser d’elles, pour servir d’espionne... Non
préparée au rôle de chef de ménage, la femme abandonnée perd patience et se
remarie pour s’assurer une protection physique. D’autres encore pour une sécurité
économique se vendent, se prostituent pour nourrir les enfants ou subvenir à l’un
ou l’autre besoin de la famille ... Bon nombre de femmes abandonnées finissent
par développer des maladies psychosomatiques (estomac, cardiaque) à cause de
la persistance du stress de la guerre... Ces viols sont pratiqués systématiquement
village par village. Les femmes n’osent pas porter plainte par peur de représailles.
La guerre a induit une dépravation des mœurs de l’ensemble de la société. Les
violeurs sont devenus tellement nombreux que la sanction traditionnelle par
le chef du village n’est plus possible. Les hommes violent parce que l’impunité
est totale. La justice est corrompue et les femmes n’osent pas porter plainte par
crainte de représailles. Je connais une jeune fille de 18 ans à qui on a coupé les
lèvres parce qu’elle avait raconté son agression à un policier.”
« Ce sont des femmes qui ont vécu l’enfer, des femmes aux traits creusés qui
semblent vieillies avant l’âge. Elles ont le regard perdu et s’épuisent à tenter
d’évacuer leur effroi. Même si la guerre civile est officiellement terminée, le
temps n’a rien effacé, ni la mauvaise intention, ni la peur, ni la souffrance, ni la
honte. Des viols répétés accompagnés de terribles violences. Bébés, filles, jeunes
filles, mères et grands-mères, rien ne pouvait arrêter la fureur et le sadisme des
bourreaux. Bon nombre d’entre elles n’y ont pas survécu. Les autres vivent
aujourd’hui encore meurtries, et hantées par le spectre de l’horreur. Il y a,
comme ça, des blessures qui saignent à jamais. Les conséquences physiques et
psychologiques de la violence sexuelle sont entre autres, des blessures internes,
des grossesses non voulues, des maladies transmises sexuellement (MTS), le VIH/
sida, le syndrome de stress post-traumatique, et le risque accru de suicide. Il faut
parfois jusqu’à quatre interventions chirurgicales pour guérir les survivantes de
blessures physiques et les services médicaux nécessaires sont souvent inaccessibles.
Ces traitements offrent une chance de reprendre le contrôle de leur vie aux braves
femmes qui réussissent à les recevoir.
« Si les femmes continuent de
subir des violences sexuelles,
ce n’est pas parce que la loi
n’est pas en mesure de les
protéger, mais parce qu’elle
est insuffisamment appliquée.
Les femmes n’ont pas de droits
si ceux qui violent leurs droits
demeurent impunis. »
- Margot Wallstrom, l’envoyée
spéciale de l’ONN par les
violences dons les conflits
Protection légale des femmes et des jeunes filles en zones
de guerre
Le viol est une horrible pratique qui a infligé la souffrance à beaucoup de femmes
et filles dans les zones de conflit. Dans sa résolution adoptée à l’unanimité le 19
juin 2008, le Conseil de sécurité des Nations Unies a finalement reconnu le viol
comme une arme de guerre, parce que non seulement l’acte laisse les femmes
traumatisées, il les met dans une plus grande situation de risque de contracter
le VIH et le sida. Cette résolution exclut les crimes de violences sexuelles des
accords d’amnistie dans le cadre des négociations de paix et met l’accent sur
l’importance de mettre fin à l’impunité pour les crimes de violences sexuelles. Le
Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a indiqué qu’au premier
trimestre de 2010, 1244 femmes avaient rapporté à l’ONU avoir été violées en
RDC, soit “près de 14 viols par jour en moyenne”. C’est à peu près autant que
pendant la même période en 2009.
Dans sa déclaration faite le 30 avril 2010 devant les 15 membres du Conseil
de sécurité à l’issue de sa visite en RDC, Margot Wallström, l’envoyée spéciale
de l’ONU pour les violences faites aux femmes et aux enfants dans les conflits
affirme : « Si les femmes continuent de subir des violences sexuelles, ce n’est
pas parce que la loi n’est pas en mesure de les protéger, mais parce qu’elle est
insuffisamment appliquée. Les femmes n’ont pas de droits si ceux qui violent leurs
droits demeurent impunis. »
12

Prière en faveur des femmes et des jeunes filles
(Tirée de la Déclaration du Conseil œcuménique des Églises sur la violence sexuelle à l’égard des femmes en République
Démocratique du Congo, le 2 septembre 2009) :
Dieu, créateur, rédempteur et soutien de la vie dans sa plénitude,
Nous t’apportons les femmes et les jeunes filles privées de la joie et de l’abondance de la vie à cause des violences qu’elles
ont subies. La violence contre les femmes et les jeunes filles est un péché, qui les exclut de la justice et de l’amour humain.
Pourtant, au cœur de ces souffrances et de ces humiliations, nous croyons que tu tiens dans le creux de ta main chaque jeune
fille et chaque femme maltraitée; tu l’appelles par son nom, tu l’entoures de ta compassion, tu lui donnes l’amour que ta mère
bénie t’a donné dans ton humanité.
Pardonne-nous pour toutes les fois où nous sommes restés muets face à de telles souffrances. Pardonne-nous pour toutes
les fois où nous n’avons pas su dire que la violence est un péché et une offense à ton égard. Pardonne-nous lorsque nous
perpétuons des pratiques culturelles, sociales et ecclésiales qui mettent en danger la vie des femmes et des jeunes filles. En
nous accordant ton pardon, donne-nous la force d’être solidaires des femmes et des jeunes filles prises au piège de la violence
et de la souffrance. Fais de nous des avocats de la justice transformatrice, à la recherche de la vérité et de la réconciliation des
personnes et des communautés. Suscite en nous le désir d’œuvrer en faveur d’une communauté accueillante aux femmes et
aux hommes, créés à ton image et partenaires de ta mission. Amen!
13

4. Je me souviens des populations
émotionnellement traumatisées par la guerre.
Qu’est-ce qu’un traumatisme?
Le traumatisme est « l’ensemble des troubles occasionnés par une plaie, une
blessure ». Cela peut aussi signifier un choc amenant une perturbation de
l’appareil psychique ; d’où le traumatisme psychique.
Selon Larousse, Grand Dictionnaire de la psychologie, le traumatisme psychique
est « un événement subi par un sujet qui en ressent une très vive atteinte affective
et émotionnelle, mettant en jeu son équilibre psychologique et entraînant souvent
une décompensation de type psychotique ou névrotique ou diverses somatisations
».
Personne n’ignore qu’en cas de conflits armés, c’est la population civile qui est la
principale victime. Ce sont les femmes et les enfants qui souffrent le plus quand
les écoles sont fermées, les dispensaires détruits, les champs truffés de mines
et les marchés vides. En effet, les événements traumatiques sont inattendus,
incontrôlables et accompagnés d’une forte menace pour soi-même ou pour ses
proches. Des enfants sont tués ou mutilés, d’autres deviennent orphelins ou
sont séparés de leurs familles ; les garçons sont contraints de porter des armes
dans certains pays et de commettre des actes de violence. Ceux qui survivent
aux combats peuvent être traumatisés pour longtemps par les mutilations, les
incendies et les pillages dont ils ont été témoins ou par une séparation prolongée
d’avec leurs familles. Des millions de gens ont été témoins directs ou indirects de
choses atroces tels que les massacres des leurs, souvent dans des conditions d’une
violence délirante dans
sa déshumanisation.
Ceux qui survivent aux combats
peuvent être traumatisés pour
longtemps par les mutilations,
les incendies et les pillages dont
ils ont été témoins ou par une
séparation prolongée d’avec leurs
familles. Des millions de gens
ont été témoins directs ou
indirects de choses atroces tels
que les massacres des leurs,
souvent dans des conditions
d’une violence délirante dans
sa déshumanisation.
Quelques symptômes observés
Les symptômes se caractérisent souvent par des souvenirs répétitifs et
envahissants de l’événement provoquant un sentiment de détresse et comprenant
des images, des pensées ou des perceptions, des rêves répétitifs de l’événement
provoquant un sentiment de détresse (rêves effrayants chez les enfants),
impressions ou agissement soudains « comme si » l’événement traumatique allait
se reproduire (illusions, hallucinations), sentiment intense de détresse psychique
lors de l’exposition à des indices externes ou internes évoquant ou ressemblant à
un aspect de l’événement traumatique en cause.
• Manifestations du traumatisme psychologique chez des enfants rwandais
après le génocide de 1994 (rapportées dans une enquête de Florence DA
SILVA, en février 1996)
• Altération du sommeil, terreurs nocturnes, cauchemars, hallucinations sont
les signes de réminiscence de la souffrance sous forme obsessionnelle et
nuisent au travail de deuil ;
• Désordres alimentaires : refus des aliments, perte de poids, dénutrition
d’origine psychologique, anorexie (plus les lésions cérébrales dues à la
malnutrition sévère) ;
• Désordres gastro-intestinaux d’origine psychosomatique, coliques,
vomissements, diarrhées mais aussi migraines, maux d’estomac, chute des
cheveux et allergies d’origine psychosomatique ;
• Altérations du langage jusqu’à l’adolescence : bégaiements ;
• Désordres du développement : régression à des étapes antérieures, oubli du
langage parlé, de la lecture et de l’écriture, énurésie (perte de contrôle du
sphincter urinaire), encoprésie (problème du contrôle du sphincter anal),
14

difficultés d’apprentissage, désorientation spatio-temporelle, difficultés à poser une frontière entre l’imaginaire et la
réalité ;
• Altération et désordres de type affectif : inhibition, indifférence, tristesse, besoin pathologique d’affection, dépendance,
irritabilité, agressivité, inquiétude, peurs intenses liées à des stimulations du milieu ambiant (exemple : sirènes, bruits de
véhicules…), fermeture à la communication, manque de concentration, attitudes psychotiques, cas de schizophrénie et
attitudes autistiformes;
• Troubles du comportement des adolescents directement liés au traumatisme : vols, bagarres, alcoolisme, prostitution,
suicides.
15

5. Je me souviens des familles séparées par la guerre.
Multiples causes de séparation des familles
Outre les pertes de vies humaines, la guerre déclenche un processus de déplacement massif de population et bouleverse les
structures démographiques d’un certain nombre de régions. La population civile se trouve de plus en plus souvent au cœur
même d’attaques et prise sous un déluge de feu. Les civils sont bien souvent devenus des objectifs militaires prioritaires, au
même titre que les combattants. Des actes de guerre sont dirigés contre des civils, soit directement, soit à titre de représailles.
La population doit se terrer dans des abris de fortune. Les assiégeants visent essentiellement à créer un climat de panique, à
répandre la terreur et à user de la famine comme d’une arme déterminante. Quant aux forces assiégées, elles embrigadent la
population, ou l’empêchent de fuir lorsque c’est encore possible, afin de disposer d’un bouclier face à l’ennemi.
Une réponse humanitaire
Il existe une agence centrale de recherches du Comité International de la Croix Rouge (CICR) qui fournit différents services
de recherche de personnes dans le monde entier, afin de permettre aux détenus et aux civils touchés par des conflits, des
catastrophes ou d’autres situations telles que les migrations, de rétablir le contact avec des membres de leur famille. Dans une
interview accordée à l’occasion du 50e anniversaire de l’Agence, le conseiller historique du CICR (Jean-François Pitteloud) et
la directrice adjointe des opérations (Angela Gussing) expliquent le processus de réunification des familles :
« Rétablir les liens familiaux, c’est conduire dans ces situations des activités qui ont pour but d’éviter les séparations et
les disparitions, de rétablir et maintenir les contacts familiaux, et de clarifier le sort des personnes portées disparues. Cela
implique la collecte d’information sur les personnes portées disparues ou qui sont décédées, ainsi que sur les personnes
vulnérables comme les enfants séparés de leurs familles ou les personnes privées de liberté. Cela implique aussi la recherche
des personnes disparues, l’échange de nouvelles familiales et la transmission de documents lorsque les moyens normaux
de communication ne fonctionnent plus, et l’émission de titres de voyage et d’attestations. Ces activités sont menées par
le réseau mondial des liens familiaux constitué par le CICR et les services de recherche des sociétés nationales de la Croix
Rouge et du Croissant Rouge. Le respect de l’unité familiale est essentiel au respect de la dignité humaine. Chaque année,
le CICR et les sociétés nationales de la Croix Rouge et du Croissant Rouge aident des centaines de milliers de personnes
(déplacées, réfugiées, détenues et disparues) à rétablir le lien avec leurs familles et à clarifier le sort de leurs proches
portés disparus. »
En 2009, le CICR a visité des lieux de détention avec une population totale de 479 669 détenus. Plus de 28 000 d’entre eux
ont bénéficié des programmes de visites familiales du CICR. Durant cette année, le CICR a :
• recueilli et distribué plus de 253 000 messages Croix-Rouge ;
• publié plus de 83 000 noms sur son site de restauration des liens familiaux (FamilyLinks.icrc.org);
• facilité plus de 12 000 appels téléphoniques qui ont permis à des personnes séparées de leur famille de reprendre contact;
• procédé à 1 063 réunions de familles ;
• et travaillé sur 45 605 cas de demandes de recherche, dont les demandes reçues en 2009.
16

6. Je me souviens des populations affamées et
qui ont perdu l’espoir à cause de la guerre.
État de la situation
Toute guerre engendre la pénurie et, le plus souvent, la famine en plus de perdre
l’espoir d’un monde meilleur. En dépit des dispositions précises et impératives
du droit international humanitaire - qui vise à protéger l’ensemble des noncombattants
et, en particulier, les populations civiles contre les effets des hostilités
et contre leurs conséquences -, la famine est trop souvent la conséquence des
conflits armés, soit que les belligérants l’aient délibérément provoquée, en
violation de leurs obligations, soit qu’elle apparaisse comme la conséquence
indirecte des destructions provoquées par la guerre.
Toute guerre engendre la pénurie
et, le plus souvent, la famine
en plus de perdre l’espoir d’un
monde meilleur.
Les facteurs causals de la famine
Les causes qui conduisent à des famines en période de conflit armé sont , entre
autres : - les déplacements de population, qu’il s’agisse de déplacements forcés
ou provoqués par l’approche des combats; - les restrictions mises aux activités
de production, notamment l’internement, les restrictions de déplacement ou
l’usage indiscriminé des mines qui empêchent les agriculteurs de cultiver la terre;
- la destruction des ouvrages d’irrigation et des récoltes; la rupture des voies de
communication; - le pillage et la destruction des réserves; - les entraves mises
aux opérations de secours d’urgence destinées à enrayer les effets des pénuries
alimentaires. De plus, il arrive que les paysans soient empêchés de cultiver leurs
terres, les cultures sont dévastées par les combats et par le passage des armées,
les moyens d’irrigation sont ravagés, les systèmes de transport et de distribution
paralysés, les populations déracinées, les réserves pillées ou détruites. Il y a
également lieu de souligner qu’il est rare que les belligérants autorisent le libre
passage des envois de secours en faveur des populations civiles, amies comme
ennemies, lorsque celles-ci manquent des biens essentiels à leur survie.
Dispositions légales internationales
(Extrait de “La protection des populations civiles en période de conflit armé;
XXVIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge” du
15-09-1995)
La Convention de Genève, en ce qui concerne les conflits armés internationaux,
de même qu’aux articles 13-17 du Protocole II, applicable aux conflits armés
non internationaux stipulent ceci : « Il est interdit d’utiliser contre les civils la
famine comme méthode de guerre (Protocole additionnel I’article 54 (1 et 2); - il
est interdit d’attaquer, de détruire, d’enlever ou de mettre hors d’usage des biens
indispensables à la survie de la population civile, tels que des denrées alimentaires
et les zones agricoles qui les produisent, les récoltes, le bétail, les installations et
réserves d’eau potable et les ouvrages d’irrigation, en vue d’en priver, à raison
de leur valeur de subsistance, la population civile ou la Partie adverse, quel que
soit le motif dont on s’inspire, que ce soit pour affamer des personnes civiles,
provoquer leur déplacement ou pour toute autre raison.
La Cour internationale de Justice l’a rappelé dans son arrêt du 27 juin 1986, “la
fourniture d’une aide strictement humanitaire à des personnes ou à des forces se
trouvant dans un autre pays, quels que soient leurs affiliations politiques
ou leurs objectifs, ne saurait être considérée comme une intervention illicite ou à
tout autre point de vue contraire au
droit international.”
17

Comité
central
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