43 ｜2013 봄호 - 프랑스문화예술학회

Modulations & ornements ❚ 177
ont une structuration moléculaire 13) . Elles courent le long des lignes
mélodiques et colorent celles-ci en fonction d’un ici et maintenant
propres. Volontiers mélismatique, la musique modale travaille à un
autre rapport voix/musique où l’ornementation possède une forte
dimension performative, difficilement reproductible, qui s’inscrit dans
une interférence entre une circonstance et un ou des interprètes
donnés. Pensons par exemple ici au pansori coréen ou au chant
flamenco. Enfin, elle est modale dans le sens également où la
singularisation est hautement intensive, ce qui veut dire que la qualité
esthétique ne relève pas tant des caractéristiques formelles que des
points d’intensités que les interprètes s’autorisent. En ce sens, la
musique modale participerait de ce que Deleuze appelle « la répétition
rythme » en opposition à « la répétition-mesure » qui, dit-il, « est une
division régulière du temps, un retour isochrone d’éléments identiques.
Mais une durée, poursuit-il, n’existe que déterminée par un accent
tonique, commandée par des intensités. 14) »
La musique modale joue en effet sur les superpositions des lignes
mélodiques et leurs entrelacements. Elle apparaît davantage comme
un déploiement de variations en continu où les lignes harmoniques
prennent place dans une durée plutôt que dans les temps séquentiels
ou grands mouvements thématiques qui se juxtaposent en s’opposant
selon une logique dramatique ou descriptive. Ainsi, si l’on prend
l’exemple grégorien, « à la différence de la musique moderne, qui ne
connaît que deux modes, le majeur et le mineur, écrit Dom Gajard 15) ,
13) L’opposition entre le « moléculaire » et le « molaire » structure tout l’ouvrage de
Mille plateaux mais on pourra se reporter, par exemple, aux pages 75-78
14) Gilles Deleuze, Différence et répétition, Op.cit., p. 33.
15) Musicologue français (1885-1972) qui participa à la restauration du chant grégorien
à l’Abbaye de Solesmes.