Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau
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physiquement proche et socialement lointain 6 ».<strong>Le</strong> discours et <strong>la</strong> pratique <strong>de</strong>s<br />
artistes <strong>de</strong> <strong>rue</strong> revendiquent <strong>de</strong> travailler à une réappropriation <strong>de</strong>s <strong>rue</strong>s par <strong>la</strong><br />
popu<strong>la</strong>tion et tentent ainsi <strong>de</strong> faire face au caractère déliquescent <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville<br />
contemporaine. Désireux <strong>de</strong> toucher non pas un public mais <strong>de</strong>s publics, les<br />
artistes <strong>de</strong> <strong>rue</strong> défen<strong>de</strong>nt un art à vocation culturelle et popu<strong>la</strong>ire que garantit <strong>la</strong><br />
gratuité <strong>de</strong>s spectacles. Il ne s’agit pas ici <strong>de</strong> définir ce que sont les arts <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>rue</strong>,<br />
ni d’i<strong>de</strong>ntifier l’ensemble <strong>de</strong>s pratiques artistiques en espace urbain, mais bien<br />
plutôt <strong>de</strong> s’attacher à montrer qu’il existe, malgré <strong>la</strong> diversité et <strong>la</strong> pléthore <strong>de</strong>s<br />
propositions artistiques, une <strong>écriture</strong> spécifique à <strong>la</strong> foule et aux grands espaces.<br />
Sans entrer dans une analyse exhaustive, puisque chaque spectacle comporte sa<br />
propre <strong>écriture</strong>, j’essaierai, au travers d’une expérience théâtrale, d’i<strong>de</strong>ntifier les<br />
enjeux et les problématiques d’une <strong>écriture</strong> adaptée à <strong>la</strong> foule.<br />
Mon champ d’analyse concernera un spectacle déambu<strong>la</strong>toire <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
compagnie Oposito qui revendique une volonté <strong>de</strong> raconter <strong>de</strong>s histoires aux<br />
villes. Son ambition artistique est <strong>de</strong> transformer <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion qui unit les hommes<br />
au lieu <strong>de</strong> leur quotidien, <strong>la</strong> ville, au moyen <strong>de</strong> l’expérience esthétique. Cette<br />
étu<strong>de</strong> portera sur <strong>Le</strong>s Trottoirs <strong>de</strong> Jo’Burg… mirage, « sorti <strong>de</strong> fabrique » le 14<br />
août 2001 à Mor<strong>la</strong>ix (29). Ce déambu<strong>la</strong>toire présente <strong>de</strong>s personnages d’un autre<br />
mon<strong>de</strong> qui, au fil <strong>de</strong> leur avancée, découvrent d’immenses poupées, mères<br />
nourricières <strong>de</strong> l’Afrique. Ils entraînent les spectateurs dans un voyage au sein <strong>de</strong><br />
l’espace urbain pour leur présenter <strong>de</strong>s images hommages à une Afrique<br />
réinventée. Jean-Raymond Jacob, co-fondateur et metteur en scène <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
compagnie, adopte volontiers le terme <strong>de</strong> para<strong>de</strong> pour parler <strong>de</strong> son spectacle.<br />
Peut-être sans doute parce qu’il est le seul terme qui sous-entend un public <strong>de</strong><br />
masse, J-R. Jacob déc<strong>la</strong>re qu’elle est « un <strong>de</strong>s signes adaptés au <strong>la</strong>ngage <strong>de</strong>s foules<br />
et <strong>de</strong>s grands espaces», seule capable <strong>de</strong> « prendre le public par surprise, <strong>de</strong> tous<br />
côtés et l’entraîner avec lui pour lui raconter une histoire, l’embarquer comme<br />
passager inconditionnel d’un rêve magique, d’un délire communautaire – comme<br />
si vivre ensemble pouvait être encore possible 7 ». Ce spectacle multiplie en effet<br />
les espaces <strong>de</strong> jeu en alternant les déambu<strong>la</strong>tions et les tableaux fixes. Il empêche<br />
donc une vision interprétative totale, unique et unanime du spectacle puisqu’en<br />
6 Sylvia OSTROWETSKY, « <strong>Le</strong>s nouvelles déambu<strong>la</strong>tions urbaines », in Rue <strong>de</strong> <strong>la</strong> Folie, n°5, juillet<br />
1999, p.42<br />
7 Thierry VOISIN, « Transhumance, l’heure du troupeau »sur <strong>la</strong> thématique <strong>de</strong>s Para<strong>de</strong>s urbaines, in<br />
Rue <strong>de</strong> <strong>la</strong> Folie n°2, 1998, p.27<br />
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