24.10.2014 Views

Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau

Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau

Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

théâtrale originelle dépouillée <strong>de</strong>s artifices du lieu théâtral pré-construit. Antonin<br />

Artaud condamnait énergiquement le rapport scène/salle c<strong>la</strong>ssique dans sa<br />

conception du théâtre <strong>de</strong> <strong>la</strong> cruauté. Ce faisant, il faisait l'apologie <strong>de</strong> l'expression<br />

corporelle et ramenait déjà le théâtre au jeu <strong>de</strong> l'acteur qui envahirait <strong>la</strong> scène<br />

vi<strong>de</strong>. Peter Brook affine cette vision en renforçant <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong> l'espace vi<strong>de</strong>.<br />

Dans cette approche, il s'agit d'investir tout espace que l'on rencontre, construit ou<br />

non, indépendamment <strong>de</strong>s contingences, pour en faire une scène <strong>de</strong> théâtre. <strong>Le</strong>s<br />

éléments scénographiques, le jeu du comédien, <strong>la</strong> disposition du public <strong>de</strong>vront<br />

prendre en compte les contingences du dit espace. L'essentiel sera alors <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion<br />

que l'on aura réussie à établir entre les acteurs et les spectateurs, et l'espace<br />

<strong>de</strong>vient alors un outil. Pour Peter Brook :<br />

L'important ce n'est pas l'espace en théorie, mais l'espace en tant<br />

qu'outil [...]. Au théâtre, il y a <strong>de</strong>s choses qui ai<strong>de</strong>nt, et d'autres qui<br />

entravent. Hors du théâtre c'est pareil. Lorsque nous quittons les espaces<br />

conventionnels, pour aller dans <strong>la</strong> <strong>rue</strong>, <strong>la</strong> campagne, le désert, un garage,<br />

une étable ou n'importe quel endroit pourvu que nous soyons en plein air,<br />

ce<strong>la</strong> peut aussi bien constituer un avantage qu'un inconvénient. L'avantage,<br />

c'est qu'une re<strong>la</strong>tion peut tout <strong>de</strong> suite s'installer entre les acteurs et le<br />

mon<strong>de</strong>, ce qui ne pourrait pas se produire dans une autre circonstance.<br />

Ce<strong>la</strong> donne au théâtre une nouvelle bouffée d'oxygène. Inviter le public à<br />

rompre avec ses habitu<strong>de</strong>s conditionnées -notamment celle d'aller dans une<br />

salle spéciale- est un grand avantage du point <strong>de</strong> vue dramatique 47 .<br />

Dans <strong>Le</strong>s Trottoirs <strong>de</strong> Jo’Burg... mirage, le bitume est occupé pour<br />

l’événement par les comédiens et les spectateurs, c’est donc sur une « scène » nue<br />

en plein air qu’évoluent acteurs et spectateurs. Marcel Frey<strong>de</strong>fond reprend à juste<br />

titre <strong>la</strong> formule <strong>de</strong> Peter Brook : « Je peux prendre n’importe quel espace vi<strong>de</strong> et<br />

l’appeler scène. Quelqu’un traverse cet espace vi<strong>de</strong> pendant que quelqu’un d’autre<br />

l’observe, et c’est suffisant pour que l’acte théâtral soit amorcé » pour affirmer<br />

qu’« au fond <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce du spectateur est une parfaite métonymie <strong>de</strong> l’espace théâtral<br />

dans son ensemble. Puisque le spectacle est le résultat d’un dispositif plus ou<br />

moins délibéré <strong>de</strong> mise en vue et d’écoute, l’endroit d’où l’on voit et l’on entend<br />

constitue le déclenchement <strong>de</strong> l’effet spectacu<strong>la</strong>ire 48 .<br />

Ce personnel présent sur toute <strong>la</strong> déambu<strong>la</strong>tion fait s’asseoir et se lever les<br />

spectateurs <strong>de</strong>s premiers rangs pendant les tableaux fixes. Lors <strong>de</strong>s séquences <strong>de</strong><br />

déambu<strong>la</strong>tion, ils sont au plus près <strong>de</strong>s comédiens et veillent à préserver <strong>la</strong><br />

47 Peter BROOK, Points <strong>de</strong> suspension, Paris, Seuil, 1992, p.190<br />

48 Peter BROOK, Points <strong>de</strong> suspension, Paris, Seuil, 1992, p.40<br />

48

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!