Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau
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froi<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> leurs capes pour faire exploser les couleurs <strong>de</strong> leurs somptueux<br />
costumes. Ensuite, ils donnent aux spectateurs le temps d’admirer leur beauté et<br />
leur dignité, dans un silence très solennel, avant <strong>de</strong> les faire reculer par une<br />
agression simulée à coups <strong>de</strong> <strong>la</strong>nces enf<strong>la</strong>mmées. <strong>Le</strong>s rires <strong>de</strong> ces personnages<br />
retentissent et font re<strong>de</strong>scendre <strong>la</strong> tension.<br />
<strong>Le</strong> rythme, basé sur le concept du mirage, tente <strong>de</strong> conserver l’attention du<br />
spectateur jusqu’au terme <strong>de</strong> <strong>la</strong> représentation. « Je vou<strong>la</strong>is qu’on aille vers le<br />
mirage, que l’on travaille sur <strong>de</strong>s images, que l’une apparaisse <strong>de</strong>rrière l’autre,<br />
chassée par <strong>la</strong> première. C’est vraiment cette sensation que l’on a quand on est en<br />
Afrique, cette terre <strong>de</strong> contrastes 44 ». Aussi les différents mouvements, corporels<br />
ou « scéniques » intègrent en eux cette impression <strong>de</strong> mouvement continu. Au<br />
départ <strong>de</strong> <strong>la</strong> création, une chorégraphe avait été associée au projet <strong>de</strong>s Trottoirs <strong>de</strong><br />
Jo’Burg... mirage. Cependant, afin <strong>de</strong> toucher au plus près <strong>la</strong> véracité du<br />
mouvement découvert lors <strong>de</strong> l’expérience africaine, entendons par là un profond<br />
désir <strong>de</strong> retranscrire le mouvement né <strong>de</strong>s différentes rencontres artistiques<br />
éthiopienne ou sud-africaine, cette col<strong>la</strong>boration a été abandonnée. Martine<br />
Rateau, Thierry Lorent et Jean-Raymond Jacob ont donc travaillé à <strong>la</strong> mise en<br />
scène avec les comédiens en <strong>la</strong>boratoire afin <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r <strong>la</strong> cohérence <strong>de</strong>s<br />
mouvements. En effet, chacun <strong>de</strong>s trente-quatre personnages présentés dans <strong>Le</strong>s<br />
Trottoirs <strong>de</strong> Jo’Burg... mirage s’exprime par le corps. Il s’agit même <strong>de</strong> leur<br />
unique moyen d’expression puisqu’ils ne parlent pas. <strong>Le</strong>urs gestes et mouvements<br />
sont chorégraphiés et s’apparentent davantage à <strong>de</strong> <strong>la</strong> danse qu’à du théâtre.<br />
Chacun <strong>de</strong> leurs pas est mesuré et développé. On retrouve encore ici une vision du<br />
théoricien Artaud qui envisage une « sorte <strong>de</strong> danse supérieure, où les danseurs<br />
seraient avant tout <strong>de</strong>s acteurs 45 ». L’établissement d’une telle re<strong>la</strong>tion par le geste<br />
met en p<strong>la</strong>ce une véritable médiation entre comédien et public à travers une<br />
double donation <strong>de</strong> sens. <strong>Le</strong> spectateur choisit à son gré <strong>de</strong> décrypter, <strong>de</strong> donner<br />
une signification aux mouvements qui lui sont proposés. Nombre <strong>de</strong> comédiens du<br />
spectacle ont participé aux voyages africains. Ils y ont donc vécu les images que<br />
<strong>Le</strong>s Trottoirs <strong>de</strong> Jo’Burg...mirage représentent. La pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> création consistait<br />
donc à raconter les histoires, les émotions vécues à ceux qui n’avaient pas touché<br />
les terres <strong>de</strong> l’Afrique. Ces trente-quatre individus évoluent ensemble sur un<br />
44 Annexe 3 : Entretien avec Jean-Raymond Jacob<br />
45 Antonin ARTAUD, <strong>Le</strong> théâtre et son double, Paris, Gallimard (Folio Essais), 1964, p.88<br />
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