Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau
Caroline Raffin : Réception d'une écriture de la rue - Le Fourneau
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passant. Nous allons essayer <strong>de</strong> montrer comment cette compagnie recrée les<br />
conditions <strong>de</strong> <strong>la</strong> représentation pour capter l’attention <strong>de</strong> ses spectateurs.<br />
D’abord, sa première faculté est sans doute sa capacité à provoquer le<br />
silence. Alors que <strong>la</strong> <strong>rue</strong> est un lieu empli <strong>de</strong> parasites sonores, elle parvient, à<br />
force <strong>de</strong> bruits sourds provoqués par une rythmique <strong>de</strong> tôles, à faire cesser tous les<br />
autres bruits. <strong>Le</strong>s regards <strong>de</strong>s spectateurs réunis autour <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> tôles sont<br />
focalisés sur cette palissa<strong>de</strong>, attentifs comme ils le seraient <strong>de</strong>vant un ri<strong>de</strong>au <strong>de</strong><br />
théâtre qui tar<strong>de</strong>rait à s’ouvrir. Soudainement dans <strong>la</strong> pénombre <strong>de</strong> <strong>la</strong> nuit qui<br />
s’installe, ils voient tomber <strong>de</strong>vant eux ce « ri<strong>de</strong>au » métallique formé par les<br />
tôles. A plusieurs reprises, les spectateurs se retrouvent seuls face à une palissa<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> tôles. Ces confrontations mettent en danger le déjà fragile pacte <strong>de</strong><br />
représentation puisqu'elles leur donnent <strong>la</strong> possibilité <strong>de</strong> partir brutalement. Ce<br />
« ri<strong>de</strong>au » coupe en effet <strong>la</strong> séquence en cours, <strong>la</strong>isse le public silencieux, et<br />
permet <strong>de</strong> re<strong>la</strong>ncer le jeu vers une nouvelle direction. Il entraîne pour ainsi dire un<br />
changement <strong>de</strong> « scène ». Ensuite, Oposito profite d’une intervention nocturne<br />
pour mieux focaliser les regards. Avant le commencement <strong>de</strong> l’acte théâtral, le<br />
public est en position d’attente, c’est l’utilisation <strong>de</strong>s artifices dans l’obscurité <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> nuit tombante qui va attirer son regard. Visibles <strong>de</strong> très loin, ils gui<strong>de</strong>nt les<br />
regards vers l’aire <strong>de</strong> jeu et permettent <strong>de</strong> suivre <strong>de</strong> loin le mouvement <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
déambu<strong>la</strong>tion. L’enjeu <strong>de</strong> <strong>la</strong> scénographie est d’autant plus important que ce pacte<br />
<strong>de</strong> représentation est intrinsèquement lié à l’auto-institution <strong>de</strong> l’espace public en<br />
espace <strong>de</strong> jeu. Il faut ici souligner que l’effet d’auto-institution <strong>de</strong> l’espace et <strong>la</strong><br />
prise <strong>de</strong> risque du pacte <strong>de</strong> représentation sont considérablement minorés par le<br />
mo<strong>de</strong> d’organisation <strong>de</strong> l’événement : programmation dans le cadre d’un festival<br />
international <strong>de</strong> Théâtre <strong>de</strong> <strong>rue</strong>, <strong>Le</strong>uven en scène pour Louvain, proposition du<br />
conseil d’animation à l’occasion du 44 ème Pardon National <strong>de</strong> <strong>la</strong> Batellerie à<br />
Conf<strong>la</strong>ns-Sainte-Honorine, programmation dans le cadre <strong>de</strong> « l’Année <strong>de</strong>s 13<br />
Lunes 43 » pour Martigues. En effet, comment surprendre pour gar<strong>de</strong>r l’attention<br />
<strong>de</strong>s spectateurs quand le spectacle est programmé ?<br />
Oposito semble offrir une alternative intéressante à cette impasse. Conscient<br />
que <strong>la</strong> foule est un flux qu’il faut emmener à soi, elle envisage le public comme<br />
43 Saison <strong>de</strong>s Arts <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>rue</strong> à l’initiative du Conseil Général <strong>de</strong>s Bouches-du-Rhône, <strong>de</strong> Lieux<br />
Publics, Centre National <strong>de</strong> Création <strong>de</strong>s Arts <strong>de</strong> <strong>la</strong> Rue et <strong>de</strong> Karwan, Pôle <strong>de</strong> développement et<br />
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