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l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

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partie l’organisation démocratique, une première raison nous étant donnée ici : la<br />

démocratie empêche d’améliorer le sort <strong><strong>de</strong>s</strong> esclaves. Mais d’un autre côté, pour améliorer<br />

le sort <strong><strong>de</strong>s</strong> esclaves, il faut s’immiscer dans la vie privée <strong><strong>de</strong>s</strong> individus. Pourquoi n’a-t-il<br />

pas franchi le pas et dénoncé <strong>de</strong> manière catégorique l’esclavage ? Nous ne nous<br />

avancerons pas à donner une réponse précise à cette question. Il peut seulement être dit que<br />

Smith semble hésiter entre plusieurs priorités plus ou moins contradictoires : puisque<br />

l’esclave est la propriété d’un homme libre et que la propriété est un droit sacré, dans<br />

quelle mesure peut-on remettre en cause la propriété du second pour assurer la liberté du<br />

premier ? Il est dommage qu’il n’ait pas davantage poussé sa réflexion à cet égard.<br />

Néanmoins, il ne fait aucun doute pour Adam Smith que si l’esclavage est moralement<br />

condamnable, il l’est aussi économiquement 19 . L’esclave n’a en effet aucun intérêt à<br />

travailler <strong>de</strong> son mieux, alors que son entretien est entièrement assumé par son maître<br />

(Smith, 1776, p. 94, 444). Un homme libre est donc toujours un meilleur travailleur 20 .<br />

3. Une certaine vision <strong>de</strong> la démocratie.<br />

Comme l’exemple précé<strong>de</strong>nt l’illustre, Smith n’envisage pas le suffrage universel<br />

comme une évolution possible et favorable du système. La démocratie, pour lui, est<br />

synonyme <strong>de</strong> « factions rancunières et virulentes », « qui ont si souvent divisé les<br />

affections <strong>de</strong> leur peuple et troublé la tranquillité <strong>de</strong> leurs gouvernements » (Smith, 1776,<br />

p. 1078). Mais Adam Smith dénonce aussi et surtout les compagnies du commerce<br />

colonial, notamment en In<strong>de</strong>, qui oppriment et exploitent le peuple et détruisent le<br />

développement du pays qui est sous leur juridiction (Smith, 1776, p. 736-737, 849-850).<br />

Cet apparent paradoxe n’en est pas un, car si Smith ne défend pas a priori la<br />

démocratie, il défend l’idée constitutionnelle, y compris le droit d’élire <strong><strong>de</strong>s</strong> assemblées, et<br />

s’oppose au cumul du pouvoir économique et du pouvoir politique (Smith, 1776, p. 921).<br />

Le souverain se doit d’avoir pour but la défense <strong>de</strong> la Constitution, elle-même garante <strong>de</strong><br />

l’intérêt du corps social, c’est-à-dire <strong>de</strong> l’ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong> individus. Autrement dit, ce n’est<br />

pas à l’Etat que Smith s’oppose, mais plutôt à toute forme arbitraire du pouvoir. De plus,<br />

dans sa volonté <strong>de</strong> réduire le rôle du gouvernement à ce qui est rigoureusement <strong>de</strong> son<br />

19 Rappelons que c’est la Déclaration <strong>de</strong> 1793, dans son article 18, qui précise que « Tout homme peut<br />

engager ses services, son temps, mais il ne peut se vendre ni être vendu. Sa personne n’est pas une propriété<br />

aliénable… ». L’article 4 <strong>de</strong> la Déclaration <strong>de</strong> 1948 pose quant à lui : « Nul ne sera tenu en esclavage ni en<br />

servitu<strong>de</strong> ; l’esclavage et la traite <strong><strong>de</strong>s</strong> esclaves sont interdits sous toutes leurs formes. »<br />

20 Nous discutons ce point par ailleurs, cf. (Kolacinski, 2002b).<br />

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