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l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

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1. La liberté <strong>de</strong> circuler librement.<br />

Adam Smith a précédé ici les juristes en s’opposant, en tant qu’économiste, à la loi<br />

sur les pauvres, non pas à cause <strong>de</strong> ses effets sociaux, mais bien par le rejet <strong>de</strong> ses effets<br />

sur les <strong>droits</strong> et la liberté. En rejetant la loi sur les pauvres, il défend une liberté <strong>de</strong> base,<br />

celle <strong>de</strong> circuler, puisque cette loi « consiste dans la difficulté qu’a un homme pauvre à<br />

obtenir un domicile, voire à être autorisé à exercer son industrie dans toute autre paroisse<br />

que la sienne » (Smith, 1776, p. 160) 8 . A noter qu’ainsi il défend aussi le droit au logement<br />

et à rési<strong>de</strong>nce, ainsi que la liberté d’exercer son travail. Mais le plus important, c’est que<br />

cette loi a pour effet <strong>de</strong> soumettre les déplacements <strong><strong>de</strong>s</strong> pauvres à la discrétion <strong><strong>de</strong>s</strong> officiers<br />

paroissiaux (I<strong>de</strong>m, p. 164-165). Ce manque <strong>de</strong> liberté <strong>de</strong> mouvement, qui s’accompagne<br />

nécessairement <strong>de</strong> contrôles et <strong>de</strong> sanctions, nuit à l’économie – en empêchant la libre<br />

circulation du travail – tout en étant une injustice flagrante, une violation <strong>de</strong> la liberté :<br />

« Expulser <strong>de</strong> la paroisse où il choisit <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r un homme qui n’a pas commis <strong>de</strong><br />

méfait, est une atteinte évi<strong>de</strong>nte à la liberté et à la justice naturelle. Cependant, les<br />

gens du peuple d’Angleterre, si jaloux <strong>de</strong> leur liberté sans toutefois jamais<br />

comprendre, comme les gens du peuple <strong>de</strong> la plupart <strong><strong>de</strong>s</strong> autres pays, exactement en<br />

quoi elle consiste, tolèrent maintenant <strong>de</strong>puis plus d’un siècle <strong>de</strong> suite d’être<br />

exposés à cette oppression sans remè<strong>de</strong>. » (Smith, 1776, p. 165-166).<br />

Cette défense <strong>de</strong> la liberté <strong>de</strong> mouvement va plus loin puisque Smith la conduit d’abord<br />

pour une raison <strong>de</strong> justice, puis pour une raison économique. De fait, une hiérarchie <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

valeurs peut être établie dans l’œuvre <strong>de</strong> Smith, puisque si la justice sert <strong>de</strong> base à<br />

l’expansion économique, elle la précè<strong>de</strong> nécessairement. L’expansion économique a alors<br />

pour but profond le renforcement <strong>de</strong> la justice, notamment par l’accroissement <strong><strong>de</strong>s</strong> moyens<br />

<strong>de</strong> réponse aux besoins, qu’ils soient individuels ou collectifs. Il peut d’ailleurs être relevé,<br />

comme le note Petkantchin (1996, p. 101, 200), qu’Adam Smith inscrit l’économie<br />

politique au sein <strong>de</strong> la Philosophie Morale qui inclut également l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la morale et <strong>de</strong><br />

la jurispru<strong>de</strong>nce.<br />

Fort <strong>de</strong> cette supériorité <strong>de</strong> la liberté sur l’intérêt mercantile, il s’oppose par<br />

exemple aux diverses lois qui interdisent à un artisan <strong>de</strong> partir à l’étranger : « je pense qu’il<br />

8 La loi sur les pauvres imposait aux paroisses <strong>de</strong> pourvoir à la subsistance <strong>de</strong> leurs pauvres. Le « but du jeu »<br />

pour les paroisses consistait donc à se débarrasser <strong>de</strong> leurs pauvres en les envoyant chez les autres ; d’où la<br />

nécessité d’instaurer un contrôle strict <strong><strong>de</strong>s</strong> mouvements <strong><strong>de</strong>s</strong> pauvres, forçant ceux-ci à rester dans leur<br />

paroisse d’origine. (N.B. : la paroisse est ici administrative, mais la religion étant religion d’Etat, les<br />

découpages administratifs et religieux se recoupent).<br />

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