l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I
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déterminer comment atteindre ou éviter (respectivement) ces états. Nous revenons par la suite (chapitre II) sur certaines de ces démarches, mais nous pouvons déjà noter que, si adopter un sens de la justice au sein de la répartition peut conduire à la prise en compte des droits de l’homme par l’économiste, ceux-ci ne peuvent être réduits à de simples « intérêts protégés légalement » et sont distincts, au moins en partie, de la justice. En outre, selon le critère adopté, les droits de l’homme seront plus ou moins sauvegardés par l’approche de la justice choisie. E. L’école française de la régulation. Il existe, en France, plusieurs théories de la régulation qui se rattachent, chacune à des degrés divers, à l’histoire, au marxisme et au keynésianisme, afin de donner des schémas de compréhension de la régulation de l’économie capitaliste. Nous revenons sur ce type d’analyse dans notre chapitre III ; nous voulons préciser simplement ici le lien le plus évident, à première vue, entre ces théories et la problématique des droits de l’homme. Il s’agit de la question des normes de la régulation qui sont de plusieurs ordres (Di Ruzza, 1993) : les normes de régulation sont des contraintes globales à respecter pour que la régulation s’effectue ; les normes régulatrices sont constituées de variables économiques qui s’imposent aux agents de façon consciente ou non ; les normes de rationalité, enfin, sont les normes de comportement des agents économiques eux-mêmes. L’ensemble de ces normes constitue le cadre d’un mode de régulation et permet de maintenir la croissance du système économique. Cependant, l’évolution de ce système et de la société dans laquelle il s’inscrit, entraîne des contradictions qui poussent au changement des normes. Les droits de l’homme, constituant une norme à part entière, peuvent s’inscrire dans ce triptyque normatif ou être autonomes. Reste à savoir quel est leur mode de mise en place en fonction du mode de régulation en vigueur et quelles sont les interactions entre le système économique et la nécessité de respecter ces droits. 56
Section II : Adam Smith, un instigateur des droits de l’homme ? « Favoriser le petit intérêt d’un seul petit ordre d’hommes dans un seul pays est préjudiciable à l’intérêt de tous les autres ordres de ce pays, et de tous les hommes dans tous les autres pays ». Cette phrase, issue de la Richesse des Nations d’Adam Smith (1776, p. 704), illustre le cœur de la démarche économique de cet auteur : garantir les conditions de justice nécessaires au respect de l’intérêt de tous les hommes. Cependant, les théories que l’on dit peu ou prou inspirées d’Adam Smith ne répondent que très peu aux véritables objectifs de l’économie smithienne, car elles ignorent l’importance que celui-ci donnait à la justice ou à la morale face à l’intérêt égoïste des individus. C’est un pan entier de son œuvre et de sa réflexion qui se trouve ainsi exclu de toutes les théories qui s’en réclament pourtant. C’est plus spécialement, mais pas exclusivement, dans cette « face cachée » de l’œuvre d’Adam Smith que nous nous retrouvons ici. Thomas Paine, dans ses Droits de l’Homme, montre son admiration pour Smith (Paine, 1790, p. 106) et, du reste, beaucoup d’idées économiques et politiques défendues par T. Paine sont similaires à celles de Smith. Nous insisterons quelque peu sur cette parenté, représentative d’un esprit libéral progressiste qui caractérisait les révolutionnaires d’alors et dont Adam Smith peut être considéré comme l’un des inspirateurs directs. La défense des droits de l’homme chez Adam Smith reste à l’état d’ébauche, puisqu’il écrit quelques années avant la Révolution française, et donc avant l’existence des Droits de l’Homme stricto sensu. Cette défense « implicite » existe néanmoins, Thomas Paine ne s’y est pas trompé, et elle est double : d’une part il s’agit de défendre certaines valeurs en tant que telles et, d’autre part, de mettre en lumière leur « utilité » pour le système économique, tel que décrit par Adam Smith. C’est en évoquant à tour de rôle les différentes catégories des droits de l’homme que l’on peut montrer l’apport d’Adam Smith à chacune d’entre elles. Nous commençons par la transition du citoyen à l’homme qui, chez Smith, passe de l’opposition à l’Etat (droit des contribuables) à la dénonciation de la guerre (droit des hommes). Puis, nous indiquons ensuite l’affirmation des libertés des travailleurs chez Adam Smith. Ce dernier, loin d’avoir toute confiance en l’autorégulation du marché, donne les prémices des droits sociaux et de l’intervention sociale de l’Etat. Ensuite, nous mettons en évidence l’importance des droits du justiciable. Le dernier point conclut sur l’importance de la démocratie qui découle directement des points précédents, et extrapole la vision du développement d’Adam Smith. 57
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seul pays est préjudiciable à l’intérêt <strong>de</strong> tous les autres ordres <strong>de</strong> ce<br />
pays, et <strong>de</strong> tous les hommes dans tous les autres pays ».<br />
Cette phrase, issue <strong>de</strong> la Richesse <strong><strong>de</strong>s</strong> Nations d’Adam Smith (1776, p. 704), illustre le<br />
cœur <strong>de</strong> la démarche économique <strong>de</strong> cet auteur : garantir les conditions <strong>de</strong> justice<br />
nécessaires au respect <strong>de</strong> l’intérêt <strong>de</strong> tous les hommes. Cependant, les théories que l’on dit<br />
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l’économie smithienne, car elles ignorent l’importance que celui-ci donnait à la justice ou à<br />
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plus spécialement, mais pas exclusivement, dans cette « face cachée » <strong>de</strong> l’œuvre d’Adam<br />
Smith que nous nous retrouvons ici.<br />
Thomas Paine, dans ses Droits <strong>de</strong> l’Homme, montre son admiration pour Smith<br />
(Paine, 1790, p. 106) et, du reste, beaucoup d’idées économiques et politiques défendues<br />
par T. Paine sont similaires à celles <strong>de</strong> Smith. Nous insisterons quelque peu sur cette<br />
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d’alors et dont Adam Smith peut être considéré comme l’un <strong><strong>de</strong>s</strong> inspirateurs directs. La<br />
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quelques années avant la Révolution française, et donc avant l’existence <strong><strong>de</strong>s</strong> Droits <strong>de</strong><br />
l’Homme stricto sensu. Cette défense « implicite » existe néanmoins, Thomas Paine ne s’y<br />
est pas trompé, et elle est double : d’une part il s’agit <strong>de</strong> défendre certaines valeurs en tant<br />
que telles et, d’autre part, <strong>de</strong> mettre en lumière leur « utilité » pour le système économique,<br />
tel que décrit par Adam Smith.<br />
C’est en évoquant à tour <strong>de</strong> rôle les différentes catégories <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme<br />
que l’on peut montrer l’apport d’Adam Smith à chacune d’entre elles. Nous commençons<br />
par la transition du citoyen à l’homme qui, chez Smith, passe <strong>de</strong> l’opposition à l’Etat (droit<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> contribuables) à la dénonciation <strong>de</strong> la guerre (droit <strong><strong>de</strong>s</strong> hommes). Puis, nous indiquons<br />
ensuite l’affirmation <strong><strong>de</strong>s</strong> libertés <strong><strong>de</strong>s</strong> travailleurs chez Adam Smith. Ce <strong>de</strong>rnier, loin d’avoir<br />
toute confiance en l’autorégulation du marché, donne les prémices <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> sociaux et <strong>de</strong><br />
l’intervention sociale <strong>de</strong> l’Etat. Ensuite, nous mettons en évi<strong>de</strong>nce l’importance <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong><br />
du justiciable. Le <strong>de</strong>rnier point conclut sur l’importance <strong>de</strong> la démocratie qui découle<br />
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