l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

liberté : celle que l’on a sur son propre corps qui n’appartient – et ne doit appartenir – à
personne d’autre.
Mais Proudhon, qui se montre donc d’abord très hostile à la propriété, la justifie
finalement comme une liberté contre le pouvoir étatique. Car, pour Proudhon, la propriété
est légitime si elle est généralisée, ce qui implique, le désir d’appropriation de l’un
contrebalançant celui de l’autre, qu’il y ait un nivellement et une égalisation des propriétés.
L’Etat, lui, est un organe de concentration qui dissout les individualités dans le grand tout
de la société communiste. Au contraire, la propriété est une puissance de décentralisation,
anti-despotique et anti-unitaire, qui peut se situer à la base de la fédération. Ainsi, la
propriété par essence autocratique, devient républicaine dès lors qu’elle est transposée dans
une société politique. Il y a une reconnaissance de la propriété comme droit de l’homme,
protectrice de l’individu face au pouvoir, ce qui implique de la généraliser pour tous les
citoyens. Par son rejet de l’Etat et de la tyrannie de la majorité, Proudhon s’inscrit ainsi,
dans sa défense – partielle – des droits de l’homme, comme le précurseur reconnu des
anarchistes 44 .
B. Les anarchistes : Bakounine et Kropotkine.
Les anarchistes du XIXe siècle ne sont pas vraiment des économistes et reprennent
des analyses comme celles de Ruskin ou d’Henry George. Ils sont néanmoins essentiels
dans l’histoire des idées, puisqu’ils sont les défenseurs indéfectibles de la classe ouvrière,
tout en étant totalement opposés à l’Etat. Par ce dernier trait, ils peuvent être vus comme
les précurseurs de certains ultra-libéraux, nommés « libertariens ». Cependant, les
anarchistes ont ceci de particulier que s’ils considèrent l’Etat comme uniquement nuisible,
ils ne voient généralement en l’homme qu’un être naturellement porté vers la bonté. Or,
l’économie, par le biais inverse d’une focalisation sur l’égoïsme, amène à prendre en
compte la diversité des comportements : même dans une société idéale, des sentiments et
des actes néfastes peuvent exister et exiger la mise en place d’organes supérieurs de
règlement des conflits et de maintien de « l’ordre » 45 . Ils nous montrent ainsi que les droits
44 Ceux-ci ne le suivent toutefois pas dans sa misogynie, et reconnaissent et réclament l’égalité des hommes
et des femmes qui passe notamment par l’émancipation de celles-ci des activités du foyer domestique.
45 Notons que les anarchistes ne sont pas pour le Chaos, mais bien pour une société organisée et
opérationnelle, qui laisse certes une large place à la liberté individuelle, mais n’exclut pas totalement les
rapports d’autorité, lorsque ceux-ci s’avèrent légitimes, justifiés et acceptés par tous comme tels. Ce point
peut, dans une certaine mesure, les différencier de leurs successeurs modernes.
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