l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

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02.10.2014 Views

D’une telle définition à l’affirmation du droit au développement, il n’y a qu’un pas que nous invitent aussi à franchir les écrits d’auteurs comme Joseph Stiglitz ou Amartya Sen. La question qui reste en suspens est alors de savoir dans quelle mesure la science économique peut influencer les décisions politiques et les accords internationaux. Jusqu’à présent, la doctrine économique a plutôt bien réussi, que ce soit le libéralisme économique, puis le néo-libéralisme, ou le marxisme orthodoxe et le marxisme-léninisme 51 . Mais la science économique, elle, a encore beaucoup de chemin à faire avant d’être « efficace », c’est-à-dire avant de trouver le chemin de sa mise en application, au sens que l’on peut donner aux sciences « dures » qui, à partir d’un théorème, donnent naissance à des technologies nouvelles et à des produits divers et variés 52 . 51 Si notre mémoire est bonne, il est intéressant de noter que Kenneth Arrow faisait la remarque que la scientificité d’une théorie économique se mesure aussi par sa capacité à convaincre. 52 Que l’on pense, par exemple, aux technologies « floues », ayant permis la fabrication de caméscopes perfectionnés, et qui sont issues de formules mathématiques extrêmement complexes d’un chercheur grenoblois. Toutefois, si le mathématicien est français, les applications sont japonaises ! On le voit, le développement est un fait international qui mériterait une plus grande coopération, notamment en matière de recherche, qu’elle soit fondamentale ou appliquée. 462

Conclusion Générale. Arrivé au bout de cette recherche, le lecteur aura pu être étonné, voire déçu, de n’y point trouver d’étude empirique d’une « économie organisationnelle » du milieu de l’action humanitaire, des ONG et autres acteurs de ce domaine. Cela pourtant, n’a rien d’étonnant, car notre propos n’était pas d’analyser « l’économie », au sens domestique, des droits de l’homme. Il s’agissait, au contraire, d’adopter un point de vue global, « métaéconomique », afin de comprendre la place des droits de l’homme, en tant que principes mais aussi comme réalisations concrètes, au sein de la théorie économique et dans le processus du développement. Loin de vouloir simplement analyser ce qui pourrait s’appeler le « marché des droits de l’homme » ou encore, « l’économie de l’humanitaire » 1 , nous voulions montrer comment les droits de l’homme peuvent (et doivent) être au cœur d’un changement économique profond, susceptible de rendre, à terme, l’action humanitaire superflue 2 . Mais il s’agissait aussi d’envisager un possible changement dans la science économique ellemême, en réaffirmant la nécessité, pour la démarche scientifique, de prendre en compte les valeurs « humaines » dans les mécanismes économiques, valeurs supérieures à tous points de vue au seul taux de profit et à la croissance économique comme buts en soi. Cela impliquait deux étapes : − La compréhension et la justification théorique, du point de vue économique, des droits de l’homme (Chapitres I et II). − La compréhension de leur insertion historique dans le développement économique et des mécanismes nécessaires au prolongement et à l’approfondissement de cette insertion (Chapitres III et IV). 1 Ou, dans un autre registre, ce que Noam Chomsky a nommé « l’économie politique des droits de l’homme », c’est-à-dire l’impérialisme économique des grandes puissances par le biais de leurs multinationales, provoquant par exemple des coups d’Etat (en Amérique Latine pour les Etats-Unis, en Afrique pour la France). 2 Nous ne nous sommes pas, pour autant, prononcé clairement sur la nécessité de la fin du capitalisme. Il ne s’agit pas là d’une ambiguïté. Il nous semble, en effet, que pour réaliser les droits de l’homme, il faut convaincre toutes les parties prenantes. En outre, nous avons indiqué que le marché a un rôle dans la garantie des droits de l’homme et que le capitalisme peut avoir sa place au sein de la sphère économique. L’égoïsme est une chose naturelle et nécessaire, disait K. Marx. L’opinion que nous avons émise est qu’il y a aujourd’hui les potentiels nécessaires (mais sont-ils suffisants ? Nous le pensons également) pour amorcer le dépassement du capitalisme, celui-ci étant réduit au rôle d’outil au service d’un autre mode civilisationnel dominant : le paradigme démocratique. De ce point de vue, nous accepterions la catégorisation de « postcapitaliste » pour nous définir, par opposition à celle de « néo-keynésien » à laquelle nous ne nous rattachons pas. 463

Conclusion Générale.<br />

Arrivé au bout <strong>de</strong> cette recherche, le lecteur aura pu être étonné, voire déçu, <strong>de</strong> n’y<br />

point trouver d’étu<strong>de</strong> empirique d’une « économie organisationnelle » du milieu <strong>de</strong> l’action<br />

humanitaire, <strong><strong>de</strong>s</strong> ONG et autres acteurs <strong>de</strong> ce domaine. Cela pourtant, n’a rien d’étonnant,<br />

car notre propos n’était pas d’analyser « l’économie », au sens domestique, <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong><br />

l’homme. Il s’agissait, au contraire, d’adopter un point <strong>de</strong> vue global, « métaéconomique »,<br />

afin <strong>de</strong> comprendre la place <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme, en tant que principes mais aussi<br />

comme réalisations concrètes, au sein <strong>de</strong> la théorie économique et dans le processus du<br />

développement.<br />

Loin <strong>de</strong> vouloir simplement analyser ce qui pourrait s’appeler le « marché <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme » ou encore, « l’économie <strong>de</strong> l’humanitaire » 1 , nous voulions montrer<br />

comment les <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme peuvent (et doivent) être au cœur d’un changement<br />

économique profond, susceptible <strong>de</strong> rendre, à terme, l’action humanitaire superflue 2 . Mais<br />

il s’agissait aussi d’envisager un possible changement dans la science économique ellemême,<br />

en réaffirmant la nécessité, pour la démarche scientifique, <strong>de</strong> prendre en compte les<br />

valeurs « humaines » dans les mécanismes économiques, valeurs supérieures à tous points<br />

<strong>de</strong> vue au seul taux <strong>de</strong> profit et à la croissance économique comme buts en soi. Cela<br />

impliquait <strong>de</strong>ux étapes :<br />

− La compréhension et la justification théorique, du point <strong>de</strong> vue économique, <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong><br />

<strong>de</strong> l’homme (Chapitres I et II).<br />

− La compréhension <strong>de</strong> leur insertion historique dans le développement économique et<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> mécanismes nécessaires au prolongement et à l’approfondissement <strong>de</strong> cette<br />

insertion (Chapitres III et IV).<br />

1 Ou, dans un autre registre, ce que Noam Chomsky a nommé « l’économie politique <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong><br />

l’homme », c’est-à-dire l’impérialisme économique <strong><strong>de</strong>s</strong> gran<strong><strong>de</strong>s</strong> puissances par le biais <strong>de</strong> leurs<br />

multinationales, provoquant par exemple <strong><strong>de</strong>s</strong> coups d’Etat (en Amérique Latine pour les Etats-Unis, en<br />

Afrique pour la France).<br />

2 Nous ne nous sommes pas, pour autant, prononcé clairement sur la nécessité <strong>de</strong> la fin du capitalisme. Il ne<br />

s’agit pas là d’une ambiguïté. Il nous semble, en effet, que pour réaliser les <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme, il faut<br />

convaincre toutes les parties prenantes. En outre, nous avons indiqué que le marché a un rôle dans la garantie<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme et que le capitalisme peut avoir sa place au sein <strong>de</strong> la sphère économique. L’égoïsme<br />

est une chose naturelle et nécessaire, disait K. Marx. L’opinion que nous avons émise est qu’il y a<br />

aujourd’hui les potentiels nécessaires (mais sont-ils suffisants ? Nous le pensons également) pour amorcer le<br />

dépassement du capitalisme, celui-ci étant réduit au rôle d’outil au service d’un autre mo<strong>de</strong> civilisationnel<br />

dominant : le paradigme démocratique. De ce point <strong>de</strong> vue, nous accepterions la catégorisation <strong>de</strong> « postcapitaliste<br />

» pour nous définir, par opposition à celle <strong>de</strong> « néo-keynésien » à laquelle nous ne nous rattachons<br />

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