l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

les plus grosses difficultés, c’est d’abord l’interprétation des ADPIC par l’OMC, ainsi que
les modalités de leur mise en œuvre.
Ces dernières ont fait l’objet d’une pression directe de la part de certains pays ou de
certaines firmes pharmaceutiques sur les autres pays, surtout du Sud, pour qu’ils adoptent
rapidement des mesures de protection en accord avec les ADPIC, mais aussi allant plus
loin que ceux-ci 32 . La mise en œuvre de protections plus strictes, nuisibles de fait à la
réalisation du droit à la santé, a donc été le résultat de pratiques internationales non
conformes à l’équité, au droit à l’autodétermination des peuples, à la souveraineté
nationale, etc. Quant à l’interprétation faite par l’OMC, elle a donné la priorité aux droits
des possesseurs, c’est-à-dire des firmes, et a escamoté ainsi les intérêts sociaux plus larges
qui entrent en jeu 33 et qui sont pourtant potentiellement reconnu par les instruments de
l’OMC.
3. Les potentialités de l’OMC.
Car, en effet, l’accord sur les ADPIC reconnaît plusieurs possibilités de limitations
des droits de propriété, notamment par l’article 27 qui précise que peuvent être exclues de
la brevetabilité les découvertes contraires à l’ordre public ou à la morale, ainsi que celles
susceptibles de nuire à la vie des personnes, des animaux ou des végétaux. L’article 8.1
concerne spécifiquement les questions de la santé publique, de l’alimentation et de l’intérêt
général et l’article 40 concerne le contrôle des pratiques anticoncurrentielles.
L’ASP, quant à lui, permet aux membres de l’OMC de prendre des mesures
restrictives sur des bases sanitaires ou phytosanitaires, mais seulement à condition qu’elles
aient pour but de protéger la santé ou la vie des personnes, des animaux ou des végétaux et
que ces mesures soient basées sur des évidences scientifiques suffisantes 34 .
Plus généralement, des mesures de protection des droits de l’homme qui
entraîneraient des limitations du libre-échange peuvent se baser sur les restrictions au
commerce définies à l’article XX du GATT 35 . Ce dernier dispose en effet que :
32 Cf. (Dommen, 2002, p. 27s) et (Oloka-Onyango et Udagama, 2001).
33 Cf., par exemple, (Cassier, 2002).
34 Les cas de l’interdiction des importations, prise par l’Europe, du bœuf aux hormones et des produits
contenant de l’amiante, entrent dans ce cadre. Cependant, le mécanisme de règlement de l’OMC a été plutôt
défavorable à ces mesures, cf. (Dommen, 2002, p. 17s).
35 Cf. (Flauss, 2001, p. 245) et (Flory et Ligneul, 2001, p. 184).
372