l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

nous opposer avec raison la remarque qui suit. Définir le développement comme la
réalisation des droits de l’homme est commettre un pléonasme ou une simple tautologie ;
nous aurions recours à une solution de facilité puisque pour définir et justifier le lien entre
les droits de l’homme et le développement, nous poserions simplement l’équation :
Développement = mise en œuvre des droits de l’homme
(a)
Nous ne récusons pas cette critique. Toutefois, il nous semble – et ce chapitre s’efforce de
le montrer – qu’elle n’est pas juste. Pour nous, il ne s’agit pas vraiment de définir le
développement comme la « réalisation » des droits de l’homme 4 mais plutôt, d’une part, de
montrer quels sont les liens entre la promotion de ceux-ci et le développement économique
(la croissance) et, d’autre part, de pointer les limites du seul développement économique
lorsqu’il ne prend pas en compte ces liens. Cela appelle effectivement une redéfinition du
développement capable de prendre en compte l’aspect multidimensionnel de celui-ci, en
opposition à sa réduction à la seule croissance. Dans ce cadre, le droit au développement
est un outil essentiel, et c’est ce dernier qui peut être défini comme la réalisation de tous les
droits de l’homme 5 , plutôt que le développement au sens strictement économique. Cet outil
permet également de dépasser les limites d’une interprétation économique qui utilise
essentiellement des indicateurs de bases (PIB, PNB, taux d’inflation, etc.).
D’ailleurs, il convient de reconnaître que le développement économique peut avoir
lieu avec des violations des droits de l’homme. Les modèles qui prennent la défense des
régimes dictatoriaux, l’illustrent parfaitement (voir infra section II). Cependant, et au-delà
de la constatation inverse que la violation des droits de l’homme n’entraîne pas
systématiquement le développement, notre position est double.
Elle est d’abord positive 6 : en théorie, il est possible de montrer que le
développement peut profiter de la réalisation des droits de l’homme. Et si cela est vrai en
théorie, les faits sont une source de confirmation à un double niveau : il est par exemple
4
Au surplus, cette critique serait plus juste en ce qui concerne la « justice sociale » que nous définissons
effectivement comme la possibilité de réalisation des droits de l’homme ; cf. notre chapitre II et (Kolacinski,
2001a). Mais le problème n’est pas identique : la justice sociale est un concept flou auquel nous voulions
donner un sens plus précis et plus opérationnel. Le développement a, quant à lui, une multitude de sens
possibles et nécessaires, et c’est la réduction opérée par une interprétation uniquement économique ou
monétaire, que nous entendons récuser.
5 Suite à la note précédente, nous pouvons préciser dès à présent que le droit au développement peut ainsi être
interprété comme la transposition de la justice sociale au niveau international ; voir la section III, infra.
6
Sur ces questions, voir aussi les chapitres II et III supra.
352