l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I
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autres faire à leur place » (se comporter en passager clandestin, en quelque sorte, ce qui n’est toutefois pas leur désir). Au contraire, le premier devoir des « grandes » puissances démocratiques est d’abord de redistribuer démocratiquement le pouvoir au sein des institutions internationales. Ainsi, par exemple, on peut être surpris que les dirigeants du FMI et de la Banque mondiale soient des occidentaux, alors même que ces institutions œuvrent exclusivement dans (et normalement pour) les pays du Sud et, depuis 1990, dans les pays de l’Europe de l’Est, dits en transition. En matière d’économie des droits de l’homme, toutefois, les problèmes sont plus profonds et sont, notamment, de deux ordres. Tout d’abord, si les actions catégorielles et spécifiques des ONG, de l’OIT, du PNUD et autres organisations du même type, sont essentielles, elles ne sont en rien suffisantes, car elles passent à côté des problèmes globaux, en particulier financiers. Ainsi, quatre obstacles directs se dressent face au développement et donc, face au respect des droits de l’homme : la dette, le niveau des prix et leur structure (les termes de l’échange, le différentiel de prix entre les pays du Nord et les pays du Sud), le non-accès au patrimoine commun de l’humanité ; cf. (de Bernis, 1998, p. 368s) et, sur le blocage des prix, également (de Bernis, 1984). Or, certains répondront à cela que les institutions internationales sont et doivent être spécialisées, les questions financières étant du seul ressort du FMI et de la Banque mondiale, et le commerce de celui de l’OMC. Cependant, un argument simple est opposable à ceux qui considèrent que cette spécialisation signifie, d’une part, une absence de dialogue et de travail commun et global entre ces institutions et, d’autre part, que le FMI et l’OMC n’ont pas à se soucier des droits de l’homme, qui seraient « politiques ». L’argument est que, d’une part, toutes les institutions créées à la fin de la Seconde guerre mondiale, dépendent de la Charte des Nations-Unies et ont donc pour devoir (pour méta-normes) de respecter et de promouvoir les droits de l’homme ; d’autre part, en étendant son domaine de compétence, le FMI a imposé des choix politiques aux Etats du Tiers Monde quasiment mis sous tutelle – le FMI impose donc bien des mesures clairement politiques. Ceci nous amène au second problème : la légitimité de la représentation des Etats au sein des institutions internationales et la légalité de leurs actions au sein de ces institutions. Autrement dit, il s’agit de constater, tout d’abord, qu’au-delà du manque de démocratie dans le fonctionnement même de ces institutions, les représentants des Etats vont défendre leur point de vue particulier alors qu’ils sont, soit des ministres des finances issus des milieux financiers (FMI) soit des ministres du commerce issus du milieu des affaires 346
(OMC) 34 . D’où l’importance des mouvements sociaux pour faire admettre un autre point de vue sur la mondialisation : celui des personnes qui en subissent tous les effets négatifs et rarement les effets positifs. Il s’agit, ensuite, de constater que les Etats ont des engagements en matière de respect des droits de l’homme, engagements qu’ils oublient dès lors qu’ils agissent par le truchement d’une institution internationale. Un tel problème se pose à la fois au niveau des institutions internationales et au niveau régional (Union européenne). La formation d’un véritable droit international et d’une Cour de justice correspondante est la seule voie permettant, à terme, le respect des normes par les institutions internationales et donc la prise en compte des droits de l’homme dans leurs actions 35 . C. Une alternative globale : la réévaluation des biens publics. Face aux lacunes des institutions internationales, il est possible d’envisager les problèmes globaux comme relevant de la responsabilité conjointe de l’ensemble des Etats, dont l’union démocratique peut contrebalancer la puissance croissante des autres macrounités, à savoir les firmes transnationales (mais aussi, pourquoi pas, les réseaux terroristes, puisque ceux-ci ont partiellement pour origine la déstructuration de l’économie mondiale liée à une mondialisation non contrôlée). Cette union peut (et doit) se dessiner à deux niveaux qui doivent être pensés et construits comme complémentaires : le niveau « local », c’est-à-dire des regroupements régionaux liés pour partie à une culture commune (l’Union européenne est le seul exemple d’un tel regroupement opérationnel, bien qu’il pêche encore par la fragilité de sa politique extérieure) ; le niveau « global », c’est-à-dire l’ensemble des pays du monde qui regroupent les niveaux locaux précédents, notamment au sein d’une ONU réformée. Ce qui pose deux questions (du moins, nous nous en tiendrons à ces deux là ici), liées à la hiérarchie nécessaire des valeurs. Il convient de reconnaître, au cœur de ces regroupements et de cette union, le caractère central et supérieur des droits de l’homme. Ainsi, la santé (OMS) et les droits du travail (OIT), par exemple, doivent passer avant les impératifs du 34 Dans une certaine mesure, la même critique peut être adressée aux instances spécialisées des droits de l’homme. Lorsque des organes y sont consacrés au niveau des gouvernements, ils se situent presque exclusivement au sein des ministères de la justice. Pourtant, les questions relatives aux droits de l’homme ne peuvent être limitées à des problèmes juridiques ou procéduraux et il est clair, comme les développements du présent chapitre l’illustrent, qu’elles concernent l’ensemble des ministères, notamment ceux de l’intérieur, de l’éducation, du travail et de l’environnement. 35 Sur ces questions, voir notamment (Kruger et Polakiewicz, 2001), (Petersmann, 2001) et (Stiglitz, 2002a). 347
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FMI et <strong>de</strong> la Banque mondiale soient <strong><strong>de</strong>s</strong> occi<strong>de</strong>ntaux, alors même que ces institutions<br />
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En matière d’économie <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme, toutefois, les problèmes sont plus<br />
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Tout d’abord, si les actions catégorielles et spécifiques <strong><strong>de</strong>s</strong> ONG, <strong>de</strong> l’OIT, du PNUD<br />
et autres organisations du même type, sont essentielles, elles ne sont en rien suffisantes, car<br />
elles passent à côté <strong><strong>de</strong>s</strong> problèmes globaux, en particulier financiers. Ainsi, quatre<br />
obstacles directs se dressent face au développement et donc, face au respect <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong><br />
l’homme : la <strong>de</strong>tte, le niveau <strong><strong>de</strong>s</strong> prix et leur structure (les termes <strong>de</strong> l’échange, le<br />
différentiel <strong>de</strong> prix entre les pays du Nord et les pays du Sud), le non-accès au patrimoine<br />
commun <strong>de</strong> l’humanité ; cf. (<strong>de</strong> Bernis, 1998, p. 368s) et, sur le blocage <strong><strong>de</strong>s</strong> prix,<br />
également (<strong>de</strong> Bernis, 1984). Or, certains répondront à cela que les institutions<br />
internationales sont et doivent être spécialisées, les questions financières étant du seul<br />
ressort du FMI et <strong>de</strong> la Banque mondiale, et le commerce <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> l’OMC. Cependant,<br />
un argument simple est opposable à ceux qui considèrent que cette spécialisation signifie,<br />
d’une part, une absence <strong>de</strong> dialogue et <strong>de</strong> travail commun et global entre ces institutions et,<br />
d’autre part, que le FMI et l’OMC n’ont pas à se soucier <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme, qui<br />
seraient « politiques ». L’argument est que, d’une part, toutes les institutions créées à la fin<br />
<strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> guerre mondiale, dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Charte <strong><strong>de</strong>s</strong> Nations-Unies et ont donc pour<br />
<strong>de</strong>voir (pour méta-normes) <strong>de</strong> respecter et <strong>de</strong> promouvoir les <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme ; d’autre<br />
part, en étendant son domaine <strong>de</strong> compétence, le FMI a imposé <strong><strong>de</strong>s</strong> choix politiques aux<br />
Etats du Tiers Mon<strong>de</strong> quasiment mis sous tutelle – le FMI impose donc bien <strong><strong>de</strong>s</strong> mesures<br />
clairement politiques.<br />
Ceci nous amène au second problème : la légitimité <strong>de</strong> la représentation <strong><strong>de</strong>s</strong> Etats au<br />
sein <strong><strong>de</strong>s</strong> institutions internationales et la légalité <strong>de</strong> leurs actions au sein <strong>de</strong> ces institutions.<br />
Autrement dit, il s’agit <strong>de</strong> constater, tout d’abord, qu’au-<strong>de</strong>là du manque <strong>de</strong> démocratie<br />
dans le fonctionnement même <strong>de</strong> ces institutions, les représentants <strong><strong>de</strong>s</strong> Etats vont défendre<br />
leur point <strong>de</strong> vue particulier alors qu’ils sont, soit <strong><strong>de</strong>s</strong> ministres <strong><strong>de</strong>s</strong> finances issus <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
milieux financiers (FMI) soit <strong><strong>de</strong>s</strong> ministres du commerce issus du milieu <strong><strong>de</strong>s</strong> affaires<br />
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