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l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

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emarquable qu’un <strong><strong>de</strong>s</strong> premiers économistes majeurs 12 ait traité explicitement ces<br />

questions en les liant naturellement à ses recherches économiques.<br />

Ainsi, le droit naturel chez Quesnay est-il étroitement lié aux questions <strong>de</strong><br />

répartition <strong><strong>de</strong>s</strong> ressources et à une justification <strong>de</strong> la société et du rôle <strong>de</strong> l’Etat. Ce <strong>de</strong>rnier<br />

est une sorte d’outil <strong>de</strong> maximisation <strong>de</strong> la jouissance <strong>de</strong> ce droit. C’est en cela que<br />

Quesnay se distingue fondamentalement <strong>de</strong> J.J. Rousseau qui voit dans le développement<br />

<strong>de</strong> la société une perte <strong>de</strong> liberté et un abandon du droit naturel 13 . Pour Quesnay, si le droit<br />

naturel peut « vaguement » être défini comme « le droit que l’homme a aux choses propres<br />

à sa jouissance » (Quesnay, 1765, p. 4), il convient <strong>de</strong> le préciser afin <strong>de</strong> se conformer à<br />

l’ordre naturel. Ce droit naturel n’est pas le droit <strong>de</strong> tous à tout, ce qui n’aurait pas grand<br />

sens, mais bien un « droit naturel général <strong>de</strong> l’homme aux choses dont il peut jouir »<br />

(Quesnay, 1765, p. 12). Du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la liberté, et même <strong>de</strong> la liberté économique en<br />

particulier, cela a plusieurs impacts importants.<br />

− L’homme ne doit pas se considérer isolé dans « l’usage et dans l’exercice » <strong>de</strong> sa<br />

liberté, mais il doit respecter les <strong>droits</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> autres, puisque les <strong>droits</strong> <strong>de</strong> chacun sont les<br />

mêmes et ne sont réels que si tous les respectent pour tous. Il s’agit en particulier <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong>droits</strong> naturels et <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> légitimes établis par les lois (Quesnay, 1747, p. 364-365).<br />

− Outre la liberté, le droit naturel lui-même est borné par sa propre nature : il est borné<br />

par la quantité <strong>de</strong> biens nécessaires à l’homme pour sa conservation, ce qui implique<br />

aussi que les hommes ne peuvent refuser cette portion aux uns et aux autres (Quesnay,<br />

1747, p. 365). Autrement dit, la propriété n’est légitime que tant qu’elle ne prive pas<br />

les autres <strong>de</strong> leur droit naturel, <strong>de</strong> la propriété personnelle nécessaire à chacun pour<br />

vivre.<br />

− Ces considérations impliquent l’utilité <strong>de</strong> la société. En effet, celle-ci permet<br />

d’accroître l’accès <strong>de</strong> tous au droit naturel. La nécessité d’un Etat régulateur <strong>de</strong> la<br />

violence et garant du bon usage et du respect <strong><strong>de</strong>s</strong> contrats est ainsi établie.<br />

12 Si Adam Smith est souvent considéré comme le « père <strong>de</strong> l’économie » et si nous classons ici les<br />

physiocrates parmi les précurseurs, nombreux sont les économistes anglo-saxons qui ont vu la véritable<br />

origine <strong>de</strong> l’économie chez les physiocrates. Notons d’ailleurs que le tableau <strong>de</strong> Quesnay est sans doute la<br />

première modélisation économique, alors que Smith n’a pas véritablement utilisé ce genre <strong>de</strong> procédé.<br />

13 (Rousseau, 1754) ; en fait, il semble bien que ce soit parce que ce <strong>de</strong>rnier se préoccupe surtout <strong>de</strong> la liberté,<br />

et non du droit naturel, qu’il considère l’état <strong>de</strong> nature comme idéal. Or, dans celui-ci, chacun dispose <strong>de</strong> ce<br />

qu’il peut prendre, tant que personne <strong>de</strong> plus fort ne l’en prive pas. Quesnay ne va pas jusqu’à un très<br />

hypothétique état <strong>de</strong> nature mais s’ancre dans la société, et c’est pourquoi il peut être envisagé comme un<br />

inspirateur <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme ; la notion <strong>de</strong> droit n’a <strong>de</strong> sens qu’en société et non pour l’homme <strong>de</strong> nature<br />

i<strong>de</strong>ntique à l’animal isolé.<br />

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