l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

à l’Etat une responsabilité dans l’application effective des droits sociaux, sans pour autant
que la Cour précise comment il doit s’y prendre. En fait, si la Cour doit aussi, selon nous,
étendre la responsabilité aux acteurs privés, il n’en reste pas moins que son rôle n’est
effectivement pas de donner les moyens à employer pour garantir les droits. C’est ici, au
contraire, que doit intervenir l’économiste capable de déterminer les solutions optimales de
la prise en charge de l’application de ces droits : privatisation ou non, mode de régulation,
définition de missions de services publics à la charge des entreprises, etc. 11
Deuxième exemple, une décision de la Cour de justice de la Communauté
européenne (CJCE), rendue le 12 septembre 2000, qui concerne un système de retraite
complémentaire obligatoire 12 . Nous pourrions penser, à première vue, que si la réponse à la
question « est-ce que les régimes monopolistiques de retraite complémentaire sont
conformes aux règles communautaires du droit de la concurrence ? », est négative, celle à
la question « est-ce que les règles communautaires du droit de la concurrence s’appliquent
aux régimes de retraite complémentaire ? », l’est aussi. C’est, d’ailleurs, ce que laissaient
penser trois arrêts datant du 21 septembre 1999, qui reconnaissent la particularité des fonds
de retraite et les excluent donc des règles du droit de la concurrence. Cependant, dans un
cas similaire, un arrêt contraire a été rendu par la CJCE, le 12 septembre 2000, attaquant le
droit social par le droit de la concurrence. Si cet arrêt nous semble important, c’est qu’il
illustre l’extension, propre à la logique néo-libérale, de la sphère économique sur la sphère
sociale, le créateur de la norme juridique choisissant les principes du marché comme
référence ultime, au prix de quelques incohérences.
Le cas implique un fonds de retraite obligatoire concernant les médecins
spécialistes néerlandais. Il s’agissait de savoir si le droit de la concurrence lui était
opposable et, dans ce cas, si le fait qu’il soit obligatoire avait un caractère abusif. En ce qui
concerne le premier point, la CJCE a répondu positivement, parce qu’il n’y avait pas eu
d’accord explicite entre les partenaires sociaux. Mais il ne s’agit là que d’un élément
procédural – on y revient toujours – n’ayant rien à voir avec le fond du dossier. En outre,
selon nous, il y a un problème évident dans ce cas : qui sont les partenaires sociaux ? Il ne
s’agit pas d’un fonds qui concerne les salariés d’une entreprise, mais bien un ensemble de
personnes qui exerce une activité libérale. Les partenaires sociaux seraient-ils donc alors
11 Sur ces questions, voir par exemple (Chevalier, Ekeland et Frison-Roche, 1999). Sur l’évolution de la
jurisprudence en matière de droits sociaux, parmi d’autres, (Akandji-Kombé, 2001), (Lambert, 2000), (Priso
Essawe, 1998).
12 Nous n’entrons pas, ici, dans les détails. Nous nous basons sur l’analyse de Jean-Philippe Lhernould
(2000), suivie de l’arrêt en question.
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