l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I
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de la formation des noirs, portée par les réformes qui découlèrent de ce mouvement. Le statut de ces réformes reste toutefois ambigu à trois égards. Tout d’abord, elles restent incomplètes, car elles finissent par s’inscrire dans le mode de régulation du capitalisme, plutôt que de le changer radicalement, ce qui fait qu’il n’y a qu’une reconnaissance limitée des droits. Ainsi, lorsque le mouvement passe au Nord, pour réclamer toujours plus d’égalité, Martin Luther King devient vite pessimiste ; il écrit que la liberté de se loger et les opportunités d’emploi équitable restent « un rêve distant », et que des réformes économiques radicales – le plein-emploi, la garantie d’un salaire annuel, des « changements structurels » du capitalisme – sont nécessaires pour l’intégration pleine et entière des noirs dans la société, cf. (Foner, 1998, p. 283). Ensuite, ces réformes surviennent au cours d’une période de croissance, puisque le mouvement pour les droits triomphe à la fin de la période des Trente Glorieuse. Il est donc possible de supposer qu’avec d’autres mouvements (voir ci-dessous), elles ont été des facteurs ou des accélérateurs de la crise 70 . Par le changement dans le paradigme sociétal et par l’interdiction des formes anciennes de régulation qu’elles impulsent, ces réformes sont susceptibles d’orienter la régulation de crise vers un autre mode de régulation. Enfin, il se peut également que, du point de vue des droits de l’homme, elles aient conduit à un échec partiel, en forçant le capital à trouver d’autres formes de régulation inadaptées, ce qui expliquerait l’impossible sortie de crise sur un nouveau mode de régulation cohérent et garant des droits de l’homme. Ces « nouvelles » formes de régulation sont en fait des formes anciennes, perpétuées et renforcées pour compenser la perte de la régulation raciale. Ainsi, est-il possible d’observer que si les lois qui interdisent la discrimination ont plutôt favorisé l’emploi et les salaires des noirs, il n’en va pas de même pour les femmes, noires ou blanches. Celles-ci ont fait les frais d’un arbitrage des employeurs, suite aux lois d’égalité de traitement entre hommes et femmes, ayant pour résultat la réduction relative de l’emploi féminin, cf. (Neumark et Stock, 2001) Il y a un problème entre, d’un côté, la reconnaissance juridique des droits de l’homme et, de l’autre, leur respect effectif et leurs effets parfois contradictoires sur la sphère économique. Le principal facteur des changements positifs impulsés par les mouvements sociaux semble bien être, malgré tout, leur impact sur le paradigme sociétal, seul susceptible de remettre en cause sur le long terme des pratiques de la sphère 70 Elles ont pu avoir, d’abord, un effet positif par une relance du taux de profit, mais les contradictions du mode de régulation s’accumulant, la revendication de nouveaux rapports sociaux qui remettent en cause les « fondamentaux » de ce mode de régulation, l’a poussé inexorablement vers sa crise. 282
économique qui vont à l’encontre des droits de l’homme. Parmi ceux-ci, le droit à un environnement sain et équilibré est le fruit d’une lutte longue et difficile qui illustre l’importance du changement des mentalités. b. Les mouvements de défense de l’environnement. Les deux premiers mouvements de défense de la nature aux Etats-Unis se situent à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Il s’agit, d’une part, d’un mouvement de chasseurs, de naturalistes et d’explorateurs, pour protéger les forêts et les autres ressources naturelles du pays ; d’autre part, d’un mouvement de médecins, d’ingénieurs et d’urbanistes, pour développer l’hygiène dans les villes, une distribution d’eau propre et l’amélioration des conditions de vie en général dans les villes en pleine croissance (Coglianese, 2001, p. 89). Ces deux mouvements s’ancrent dans le mode de régulation en vigueur, bien qu’ils appellent une certaine modification du paradigme sociétal sur lequel s’appuie cette régulation. En effet, d’un côté, ils encouragent un changement de la vision que porte la société sur la nature et le développement urbain : la nature n’est pas une ressource libre que l’on peut surexploiter sans limites ; le développement urbain livré à lui-même est un maldéveloppement et les villes ne sont donc pas forcément synonymes de progrès. D’un autre côté, ils s’ancrent dans la régulation capitaliste de la société et sont sources d’investissements dévalorisant le capital. Ils autorisent ainsi, à terme, l’augmentation de la productivité et du taux de profit : préservation des ressources pour une exploitation soutenue dans le temps 71 ; meilleure gestion de la propriété pour une meilleure exploitation (que l’on pense au cas des mines françaises au début du XIXe siècle, évoqué supra) ; meilleure gestion de l’urbanisme pour une meilleure hygiène qui améliore la qualité de la force de travail ; etc. C’est, de fait, la régulation capitaliste qui a prévalu, puisque ces mouvements n’ont pas remis en cause le paradigme sociétal en vigueur, mais ont simplement contribué à une amélioration du mode de régulation concernant ses impacts sur les sphères écologique et sociale. C’est le cas du mouvement de préservation de la nature. Celui-ci a certes favorisé 71 C’est de cette période du début du XXe siècle que datent les institutions fédérales s’assurant de la régulation de la nature, suivant le point de vue du « first director » de l’ « U.S. Forest Service », Gifford Pinchot, pour qui les ressources doivent être gérées de façon à promouvoir leur utilisation efficace, autant en matière d’exploitations forestière, minière, agricole, que pour les loisirs ; cf. (Coglianese, 2001). 283
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Tout d’abord, elles restent incomplètes, car elles finissent par s’inscrire dans le<br />
mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> régulation du capitalisme, plutôt que <strong>de</strong> le changer radicalement, ce qui fait qu’il<br />
n’y a qu’une reconnaissance limitée <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong>. Ainsi, lorsque le mouvement passe au<br />
Nord, pour réclamer toujours plus d’égalité, Martin Luther King <strong>de</strong>vient vite pessimiste ; il<br />
écrit que la liberté <strong>de</strong> se loger et les opportunités d’emploi équitable restent « un rêve<br />
distant », et que <strong><strong>de</strong>s</strong> réformes économiques radicales – le plein-emploi, la garantie d’un<br />
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l’intégration pleine et entière <strong><strong>de</strong>s</strong> noirs dans la société, cf. (Foner, 1998, p. 283).<br />
Ensuite, ces réformes surviennent au cours d’une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> croissance, puisque le<br />
mouvement pour les <strong>droits</strong> triomphe à la fin <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> Trente Glorieuse. Il est donc<br />
possible <strong>de</strong> supposer qu’avec d’autres mouvements (voir ci-<strong><strong>de</strong>s</strong>sous), elles ont été <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
facteurs ou <strong><strong>de</strong>s</strong> accélérateurs <strong>de</strong> la crise 70 . Par le changement dans le paradigme sociétal et<br />
par l’interdiction <strong><strong>de</strong>s</strong> formes anciennes <strong>de</strong> régulation qu’elles impulsent, ces réformes sont<br />
susceptibles d’orienter la régulation <strong>de</strong> crise vers un autre mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> régulation.<br />
Enfin, il se peut également que, du point <strong>de</strong> vue <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme, elles aient<br />
conduit à un échec partiel, en forçant le capital à trouver d’autres formes <strong>de</strong> régulation<br />
inadaptées, ce qui expliquerait l’impossible sortie <strong>de</strong> crise sur un nouveau mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
régulation cohérent et garant <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme. Ces « nouvelles » formes <strong>de</strong><br />
régulation sont en fait <strong><strong>de</strong>s</strong> formes anciennes, perpétuées et renforcées pour compenser la<br />
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la discrimination ont plutôt favorisé l’emploi et les salaires <strong><strong>de</strong>s</strong> noirs, il n’en va pas <strong>de</strong><br />
même pour les femmes, noires ou blanches. Celles-ci ont fait les frais d’un arbitrage <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
employeurs, suite aux lois d’égalité <strong>de</strong> traitement entre hommes et femmes, ayant pour<br />
résultat la réduction relative <strong>de</strong> l’emploi féminin, cf. (Neumark et Stock, 2001)<br />
Il y a un problème entre, d’un côté, la reconnaissance juridique <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong><br />
l’homme et, <strong>de</strong> l’autre, leur respect effectif et leurs effets parfois contradictoires sur la<br />
sphère économique. Le principal facteur <strong><strong>de</strong>s</strong> changements positifs impulsés par les<br />
mouvements sociaux semble bien être, malgré tout, leur impact sur le paradigme sociétal,<br />
seul susceptible <strong>de</strong> remettre en cause sur le long terme <strong><strong>de</strong>s</strong> pratiques <strong>de</strong> la sphère<br />
70 Elles ont pu avoir, d’abord, un effet positif par une relance du taux <strong>de</strong> profit, mais les contradictions du<br />
mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> régulation s’accumulant, la revendication <strong>de</strong> nouveaux rapports sociaux qui remettent en cause les<br />
« fondamentaux » <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> régulation, l’a poussé inexorablement vers sa crise.<br />
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