l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

idées, lorsque les docteurs de l’Eglise reconnaîtront que le prêt à intérêt peut être légitime
dans certaines circonstances 17 .
− Le Moyen-Age.
La nouvelle civilisation qui se met en place à la chute de l’empire romain va ainsi
se diluer, petit à petit, dans celle du capitalisme qui émerge à partir du Bas Moyen-Age. Le
retour en arrière que représente l’abandon des idéaux antiques, couplé avec le maintien de
structures économiques esclavagistes (servage, etc.), est donc aggravé, dans un premier
temps, par la montée des structures économiques du capitalisme marchand qui se
juxtaposent aux structures médiévales et nobiliaires 18 . A cette évolution et à ses crises,
vont répondre des mouvements sociaux porteurs des idéaux des droits de l’homme,
susceptibles soit d’accélérer la montée du capitalisme, soit de l’entraver.
Ainsi, si la bourgeoisie et les artisans des villes ont commencé à prendre le pouvoir
communal au début du XIVe siècle, cela ne va pas sans s’accompagner de luttes sociales
qui revendiquent la liberté de choisir son employeur et de le quitter librement, ainsi que la
garantie de droits écrits. Il y a, toutefois, de fortes répressions contre ces mouvements qui
vont à l’encontre des intérêts des marchands et, de fait, si Louis X le Hutin, en France,
abolit l’esclavage en 1315, les lois sociales du XIVe siècle restent très en deçà en matière
de liberté des salariés. Par exemple, en Grande Bretagne, le « Statute of the Laborers » de
1349-1351, interdit notamment l’offre et la demande de salaires au-dessus des niveaux de
1346, année qui précéda la Peste Noire et qui connaissait donc encore une forte population
avec des salaires faibles. A cela s’ajoutent des contraintes sur la mobilité des travailleurs,
notamment par le biais du contrat de travail qui fixe une durée minimale pendant laquelle
l’employé ne peut quitter son employeur (Moulier-Boutang, 1998, p. 278). Contraintes qui
se trouvent alors mises en place un peu partout en Europe, par la coalition tacite de l’Etat
(du monarque) et des bourgeois et maîtres de corporations 19 .
17 Autrement dit, à partir de Saint Thomas d’Aquin (1225-1274) et de la révolution municipale de 1275 à
1310 ; sur cette dernière, cf. (Moulier-Boutang, 1998, p. 283) ; pour Saint Thomas, cf. les « Secunda
Secundae » de sa Somme Théologique (éditions du Cerf, Paris, 1983). Sur la montée des villes et sur
l’évolution parallèle de la croissance économique et des libertés, cf. l’approche institutionnelle de North
(1993). Nous datons donc les débuts du capitalisme au commencement du XIVe siècle.
18 N’étant pas nous-mêmes historien nous ne pouvons qu’être approximatif ici. Cependant, nous renvoyons,
outre aux références de la note précédente, aux travaux de Guy Bois qui voit dans la période du début du
XIVe au milieu du XVe siècle, une crise systémique qui aurait impulsé un changement de civilisation, avec
notamment un recul de l’essor démocratique, recul lié à la mise en place du capitalisme, cf. (Bois, 2000).
19 Sur l’ensemble des sujets ici abordés, voir aussi Karl Marx (1867a).
249