l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

Chapitre III : La formation des normes : les interactions entre les
droits de l’homme et la régulation de l’économie à travers le temps.
Dans son article de 1881, Gustave Schmoller remarquait l’importance du facteur
économique pour les droits, considérés comme des moyens de l’accès aux revenus et au
bien-être (cf. chapitre I, supra). De fait, nous pouvons nous interroger sur le lien qui existe
entre les nécessités de la sphère économique et la mise en œuvre des droits de l’homme.
Autrement dit, les droits de l’homme sont-ils mis en place plus facilement lorsqu’ils
servent des objectifs économiques ? Ces objectifs économiques sont-ils ceux des personnes
singulières ou du fonctionnement du capitalisme ? Les droits qui contrecarrent la
régulation du capitalisme sont-ils inapplicables ? Le capitalisme se nourrit-il des droits de
l’homme ou bien les combat-il ? Qui met en place les normes sous-tendues par les droits de
l’homme ? Autant de questions qui se posent à ceux qui souhaitent voir les droits de
l’homme exister. Autant de questions qui, outre le fait de soulever le problème des liens
ambigus entre les droits de l’homme et la sphère économique, nous amènent à nous
interroger sur la formation des normes et sur le rôle des acteurs au sein de cette sphère.
Ces questions sont importantes, car elles soulèvent l’aspect structurel du respect des
droits de l’homme. L’approche structurelle, qui a été développée aux Nations-Unies dans
les années 1970-80, considère que les violations des droits de l’homme découlent
naturellement du fonctionnement de systèmes fondés sur l’injustice et l’inégalité, cf.
(Thuan, 1984a). Cette approche pose plusieurs questions, dont celle de savoir comment
l’on peut promouvoir efficacement les droits de l’homme ; mais aussi celle de savoir s’ils
peuvent aller contre les intérêts économiques et comment ils se construisent en tant que
normes capables d’être réelles et durables. Autant de problèmes auxquels nous souhaitons
apporter des éléments de réponses dans ce chapitre. Cela se fera en trois étapes.
Une première section tente de répondre à la question de la mise en place historique
de la norme. Le capitalisme 1 se nourrit-il des droits de l’homme ou s’y oppose-t-il ? Par le
1 Par capitalisme, nous entendrons provisoirement tout système économique qui a pour but essentiel, affiché,
réel ou supposé, la création de profits et, pour ce faire, l’accumulation du capital (ou inversement). La
justification d’un tel système, nonobstant son origine supposée spontanée (reposant sur les désirs des
hommes de s’enrichir et d’échanger, etc.), se base sur le fait que l’augmentation des profits et des capitaux
doit pouvoir signifier un accroissement du niveau de vie de l’ensemble de la population et, à terme,
l’amélioration de la qualité de vie et le respect plein et entier des droits de l’homme, dans une société
d’abondance.
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