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l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I

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principe <strong>de</strong> différence, pour Hayek cette égalité ne doit être réalisée que <strong>de</strong> manière égale<br />

pour tous, c’est-à-dire, en fait, très inégalement. Si John Rawls envisage <strong><strong>de</strong>s</strong> mesures<br />

« positives » 5 pour améliorer les chances <strong><strong>de</strong>s</strong> moins favorisés afin qu’ils soient à égalité<br />

avec les autres, F. Hayek considère que ce genre <strong>de</strong> discrimination positive entraîne la<br />

remise en cause <strong>de</strong> l’égalité en droit dont il se fait le défenseur 6 . Mais cette opposition <strong>de</strong><br />

Hayek n’a <strong>de</strong> sens que si le marché est reconnu comme un promoteur <strong>de</strong> la chance <strong>de</strong> tous.<br />

Suivons la logique hayekienne, et ce <strong>de</strong> façon conforme aux principes rawlsiens.<br />

Supposons tout d’abord que la meilleure façon <strong>de</strong> garantir à tous un ensemble maximal <strong>de</strong><br />

liberté <strong>de</strong> base consiste à laisser les individus agir à leur guise, dans les respects <strong><strong>de</strong>s</strong> règles<br />

<strong>de</strong> juste conduite, c’est-à-dire <strong>de</strong> respect <strong><strong>de</strong>s</strong> contrats et sans exercer d’« acte <strong>de</strong><br />

contrainte » arbitraire. Alors le gouvernement n’a pas à agir <strong>de</strong> manière positive. En effet,<br />

dès lors que le « grand mérite <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> marché » a été d’ôter à quiconque l’usage d’un<br />

pouvoir arbitraire (Hayek, 1976, p. 155), l’autodéveloppement du marché ne peut qu’être<br />

profitable à tous et donc, « toute initiative politique qui corrigerait les effets <strong>de</strong> cet<br />

autodéveloppement est en droit impossible à légitimer » (Ferry et Renaut, 1985, p. 148). Il<br />

en va ainsi parce que le marché accroît les chances <strong>de</strong> tous et le but <strong>de</strong> la loi ne peut être<br />

différent : la modification <strong><strong>de</strong>s</strong> règles <strong>de</strong> juste conduite par la loi doit aboutir à « améliorer<br />

autant que possible les chances <strong>de</strong> l’individu quelconque pris au hasard » (Hayek, 1976, p.<br />

156). De fait, précise Hayek, cet effort impartial en vue d’augmenter les chances <strong>de</strong><br />

quiconque, ne rendra pas semblable les chances <strong>de</strong> tous ; le législateur n’a, <strong>de</strong> toute façon,<br />

aucun moyen, ni aucun droit, d’influencer les chances <strong><strong>de</strong>s</strong> individus particuliers, puisque<br />

celles-ci dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> facteurs, comme la position initiale <strong>de</strong> l’individu, issus d’une série<br />

d’événements fortuits du passé.<br />

Pour John Rawls, au contraire, l’inégalité liée aux « événements fortuits » comme,<br />

par exemple, le milieu social <strong>de</strong> naissance, est arbitraire et injuste et doit être corrigée<br />

5 Par mesures positives, l’on entend habituellement <strong><strong>de</strong>s</strong> mesures qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt une action intervenant dans la<br />

vie <strong><strong>de</strong>s</strong> individus (forcer quelqu’un à publier un journal est un acte positif) ; par mesures négatives, l’on<br />

entend <strong><strong>de</strong>s</strong> mesures ne réclamant aucune intervention particulière (donner les <strong>droits</strong> <strong>de</strong> presse et <strong>de</strong> libre<br />

expression n’implique aucune intervention directe dans la vie <strong><strong>de</strong>s</strong> individus). Nous avons volontairement pris<br />

<strong>de</strong>ux exemples « exagérés » (du moins dans la formulation du premier), afin d’indiquer que « négatif » ne<br />

signifie pas « mauvais ou mal » et que « positif » n’est pas forcément « bon ou bien » ; en fait, ces <strong>de</strong>ux<br />

termes se veulent neutres moralement. Pour une présentation <strong>de</strong> la liberté négative et <strong>de</strong> la liberté positive,<br />

pouvant éclairer cette distinction ainsi que notre propos présent, cf. (Sen, 1991).<br />

6 Notons que cette égalité n’est que <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> dès lors qu’elle est déconnectée <strong>de</strong> l’inégalité économique.<br />

Supposons que les délits mineurs (petits vols, mendicité (lorsqu’elle est un délit, ce qui est déjà inquiétant),<br />

« sans papiers », etc.) soient lour<strong>de</strong>ment sanctionnés et qu’au contraire, les délits financiers, impliquant <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

sommes autrement considérables et <strong><strong>de</strong>s</strong> conséquences sur l’ensemble <strong>de</strong> la société d’autant plus importantes,<br />

soient finalement très peu condamnés ; il est évi<strong>de</strong>nt dans ce cas que ce seront toujours les plus mal lotis qui<br />

seront les plus lour<strong>de</strong>ment frappés par la loi.<br />

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