l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I
l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I l'economie des droits de l'homme - creden - Université Montpellier I
« non raisonnables » dès lors qu’ils s’opposeraient au « progrès » (cf. le cas des organismes génétiquement modifiés, par exemple) ? Ou encore, parce qu’un gouvernement dictatorial conduit une politique économique libérale « efficace », ses opposants sont-ils obligatoirement à classer parmi les non raisonnables, comme semble le prétendre, parmi d’autres, Milton Friedman (1991) ? Lorsqu’un principe de discrimination est ainsi mis en place, la prudence est de rigueur. La non-discrimination, rappelons-le, est à la base des droits de l’homme et de leur applicabilité. En outre, la métaéconomie simple qui se base sur des concepts restrictifs (la rationalité de l’homo-œconomicus), ne peut avoir la prétention d’opérer à elle seule et sur ses seuls critères, une telle discrimination. Le réductionnisme qui consiste à ne voir l’être humain que comme un maximisateur d’utilité est donc dommageable à l’économie tout comme à une étude économique des droits de l’homme. Mais la rationalité et l’égoïsme ne sont pas les seules bases d’une analyse métaéconomique. Ces traits de comportements ne peuvent être totalement dissociés du mécanisme du marché, des mécanismes de l’échange. B. Le jeu de catallaxie généralisé. Friedrich von Hayek (1976) utilise le terme de catallaxie pour désigner le jeu du marché, les mécanismes des échanges ; James Buchanan utilise ce terme pour caractériser l’aspect central de l’économie transféré au domaine politique. Si cet aspect ne peut se passer des hypothèses comportementales discutées dans le point précédent, il n’empêche que c’est bien lui qui constitue le cœur de la métaéconomie du politique. Cette assimilation, presque parfaite, du fonctionnement du marché au domaine politique, pousse toutefois à s’interroger sur la pertinence de la translation opérée et, parallèlement, sur le retour que peut en tirer l’analyse économique stricto sensu. Selon James Buchanan (1987, p. 246), « la politique est une structure d’échanges complexes entre les individus, une structure où chacun cherche à sécuriser collectivement les objectifs privés qu’il ne pourrait efficacement sécuriser uniquement par les simples échanges de marché. » En outre, il précise que la conceptualisation de la politique par le biais de l’échange, est essentielle à la naissance d’une théorie normative de la politique économique. Et puisque cette dernière découle de la théorie positive qui provient elle-même de la réalité spécifique que le chercheur a choisi d’observer (Buchanan, 1990, p. 17), il est possible d’en déduire 152
que la « politique-comme-échange » est la réalité que James Buchanan a choisi d’observer et la seule qu’il entend étudier. Ce sont donc les procédés d’accords volontaires, dépendant exclusivement des décisions individuelles (Buchanan, 1983, p. 8-9), qui sont pris en compte ; ce qui sous-tend d’ailleurs un biais en faveur de la règle d’unanimité. Une contradiction peut déjà être relevée. Effectivement, alors que la perspective du « Public choice » se révèle fondamentalement normative et favorise les arrangements de type « marché » qui s’appuient sur la catallaxie (Buchanan, 1983, p. 10), les institutions sont censées pallier les lacunes de ce même marché, cf. la citation ci-dessus (1987). Alors que Buchanan considère que les institutions, provenant d’accords volontaires, ne sont justifiées que parce qu’elles assurent la « sécurisation » dont est incapable le marché, il part du principe que ces institutions doivent elles-mêmes être analysées (positivisme) et fonctionner (normativisme) comme le marché. Mais peut-être est-ce tout simplement que le marché lui-même ne fonctionne pas en un mécanisme de pure catallaxie ? 13 Les analystes des choix publics, à travers une étude métaéconomique conséquente – bien que majoritairement « simple » –, ont ainsi étudié les partis politiques comme des firmes qui peuvent être monopolistiques. En outre, de nombreux auteurs se sont intéressés aux groupes de pression ou encore, ont étudié le « marché politique » sous l’angle de la théorie principal-agent. Ces analyses apparaissent doublement pertinentes, à notre sens, car elles permettent à la fois d’approfondir l’analyse des institutions et d’éclairer le fonctionnement de l’économie et de la science économique elles-mêmes. Pour préciser ces éléments, nous allons aborder l’assimilation des partis politiques à des firmes et les raisons d’une remise en cause de la démocratie, qui repose notamment sur l’excès des dépenses publiques. 1. Les partis politiques vus comme des firmes. Le premier point que nous voulons discuter ici découle de la comparaison entre partis et entreprises. Dans son article de 1971 sur cette question, George Stigler indique que l’on peut envisager un parti unique au même titre qu’un monopoleur. Ainsi, tout comme le monopoleur a intérêt à vendre le produit que les consommateurs attendent, mais à son prix de monopole, le dictateur a intérêt à rechercher la politique la plus populaire, en fonction de ses contraintes de parti unique. Si l’analyse, en termes économiques, est 13 James Buchanan (1987, p. 264) précisant d’ailleurs lui-même que la main invisible n’existe pas sur le marché politique, ne peut-on pas s’interroger en retour sur son existence sur le marché proprement dit ? 153
- Page 109 and 110: A. De la justification à l’objec
- Page 111 and 112: économie. 1. Une première approxi
- Page 113 and 114: consiste dans le fait d’être imp
- Page 115 and 116: ajoutant que les « médiateurs ent
- Page 117 and 118: domination du grand nombre par quel
- Page 119 and 120: préliminaire d’une production é
- Page 121 and 122: Les droits sociaux. « Affamer un o
- Page 123 and 124: estent prédominants s’ils ne son
- Page 125 and 126: « frais fondamentaux du statut hum
- Page 127 and 128: marché est la confiance (Villet, 1
- Page 129 and 130: s’en réclamer en vue d’agir co
- Page 131 and 132: Cependant, la question des institut
- Page 133 and 134: général et donc la « production
- Page 135 and 136: Chapitre II : Métaéconomie des dr
- Page 137 and 138: argumenter en faveur de nos hypoth
- Page 139 and 140: Si seule la seconde opération corr
- Page 141 and 142: Z = f (x 1 , ..., x m ; t 1 , ...,
- Page 143 and 144: L’analyse économique du mariage
- Page 145 and 146: partie le développement industriel
- Page 147 and 148: tolérable (Hahn, 1982, p. 22) 15 .
- Page 149 and 150: travaillant à salaire égal pour u
- Page 151 and 152: suite, la dénomination de « Publi
- Page 153 and 154: En montrant que ces quatre conditio
- Page 155 and 156: (Wolfelsperger, 1998) 7 . En fait,
- Page 157 and 158: sur les actes 10 . Sur ce point, il
- Page 159: que la discussion démocratique, g
- Page 163 and 164: plus difficile à obtenir, c’est-
- Page 165 and 166: complexes concernant la façon plus
- Page 167 and 168: Le fonctionnement du marché politi
- Page 169 and 170: économistes à critiquer la démoc
- Page 171 and 172: II. Les leçons de la critique de l
- Page 173 and 174: les individus n’ont pas le choix,
- Page 175 and 176: fonctionnement de la démocratie. C
- Page 177 and 178: qu’aucun autre groupe ne deviendr
- Page 179 and 180: garantir à tous l’accès réel
- Page 181 and 182: (b) elles doivent ensuite procurer
- Page 183 and 184: allons discuter ici trois points :
- Page 185 and 186: être vu comme un moyen du bonheur
- Page 187 and 188: privé de jambes, mène malgré tou
- Page 189 and 190: l’ajout d’un individu, et donc
- Page 191 and 192: De plus, ne construire un modèle q
- Page 193 and 194: cette perspective. Dans cette derni
- Page 195 and 196: II. La liberté comme droit de prop
- Page 197 and 198: plus pauvres. Il a ainsi développ
- Page 199 and 200: Ce qui se retrouve ainsi chez Rawls
- Page 201 and 202: une autre série d’autres droits
- Page 203 and 204: Tableau II.1. Trois théories « re
- Page 205 and 206: l’homme comme moyens et comme fin
- Page 207 and 208: n’est pas tenable alors même qu
- Page 209 and 210: qu’Amartya Sen s’oppose à l’
« non raisonnables » dès lors qu’ils s’opposeraient au « progrès » (cf. le cas <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
organismes génétiquement modifiés, par exemple) ? Ou encore, parce qu’un gouvernement<br />
dictatorial conduit une politique économique libérale « efficace », ses opposants sont-ils<br />
obligatoirement à classer parmi les non raisonnables, comme semble le prétendre, parmi<br />
d’autres, Milton Friedman (1991) ?<br />
Lorsqu’un principe <strong>de</strong> discrimination est ainsi mis en place, la pru<strong>de</strong>nce est <strong>de</strong><br />
rigueur. La non-discrimination, rappelons-le, est à la base <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme et <strong>de</strong> leur<br />
applicabilité. En outre, la métaéconomie simple qui se base sur <strong><strong>de</strong>s</strong> concepts restrictifs (la<br />
rationalité <strong>de</strong> l’homo-œconomicus), ne peut avoir la prétention d’opérer à elle seule et sur<br />
ses seuls critères, une telle discrimination. Le réductionnisme qui consiste à ne voir l’être<br />
humain que comme un maximisateur d’utilité est donc dommageable à l’économie tout<br />
comme à une étu<strong>de</strong> économique <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>droits</strong> <strong>de</strong> l’homme.<br />
Mais la rationalité et l’égoïsme ne sont pas les seules bases d’une analyse<br />
métaéconomique. Ces traits <strong>de</strong> comportements ne peuvent être totalement dissociés du<br />
mécanisme du marché, <strong><strong>de</strong>s</strong> mécanismes <strong>de</strong> l’échange.<br />
B. Le jeu <strong>de</strong> catallaxie généralisé.<br />
Friedrich von Hayek (1976) utilise le terme <strong>de</strong> catallaxie pour désigner le jeu du<br />
marché, les mécanismes <strong><strong>de</strong>s</strong> échanges ; James Buchanan utilise ce terme pour caractériser<br />
l’aspect central <strong>de</strong> l’économie transféré au domaine politique. Si cet aspect ne peut se<br />
passer <strong><strong>de</strong>s</strong> hypothèses comportementales discutées dans le point précé<strong>de</strong>nt, il n’empêche<br />
que c’est bien lui qui constitue le cœur <strong>de</strong> la métaéconomie du politique.<br />
Cette assimilation, presque parfaite, du fonctionnement du marché au domaine<br />
politique, pousse toutefois à s’interroger sur la pertinence <strong>de</strong> la translation opérée et,<br />
parallèlement, sur le retour que peut en tirer l’analyse économique stricto sensu.<br />
Selon James Buchanan (1987, p. 246),<br />
« la politique est une structure d’échanges complexes entre les individus, une<br />
structure où chacun cherche à sécuriser collectivement les objectifs privés qu’il ne<br />
pourrait efficacement sécuriser uniquement par les simples échanges <strong>de</strong> marché. »<br />
En outre, il précise que la conceptualisation <strong>de</strong> la politique par le biais <strong>de</strong> l’échange, est<br />
essentielle à la naissance d’une théorie normative <strong>de</strong> la politique économique. Et puisque<br />
cette <strong>de</strong>rnière découle <strong>de</strong> la théorie positive qui provient elle-même <strong>de</strong> la réalité spécifique<br />
que le chercheur a choisi d’observer (Buchanan, 1990, p. 17), il est possible d’en déduire<br />
152