432 TEXTES.qxd - Tribune Bulletin Côte d'Azur
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Revue de presse<br />
La semaine de Jean-Jacques Ninon ➜ www.ninon-avocat.com<br />
Serge Brammertz<br />
➔ La Croix, François d'Alançon, 26/04/2008<br />
La justice internationale<br />
devenue diplomate<br />
Prudence, petits pas, Serge Brammertz, 46 ans,<br />
procureur du Tribunal pénal international pour<br />
l'ex-Yougoslavie (Tpiy) depuis le 1er janvier 2008,<br />
n'est pas du genre à ruer dans les brancards. Loin<br />
du style bouillonnant et improvisé de son prédécesseur<br />
Carla Del Ponte, le magistrat belge a délibérément<br />
choisi le profil bas. Fidèle à sa réputation<br />
de "technocrate du droit", efficace et compétent,<br />
le procureur entend accomplir son travail sans faire<br />
de vagues. (...)<br />
L'époque où le bureau du procureur jouait les<br />
empêcheurs de tourner en rond, cherchant obstinément<br />
des appuis à Washington et dans les capitales<br />
européennes pour forcer l'arrestation des criminels<br />
de guerre semble bien révolue. (...)<br />
Grand et carré, fines lunettes, le magistrat belge<br />
revendique une approche "apolitique" de sa fonction.<br />
(...)<br />
Toujours placide et informel dans son vaste bureau<br />
au deuxième étage du tribunal, le procureur est<br />
décidément très consensuel. Mais qu'on ne s'y<br />
trompe pas, son ascension fulgurante, de la magistrature<br />
belge jusqu'aux plus hautes instances de<br />
la justice internationale, ne doit rien au hasard. Le<br />
natif d'Eupen, à quelques kilomètres de la frontière<br />
allemande, aux confins des Pays-Bas et du Luxembourg,<br />
réunit des qualités rares et attractives.<br />
Ce fils de menuisier est avant tout un excellent<br />
juriste, un bûcheur qui a collectionné les diplômes<br />
en travaillant le week-end comme serveur de restaurant<br />
pour financer ses études. (...) Quadrilingue,<br />
membre de la communauté germanophone<br />
belge, spécialiste de la lutte contre le crime organisé,<br />
la corruption et la traite des êtres humains,<br />
il a rapidement bénéficié du statut d'oiseau rare<br />
dans la magistrature de la Belgique plurielle, avant<br />
de faire son chemin dans les instances onusiennes.<br />
Ses détracteurs voient en lui un ambitieux, pressé<br />
d'arriver quitte à brûler les étapes, quelqu'un qui<br />
a commencé beaucoup de choses sans vraiment les<br />
terminer.<br />
Six années à Bruxelles et le voilà qui postule en<br />
2003 au poste de procureur adjoint de la toute nouvelle<br />
Cour pénale internationale (Cpi), cette institution<br />
judiciaire née le 1er juillet 2002, chargée<br />
d'enquêter et de juger les individus accusés de<br />
génocide, de crimes de guerre et de crimes contre<br />
l'humanité. Serge Brammertz n'y passera que deux<br />
ans avant d'être nommé président de la commission<br />
d'enquête internationale sur l'assassinat de<br />
l'ancien premier ministre libanais Rafiq Hariri.<br />
Là aussi, le changement de style est radical, à l'opposé<br />
du prédécesseur, l'allemand Detlev Mehlis, qui<br />
avait mis publiquement en cause des responsables<br />
des services syriens et libanais. Juriste méthodique<br />
et minutieux, le magistrat belge mise sur le caractère<br />
scientifique des informations collectées pour<br />
assurer la neutralité politique de son enquête et<br />
normaliser les relations de la commission avec les<br />
autorités syriennes. (...) "Mon boulot est aussi mon<br />
hobby principal, reconnaît-il, mais quand je suis en<br />
vacances, j'ai une vie tout à fait normale. J'ai des<br />
copains, une amie et j'aime bien cuisiner."<br />
Reste une question lancinante, à l'esprit de tous<br />
ceux qui l'ont vu revenir à La Haye au début de<br />
cette année. La véritable mission de Serge Brammertz<br />
n'est-elle pas de mener à bien la "stratégie d'achèvement"<br />
adoptée dès 2003 par le Conseil de sécurité,<br />
sous la pression des grandes puissances qui<br />
veulent fermer le tribunal en oubliant leur promesse<br />
de juger Karadzic et Mladic ?<br />
Le magistrat prend le temps de la réflexion mais<br />
il ne se dérobe pas. "(...)<br />
L'institution devra continuer à exister sur le plan<br />
juridique au-delà de 2010-2011 car des décisions<br />
devront être prises. Même si les procès sont terminés,<br />
il y aura toujours des témoins à protéger, des<br />
demandes de détenus sur lesquelles il faudra statuer,<br />
des procureurs de la région qui demanderont l'accès<br />
à des documents classés. En même temps, une<br />
cellule devra travailler sur les fugitifs et pouvoir s'agrandir<br />
une fois qu'un, voire deux, trois ou quatre<br />
fugitifs seront arrêtés. Pour moi, il est clair que les<br />
trois fonctions de parquet, de greffe et judiciaire doivent<br />
continuer."<br />
➔ Le Figaro, Laurence de Charette, 15/04/2008<br />
Durcissement<br />
pour mineurs endurcis<br />
Pour lancer les travaux de la commission chargée<br />
de réformer l'ordonnance de 1945, confiée à André<br />
Varinard, professeur de droit à l'université de Lyon-<br />
III, Rachida Dati a choisi de présenter ce matin, à<br />
ses 32 membres, un court-métrage choc. Un petit<br />
film qui doit les convaincre de la nécessité d'agir.<br />
En 2006, 57 000 mineurs ont été condamnés, et les<br />
statistiques montrent que plus de la moitié d'entre<br />
eux retourneront devant le juge avant cinq ans.<br />
La délinquance des mineurs s'est aussi durcie et<br />
considérablement rajeunie - 32 enfants de moins<br />
de 13 ans ont été jugés pour des crimes, l'année<br />
dernière.<br />
(...) La Chancellerie tient à ce que chaque acte soit<br />
sanctionné et veut mieux hiérarchiser la réponse<br />
pénale par rapport à la gravité des faits. (...)<br />
La commission devra également fixer un âge minimum<br />
de responsabilité pénale, ce qui promet des<br />
débats houleux - actuellement, c'est le magistrat<br />
qui évalue la capacité de "discernement" d'un<br />
enfant, pour savoir s'il relève de la justice. Cet exercice<br />
risque de bousculer toute la construction du<br />
droit des mineurs, fondé sur les seuils de 10-13 ans,<br />
13-16 ans et 16-18 ans. (...)<br />
Parallèlement, Rachida Dati est décidée à faire le<br />
ménage dans les mesures sociales d'hébergement<br />
pour les 18-21 ans, qui coûtent plus de 50 millions<br />
par an pour 3.000 jeunes et pourraient être renvoyées<br />
vers les départements.<br />
Même si elles suscitent des réticences, parfois fortes,<br />
chez les éducateurs, ces réformes interviennent<br />
toutefois dans un contexte nouveau : la Protection<br />
judiciaire de la jeunesse a entamé une véritable<br />
révolution culturelle. Une nouvelle génération de<br />
jeunes éducateurs prend le pas sur l'ancienne.<br />
"Pendant des années, explique un membre de l'administration,<br />
on a placé les anciens, les plus radicaux,<br />
à la formation. Si bien que des générations d'éducateurs<br />
ont été formées sur leur moule, hostiles<br />
à toute sanction." Résultat : en 2002, quand apparaissent<br />
les premiers "centres éducatifs fermés", la<br />
Protection judiciaire de la jeunesse ne trouve pour<br />
ainsi dire pas de volontaires, la profession jugeant<br />
ces centres trop coercitifs. Aujourd'hui encore, les<br />
postes dans ces centres sont essentiellement pourvus<br />
par des sortants d'école ou des contractuels.<br />
Des questions comme "Faut-il mettre du Nutella sur<br />
la table du goûter ?" opposent anciens et nouveaux...<br />
Le tournant générationnel est toutefois amorcé.<br />
➔ Le Monde, Laetitia Van Eeckhaut, 19/04/2008<br />
Audience de proximité<br />
La justice ne peut être rendue dans un centre de<br />
rétention administrative (Cra) : ainsi en a décidé,<br />
mercredi 16 avril, la Cour de cassation, dans trois<br />
arrêts condamnant l'existence d'une salle d'audience<br />
dans l'enceinte du Cra du Canet, au nord de<br />
Marseille.<br />
La première chambre civile de la Cour statuait sur<br />
les pourvois de trois étrangers en situation irrégulière.<br />
Soutenus par l'ordre des avocats de Marseille<br />
et le Syndicat des avocats de France, ils estimaient<br />
que les décisions des juges des libertés et<br />
de la détention (Jld) qui ont prolongé leur rétention<br />
étaient nulles, car prises au cœur même du<br />
centre.<br />
Cette délocalisation a été décidée par l'administration<br />
en application de la loi du 26 novembre<br />
2003 réformant le droit d'asile. Le texte a prévu que<br />
le juge des libertés peut statuer dans des salles "spécialement<br />
aménagées à proximité immédiate [du]<br />
lieu de rétention".<br />
Le premier président de la cour d'appel d'Aix avait,<br />
en septembre 2006, considéré que la situation de<br />
la salle du Canet "correspondait bien aux prescriptions"<br />
de la loi et avait débouté les trois requérants.<br />
Selon lui, cette salle d'audiences était "située<br />
dans l'enceinte commune du centre de rétention,<br />
de la police aux frontières et du pôle judiciaire (...)<br />
à proximité immédiate des chambres où sont retenus<br />
les étrangers" et disposait "d'accès et de fermeture<br />
autonomes".<br />
Mais pour la Cour de cassation, "la proximité immédiate<br />
exigée par l'article L. 552-1 du code de l'entrée<br />
et du séjour des étrangers et du droit d'asile est exclusive<br />
de l'aménagement spécial d'une salle d'audience<br />
dans l'enceinte d'un centre de rétention".<br />
Le président du tribunal de grande instance de<br />
Marseille a aussitôt pris acte de cette décision de<br />
portée normative et décidé que, dès jeudi 17 avril,<br />
les audiences concernant les étrangers retenus au<br />
centre du Canet se dérouleraient à nouveau au<br />
palais de justice.<br />
Son homologue de Toulouse en a fait de même.<br />
En revanche, la troisième salle d'audience "délocalisée"<br />
pour étrangers en situation irrégulière qui<br />
avait été ouverte dès juin 2005 à Coquelles (Pas-de-<br />
Calais) ne sera pas, dans l'immédiat, fermée. Le<br />
juge des libertés de Boulogne-sur-Mer a informé<br />
les avocats qu'il continuerait à y tenir ses audiences.<br />
(...)<br />
➔ Commentez l’actualité judiciaire sur le blog de : www.ninon-avocat.com<br />
● Vendredi 2 mai 2008 ● <strong>Tribune</strong> <strong>Bulletin</strong> Côte d’Azur ● 12 ●