.Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris
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Revue <strong>de</strong> Presse-Press Review-Berhevoka Çapê-Rivista Stampa-Dentro<br />
<strong>de</strong> la Prensa-Basm Öz<strong>et</strong>i<br />
Grâce aux taxes sur la contreban<strong>de</strong><br />
du pétrole, plusieurs milfibns<strong>de</strong> dollars<br />
par mois se déversaient dans les caisses<br />
kur<strong>de</strong>s, sans compter les 13 % <strong>de</strong>s reyenus<br />
pétroliers <strong>de</strong> l'Irak dans le cadre<br />
.<strong>de</strong> l~ résolution Pétrole contre Nourri-<br />
~ture.Dans son bureau <strong>de</strong> l'université, .<br />
Saedi,Barzinjirêve ainsi <strong>de</strong> reconstruire<br />
son village, «quand on libérera Kirkouk<br />
.... »Mais personne' n'a oublié que<br />
.. ",<br />
les Ku..pes ont été trahis <strong>de</strong>ux fois par<br />
les Etàts-Unis, en 1975, lors <strong>de</strong> l'accord<br />
d'Alger entre l'Iran <strong>et</strong> l'Irak, <strong>et</strong> en 1991,<br />
après un soùlèvement encouragé par<br />
la Maison-Blanche, qui les abandonna<br />
.ensuiteen r~e campagne.<br />
.Ces trahisons restent gravées dans<br />
l'esprit <strong>de</strong>Taher Hainad, 73 ans, qui redoute<br />
que l'avenir ne soit pas plus riant<br />
que le passé. Dans la zone interdite qui<br />
sépare les peshmergas <strong>de</strong>s soldats ira-.<br />
kiens perchés sur les collines, aux'<br />
abords du hameau déserté <strong>de</strong> Doraza,le<br />
vieux paysan gu<strong>et</strong>te l'ennemi. Debout<br />
sur son toit haut comme un donjon dérisoire<br />
qui se découpe sur les cimes<br />
enneigées <strong>de</strong> l'Iran. Au milieu <strong>de</strong> sa ferme,<br />
un ancien fort endommagé <strong>de</strong> l'armée<br />
<strong>de</strong> Badgad peuplé <strong>de</strong> moutons <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> sacs <strong>de</strong> grèlÏn.ilvoue aux gémonies le<br />
colonel qui l'a forcé le 23 janvier à quitter<br />
son village, à une encablure, <strong>de</strong><br />
l'autre côté <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> front, où il a<br />
laissé . <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> dinars, ses outils ,.<br />
ses greniers bien remplis. ,<br />
...~Au premier bombar<strong>de</strong>ment, ces<br />
lâches détaleront comme <strong>de</strong>s lapins »,<br />
lance-toilen désignant d'un geste large<br />
.' ses terres à l'abandon. En contrebas<br />
. du donjon, <strong>de</strong>s mines empêchent ses<br />
bêtes <strong>de</strong> paître. Quatre hommes ont<br />
déjà sauté sur les engins mortels. Et<br />
quand on regar<strong>de</strong> le réduit dans lequel<br />
survit la famille <strong>de</strong> ce paysan aux joues<br />
creuses, la tête noyée dans un turban<br />
blanc <strong>et</strong> noir, on ne peut S"empêcher<br />
<strong>de</strong> penser à ce « Kurdistan libre n, dérisoire<br />
enclave cernée par <strong>de</strong> grands<br />
.champs <strong>de</strong> mines. .<br />
felltORae,' '18 F(VRIER2003<br />
, .<br />
Tony Blair invoqueJ'«aigument<br />
,<br />
moral»<br />
pour.en.finir avecSaddam Hussein<br />
. .,<br />
. . .<br />
Renverser le dictateur irakien cc serait un acte d'hun:lanité », dédare le premier ministre britannique<br />
..'<br />
LONDRES<br />
<strong>de</strong> notre correspondant<br />
Tony Blair se veut un moraliste,<br />
fidèle à ses principes. En prenant la<br />
parole, samedi matin 15 février à<br />
Glasgow, en Ecosse, <strong>de</strong>vant laconférence<br />
<strong>de</strong> printemps <strong>de</strong> son parti, il<br />
s'ait qu'une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s manifestants<br />
qui défileront quelques heures<br />
plus tard dans les rues <strong>de</strong> Londres,<br />
notamment ceux qui votent<br />
travailliste, veulent exprimer ainsi<br />
une «protestation morale» contre<br />
la perspective d'une guerre qu'üs<br />
tiennent pour illégitime <strong>et</strong> grosse<br />
d'une catastrophe humanitaire. n a<br />
donc choisi <strong>de</strong> leur répondre, à<br />
l'avance, en se plaçant, lui aussi, sur<br />
ce terrain <strong>de</strong> la morale.<br />
«L'argument moral contre la<br />
guerre, assure-toil, a une réponsè<br />
morale: c'est l'argument moral pour<br />
renverser Saddam. Ce n'est pas la raison<br />
pour laquelle nous agissons. Nous<br />
le faisons coriforinément au mandat<br />
<strong>de</strong> l'ONU sur l'annihilation <strong>de</strong>s armes<br />
. <strong>de</strong> <strong>de</strong>stroction massive. Mais,franchement,<br />
c'est la raison pour laquelle, s'il<br />
nous faut agir, nous <strong>de</strong>vrons le faire<br />
avec la conscience claire. Stopper la<br />
guerre a aussi <strong>de</strong>s conséquences. R<br />
nyaura aucune marche pour les victimes<br />
<strong>de</strong> Saddam, aucune protestation<br />
au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s milliers d'enfants qui<br />
meurent inutilement chaque année<br />
sous son règne, aucune juste colère<br />
contre les chambres <strong>de</strong> torture qui<br />
continueront à fonctionner s'il reste<br />
en place. »<br />
Le premier ministre s'est ensuite<br />
adressé 'presque .directement aux<br />
marcheurs <strong>de</strong> l'après-midi: « S'il y a<br />
500 000 manifestants, ce sera toujours<br />
moins que le nombre <strong>de</strong> morts<br />
dont Saddam est responsable. S'il y<br />
en a un million, ce sera toujours<br />
moins que le nombre <strong>de</strong> gens morts<br />
dans les guerres qu'il a déclenchées.<br />
Débarrasser le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Saddam<br />
serait un acte d'humanité. Le laisser<br />
où il est, enfait, inhumain. C'est pour .<br />
cela ,que je ne reculerai pas <strong>de</strong>vant<br />
l'action militaire, si elle <strong>de</strong>venait<br />
nécessaire.» ConscIent <strong>de</strong> l'écart<br />
qui se creuse entre lui-même <strong>et</strong> une<br />
gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> l'opinion britannique,<br />
n' a ajouté : «Je ne recherche<br />
pas l'impopularité comme un badge<br />
d'honneur. Mais c'est paifois le prix à<br />
payer du lea<strong>de</strong>rship, <strong>et</strong> le coDt <strong>de</strong> la<br />
conviction. »<br />
Sur la procédure diplomatique .en<br />
cours pour résoudre la cri$e, Tony<br />
Blair a fait une concession, au<br />
<strong>de</strong>meurant inévitable, en acceptant<br />
<strong>de</strong> donner un nouveau délai aux inspecteurs<br />
<strong>de</strong> l'ONU: «n y aura plus<br />
<strong>de</strong> temps donné aux inspections.<br />
M. Blix fera un l10uveau rapport le<br />
28 février », a-t-il convenu, tout en<br />
doutant <strong>de</strong> l'utilité d'un tel geste :<br />
«Quiconque est familier <strong>de</strong>s tacti-<br />
. ques <strong>de</strong> duperie <strong>et</strong> <strong>de</strong> déroba<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
Saddam peut avoir un las sentiment<br />
<strong>de</strong> déjà-vu. Comme d'habitu<strong>de</strong>, à la<br />
<strong>de</strong>rnière minute, <strong>de</strong>s concessions sont<br />
faites. Les concessions sont suspectes.<br />
Malheureusement, les armes sont réelles.»<br />
Pour ménager les chances<br />
d'un compromis lors du somm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l'Union européenne sur l'Irak, lundi,<br />
à Bruxelles, M. BJajr, s'en est tenu à<br />
quelques propos lénifiants<br />
«L'Union europeenne est une immense<br />
réussite pour la paix <strong>et</strong> la prospérité.<br />
»<br />
Tony Blair est dans une situation<br />
dangereuse; n le sait <strong>et</strong> l'a admis<br />
auprès <strong>de</strong> certains <strong>de</strong> ses confi<strong>de</strong>nts.<br />
Mais tout prouve qu'il ne'<br />
changera pas d'avis. A c<strong>et</strong> égard, le<br />
premier ministre a prononcé à Glasgow<br />
<strong>de</strong>ux ou trois phrases très révé-<br />
.latrices : «C'est un moment difficile,<br />
éprouvant, mais si nous lesurmontons,<br />
notre récompense ne sera pas<br />
seulement d'avoir un gouvernement<br />
« 'Stopper la guerre a<br />
aussi <strong>de</strong>s conséquences.<br />
n n'y aura aucune<br />
marche pour les<br />
victimes <strong>de</strong> Saddam »<br />
capable <strong>de</strong> continuer son travail. Ce<br />
sera beaucoup plus important que<br />
cela : ce sera un signal que nous<br />
avons vraiment changé la politique<br />
pour <strong>de</strong> bon. »<br />
Ainsi, dans l'esprit du premier<br />
ministre, l'épiso<strong>de</strong> irakien qu'il traverse<br />
a valeur d'une épreuve exemplaire<br />
: si le gouvernement sait tenir<br />
bon face aux protestations <strong>de</strong> l'opinion<br />
en défendant ce qu'il croit<br />
juste, s'il reste fidèle à ses<br />
convictions,' même au prix d'une<br />
impopularité passagère, il prouvera,<br />
une fois la crise passée, que quelque<br />
chose <strong>de</strong> fondamental a changé<br />
dans la vie politique britannique,<br />
que le New Labour s'est dépouillé<br />
une fois pour toutes <strong>de</strong>s oripeaux<br />
du travaillisme d'antan <strong>et</strong> qu'il a<br />
chassé les hantises <strong>et</strong>.les faiblesses<br />
qui l'ont trop souvent paralysé dans<br />
l'action lorsque la vieille gauche antiaméricaine<br />
donnait le la au sein du<br />
Labour. ,<br />
On saisit .là à quel point Tony<br />
Blair. voit dans c<strong>et</strong>te crise un enjeu<br />
majeur. n est vrai qu'il se trouve<br />
dans une situation particulièrement<br />
inconfortable puisqu'il est, pour la<br />
première fois <strong>de</strong>puis 1997, en désaccord,<br />
en même temps, avec une frange<br />
<strong>de</strong> son parti <strong>et</strong>. avec une gran<strong>de</strong><br />
partie <strong>de</strong> l'opinion. fi reste que l'ap- .<br />
pareil travailliste est loin <strong>de</strong> la rébellion.<br />
A Glasgow, Tony Blair a eu<br />
droit à l'habituelle ovation <strong>de</strong>bout,<br />
même s'il n'a pas battu; c<strong>et</strong>te fois,<br />
<strong>de</strong>s records à l'applaudiinètre. Deux<br />
ou trois délégués seulement ont,<br />
pendant son discours, exhibé en<br />
silence le slogan: « Pas <strong>de</strong> sang pour<br />
le pétrole! » La presse du dimanche<br />
était, dans ses commentaires, assez<br />
partagée. Deux journaux <strong>de</strong> droite<br />
approuvaient franchement la<br />
démarche du premier ministre ..<br />
L'éditorial du Sunday Times était<br />
titré: « Ceci est une guerre juste »,<br />
celui du Sunday Telegraph: « Donnez<br />
une chance à la guerre. »<br />
Jean-Pierre<br />
LangeUier<br />
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