Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

Revue de Presse-Press Review-Berhevoka
Çapê-Rivista Stampa-Dentro de la Prensa-Baszn Ozeti
TURQUIE Pour la premièrefois. les politiques dénoncent l'interventionnisme
__des_mUitairf1sdQ,nsle~affairesfJubligues
Polémique entre!'affilée et
le pouvoir civil
__
Istanbul:
Éric BiegaJa
La goutte d'eau qui a fait déborder
le vase ? Une simple question
PI'Qtocolaire : qui d'un com- .
mandant de gendannerie ou d'un
minis1re a donné le coup d'envoi
d'une enquête anticonuption ?
. Dans son édition de mardi, le
, quotidien populaire Hürriyet reproduisait
les propos abrupts
d'un haut commandant de la gendannerie
: « Qu'Usoit bien clair
que le ministre (de l'Énergie,
NDLR) a été aoertl à la dernière
. minute (de l'enquête en cours, .
. NDLR). A partir d'aujourd'hui.
. nous sommes déterminés à lutter
contre la corruption. quels qu'en
soient les bénéficiaires », mena-
. çait l'officier: ÄÎlusion à pein~ voilée
aux possibles poursuites
contre des hauts fonctionnaires
du ministère de l'Énergie (plusieurs
ont été arrêtés le week-end
demier) et peut-être contre le ministre
lui-même.
L'armée, dont dépend la gendannerie,
avait cette fois passé les
bornes. Le premier minis1re Bülent
Eœvit indiquait aussitôt que
les propos tenus par l'officier
étaient« inacceptables», demandant
qu'il soit identifié et puni. Selon
la gendannerie et l'état-major,
Wle enquête est en cours.
Devant son groupe parlementaire,le
ehef du gouvernement estimait
qu'une telle enquête suffirait
pour que « personne, à
l'étranger ou en Turquie n'ait de
doute quant au régime en
place».
.. n est vrai que hi- questioD se
pose en Turquie à échéanœ régu-
'lière, l'armée intervenant plus
qu'à son tour dans l& débat public.
Pius virulent que le ehef du
gouvernement, le vice-premier
, minis1re Mesut Yùmaz, à la for-
.mation duquel appartient le mi-
. nistre de l'Energie mis en cause,
accusait les thuriféraires d'un régime
autori!aire et. let,1I'Srelais
dans la presse de s8.b0ter Sëiemment
la réputation des hommes
politiques pour faire place nette.
n y a quinze jours, les milieux
économiques d'Istanbul demandaient
effectivement qu'un nouveau
gouvernement indépendant .
. des partis politiques soit nommé
.par le Conseil de séctttité nationale
dominé par l'armée. Le sujet'
est on ne peut pius sensible en
Turquie où les forces armées ont
corlduit trois coups' d'État depuiS
le début des années 60 et ont
poussé à la démission le premier
ministre (islamiste) Necmettin Erbakanen
1997.
Depuis, l'état-major a multiplié
les prises de position publiques
Le premier ministre
demande des sanctions
contre un officier ayant
insinué que le gouvernement
était corrompu
en matière politique. Duront l'année
2000, il s'est ainsi opposé à la
candidature de Mesut yùmaz à la
prési~enœ de la République; il a
ensUIte obtenu une purge dans
l'administration ; il s'est également
prononcé contre toute mo-
. dification de article 312 du Code
pénal qui a permis d'envoyer en
prison des « subversifs» tels que
le président de l'association des
droits de l'homme.
Sur le projet
européen de la
Turquie, l'armée
a envoyé
des signaux
contradic-
. toires, indi-
. quant une ferveur
très
européaniste
Wl jour, s'opposant
le lendemain aux demandes
de l'Union, en faveur de
l'introduction de la langue kurde
à la télévision. L'avis contraire
de l'état-major en la matièrè.
. était, d'ailleurs repris à la lettre
~ar. un premier ministre qui Y
etalt pourtant favorable
.quelques jours plus tôt
Les médias turcs hésitent en
général à mettre directement en
cause le rôle des forces armées .
dans le pays et préferent faire
porter le chapeau aux politiques.
Le refrain « tous pourris» est
souvent entonné. «Aux yeux de
la communauté internationale,
la Turquie a un régime semi-miütaire
», écrit par exemple Okay
Günesin dans le quotidien
Sabah : « la seule manière de
changer d'image, c'est que les
politiciens changent euxmêmes
», assure-t-il. «Les coups
d'État des 40 dernières années
et les procès de masse qui leur
ont succédé n'ont-ils pas joué
leur rôle(dans la médiocrité de la
classe politique actuelle,
NDLR) ? », demande en retour
Mehmet Ali Birand dans le Turkish
Daily News.
« En matière de corruption et
autres malversations, les militaires
n'ont de leçon à donner à
personne », souligne un observa~
teur au fait des réalités militaires .
. «depuis peu. l'armée contrôledi:
rectement les gigantesques marchés
d'armement... »
Des marchés dans lesquels les
dessous de table sont « obligato,ireset
faramineux ». soulignetoil
encore. Quant aux prises de
position publiques et politiques
des militaires, le quotidien MUliyet
rappelait opportunément.
dans son édition de mercredi.
qu'elles sont passibles de cinq ans .
de prisons selon les lois en vigueur
...
LE nGARO VENDREDI 12 JANVIER 2001
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