Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris
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Revue <strong>de</strong> Presse-Press Review-Berhevoka Çapê-Rivista Stampa-Dentro <strong>de</strong> la Prensa-Baszn Öz<strong>et</strong>i<br />
URFA<br />
Dans la cour d'une<br />
mosquée.<br />
UN VIllAGE DES ENVIRONS<br />
Kur<strong>de</strong>, Murat Badilli<br />
y a fait venir<br />
l'électricité, en<br />
attendant "eau<br />
courante.<br />
le sien. Si tu crois au <strong>de</strong>stin, il <strong>de</strong>vient réalité ... "<br />
La colombe est imprévisible. On ne peut savoir<br />
où elle va se poser. Maintenant, elle fait briller<br />
son collier d'argent dans un taxi collectif. Le<br />
chauffeur a les yeux rougis par l'insomnie. Le<br />
matin, Necmi est instituteur. L'après-midi, il est<br />
chauffeur. Et, la nuit,<br />
quand il y a du travail, il<br />
<strong>de</strong>vient "Neco", gardien<br />
<strong>de</strong> chantiers. A40 ans, il<br />
enseigne <strong>de</strong>puis dix-sept<br />
ans. Il n'a pas pu se marier<br />
jusqu'à présent - "A<br />
cause.<strong>de</strong> monfaible poids .<br />
côté livres turques". Il vit<br />
Lespressions du clan ont<br />
emPêché Murat d'épouser la<br />
femme qu'il a aimée en France<br />
30<br />
u\'t'c ses sœurs. Quand on lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> son ori- prenez lesfemmes en photo. " Le chant funèbre<br />
gine, il lance, avec l'accentuation nécessaire, tourne dans l'air pour <strong>de</strong>venir d'abord un cri<br />
conscient <strong>de</strong> l'importance, à Urfa, d'une telle aigu, puis une lamentation grave, rauque. Les<br />
question: "J'appartiens à lafamille <strong>de</strong>s Sans- femmes elles-mêmes <strong>de</strong>viennent un cri tourpersonne<br />
!"Même la colombe en rit. Necmi, lui, menté qui vous arrache le cœur. Mais chacune<br />
est entre rire <strong>et</strong> larmes. Il <strong>de</strong>vrait aller tuer sa d'entre elles j<strong>et</strong>te un regard furtif,au moins une<br />
tristesse dans le raki [pastis turc], mais il ne fois, à l'appareil photo, <strong>et</strong> puis se frappe encore<br />
boira pas ce soir, il doit conduire.<br />
plus violemment la poitrine.<br />
La colombe <strong>de</strong>scend dans un village arabe, , La colombe s'envole à nouveau les ruelles<br />
<strong>de</strong>ssinant <strong>de</strong>. grands cercles dans l'air. De la étroites <strong>de</strong> la ville défilent sous ses yeux, les<br />
fumée monte <strong>de</strong> la place centrale. Une tente marché~, les femmes aux corps splendi<strong>de</strong>s <strong>et</strong><br />
noire en peau <strong>de</strong> chèvre est dressée, pour le les mille histoires d'Urfa ... Elle aime ce lieu <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>uil qui dure déjà <strong>de</strong>puis une semaine. Les elle a <strong>de</strong> la peine, car les histoires d'Urfa ~ont<br />
hommes atten<strong>de</strong>nt silencieusement, accoudés souillées <strong>de</strong> sang, pleines d'armes <strong>et</strong> <strong>de</strong> lois<br />
à <strong>de</strong>s coussins brodés <strong>de</strong> filsd'or. Le chef du clan impitoyables. Les gens naissent ici pour vivre<br />
<strong>de</strong>s Siya, Sattam el-Bedr, se tient au milieu, ces histoires. Dès que l'on franchit les monentouré<br />
<strong>de</strong> 200 hommes. Les femmes sont tagnes <strong>et</strong> la brume qui entour.ent la ville, les.<br />
<strong>de</strong>hors, en cercle <strong>de</strong>vant la plus gran<strong>de</strong> maison histoires d'Urfa <strong>de</strong>viennent ridicules <strong>et</strong> invraidu<br />
village. Elles tournent en rond, se frappant semblables. Urfa est comme la magie: perla<br />
poitrine <strong>et</strong> chantant <strong>de</strong>s lamentations en arabe. sonne ne peut démontrer l'existence <strong>de</strong> son<br />
Des tatouages sur leurs mentons, <strong>et</strong> plus <strong>de</strong> âme <strong>et</strong> personne ne peut la nier. Une seule<br />
fatigue que <strong>de</strong> tristesse sur leurs visages. Elles chose est certaine: à Urfa, il y a <strong>de</strong>s colombes<br />
sont fatiguées <strong>de</strong> toumer en rond, <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>uil. à collier d'argent.<br />
Nous voulons nous éloigner sans trop les déran-<br />
Ece Temelkuran<br />
ger, mais l'une d'elles nous interpelle: "Venez,