Partie 3 - Territoire de Belfort
Partie 3 - Territoire de Belfort
Partie 3 - Territoire de Belfort
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10 -<br />
Ne plus<br />
être étranger<br />
Archives départementales<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
D’ICI ET D’AILLEURS<br />
Après un temps plus ou moins long <strong>de</strong> vie loin <strong>de</strong> sa terre<br />
d’origine, la plupart <strong>de</strong>s étrangers s’engage dans un processus<br />
<strong>de</strong> naturalisation sous <strong>de</strong>s conditions plus ou moins exigeantes<br />
selon les époques.<br />
Doc 1 : Lettre<br />
<strong>de</strong> naturalité<br />
<strong>de</strong> Henry Schuler<br />
ADHR 1 B 957 k<br />
Doc 2 : Dessin <strong>de</strong> l’église<br />
St Christophe réalisé<br />
par Henry Schuler<br />
AMB 2 M 1 x<br />
Doc 3 : Dossier <strong>de</strong> naturalisation avec<br />
mention « Urgent service militaire »<br />
ADTB 6 M 331<br />
Pour certains étrangers installés en France, le désir<br />
d’intégrer pleinement la communauté se fait jour<br />
plus ou moins rapi<strong>de</strong>ment. Renoncer à sa nationalité<br />
<strong>de</strong> naissance pour en prendre une autre n’est jamais<br />
un choix facile et irréfléchi.<br />
Les raisons qui poussent au choix d’abandonner sa<br />
nationalité pour prendre celle <strong>de</strong> son pays d’accueil<br />
sont multiples :<br />
• la certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne plus revenir dans son pays d’origine,<br />
• la volonté <strong>de</strong> rompre avec un pays qui a été fui sous<br />
la contrainte,<br />
• la volonté <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong>s citoyens<br />
français,<br />
• la volonté <strong>de</strong> s’intégrer pleinement à la communauté<br />
française avec sa famille,<br />
• le fait <strong>de</strong> se sentir plus français qu’étranger.<br />
À l’époque royale, faire d’un sujet étranger un Français<br />
est le privilège du roi ; lui seul peut accor<strong>de</strong>r la lettre<br />
<strong>de</strong> naturalité qui permet alors à l’étranger d’obtenir<br />
les mêmes droits que les natifs du royaume <strong>de</strong> France.<br />
C’est souvent pour services rendus à la monarchie<br />
que ces lettres sont octroyées, comme celle accordée<br />
en 1745 à l’Allemand Henry Schuler pour son rôle dans<br />
la construction <strong>de</strong>s fortifications <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> (doc 1 et 2).<br />
La Révolution, dans un principe généreux, veut faciliter<br />
l’adoption <strong>de</strong> la nationalité française : il suffit <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>r<br />
et d’être propriétaire sur le territoire national <strong>de</strong>puis<br />
au moins cinq ans pour <strong>de</strong>venir français (droit du sol).<br />
La nationalité se transmet aussi par le père puisque les<br />
enfants nés d’un père français et d’une mère étrangère<br />
sont français (droit du sang).<br />
Doc 4 : La préfecture<br />
<strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
ADTB 7 Fi <strong>Belfort</strong> 233 k<br />
Doc 5 : Enquête<br />
sur une <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> naturalisation<br />
v ADTB 6 M 372<br />
En 1889 est publiée la première loi qui porte sur<br />
la nationalité : les règles changent peu, mais elles font<br />
<strong>de</strong>s nouveaux Français <strong>de</strong>s citoyens <strong>de</strong> secon<strong>de</strong> catégorie<br />
puisqu’ils ne peuvent exercer complètement leurs<br />
droits civiques que 10 ans après la naturalisation (doc 3).<br />
La Première Guerre mondiale est une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> suspicion<br />
envers les étrangers et les naturalisés récents. En 1915,<br />
une loi est promulguée afin <strong>de</strong> pouvoir retirer la nationalité<br />
aux naturalisés susceptibles <strong>de</strong> nuire aux intérêts français.<br />
Mais c’est avec le régime <strong>de</strong> Vichy que la régression est<br />
la plus nette. Dès juillet 1940, une loi permet <strong>de</strong> réviser<br />
les 450 000 naturalisations octroyées <strong>de</strong>puis la loi <strong>de</strong><br />
1927 qui facilitait gran<strong>de</strong>ment l’accession à la nationalité<br />
française. 15 000 personnes environ ont été déchues<br />
<strong>de</strong> leur nationalité française.<br />
Les lois suivantes réglant la naturalisation ne font<br />
qu’assouplir ou durcir les conditions d’accès en fonction<br />
<strong>de</strong> la situation économique et sociale du pays.<br />
La procédure <strong>de</strong> naturalisation s’engage à la préfecture<br />
(doc 4) ; elle est onéreuse et implique une enquête <strong>de</strong> police<br />
(doc 5). Elle peut être refusée si le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur n’est pas<br />
sûr politiquement, s’il ne se montre pas très intégré<br />
à la communauté nationale ou s’il est l’auteur <strong>de</strong> délits.<br />
Le fait d’être un homme en âge d’être incorporé à l’armée<br />
française est un facteur d’accélération <strong>de</strong> la procédure.<br />
Comme à l’époque royale, la naturalisation est un acte<br />
du pouvoir souverain qui s’obtient par un décret signé<br />
selon les époques par le Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République,<br />
le Gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Sceaux ou le Premier ministre.
11 -<br />
Des étrangers<br />
pas si étrangers<br />
Archives départementales<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
D’ICI ET D’AILLEURS<br />
Nos voisins alsaciens, en raison <strong>de</strong>s vicissitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’histoire,<br />
ont été considérés et enregistrés comme une communauté<br />
étrangère en France entre 1872 et 1918.<br />
Doc 1 : A. Thiers négociant<br />
le Traité <strong>de</strong> Francfort en 1871<br />
ADTB 5 fi 135 k<br />
Doc 3 : Gravure<br />
patriotique<br />
v ADTB 5 J doc 42/46<br />
Doc 2 : Deman<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
domiciliation d’Alsaciens<br />
à Faverois en 1872<br />
ADTB 33 E dépôt BB6 x<br />
Doc 6 : Alsaciennes<br />
<strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> en 1919<br />
ADTB 7 Fi <strong>Belfort</strong> 805<br />
x<br />
Doc 4 :<br />
Recensement<br />
<strong>de</strong> la population<br />
d’Etueffont-Haut<br />
en 1891<br />
ADTB 41 E dépôt 1 F 1 k<br />
La défaite <strong>de</strong>s armées françaises à l’automne 1870<br />
conduit le gouvernement provisoire <strong>de</strong> la République<br />
française à négocier âprement avec les autorités du<br />
nouveau Reich allemand. Ces négociations trouvent<br />
leur aboutissement le 10 mai 1871 avec la signature<br />
du Traité <strong>de</strong> Francfort (doc 1). Un article <strong>de</strong> ce traité prévoit<br />
que « les sujets français originaires <strong>de</strong>s territoires<br />
cédés, domiciliés actuellement sur ce territoire, qui<br />
entendront conserver la nationalité française, jouiront<br />
jusqu’au 1 er octobre 1872, et moyennant une déclaration<br />
préalable faite à l’autorité compétente, <strong>de</strong> la faculté<br />
<strong>de</strong> transporter leur domicile en France et <strong>de</strong> s’y fixer,<br />
auquel cas la qualité <strong>de</strong> citoyen français leur sera<br />
maintenue » (doc 2).<br />
Du fait <strong>de</strong> sa proximité géographique avec l’Alsace<br />
annexée et <strong>de</strong> son ancien lien administratif avec<br />
le Haut-Rhin, le nouveau <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> <strong>de</strong>vient<br />
une zone <strong>de</strong> refuge pour les Alsaciens qui refusent<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir allemands (doc 3) et un lieu privilégié pour<br />
faire inscrire son choix d’option. En 1872, sur 6 817<br />
habitants la ville <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> compte déjà 856 Alsaciens<br />
ayant opté et 701 non optants.<br />
Doc 5 : Les cités<br />
alsaciennes<br />
<strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
ADTB 7 Fi <strong>Belfort</strong> 1124<br />
v<br />
Pour ceux qui quittent les régions annexées après 1872<br />
sans avoir opté se pose le problème <strong>de</strong> leur nationalité<br />
lors <strong>de</strong>s recensements réguliers <strong>de</strong> la population (doc 4).<br />
Ils sont souvent inscrits sous la rubrique Allemands,<br />
mais parfois dans certains villages sous la rubrique<br />
Alsaciens. Leur nombre est déjà significatif en 1881<br />
(1 344), parce que les industries alsaciennes viennent<br />
<strong>de</strong> s’installer dans le <strong>Territoire</strong> : la S.A.C.M. (Société<br />
Alsacienne <strong>de</strong> Constructions Mécaniques) et D.M.C.<br />
(Dollfus-Mieg et Cie) s’implantent en 1879. En 1896,<br />
les Alsaciens sont au total 4 895, principalement dans<br />
les centres industriels (doc 5).<br />
Jusqu’au milieu <strong>de</strong>s années 1880 la commission<br />
d’émigration alsacienne <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> permet à <strong>de</strong>s centaines<br />
d’entre eux d’obtenir gracieusement une terre agricole<br />
en Algérie.<br />
Les rapports entre cette communauté et la population du<br />
<strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> sont ambivalents. L’élan patriotique<br />
qui suit le choc <strong>de</strong> la défaite rend les Alsaciens déracinés<br />
sympathiques : ils sont particulièrement mis à l’honneur<br />
lors <strong>de</strong>s fêtes nationales le 14 juillet (doc 6). Mais la méfiance<br />
renaît envers ces Français qui n’en sont plus vraiment<br />
lors <strong>de</strong> pério<strong>de</strong>s troublées comme pendant l’affaire<br />
Dreyfus où les Alsaciens protestants du département<br />
favorables à la réhabilitation du capitaine sont suspectés<br />
<strong>de</strong> connivence avec l’Allemagne.
Regards<br />
12 - sur les étrangers<br />
Archives départementales<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
D’ICI ET D’AILLEURS<br />
L’étranger, quel qu’il soit et à toute époque, a suscité<br />
la curiosité, l’intérêt, la sympathie ou la méfiance<br />
<strong>de</strong> ceux qui étaient là avant son arrivée.<br />
Doc 3 : Résolution <strong>de</strong> la chambre<br />
<strong>de</strong> commerce <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong>, 1934<br />
ADTB 3 J 219<br />
x<br />
Doc 6 : Affiche<br />
(vers 1978)<br />
ADTB 57 Fi 501<br />
v<br />
Doc 1 : Journal La Frontière<br />
du 28 juin 1894<br />
ADTB 4 J 3a<br />
x<br />
Doc 4 : Tract du Front National années 1990<br />
ADTB 5 J doc 52/2<br />
Le regard porté sur les étrangers par les habitants<br />
d’une ville ou d’un territoire est partiellement lié<br />
au nombre <strong>de</strong> ces étrangers et à la situation sociale<br />
<strong>de</strong> ce territoire. Les sources d’archives conservent<br />
bien plus la trace <strong>de</strong>s heurts entre communautés<br />
que le souvenir <strong>de</strong> l’accueil favorable qu’ont pu recevoir<br />
les nouveaux arrivants. Déjà dans les siècles passés<br />
les sources judiciaires évoquent <strong>de</strong>s relations tendues<br />
entre communautés étrangères et habitants installés<br />
<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s générations. Elles font état par exemple<br />
en 1564 <strong>de</strong> l’incendie volontaire du village <strong>de</strong>s mineurs<br />
allemands <strong>de</strong> Giromagny par <strong>de</strong>s habitants du Rosemont.<br />
Le XIX e siècle voit naître <strong>de</strong>s courants nationalistes<br />
et patriotiques qui conduisent à <strong>de</strong>s comportements<br />
xénophobes et à un regard négatif sur les étrangers.<br />
Lors <strong>de</strong> la construction du chemin <strong>de</strong> fer à <strong>Belfort</strong>,<br />
la presse fait état <strong>de</strong>s particularités <strong>de</strong>s ouvriers belges<br />
et italiens, différents physiquement, pour justifier<br />
leur présence massive. Si dans ce cas le regard porté<br />
est positif, les mêmes arguments peuvent se retourner<br />
contre ces populations si la conjoncture économique<br />
est moins favorable.<br />
Les grands événements nationaux mettant en cause <strong>de</strong>s<br />
étrangers suscitent parfois <strong>de</strong>s regards et <strong>de</strong>s réactions<br />
hostiles : méfiance à l’égard <strong>de</strong>s Alsaciens installés<br />
dans le <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> en raison <strong>de</strong> leur proximité<br />
supposée avec les Allemands durant l’affaire Dreyfus<br />
et au déclenchement <strong>de</strong> la Première Guerre mondiale,<br />
soupçons envers les Italiens après l’assassinat en 1894<br />
du Prési<strong>de</strong>nt Carnot par un anarchiste italien (doc 1).<br />
Mais cela n’entraîne pas <strong>de</strong> violence dans le département<br />
envers les communautés étrangères en guise <strong>de</strong><br />
représailles. La population belfortaine ne manifeste<br />
aucune hostilité envers les Italiens lors du procès<br />
et <strong>de</strong> l’exécution à <strong>Belfort</strong> du criminel italien Pozzi<br />
en 1905, bien que parfois <strong>de</strong>s remarques blessantes<br />
ont été faites à l’encontre <strong>de</strong>s soldats italiens<br />
stationnés dans le département au cours<br />
<strong>de</strong> la Première Guerre mondiale (doc 2).<br />
Doc 5 : Tract<br />
S.O.S. Racisme<br />
années 1980<br />
ADTB 5 J 51/15<br />
v<br />
Doc 2 : Note <strong>de</strong>s<br />
autorités militaires<br />
au sujet <strong>de</strong> préjugés<br />
envers les Italiens,<br />
1915<br />
ADTB 33 E dépôt 4 H 59<br />
v<br />
La crise économique <strong>de</strong>s années 1930 donne lieu<br />
à <strong>de</strong>s propos et <strong>de</strong>s tracts stigmatisant les étrangers<br />
supposés être responsables du chômage <strong>de</strong>s Français<br />
<strong>de</strong> souche (doc 3). Ces mêmes affirmations réapparaissent<br />
avec la récession <strong>de</strong>s années 1970 (doc 4).<br />
À contrario se développe en miroir un courant favorable<br />
et protecteur envers les étrangers qui tente, au nom <strong>de</strong>s<br />
valeurs <strong>de</strong> la République, <strong>de</strong> favoriser l’accueil et le respect<br />
<strong>de</strong>s droits <strong>de</strong>s immigrés sur notre territoire (doc 5 et 6).<br />
Les noma<strong>de</strong>s et les forains eux aussi sont victimes<br />
<strong>de</strong> ces regards <strong>de</strong> défiance, mais pas besoin <strong>de</strong> crise<br />
ou d’évènement dramatique pour jeter sur eux<br />
la suspicion. Cette hostilité est quasiment constante<br />
au cours <strong>de</strong>s siècles contre cette communauté migrante<br />
qui intrigue par ses habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie et son refus<br />
<strong>de</strong> s’ancrer dans un espace précis et définitif.
Archives départementales<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
D’ICI ET D’AILLEURS<br />
S’intégrer<br />
13 - sans perdre ses racines<br />
S’intégrer, s’approprier la culture, la langue, les coutumes<br />
du pays où on s’installe est un processus lent qui laisse<br />
perdurer le besoin <strong>de</strong> se raccrocher à sa communauté<br />
d’origine.<br />
Doc 1 : Statuts <strong>de</strong><br />
l’association d’entrai<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>s Suisses <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
ADTB 4 M 219<br />
k<br />
Doc 3 : École russe<br />
à <strong>Belfort</strong><br />
ADTB 29 Fi x<br />
Doc 2 : Un couple franco-suisse<br />
début du XX e siècle à Grandvillars<br />
ADTB 14 Fi 877<br />
x<br />
Pour tout migrant, et quelle que soit la proximité<br />
géographique ou culturelle avec le pays qui l’accueille,<br />
l’installation, même si elle est provisoire, pose<br />
la question <strong>de</strong> l’intégration au nouveau pays,<br />
à sa langue, à ses coutumes et à son mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie.<br />
Il est tout à fait exceptionnel qu’un étranger ne trouve<br />
pas d’autres membres <strong>de</strong> sa nationalité dans la ville<br />
où il s’installe et il va souvent chercher à habiter au plus<br />
près <strong>de</strong> ses compatriotes immigrés. Si la communauté<br />
est suffisamment importante, elle se structure et tente<br />
<strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s réseaux <strong>de</strong> solidarité pour faire vivre<br />
les traditions et les habitu<strong>de</strong>s culturelles du pays d’origine.<br />
Cela peut se traduire également par <strong>de</strong>s associations<br />
d’entrai<strong>de</strong> pour favoriser l’arrivée et le bon accueil<br />
<strong>de</strong>s nouveaux arrivants (doc 1).<br />
La loi <strong>de</strong> 1901 sur les associations n’interdit nullement<br />
la création d’associations dont le but est lié à l’existence<br />
<strong>de</strong> communautés étrangères, ce dont vont largement<br />
profiter les communautés russes et italiennes durant<br />
l’entre <strong>de</strong>ux guerres. En 1939 la législation <strong>de</strong>vient plus<br />
restrictive et toute association qui compte au moins<br />
un quart d’étrangers ou qui est dirigée par un étranger<br />
doit faire l’objet d’une déclaration spécifique et d’une<br />
autorisation visée par le Ministère <strong>de</strong> l’Intérieur, ce qui<br />
restreint le nombre d’associations officielles <strong>de</strong> ce type<br />
jusqu’à la levée <strong>de</strong> cette mesure en 1981.<br />
L’immigrant est tiraillé entre son désir <strong>de</strong> bien s’adapter<br />
au pays qui l’accueille et sa volonté <strong>de</strong> ne pas rompre<br />
avec le pays qu’il a quitté, où il a laissé <strong>de</strong> la famille,<br />
où il retourne parfois, où il projette même souvent <strong>de</strong><br />
retourner après cette pério<strong>de</strong> d’exil volontaire ou forcé.<br />
Doc 5 : Fanion <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> pétanque<br />
du club sportif portugais <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
Collection du club x<br />
Doc 4 : L’équipe <strong>de</strong> football du club<br />
sportif portugais <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> vers 1976<br />
Collection du club<br />
h<br />
Lors <strong>de</strong>s migrations du XIX e siècle et du début<br />
du XX e siècle, ce sont souvent <strong>de</strong>s hommes jeunes<br />
et célibataires qui arrivent dans le <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
et qui pour un certain nombre épousent <strong>de</strong>s jeunes<br />
femmes sur place. Ceci facilite leur intégration et celle<br />
<strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> ces couples mixtes (doc 2). Les liens avec<br />
l’ancienne mère patrie sont plus distendus et souvent<br />
idéalisés. Dans le cas <strong>de</strong> familles entières ou d’hommes<br />
déjà mariés dans leur pays d’origine, l’intégration peut<br />
être plus difficile et la tendance au repli communautaire<br />
plus fort.<br />
La fréquentation <strong>de</strong> l’école publique pour les enfants<br />
est un facteur d’intégration même si <strong>de</strong>s associations<br />
culturelles leur permettent aussi <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r un lien<br />
avec la patrie <strong>de</strong> leurs parents en leur apprenant<br />
la langue (doc 3), la religion et la culture d’origine.<br />
Fêtes, lieux <strong>de</strong> rencontre et clubs sportifs (doc 4 et 5)<br />
recréent <strong>de</strong>s liens entre les membres d’une même<br />
communauté étrangère.
14 -<br />
Étrangers<br />
aujourd’hui<br />
Archives départementales<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong><br />
D’ICI ET D’AILLEURS<br />
L’immigration gar<strong>de</strong> un poids et un impact important<br />
dans notre département, tant par l’apport démographique,<br />
économique et culturel que représentent les <strong>de</strong>scendants<br />
<strong>de</strong> l’immigration, que par la présence toujours vivante<br />
<strong>de</strong> cette mémoire et par l’existence <strong>de</strong> communautés<br />
nouvelles installées <strong>de</strong>puis peu.<br />
Doc 3 : Restaurants<br />
<strong>de</strong> cuisine étrangère<br />
à <strong>Belfort</strong><br />
Photographies J.F. Lami<br />
cxl<br />
Doc 4 : Intérieur <strong>de</strong><br />
la chapelle orthodoxe <strong>de</strong><br />
la rue du Berger à <strong>Belfort</strong><br />
Photographie J.F. Lami x<br />
Doc 5 : Travaux <strong>de</strong><br />
la mosquée <strong>de</strong> la<br />
lunette 18 à <strong>Belfort</strong><br />
Photographie J.F. Lami<br />
v<br />
Le <strong>de</strong>rnier recensement général <strong>de</strong> la population<br />
du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> date <strong>de</strong> 1999. Il compte<br />
11 176 étrangers dans le département, ce qui représente<br />
une certaine stabilité sur les vingt <strong>de</strong>rnières années.<br />
Le pourcentage d’étrangers dans la population totale<br />
est <strong>de</strong> 7,3%, proche <strong>de</strong> la moyenne nationale. La baisse<br />
<strong>de</strong> cette proportion s’explique par l’arrêt <strong>de</strong>s grands<br />
mouvements migratoires et par l’acquisition <strong>de</strong><br />
la nationalité française par les étrangers. Le <strong>Territoire</strong><br />
<strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> est encore une terre d’accueil pour les<br />
migrants en quête <strong>de</strong> travail ou <strong>de</strong> refuge politique.<br />
Presque la moitié d’entre eux sont originaires<br />
du Maghreb, ce qui n’a rien d’original au regard<br />
<strong>de</strong>s phénomènes d’immigration à l’échelle nationale (doc 1)<br />
et résulte d’une tendance observable dans le département<br />
<strong>de</strong>puis la fin <strong>de</strong>s années 1960. La communauté la plus<br />
nombreuse est algérienne. La dynamique <strong>de</strong> groupe la<br />
plus importante concerne l’immigration en provenance<br />
<strong>de</strong> Turquie : cette communauté est actuellement la<br />
secon<strong>de</strong> par le nombre. Ce phénomène est à relier avec<br />
la présence déjà forte et ancienne d’immigrés turcs<br />
en Allemagne et en Alsace, tout près du <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>Belfort</strong>. Les étrangers <strong>de</strong>s premières vagues d’immigration<br />
(Italiens, Suisses, Espagnols) sont encore présents<br />
mais plus faiblement : ce sont <strong>de</strong>s personnes âgées<br />
aujourd’hui qui ont fait le choix <strong>de</strong> ne pas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la<br />
naturalisation (doc 2). À partir du début <strong>de</strong>s années 1990,<br />
le retour <strong>de</strong>s Européens <strong>de</strong> l’est vers la France est<br />
à noter. Il fait suite à l’effondrement <strong>de</strong>s systèmes<br />
communistes, à l’ouverture <strong>de</strong>s frontières et à<br />
une certaine instabilité dans les Balkans. Les Africains,<br />
Américains du sud et Asiatiques, peu nombreux jusque<br />
dans les années 1990, sont <strong>de</strong> nouvelles communautés<br />
qui s’installent en plus grand nombre dans le département<br />
pour échapper à la misère et aux guerres.<br />
18 %<br />
Turcs<br />
Doc 2 : Répartition <strong>de</strong>s étrangers<br />
par nationalités en 1999<br />
9 %<br />
Autres<br />
30 %<br />
Algériens<br />
Doc 1 : Nombre d’étrangers présents<br />
dans le département en 1999<br />
4000<br />
3500<br />
3000<br />
2500<br />
2000<br />
1500<br />
1000<br />
500<br />
0<br />
Algériens Marocains Italiens<br />
Suisses<br />
Turcs<br />
Espagnols Tunisiens Portugais Yougoslaves<br />
La présence étrangère dans le <strong>Territoire</strong> <strong>de</strong> <strong>Belfort</strong> reste<br />
donc importante, et pas uniquement par sa visibilité<br />
immédiate. En effet, les migrations anciennes ont laissé<br />
<strong>de</strong>s traces même si les <strong>de</strong>scendants <strong>de</strong> ces migrants<br />
sont <strong>de</strong>venus <strong>de</strong>s citoyens français. Les noms <strong>de</strong> famille<br />
attestent encore aujourd’hui <strong>de</strong>s arrivées successives<br />
<strong>de</strong> ressortissants suisses, alsaciens, italiens, polonais,<br />
etc. Le paysage économique du département leur<br />
doit beaucoup tant dans les travaux publics que dans<br />
l’industrie. Les gran<strong>de</strong>s entreprises <strong>de</strong> construction<br />
créées par <strong>de</strong>s Italiens, les entreprises <strong>de</strong>s Alsaciens<br />
(Stein, Alstom) sont encore un élément majeur <strong>de</strong><br />
l’activité du département. La présence culturelle<br />
d’associations toujours bien vivantes continue à<br />
entretenir et diffuser la culture <strong>de</strong> la patrie d’origine,<br />
associations italiennes, portugaises et tout récemment<br />
serbes. Le choix gastronomique offert aujourd’hui<br />
aux <strong>Belfort</strong>ains reflète aussi l’apport <strong>de</strong>s étrangers<br />
du département : restaurants italiens, marocains, turcs,<br />
indiens (doc 3). L’aspect cultuel n’est pas à oublier,<br />
la chapelle orthodoxe créée rue du Berger (doc 4) pour<br />
les exilés russes fonctionne toujours mais désormais<br />
moins pour <strong>de</strong>s Russes que pour <strong>de</strong>s croyants originaires<br />
<strong>de</strong>s Balkans. La lunette 18 à <strong>Belfort</strong> (doc 5), premier foyer<br />
d’accueil pour les Algériens, se transforme actuellement<br />
en une mosquée mo<strong>de</strong>rne.<br />
Autres<br />
Yougoslaves<br />
4 %<br />
Suisses<br />
3 %<br />
Espagnols<br />
4 %<br />
Portugais<br />
8 %<br />
Italiens<br />
7 %<br />
2 %<br />
Tunisiens<br />
Marocains<br />
15 %