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des injustices sociales alimentent un mécontentement populaire palpable<br />
dans les conversations quotidiennes. Bien des discours<br />
conjuguent des dimensions sociales, politiques et économiques qui<br />
sembleraient appartenir à des univers de sens différents. Ainsi un militant<br />
« anti-code » remarque : « Ils ont augmenté les prix des denrées de première<br />
nécessité (eau, électricité, riz, sucre…) ; ils ont traficoté nos semences, vendu<br />
nos sociétés ; ils ont autorisé la tenue d’un congrès d’homosexuels dans notre pays ;<br />
ils n’ont pas daigné punir les corrompus parmi eux dénoncés par le Vérificateur<br />
Général ; ils nous ont mentis, trahis… maintenant, ils en veulent à notre dignité,<br />
à notre honneur, à notre foi religieuse. Nous n’accepterons pas ! Nous préférons<br />
mourir sur le chemin de Dieu ! ». Le refus de transformations socio-familiales<br />
prend place dans une suspicion globale d’une partie de la population<br />
à l’égard des élites politiques.<br />
Un article du journal Jeune Afrique intitulé « Mahmoud Dicko, l’imam<br />
qui casse le code de la famille » disait de celui qui a été à l’origine de la mobilisation<br />
des mouvements islamiques contre le code, qu’il « peut s’y attribuer<br />
le beau rôle, celui de l’avocat des petits contre les puissants. Accusant les<br />
élus de ne pas interpeller le gouvernement sur les sujets cruciaux : trafic de drogue,<br />
terrorisme, il fait le travail d’un opposant. » Ce rôle d’opposant apparaissait<br />
avec d’autant plus de visibilité, que ce leader intervenait dans un<br />
contexte où les partis politiques se sont alliés depuis plusieurs années<br />
au régime actuel, au nom d’une « gestion consensuelle du pouvoir »<br />
prôné par le Chef de l’État.<br />
Craignant très certainement un effet d’entraînement social, les autorités<br />
politiques ont cru bon de revoir leur projet. En fait, de céder devant<br />
la détermination du front du refus qui par ailleurs, n’a pas manqué<br />
une occasion de souligner qu’il représentait une religion qui est<br />
largement majoritaire, et que la démocratie exigeait que l’on applique<br />
la loi de la majorité. Ce raisonnement basé sur l’argument que « le<br />
nombre fait loi » était une façon de rappeler les autorités à leur « devoir<br />
démocratique ».<br />
Par ailleurs, certains parlementaires ont clairement annoncé qu’ils<br />
n’avaient pas l’intention de voter « contre eux-mêmes », c’est-à-dire à<br />
l’encontre des choix de leur électorat. «Je ne peux pas me présenter devant<br />
mes électeurs et leur dire que le mariage religieux est illégal, qu’une femme ne doit<br />
plus obéir à son mari » déclara l’un d’entre eux. Enfin, malgré quelques<br />
déclarations dans les médias, les acteurs favorables au nouveau code<br />
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