Prise en compte NRBC sur le terrain. Y at-il un bénéfice à la ... - SFMU

URGENCES
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Chapitre 71
Prise en compte NRBC
sur le terrain.
Y a-t-il un bénéfice à la médicalisation
de l’amont ?
L. RONCHI 1 , R. CORDEBAR 1 , CH. DECANLERS 2
Les opinions et propositions contenues dans cet exposé ne reflètent pas nécessairement
la position officielle du service de santé des armées ou de la direction
de la sécurité civile français.
Points essentiels :
■ Le médecin en zone d’exclusion apporte un œil spécialisé qui peut accélérer
la caractérisation du toxique en cause.
■ La plus-value apportée par la présence du médecin en zone d’exclusion réside
essentiellement dans la capacité à diagnostiquer et à traiter un état de
détresse aiguë facilement et rapidement réversible (administration d’antidote,
remplissage d’une hypovolhémie aiguë, exsufflation d’un pneumothorax
suffocant, analgésie d’un polyfracturé).
■ La médicalisation permet de « gagner la course contre la montre » contre le
toxique en permettant une administration précoce d’un antidote.
■ La capacité d’action du médecin en zone d’exclusion est inversement,
proportionnelle à la magnitude et à la gravité de l’accident catastrophique.
■ La priorité est donnée à limiter la contamination des victimes et des intervenants.
■ Le port par le médecin d’une tenue de protection allonge et complique la
réalisation d’un acte.
Unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile n° 1, BP 50179, 28401 Nogent le Rotrou
cedex (France).
1. Médecin en chef de réserve, UIISC n° 1, Nogent le Rotrou.
2. Médecin en chef, médecin-chef, UIISC n° 1, Nogent le Rotrou.
Correspondance : D r Luc Ronchi, Centre hospitalier, BP 414, 44606 Saint-Nazaire cedex (France).
Tél. : 0 240 906 340. Fax : 0 240 906 385. E-mail : l.ronchi@ch-saintnazaire.fr
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■ Le port de la tenue de protection limite les gestes techniques réalisables
(assistance ventilatoire, voie veineuse périphérique, voie intraosseuse,
intubation trachéale, exsufflation de pneumothorax, bloc ilio-fascial).
■ Le médecin est isolé au sein de la zone d’exclusion et son approvisionnement
est restreint, ce qui réduit d’autant ses possibilités d’action.
■ Le passage (impératif) à travers la chaîne de décontamination non-valide,
impliquant plusieurs minutes en atmosphère de vapeur d’eau chaude, sans
surveillance, soulève la question de la mise en condition préalable d’une
victime (sonde d’intubation, cathéter veineux et de leur décontamination).
■ Le médecin en zone d’exclusion apporte un soutien « santé » aux sauveteurs
ainsi qu’un soutien psychologique direct.
■ La qualité des interventions à l’avant conditionne le pronostic immédiat et
secondaire des victimes, mais également la sécurité des intervenants à l’arrière
(hôpitaux d’infrastructure).
La survenue d’un accident catastrophique de nature biologique, chimique ou
radiologique, question demeurant d’actualité (1), exige (2) la mise en place
d’une zone d’exclusion. N’interviendront au sein de ce périmètre de sécurité
étanche que des sauveteurs en tenue de protection, avec plusieurs missions :
contrôle de la situation (incendie, émission de toxique entre autres), recensement
et catégorisation des victimes aux fins de triage, évacuation. La priorité est toujours
donnée à la limitation de la contamination et au sauvetage du plus grand
nombre de victimes.
Une des questions classiquement soulevée pour ces situations est la place des
gestes techniques au profit des victimes, avec l’inadéquation, habituelle en
médecine de catastrophe, entre la demande de soins et les moyens mis en
œuvre.
L’accident catastrophique en contexte chimique est le plus probable, et représente
un modèle de catastrophe pour laquelle une médicalisation la plus avancée
possible pourrait s’avérer rentable. Ce modèle associe en effet une intoxication
de masse à des lésions traumatiques fréquentes (explosion ou accident de transport),
ces dernières générant des situations aiguës létales faute d’une action
médicale précoce (exsufflation d’un pneumothorax suffocant, intubation d’un
traumatisme crânien inconscient sans détresse respiratoire associée).
1. Faut-il préconiser une médicalisation précoce,
en amont du sas de sortie (chaîne de décontamination)
de la zone d’exclusion ?
1.1. POUR
Un œil médical permet probablement une analyse fine et précoce des symptômes
présentés par les premières victimes prises en charge (3), amenant une
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caractérisation plus rapide du toxique lorsque celui-ci n’est pas connu d’emblée.
L’administration d’un antidote sera ainsi plus rapide, sur un mode de titration
lorsque celle-ci est possible.
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Le médecin sera en mesure d’effectuer un métatriage transformant le bilan
lésionnel analytique habituel (nature et gravité des lésions constatées) en un
bilan anticipatif (évolutivité à court terme) débouchant sur des actions simples et
précoces susceptibles d’inverser le pronostic d’une victime avant d’avoir rejoint
le point de rassemblement.
Un certain nombre de gestes simples sont réalisables (4) en tenue de protection
(pose de voie veineuse périphérique ou intraosseuse (5), intubation trachéale,
crycothyrotomie, ponction pleurale à l’aiguille) au prix d’un délai de réalisation
allongé. Le retour d’expérience de l’accident de Dakar (6), a montré que de
nombreuses vies avaient pu être sauvées par une intubation précoce réalisée en
zone d’exclusion.
Le médecin est, dans ce contexte, le plus à même d’endosser la responsabilité
de réalisation d’une analgésie par morphinique sous-cutané pour de nombreuses
situations de détresse médicale : analgésie d’un traumatisé grave conscient, analgésie
compassionnelle d’un moriturus par exemple.
En fonction de la topographie et de l’étendue de la zone d’exclusion, la présence
d’un médecin permet probablement une meilleure organisation des petites
norias en optimisant les priorités.
La présence d’un médecin au sein des équipes d’intervention en zone contaminée
apporte un facteur de soutien psychologique à ces dernières, et une précocité
d’intervention en cas d’accident impliquant un sauveteur.
Dans le cas d’une mise en place secondaire de la chaîne de décontamination
(contraintes logistiques sur le délai), la présence d’un médecin en zone d’exclusion
est hautement souhaitable (7) (premiers soins médicaux, soutien psychologique).
1.2. CONTRE
Le contexte d’accident catastrophique sous-entend une limitation de la ressource
médicale. En fonction des circonstances et notamment de la survenue de l’accident
catastrophique en zone urbaine très dense ou en zone rurale, il pourra
s’avérer nécessaire de conserver l’un des quelques médecins présents initialement
pour faire fonctionner le poste médical avancé et le module de décontamination
plutôt que de l’envoyer en zone d’exclusion, au contact.
Le travail en tenue de protection, outre la majoration de la difficulté et le ralentissement
de la réalisation des gestes techniques (4), induit une contrainte ergonomique
importante (8) avec nécessité de prévoir des relais réguliers et
rapprochés, facteur d’aggravation de la pénurie médicale sur le site d’intervention.
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L’intervention d’un médecin « oubliant le contexte de catastrophe » ralentirait le
fonctionnement de la chaîne des secours en créant des points d’arrêt pour évaluation
et gestes éventuels. Il est essentiel que le médecin conserve à l’esprit la
nécessité de ne pas retarder la sortie des victimes de la zone contaminée et de
ne pas différer, sauf nécessité absolue, la décontamination. Les gestes pratiqués
relèvent exclusivement du sauvetage médical.
Le franchissement de la chaîne de décontamination pour une victime ayant
bénéficié de gestes techniques (perfusion veineuse, intubation trachéale, remplissage
vasculaire, ventilation instrumentale) pose un problème potentiel (9). La
décontamination d’une sonde d’intubation ou d’un cathéter de perfusion nécessite
des mesures spécifiques (fixation parfaite de la sonde d’intubation, pose
d’un obturateur ou d’un bouchon sur le cathéter périphérique) avant passage à
la douche. La surveillance, ou plus exactement la quasi non-surveillance durant
plusieurs minutes d’une victime inconsciente, intubée en ventilation spontanée,
dans une atmosphère saturée en vapeur d’eau peut annihiler le bénéfice d’un
geste précoce. L’option de retirer voie veineuse et sonde d’intubation au
moment d’entrer dans la chaîne de décontamination pour les reposer secondairement
après vérification de l’absence de toxique résiduel n’est pas recommandable
(un parfait contre exemple est constitué par les brûlures faciales avec
œdème retardé). La question de la ventilation assistée durant cette phase n’est
pas résolue.
L’autonomie technique du médecin est réduite, sa capacité d’emport (cathéters
périphériques, sondes d’intubation, laryngoscope et son jeu de lames, trocarts,
solutés de remplissage) étant réduite et restreignant très rapidement ses possibilités
d’action. Le ravitaillement technique en zone d’exclusion est limité.
Les plans d’intervention actuels qui prévoient une présence médicale au sein des
équipes de secours (2) la conditionnent aux moyens disponibles.
2. Médicalisation de la chaîne de décontamination
La présence médicale se différencie en entrée et en sortie de la chaîne.
Au point de rassemblement des victimes, ou à l’entrée de la chaîne de décontamination,
le médecin va pouvoir évaluer ou réévaluer l’état clinique des victimes,
décider d’un ordre de passage au sein de la chaîne, et en fonction de la topographie
locale jouer le rôle de consultant en tant que de besoin au profit de la
chaîne « valide » (exemple de la victime considérée initialement valide qui présente
une crise comitiale en se présentant devant la douche).
Le médecin en amont de la chaîne de décontamination assure le rôle de superviseur
médical du personnel chargé de la douche des non-valides. Une formation
spécifique de ces personnels sur les éléments de surveillance des victimes durant
leur séjour dans le module de décontamination est essentielle.
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En sortie de chaîne de décontamination, le rôle du médecin rejoint le rôle habituel
en contexte non contaminé (catégorisation, gestes d’urgence, annotation
de la fiche de l’avant, insertion des victimes dans le circuit d’évacuation).
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3. Médicalisation du poste médical avancé
Le circuit en aval de la chaîne de décontamination rejoint le parcours classique
d’un événement catastrophique (10). La médicalisation est un élément fondamental
de l’amélioration du pronostic. Elle ne donne plus lieu à débat.
4. Particularités du contexte radiologique
À l’inverse du contexte chimique, la réanimation va primer sur la décontamination
en contexte radiologique. Le médecin trouvera donc sa place le plus en
amont possible dans le respect des conditions de sécurité assurant sa protection
personnelle (travail en tenue de protection, non exposition à un rayonnement
actif).
5. Particularités du contexte biologique
La médicalisation va s’exercer de manière très variable en fonction du contexte,
et notamment de l’agent infectieux en cause. L’émergence de la maladie infectieuse
peut s’étaler sur plusieurs jours. La protection des intervenants repose sur
le port de gants, masques, protection oculaire, et ne modifie pas fondamentalement
les possibilités d’action du soignant.
6. Conclusion
La place et la mission du médecin au sein des équipes d’intervention en zone
d’exclusion restent à définir précisément. Il n’existe probablement pas de règle
universelle, et les retours d’expérience joueront un rôle essentiel. L’analyse de
l’expérience des équipes confrontées à un accident catastrophique en contexte
essentiellement chimique, et l’étude des plans de secours préétablis, permet de
faire émerger l’intérêt d’une médicalisation avancée dans deux circonstances
opposées. La première est constituée par le type le plus fréquent d’accident
catastrophique à effet limité en ambiance toxique que représente l’intoxication
collective par fumées d’incendie. Il existe plusieurs victimes présentant des
pathologies intriquées (lésions traumatiques, brûlures, blast, intoxication), le
médecin intervient en tenue de protection au plus près du sinistre. Le bénéfice
d’une médicalisation précoce est évident sur la morbidité et la mortalité dues à
l’intoxication cyanhydrique (antagonisation par voie intraveineuse du toxique,
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suppléance ventilatoire). Une catastrophe de grande ampleur en contexte chimique
verra probablement, elle aussi, une influence bénéfique à la présence médicale
en zone d’exclusion (métatriage, réalisation de gestes médicaux de survie,
remodelage permanent des circuits de petite noria en fonction des pathologies
associées). La question de la présence de prothèses (sonde d’intubation, cathéter
de perfusion) au moment du passage en chaîne de décontamination renvoie à
la question de leur indication dans ce contexte. Le médecin de l’avant est appelé
à jouer un rôle crucial, en sélectionnant les indications, tout particulièrement
pour l’intubation endotrachéale indiquée au profit des porteurs de troubles de
conscience ayant conservé leur autonomie respiratoire.
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de victimes suite à un attentat avec libération d’agents chimiques. Urgence pratique
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