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Yannick Nézet-Séguin - La Scena Musicale

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PORTRAIT NIKKI CHOOI<br />

NIKKI CHOOI<br />

Le violoniste canadien se rend en finale du Concours Reine Elisabeth<br />

par JACQUELINE VANASSE<br />

Il est<br />

souvent dit que le<br />

Concours musical international<br />

Reine Elisabeth<br />

de Belgique (CMIREB), de par son ancienneté,<br />

la difficulté de ses épreuves et la grandeur de<br />

sa tradition, ne se compare à aucun autre<br />

concours. L’édition de cette année, consacrée<br />

au violon, a porté le jeune Canadien Nikki<br />

Chooi jusqu’en finale. Chooi fut le premier à<br />

être impressionné par ce qu’il a accompli : « Le<br />

simple fait de préparer un tel concours et de se<br />

rendre en finale change une vie. » Le musicien,<br />

comme la plupart des jeunes finalistes, avoue<br />

s’être demandé comment il survivrait à la mise<br />

en loge à la Chapelle Reine Elisabeth, coupé de<br />

toute technologie pendant une semaine. <strong>La</strong><br />

mise en loge, qui est une particularité du<br />

concours, consiste à isoler les douze finalistes<br />

pendant la semaine précédant leur ultime<br />

prestation. Coupés du monde extérieur, sans<br />

ordinateur ni téléphone, les jeunes musiciens<br />

doivent apprendre seuls une œuvre contemporaine<br />

écrite spécialement pour l’occasion. À<br />

la suite de cette épreuve, le jeune Canadien<br />

admet avoir trouvé rafraîchissant de pouvoir<br />

tout mettre de côté et simplement profiter<br />

d’être « enfermé » avec onze autres superbes<br />

violonistes. Situation enviable entre toutes<br />

pour un jeune musicien que de déjeuner, dîner<br />

et souper avec onze des plus grands talents de<br />

sa génération, onze personnalités distinctes<br />

provenant d’horizons et de réalités souvent<br />

très différents ! Comme pour la plupart des<br />

autres lauréat qui l’ont également mentionné,<br />

l’« obligation » de socialiser entre candidats<br />

aura été pour Chooi une expérience particulièrement<br />

stimulante, mais plus étonnant encore,<br />

une activité devenue inaccoutumée, presque<br />

insolite dont on aurait perdu l’habitude.<br />

Au delà de la dimension sociale de la<br />

semaine d’isolement, c’est l’aspect pédagogique<br />

qui laissera son empreinte sur Chooi. Il<br />

dit avoir appris énormément sur lui-même et,<br />

ayant repoussé ses limites, s’être prouvé qu’il<br />

était capable de beaucoup plus qu’il ne le pensait<br />

jusque-là. Le violoniste estime qu’en<br />

temps normal, il lui aurait fallu facilement un<br />

mois ou deux de travail pour apprendre<br />

l’œuvre imposée. Aujourd’hui, il se sent très<br />

fier d’avoir pu apprendre un morceau aussi<br />

difficile en une semaine seulement. Il remercie<br />

ici ses parents pour la discipline, l’amour<br />

du travail et le sens de l’organisation qu’ils lui<br />

ont inculqués dès le plus jeune âge et qui lui<br />

ont fortement servi une fois laissé à lui-même.<br />

Le jeune homme repart donc grandi de son<br />

expérience. Et c’est confiant qu’il abordera cet<br />

été le Festival Marlboro auquel on lui a justement<br />

demandé de jouer plusieurs œuvres<br />

contemporaines : « Dans le passé, j’aurais<br />

paniqué à l’idée de jouer des œuvres modernes<br />

inédites, mais dorénavant, je me réjouirai de<br />

relever ce genre de défi », dit-il en souriant.<br />

Lors de son passage au CMIREB, la solide<br />

PHOTO Steve Riskind<br />

formation de Nikki Chooi a entre autres été<br />

saluée. Le jeune musicien terminait ce printemps<br />

son baccalauréat à Curtis dans la classe<br />

d’Ida Kavafian (dont trois élèves participaient<br />

à l’épreuve finale du CMIREB 2012 et qui est<br />

également le professeur de Benjamin<br />

Beilman, premier prix du CMIM 2010). C’est<br />

dans les termes les plus élogieux que Chooi<br />

parle de Curtis. L’institution étant très sélective,<br />

le niveau y est formidablement élevé et,<br />

comme les élèves sont peu nombreux, chacun<br />

reçoit beaucoup d’attention et profite du soutien<br />

et de l’amitié de ses collègues ainsi que de<br />

tous les membres du corps enseignant. Le<br />

violoniste insiste sur le fait que les professeurs<br />

travaillent ensemble et qu’il est possible de<br />

leur demander conseil et de jouer pour chacun<br />

d’entre eux. Heureux dans l’institution qu’il a<br />

choisie, on sent aussi le jeune violoniste très<br />

attaché à son actuelle professeure Ida<br />

Kavafian avec qui il entreprendra une maîtrise<br />

à Juilliard en septembre. « Le fait de voir trois<br />

de ses élèves en finale du Reine Elisabeth<br />

montre assez bien quelle grande professeure<br />

elle est. Elle n’a pas vraiment de méthode. Elle<br />

s’adapte à chacun de ses élèves et aucun<br />

d’entre eux ne joue de la même façon, c’est ce<br />

qui rend son enseignement très spécial. »<br />

Si on lui demande quel est son musicien préféré,<br />

le jeune violoniste répond sans hésiter :<br />

Jascha Heifetz. Selon Chooi, ce dernier a surpassé<br />

tous les standards du violon et depuis lui,<br />

bien que le niveau violonistique ne cesse de<br />

grimper, le grand maître demeure inégalé. <strong>La</strong><br />

technique de Heifetz ne s’arrête pas à la bonne<br />

intonation, à la justesse des glissandos, au style<br />

et à la perfection sonore. Heifetz, c’est toute<br />

une autre dimension : un jeu qui n’appartient<br />

qu’à lui. Le jeune musicien ajoute cependant<br />

qu’il ne cherche à copier personne. « Bien sûr<br />

que j’aimerais être précis comme Heifetz, ditil,<br />

avoir son jeu exaltant, son son communicatif,<br />

mais il faut aussi savoir incorporer sa<br />

propre personnalité, sinon on passe à côté de<br />

l’essence de ce qu’est la musique. On joue pour<br />

exprimer ce que l’on ressent, et il ne peut être<br />

satisfaisant d’essayer d’exprimer quelque<br />

chose à travers un jeu qui n’est pas le nôtre. »<br />

Outre son professeur et les grands violonistes,<br />

Chooi a, lors du concours, puisé son inspiration<br />

dans L’univers de la possibilité, un livre<br />

du chef d’orchestre Benjamin Zander. Le livre,<br />

qui lui a été offert par sa famille d’accueil belge,<br />

s’intéresse à la manière dont on peut réellement<br />

prendre le contrôle d’une situation et<br />

décider de la vie qu’on veut avoir. Inutile de<br />

répéter que le jeune homme a su merveilleusement<br />

tirer le meilleur de ses cinq semaines en<br />

Belgique. Pour la suite, il espère mener une<br />

carrière qui lui donnera encore souvent<br />

l’occasion de jouer en soliste et comme chambriste<br />

les œuvres qu’il aime et de rencontrer<br />

encore longtemps des gens qui le conseilleront<br />

et l’inspireront.<br />

www.cmireb.be<br />

LSM<br />

SEPTEMBRE 2012 23

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