Yannick Nézet-Séguin - La Scena Musicale
Yannick Nézet-Séguin - La Scena Musicale
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EN COUVERTURE<br />
mouvements et idées comme je n’en avais<br />
jamais connue auparavant, déclare-t-il. On<br />
aurait dit que nous avions fait de la musique<br />
ensemble dans une vie antérieure, c’était<br />
comme retrouver une âme sœur. »<br />
Les musiciens décrivent ce contact en des<br />
termes similaires. « J’ai senti la magie dès la<br />
première minute », dit David Kim, violon. « À<br />
l’issue de la première répétition, renchérit<br />
Jeffrey Khaner, premier flûtiste, nous savions<br />
déjà que nous avions affaire à une personnalité<br />
hors du commun dont l’interprétation serait<br />
convaincante, possédant la technique nécessaire<br />
pour nous faire comprendre sa vision<br />
avec une clarté absolue et sans aucun geste<br />
parasite. Il est doté d’un dynamisme et d’un<br />
charisme immenses, en plus d’un caractère<br />
exceptionnellement chaleureux et positif ».<br />
<strong>La</strong> grande tradition orchestrale de<br />
Philadelphie est bien documentée dans ses<br />
enregistrements avec Leopold Stokowski et<br />
Eugene Ormandy, et c’est ce qui attire Nézet-<br />
Séguin. « C’est le facteur Curtis, dit-il en se<br />
référant à l’Institut Curtis, où la plupart des<br />
membres de l’orchestre enseignent. Le rapport<br />
de maître à élève est le plus élevé de tous<br />
les orchestres, et cela produit un son merveilleusement<br />
puissant des cordes. Il y a un<br />
grand respect entre les générations. »<br />
Nézet-Séguin a des idées précises sur la<br />
façon de diriger son nouvel orchestre. « Les<br />
enregistrements de Stokowski dans les années<br />
1930 sont tout simplement époustouflants.<br />
D’une justesse absolue, un ensemble parfait.<br />
Je veux revenir au sostenuto et au legato, qui<br />
tiennent du coup d’archet autant que de la<br />
présence du cœur et de l’âme. Les solistes<br />
savent prendre leur place, mais lorsque tout le<br />
monde joue ensemble, c’est avec une générosité<br />
qui ne se dément jamais. Ainsi, le son est<br />
mieux équilibré. » Nézet-Séguin envisage<br />
d’introduire du nouveau répertoire, davantage<br />
de musique baroque. « Jouer du Bach<br />
aide à faire du Mozart, ce qui aide dans<br />
Beethoven, puis Brahms. »<br />
Nézet-Séguin est également ravi de donner<br />
des conférences post-concert. « Des centaines<br />
et parfois des milliers de gens y assistent »,<br />
dit-il. Parmi les autres initiatives prévues, il<br />
mentionne son projet de festival à l’ancienne<br />
demeure de son orchestre, l’Academy of<br />
Music.<br />
Financièrement aussi, la situation se<br />
rétablit pour Philadelphie. L’an dernier,<br />
<strong>Yannick</strong> Nézet-Séguin était censé rester<br />
quatre semaines, mais il a donné six semaines<br />
« Il a développé une grande amitié avec<br />
l'Orchestre dans son entier. On a vraiment<br />
l'impression d'être "son" orchestre. »<br />
- JULIEN HERVÉ, clarinette solo de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam<br />
de concerts à guichets fermés. Enfin, depuis<br />
cet été, l’orchestre n’est plus sous la protection<br />
de la loi sur les faillites.<br />
Rotterdam<br />
<strong>La</strong> relation de Nézet-Séguin avec l’Orchestre<br />
philharmonique de Rotterdam a évolué différemment.<br />
« Je me sentais attiré par cette formation,<br />
mais il a fallu du temps pour transformer<br />
cette attraction en compréhension, ce<br />
qui était aussi très palpitant », explique-t-il.<br />
Depuis qu’il a repris l’orchestre de l’impulsif<br />
Russe Valery Gergiev, il essaie « de combiner<br />
la spontanéité de Gergiev à une discipline<br />
accrue dans le jeu et plus de raffinement dans<br />
les textures douces. Il a fallu trois ans de travail<br />
dans ce jardin, mais il commence à fleurir.<br />
» L’objectif de <strong>Yannick</strong> Nézet-Séguin est<br />
de hisser Rotterdam au rang des orchestres<br />
d’envergure internationale. L’année<br />
prochaine, ils démarrent une tournée de<br />
30 concerts qui arrivera à Montréal durant la<br />
saison 2014-2015.<br />
« <strong>Yannick</strong> est plus un architecte, et Gergiev plus<br />
un instinctif, explique Julien Hervé, clarinette<br />
solo de l’orchestre. Tout le monde appelle<br />
<strong>Yannick</strong> par son prénom dans l’orchestre, ça<br />
en dit déjà beaucoup ! » André Heuvelman,<br />
trompette solo, aime la façon dont le chef et<br />
l’orchestre font de la musique ensemble, mais<br />
il a quelques critiques à formuler sur le style<br />
et la technique de répétition de Nézet-Séguin :<br />
« À cause de sa jeunesse, il est parfois trop<br />
énergique et parle trop. J’espère qu’il va se<br />
calmer un peu et gagner en confiance à<br />
l’avenir, mais pour l’instant ça va très bien. »<br />
Montréal<br />
Les Montréalais ont assisté en direct à<br />
l’ascension fulgurante du maestro de 36 ans.<br />
Le cadet des trois enfants de Claudine Nézet<br />
et Serge Séguin, <strong>Yannick</strong> a commencé à<br />
écouter et à imiter ses sœurs au piano dès l’âge<br />
de deux ans, puis a débuté ses leçons de piano<br />
à cinq ans auprès de Jeanne-d’Arc Lebrun-<br />
Lussier. Celle-ci lui remettait constamment de<br />
nouvelles partitions parce qu’il les mémorisait<br />
PHOTO Marco Borggreve<br />
10<br />
SEPTEMBRE 2012