Palabres 13 - Association des Revues Plurielles
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Dossier<br />
M<br />
SESSIANISME<br />
YNCRÉTISME<br />
RELIGION<br />
Le Harrisme<br />
en France<br />
Hippolyte MEL GBADJA*<br />
1 - Le titre de prophète appliqué à William<br />
Wadé Harris vient du fait que comme la<br />
plupart <strong>des</strong> personnages charismatiques<br />
fondateurs d’Église, il se reconnaît comme<br />
envoyé de Dieu et dit avoir reçu sa mission<br />
de Dieu. Il s’appuie ensuite sur la Bible<br />
dans son enseignement. La persécution<br />
dont il est victime dans son parcours ainsi<br />
que les miracles et divers prodiges accomplis<br />
viennent confirmer enfin cette vocation<br />
prophétique dans laquelle il s’inscrit.<br />
2 - Les estimations sont de l’administrateur<br />
Gaston Joseph et du Pasteur André Roux.<br />
Cf. Pierre TRICHET, Côte d’Ivoire : Les<br />
premiers pas d’une Église. t. II : 1914-<br />
1940, Abidjan : La Nouvelle, 1994, p. 25.<br />
Le nombre élevé de conversions<br />
(200.000) par rapport à la population du<br />
littoral (120.000) révèle que l’action du<br />
prophète Harris s’étend au delà de la région<br />
côtière.<br />
3 - Les premiers missionnaires catholiques<br />
sont arrivés en Côte d’Ivoire en<br />
1895 et ceux de l’Église protestante en<br />
1924 c’est-à-dire dix années après la prédication<br />
du prophète Harris.<br />
4 - Le Père Trichet reprend ici une remarque<br />
du Père Joseph Gorju supérieur de<br />
la mission de Bingerville de 1906 à 1922.<br />
Cf. Pierre Trichet, op. cit., p. 18. L’on note<br />
effectivement une évolution nette du<br />
nombre de la population catholique qui<br />
passe de 3.680 en 1915 à 8.274 en 1920<br />
alors qu’elle était de 2.650 en 1910. De<br />
* Est né le 3 mars 1969 à Dabou (Côted’Ivoire).<br />
Ordonné prêtre en 1995 il officie<br />
au diocèse de Yopougon. Il prépare<br />
actuellement à l’Institut Catholique<br />
de Paris, une thèse sur les<br />
Mouvements prophétiques et messianiques<br />
en Afrique.<br />
Lorsqu’en 19<strong>13</strong>, le prophète William Wadé Harris fit son apparition dans le paysage religieux<br />
ivoirien, il était presque inconnu dans son pays le Liberia 1 . Pendant deux ans, il sillonna<br />
le littoral de la Côte d'Ivoire, prêchant au nom de Dieu et invitant les populations à se débarrasser<br />
de leurs fétiches. Le succès ne se fit pas attendre. On estime à environ 200.000 le<br />
nombre de personnes qui, résultat direct ou indirect de sa prédication, ont à ce moment-là<br />
brûlé leurs fétiches.<br />
I<br />
nfluence énorme du prophète<br />
Harris lorsqu’on sait que son action<br />
(directe) s’exerça sur une population<br />
qui peut être évaluée facilement à 100 ou<br />
120.000 habitants 2 . La prédication du prophète<br />
Harris marqua aussi, de manière importante,<br />
le travail <strong>des</strong> missionnaires européens<br />
qui en étaient à leurs débuts 3 . Cet halluciné,<br />
doublé d’un charlatan, dira un Père missionnaire,<br />
a fait en trois mois à peine, ce que nous,<br />
ministres de notre Seigneur Jésus-Christ,<br />
n’avons pas pu ébaucher en vingt ans 4 . Du<br />
côté protestant, les témoignages <strong>des</strong> pasteurs<br />
sont tout aussi extraordinaires : Je reviens de<br />
l’assemblée annuelle du district français de<br />
l’A.O.F 5 – c’était en janvier 1930 –. Quinze<br />
cents personnes s’y trouvaient, de tribus diverses,<br />
parlant je ne sais combien de langages<br />
différents, écoutant, chantant avec recueillement<br />
et un entrain inoubliables. Qui<br />
l’aurait cru avant le passage d’Harris ? 6 . Les<br />
missionnaires étaient ainsi unanimes à reconnaître<br />
l’importance de l’action du prophète<br />
William Wadé Harris. Cette action est aujourd’hui<br />
continuée par l’Église Harriste dont la<br />
présence dépasse le cadre ivoirien. La France<br />
est en effet devenue l’un <strong>des</strong> nouveaux espaces<br />
d’implantation <strong>des</strong> Églises prophétiques<br />
et messianiques africaines parmi lesquelles<br />
l’Église harriste reste l’une <strong>des</strong> plus<br />
significatives.<br />
LE DÉTOUR HISTORIQUE<br />
LE DÉTOUR HISTORIQUE<br />
La situation politique du Liberia.<br />
C’est en 1865 que naquit William Wadé<br />
Harris à Garaway au Liberia dans une nation<br />
indépendante depuis 1847 et au milieu<br />
d’une ethnie rebelle : les Grébo.<br />
C’est un peuple du littoral du Liberia appartenant<br />
au grand groupe ethnique<br />
Krou, frontalier avec la Côte-d’Ivoire.<br />
Leur région a connu le débarquement<br />
d’anciens esclaves noirs américains partis<br />
du Maryland en 1822 7 . Avec ce débarquement,<br />
naissent les tensions entre<br />
les Grébo et le gouvernement américanolibérien,<br />
mis en place avec l’arrivée <strong>des</strong><br />
esclaves noirs américains. Les Grébo reprochent<br />
aux nouveaux venus et surtout<br />
au gouvernement américano-libérien<br />
leur attitude dominatrice. L’arrivée <strong>des</strong><br />
Anglais au Liberia permet au peuple grébo<br />
de s’opposer ouvertement au gouver-<br />
14<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
D OSSIER<br />
Les Harristes de France<br />
nement américano-libérien et d’affirmer<br />
son nationalisme. Les Anglais qui manifestaient<br />
<strong>des</strong> visées protectionnistes sur<br />
le Liberia apportent en effet leur soutien<br />
aux Grébo qui travaillaient depuis longtemps<br />
dans les équipages de bateaux anglais.<br />
Ces derniers espéraient en fait devenir<br />
<strong>des</strong> sujets britanniques. Le gouvernement<br />
organise alors <strong>des</strong> représailles<br />
contre les Grébo avec l’aide <strong>des</strong><br />
Allemands et <strong>des</strong> Américains en bombardant<br />
Garaway, le centre de leur mouvement<br />
nationaliste. Une lutte s’engage<br />
ainsi entre le gouvernement américanolibérien<br />
et le mouvement nationaliste<br />
grébo. L’un de ces plus ardents nationalistes<br />
est William Wadé Harris connu<br />
sous le nom de Old man Union Jack.<br />
Dans le village de Paduke, près de<br />
Garaway, Harris qui a pris fait et cause<br />
pour un protectorat britannique, arrache<br />
le drapeau libérien du bâtiment administratif<br />
pour y faire flotter le drapeau anglais.<br />
Il est alors arrêté et mis en prison.<br />
C’est au cours de cette incarcération<br />
qu’Harris dit avoir reçu la visite de l’ange<br />
Gabriel. Mais pour comprendre cette<br />
expérience mystique qui changea sa vie,<br />
il convient de jeter un regard sur son parcours<br />
religieux.<br />
Le parcours religieux de William Wadé<br />
Harris. C’est à l’âge de douze ans que le<br />
jeune Harris se convertit au<br />
Christianisme. Il est alors pris sous tutelle<br />
par Jesse Lawry, un pasteur épiscopalien<br />
grébo 8 . C’est auprès de ce dernier<br />
qu’il reçoit sa première formation religieuse<br />
et son baptême. Le pays est alors<br />
officiellement d’obédience protestante<br />
1910 à 1915, il y a eu 1.030 conversions et<br />
de 1915 à 1920, 4.594 conversions soit<br />
quatre fois plus.<br />
5 - Afrique Occidentale Française.<br />
6 - Cité par Théophile Roux in Walker<br />
Deaville, Harris le prophète noir.<br />
Instrument d’un puissant réveil en Côte<br />
d’Ivoire, Paris : Privas, 1931, p. XII.<br />
7 - Avec les armateurs de Charleston en<br />
Caroline du sud s’est développé un mouvement<br />
pour le rapatriement <strong>des</strong> esclaves<br />
libérés vers l’Afrique. Le Liberia et la<br />
Sierra Leone ont été choisis à cet effet par<br />
les réformés américains.<br />
8 - Jesse Lawry était président de l’école<br />
méthodiste épiscopalienne de Cap<br />
Palmas.<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
15
D OSSIER<br />
9 - Le missionnaire le plus actif de cette<br />
œuvre est le Pasteur John Gottleib Auer.<br />
Beaucoup de ses livres furent malheureusement<br />
brûlés ou jetés à la mer par le gouvernement<br />
qui y voyait <strong>des</strong> menaces d’insurrection.<br />
Cf. René Bureau, Le prophète<br />
de la lagune. Les harristes de Côte<br />
d’Ivoire, Paris : Karthala, 1996, p. 10-11.<br />
10 - René Bureau, Op. Cit., p. 11.<br />
11 - La Guerre de 1914-1918 a en fait mobilisé<br />
un grand nombre de prêtres en service<br />
en Côte d’Ivoire. Le Père Joseph Hartz<br />
alors supérieur de Grand-Bassam sera ainsi<br />
appelé à venir assumer l’intérim du supérieur<br />
de Bingerville. C’est ce qui lui vaudra<br />
de recevoir la visite de Harris vers octobre<br />
1914.<br />
12 - L’entretien a eu lieu en octobre 1914 à<br />
Bingerville.<br />
<strong>13</strong> - Sa femme qui était malade mourra effectivement<br />
quelques temps après.<br />
14 - Cf. René Bureau, Op. Cit., p. 12.<br />
15 - Mongo Béti explique le succès du<br />
christianisme en Afrique par cette volonté<br />
de découvrir le secret <strong>des</strong> Blancs. À la<br />
question du Père Drumont qui n’arrive pas<br />
à comprendre pourquoi la population quitte<br />
l’Église après l’engouement <strong>des</strong> premières<br />
heures, son cuisinier Zacharie répond<br />
: Les premiers d’entre nous qui ont<br />
accouru à votre religion y sont venus comme<br />
à ... une révélation, c’est ça, une révélation,<br />
une école où ils acquerraient la révélation<br />
de votre secret, le secret de votre<br />
force, la force de vos avions, de vos chemins<br />
de fer, est-ce que je sais moi ... le secret<br />
de votre mystère, quoi ! Au lieu de cela,<br />
vous vous êtes mis à leur parler de<br />
Dieu, de l’âme de la vie éternelle, etc ...<br />
Est-ce que vous vous imaginez qu’ils ne<br />
connaissaient pas déjà tout cela avant,<br />
bien avant votre arrivée ? Ma foi, ils ont eu<br />
l’impression que vous leur cachiez<br />
quelque chose. Plus tard ils s’aperçurent<br />
qu’avec de l’argent ils pouvaient se procurer<br />
bien <strong>des</strong> choses, et par exemple <strong>des</strong><br />
phonographes, <strong>des</strong> automobiles, et un jour<br />
peut-être <strong>des</strong> avions. Et voila. Ils abandonnent<br />
la religion, ils courent ailleurs, je<br />
veux dire vers l’argent. Voila la vérité<br />
Père. Mongo Beti, Le pauvre Christ de<br />
Bomba, Paris, Présence Africaine, 1976,<br />
p. 54.<br />
depuis 1837. Les missionnaires catholiques,<br />
moins en vue, ne débarqueront<br />
que quelques années après, en 1841. Les<br />
missionnaires épiscopaliens, à leur arrivée,<br />
s’engagent dans une vaste opération<br />
d’étude de la langue grébo, en vue de la<br />
traduction de la Bible en langue vernaculaire<br />
grébo 9 . Après l’édition d’un dictionnaire<br />
grébo en 1839 et de livres<br />
d’écoles, les épiscopaliens réussissent<br />
aussi à traduire, dès 1842, <strong>des</strong> portions de<br />
la Bible, <strong>des</strong> livres de prières, <strong>des</strong><br />
hymnes et <strong>des</strong> litanies. René Bureau note<br />
que grâce aux écoles et à ces ouvrages,<br />
les Grébo furent rapidement les plus<br />
avertis au sein du groupe Krou 10 . Harris<br />
a reçu ainsi avec l’Église épiscopalienne,<br />
une formation chrétienne très solide en<br />
anglais et en grébo. La traduction de la<br />
Bible en langue vernaculaire était pour<br />
lui un atout précieux : c’est avec elle<br />
qu’il a appris à lire. C’ était le seul livre<br />
qu’il connaissait et il le connaissait bien.<br />
Après un passage dans la marine anglaise<br />
comme crewman, il se convertit à<br />
vingt-et-un ans à l’Église méthodiste<br />
dont il devient prédicateur, tout en exerçant<br />
le métier de maçon. II revient ensuite<br />
à l’Église épiscopalienne après son<br />
mariage en 1885 avec Rose Badock. Il<br />
sera confirmé dans cette Église par le<br />
Pasteur Ferguson en 1888. Il tient, en<br />
1892, un internat à Garaway où il est à la<br />
fois enseignant et prédicateur. Harris a<br />
donc une connaissance biblique assez solide<br />
lorsqu’il fait l’expérience mystique<br />
de sa vocation qui changea le cours de sa<br />
vie. Le récit de cette vocation nous est<br />
connu grâce à ses témoignages et notamment<br />
à un entretien avec le Père Joseph<br />
Hartz, supérieur intérimaire de<br />
Bingerville 11 . Il décrit ainsi sa vision : Je<br />
suis prophète, au-<strong>des</strong>sus de toute religion<br />
et affranchi du contrôle <strong>des</strong> hommes. Je<br />
ne relève que de Dieu par l’intermédiaire<br />
de l’ange Gabriel. Il y a quatre ans –<br />
c’est-à-dire en 1910 12 –, je fus éveillé<br />
brusquement durant la nuit. Je vis l’ange<br />
protecteur sous une forme sensible au<strong>des</strong>sus<br />
de mon lit. Par trois fois il me<br />
frappa le sommet de la tête et me dit « Je<br />
te demande le sacrifice de ta femme. Elle<br />
mourra mais je t’en donnerai d’autres<br />
qui t’aideront dans l’ œuvre que tu dois<br />
fonder <strong>13</strong> . Ta femme te remettra, avant sa<br />
mort, six shilling ; ce sera ta fortune ; tu<br />
passeras partout. Ils ne te manqueront<br />
jamais. Je t’accompagnerai partout et te<br />
révélerai la mission à laquelle te <strong>des</strong>tine<br />
Dieu, le Maître de l’univers que les<br />
hommes ne respectent plus » 14 .<br />
La mission du prophète Harris commence<br />
alors à sa sortie de prison en 1912.<br />
Harris se fait confectionner un grand<br />
boubou blanc assorti d’un turban blanc.<br />
Un pan de tissu noir lui couvre les<br />
épaules alors qu’un autre est utilisé comme<br />
une sorte de baudrier croisé sur sa<br />
poitrine. Portant ensuite une Bible et une<br />
canne en forme de croix, il se lance sur la<br />
voie de la mission. Après un premier<br />
échec dans son pays, il se tourne vers la<br />
Côte-d’Ivoire.<br />
Le message du prophète Harris. Harris<br />
se présente dans ses prédications comme<br />
celui qui inaugure une nouvelle vie pour<br />
le peuple ; une vie comparable à celle <strong>des</strong><br />
Blancs. Le colonisateur est en effet perçu<br />
par l’Africain de façon ambivalente. Il<br />
est à la fois redoutable et séduisant. Il est<br />
l’homme du mal et du bien, celui qui est<br />
critiqué et admiré. L’homme Blanc est<br />
sans aucun doute un mystère. II est un<br />
mystère qui attire, fascine, interroge.<br />
D’où lui vient sa force ? Quel est le secret<br />
de son pouvoir ? Comment, en somme,<br />
percer le secret de l’homme Blanc 15 ?<br />
Pour le prophète Harris, l’homme blanc<br />
est fort parce qu’il a bénéficié de la force<br />
de Jésus. Mais Jésus n’est pas venu en<br />
Afrique. Dieu l’a envoyé aux Blancs parce<br />
que Jésus était lui-même un Blanc.<br />
Ainsi, de même que Dieu a envoyé Jésus<br />
aux Blancs, de même il a envoyé Harris<br />
aux Africains. Harris est donc une chance<br />
pour les Africains. Reconnaître le prophète<br />
Harris et écouter sa parole, c’est<br />
ouvrir la voie de la prospérité et d’une vie<br />
semblable à celle <strong>des</strong> Blancs. Dans sept<br />
16<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
ans, les Noirs seront comme <strong>des</strong> Blancs<br />
dira le prophète Harris 16 . La prospérité<br />
de la région côtière sera ainsi vue comme<br />
un signe de l’efficacité de la mission<br />
d’Harris 17 .<br />
Mais pour espérer avoir part à la vie <strong>des</strong><br />
Blancs, il faut d’abord se convertir. Harris<br />
appelle ainsi la population tout entière à la<br />
conversion qui passe par la lutte contre la<br />
sorcellerie et la <strong>des</strong>truction systématique<br />
<strong>des</strong> fétiches pour servir et adorer le Dieu<br />
unique et vrai. John Ahui, le premier chef<br />
spirituel de l’Église harriste dira : Les fétiches<br />
tuent et Harris est venu nous délivrer<br />
de cette mort. Il m’a dit de brûler les fétiches,<br />
les maisons et les idoles 18 . Les fétiches<br />
sont un mal à combattre et contre<br />
leur influence, Harris propose le baptême.<br />
Le baptême est l’instrument de la lutte<br />
contre les fétiches et la sorcellerie. Il est généralement<br />
précédé d’une exhortation à la<br />
conversion et un appel à jeter les fétiches.<br />
L’acte en lui-même comprend deux parties<br />
qui se réalisent de manière concomitante :<br />
le toucher de la Croix du prophète Harris et<br />
la signation sur le front avec l’eau. Harris<br />
trace sur le front du fidèle un signe de croix<br />
en lui faisant tenir sa Croix.<br />
En fait, c’est longtemps après la mort<br />
du prophète Harris, le 23 avril 1929 et avec<br />
l’institutionnalisation du mouvement harriste<br />
que l’enseignement du prophète se<br />
structure pour devenir une véritable doctrine,<br />
avec l’édition, en 1956, d’un catéchisme.<br />
Il s’agissait de fixer l’enseignement du<br />
prophète ainsi que l’organisation de la vie<br />
de la nouvelle Église. Cet enseignement<br />
doctrinal est résumé dans les Dix commandements<br />
de la foi harriste :<br />
Dieu seul tu adoreras.<br />
Dans ton prochain, Dieu tu aimeras.<br />
Le Nom de Dieu tu ne parjureras pas.<br />
Tu abhorreras l’idolâtrie.<br />
Dimanche tout travail sera interdit.<br />
Tu honoreras ton père et ta mère.<br />
Tu ne commettras pas d’adultère.<br />
Tu ne tueras point.<br />
Tu ne voleras point.<br />
Alcool, tu n’abuseras point 19 .<br />
Harris a posé en somme <strong>des</strong> jalons<br />
qui seront repris, augmentés et commentés<br />
par l’Église harriste et toutes les<br />
Églises néo-harristes.<br />
D OSSIER<br />
16 - Paul Augé, Jean Paul Colleyn, Nkpiti.<br />
La rancune et le prophète, Paris, Éd. de<br />
l’École de Hautes Étu<strong>des</strong> en Sciences sociales,<br />
1990, p. 15.<br />
17 - Jean-Pierre Dozon note à ce sujet : Les<br />
commandements d’Harris auraient-ils eu<br />
à ce point l’effet escompté que sa prophétie,<br />
qui voulait que les Noirs fussent bientôt<br />
les égaux <strong>des</strong> Blancs, se soit finalement<br />
réalisée ? On serait tenté de le croire,<br />
puisque l’espace proprement ivoirien n’a<br />
cessé de grossir aux dépens du colonisateur<br />
en donnant naissance à un État indépendant<br />
et en se parant <strong>des</strong> nombreux attributs<br />
de la modernité qu’une société de<br />
consommation pour les couches ivoiriennes<br />
les plus aisées semble presque<br />
parachever. Cf. Jean-Pierre Dozon, La<br />
cause <strong>des</strong> prophètes, Paris : Seuil, 1995, p.<br />
74.<br />
18 - René Bureau, Op. Cit., p. 110.<br />
19 - René Bureau, Op. Cit., p. 96-97<br />
20 - Harris aurait ainsi invité ses fidèles à<br />
se diriger vers les missionnaires Blancs qui<br />
viendront à eux avec la Bible c’est-à-dire<br />
les missionnaires protestants dont il aurait<br />
d’ailleurs prédit l’arrivée. Les missionnaires<br />
protestants sont effectivement arrivés<br />
en Côte d’Ivoire en 1924, dix ans après<br />
le passage du prophète Harris.<br />
L’institutionnalisation du mouvement<br />
harriste. D’un point de vue sociologique,<br />
les mouvements prophétiques et messianiques<br />
ne pouvaient pas continuer à exister<br />
uniquement comme mouvements, ni<br />
survivre à long terme uniquement avec<br />
<strong>des</strong> chefs charismatiques. Ou ils se désintégraient<br />
et disparaissaient, ou ils s’institutionnalisaient<br />
pour devenir <strong>des</strong> Églises<br />
indépendantes. C’est cette deuxième<br />
voie que le mouvement harriste a suivi<br />
avec beaucoup d’autres mouvements.<br />
Arrêté en avril 1915 par l’autorité coloniale<br />
pour trouble à l’ordre public,<br />
Harris est en effet expulsé de la Côted’Ivoire<br />
vers le Liberia. Il a été victime<br />
de l’influence considérable <strong>des</strong> conjonctures<br />
politiques de l’Europe sur 1’ œuvre<br />
missionnaire notamment les rivalités<br />
entre la France et l’Angleterre. À cette<br />
époque, une certaine vision de la mission<br />
consistait à avoir <strong>des</strong> missionnaires anglais<br />
à l’œuvre dans les colonies britanniques,<br />
<strong>des</strong> missionnaires français dans<br />
les colonies françaises et <strong>des</strong> missionnaires<br />
allemands dans les colonies alleman<strong>des</strong>.<br />
Harris , originaire d’une colonie<br />
anglophone – le Liberia –, officiellement<br />
d’obédience protestante, sera soupçonné<br />
de soutenir le protestantisme et<br />
donc les Anglais 20 . Raison suffisante<br />
pour être expulsé de la Côte-d’Ivoire.<br />
L’action du prophète Harris a cependant<br />
été couronnée de succès : nombreuses<br />
ont été les conversions dans la<br />
population. Mais après son départ au<br />
Liberia s’est posée la question du devenir<br />
de ces nouveaux convertis. Vers quelle<br />
Église s’orienter ? Qui va gérer l’héritage<br />
du prophète Harris ?<br />
Une lutte ouverte s’est alors engagée.<br />
La Société <strong>des</strong> Missions Méthodistes<br />
Wesleyennes de Londres est la première à<br />
s’attribuer officiellement cette charge.<br />
Elle a, en effet, décidé dans un grand acl’arbre<br />
à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
17
D<br />
OSSIER<br />
te de foi et en plein accord avec la<br />
Société <strong>des</strong> Missions Évangéliques de<br />
Paris, d’accepter l’héritage spirituel<br />
d’Harris 21 . L’Église Méthodiste<br />
Wesleyenne s’est en fait appliqué les paroles<br />
du prophète Harris : Après moi<br />
viendront les Blancs, serviteurs de Dieu,<br />
avec le Livre, et ils vous enseigneront par<br />
« Message du prophète William Wadé Harris aux Églises que j’ai<br />
fondées sur la Côte d’Ivoire<br />
» Moi, William Wadé Harris, qui vous ai appelés à la vérité de l’Évangile<br />
et au baptême, j’ai donné œ message au Pasteur P. Benoît,<br />
afin qu’il puisse vous l’apporter et que vous y obéissiez.<br />
» Tous les hommes, femmes et enfants qui ont été appelés et baptisés<br />
par moi, doivent entrer dans l’Église Méthodiste Wesleyenne.<br />
Je suis moi-même méthodiste. Personne ne doit se joindre à l’Église<br />
catholique romaine, s’il désire me rester fidèle. M. Platt, le<br />
directeur de notre Église méthodiste, est désigné, par moi, comme<br />
mon successeur à la tête <strong>des</strong> Église que j’ai fondées.<br />
» Tous les fétiches doivent être détruits. Brûlez-les tous au feu. Que<br />
le malin assiège celui qui les gardera secrètement dans sa maison !<br />
Puisse le feu céleste les dévorer ! Tous doivent adorer le seul vrai<br />
Dieu en Jésus-Christ et Le servir Lui seul !<br />
» Lisez la Bible, c’est la Parole de Dieu. Je vous en envoie une, où<br />
j’ai marqué les versets que vous devrez lire. Cherchez la lumière<br />
dans la Bible. Apprenez à lire pour être capables de connaître la<br />
Bible ; elle sera votre guide.<br />
» Soyez fidèles en toutes choses, vous attachant fermement à pratiquer<br />
les dix commandements et la parole de Jésus-Christ, notre<br />
seul sauveur.<br />
» Je vous envoie mes vœux et mes messages de joie. Puisse le Dieu<br />
de grâce vous bénir abondamment! » (Cap Palmas, le 25 septembre<br />
1926).<br />
Le Pasteur Deaville Walker qui nous présente ce document souligne<br />
qu’en plus de sa signature, « Harris apposa à cet important<br />
document, l’empreinte de ses deux pouces ; puis neuf témoins y<br />
ajoutèrent leurs noms ou leurs empreintes digitales ». Cf. Deaville<br />
Walker, Op. Cit., p. 174-175.<br />
21 - E. de Billy, En Côte d’Ivoire.<br />
Mission protestante d’A.0.F., Paris :<br />
S.M.E., p. XII.<br />
22 - Cf. E. de Billy, Op. Cit., p. 16. Le<br />
Pasteur André Roux nous donne une<br />
autre version dans laquelle la mission<br />
d’Harris est comparée à celle de Jean-<br />
Baptiste : Quand le coq chante, ce n’est<br />
pas encore le jour, mais seulement le<br />
premier rayon de l’aube. Cependant le<br />
jour vient. Je ne vous apporte pas la lu-<br />
la prédication et les écoles tout ce qui est<br />
écrit dans la Bible. C’est chez un Pasteur<br />
de votre race instruit par eux (Il s’agit du<br />
Pasteur Jessy Lawry), que moi-même,<br />
quand je n’étais qu’un petit garçon, j’ai<br />
appris à lire la Parole de Dieu. C’est cette<br />
parole sacrée apportée par les Blancs<br />
que vous devrez recevoir et à laquelle il<br />
faudra obéir sans murmures, si vous<br />
voulez avoir part à la Vie éternelle après<br />
la mort 22 .<br />
Dix ans après le passage du prophète<br />
Harris, en 1924, le Pasteur Platt 23 en visite<br />
en Côte-d’Ivoire fut accueilli en<br />
grande pompe comme le premier de ces<br />
Blancs annoncés par le prophète.<br />
L’Église méthodiste se voyait ainsi établie<br />
triomphalement par la population<br />
comme l’héritière de l’œuvre du prophète<br />
Harris. Une révolte éclata alors du côté<br />
<strong>des</strong> inconditionnels du prophète Harris<br />
qui refusaient de reconnaître l’Église méthodiste<br />
comme l’héritière du prophète.<br />
Face à cette crise ouverte, le Pasteur français<br />
Pierre Benoît, avec l’accord du<br />
Pasteur Platt, se rendit en septembre<br />
1926 au Liberia pour rencontrer le prophète<br />
William Wadé Harris. Il revint de<br />
ce voyage avec une Bible, une photo sur<br />
laquelle on peut voir Harris et le Pasteur<br />
Pierre Benoît et un message connu sous<br />
le nom de Testament d’Harris. Ce message<br />
est une invitation adressée à ses fidèles<br />
pour entrer dans l’Église protestante<br />
et non l’Église catholique – voir encadré<br />
page suivante. Ce document très<br />
controversé sonna en fait le glas de la<br />
rupture entre l’Église protestante de<br />
Côte-d’Ivoire et les inconditionnels de<br />
William Wadé Harris 24 .<br />
Face à l’Église protestante méthodiste<br />
se dresse le groupe <strong>des</strong> inconditionnels<br />
du prophète. Dirigé par John Ahui,<br />
Salomon Dagri et Gaston N’dri, il se<br />
compose d’abord <strong>des</strong> prédicateurs établis<br />
par Harris lui-même dans les villages où<br />
il est passé ainsi que <strong>des</strong> responsables de<br />
communautés harristes qui ont vu le jour<br />
après le passage du prophète 25 . On trouve<br />
ensuite les interprètes du prophète<br />
Harris notamment les clerks originaires<br />
de la Gold Coast ou de la Sierra Leone.<br />
Autour de ce noyau s’est enfin formé un<br />
grand nombre de fidèles qui ont refusé de<br />
se rallier à l’Église protestante et à l’Église<br />
catholique. Parmi eux, certains ont<br />
été rebutés par les exigences morales de<br />
l’Église catholique. Du côté protestant,<br />
les charges financières pour la vie de l’Église<br />
ont découragé beaucoup de fidèles.<br />
18<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
Les questions sur les lois du mariage et<br />
les collectes d’argent ont décidé officiellement<br />
John Ahui et Salomon Dagri à se<br />
rendre en 1928 à Garaway pour rencontrer<br />
Harris. Mais en fait, avec ce voyage<br />
se profile aussi la recherche d’une légitimité<br />
face aux missionnaires protestants<br />
forts de leur Testament d’Harris et les<br />
nouvelles défections <strong>des</strong> fidèles avec<br />
l’émergence de prophètes se réclamant<br />
d’Harris 26 .<br />
Le séjour à Garaway fut fructueux<br />
puisqu’il est couronné par une photo du<br />
prophète Harris avec John Ahui,<br />
Salomon Dagri et Dibo l’interprète.<br />
Harris remet ensuite à Salomon Dagri sa<br />
canne et sa Bible, symbole de la légitimité<br />
et de l’orthodoxie de leur action.<br />
L’Église harriste vient de naître. Mais<br />
c’est en août 1955 avec son premier<br />
congrès qu’elle devient une véritable institution<br />
avec John Ahui comme premier<br />
chef spirituel. Il hérite en effet à ce<br />
congrès de la canne et de la Bible du prophète.<br />
L’Église harriste se donne ensuite<br />
une devise : Dieu, Travail, Amour,<br />
Patrie, un catéchisme imprimé en 1956<br />
et <strong>des</strong> statuts publiés dans le journal officiel<br />
de la Côte-d’Ivoire le 4 mars 1961<br />
avec comme dénomination officielle :<br />
Église du Christ Mission Harris 27 .<br />
LE HARRISME EN FRANCE<br />
L’Église harriste dans le contexte juridique<br />
du fait religieux en France. En s’implantant<br />
en France, les Églises prophétiques<br />
et messianiques africaines se trouvent<br />
confrontées à de nouvelles réalités<br />
auxquelles n’échappe pas l’Église harriste.<br />
Ceux qui se réclament de ces Églises<br />
ne peuvent pas en effet vivre et exprimer<br />
leur foi comme ils le feraient dans leur<br />
pays d’origine. Le fidèle harriste vivant<br />
en France ne peut pas ainsi honorer par<br />
exemple les sept moments de la prière<br />
hebdomadaire requise comme il le ferait<br />
en Côte-d’Ivoire. Il doit tenir compte <strong>des</strong><br />
contraintes que lui impose son nouveau<br />
cadre de vie, et notamment le contexte<br />
D OSSIER<br />
mière, je suis seulement le coq qui<br />
chante, après moi <strong>des</strong> missionnaires<br />
Blancs viendront avec la Bible, vous les<br />
écouterez, ce sont eux qui vous instruiront<br />
dans toute la lumière. Cf. André<br />
Roux, Un prophète : Harris, Le monde<br />
noir, n° 8-9, mars 1950, p. <strong>13</strong>6.<br />
23 - Le Pasteur Platt était le président<br />
du Synode du district de la Société <strong>des</strong><br />
Missions Méthodistes Wesleyennes de<br />
Londres en A.O.F. Il résidait à Porto-<br />
Novo au Dahomey. Sa visite fait suite à<br />
la crise suscitée dans l’Église<br />
Méthodiste de Côte d’Ivoire par le traité<br />
de St-Germain qui entraîna la fermeture<br />
du temple de Grand-Bassam et la<br />
suspension de leur commerce de<br />
Bibles.<br />
24 - Sans douter de la bonne foi du<br />
Pasteur Pierre Benoît, il faut cependant<br />
reconnaître que ce document parce<br />
qu’il s’inscrit dans un contexte de crise<br />
de leadership, n’est pas à l’abri d’une<br />
intervention partisane de ce dernier.<br />
René Bureau note d’ailleurs à cet effet<br />
: Cette mission ne peut être mise en<br />
doute mais la teneur du texte signé<br />
alors par Harris, par lequel il conseille<br />
à tous ses anciens fidèles d’embrasser<br />
la religion méthodiste, est en contradiction<br />
avec les éléments recueillis un<br />
an plus tard par la délégation Ebrié<br />
conduite par Salomon Dagri et John<br />
Ahui. Voici ce que dit A., le prédicateur<br />
professionnel : Les vieux nous ont<br />
trompés. Ils ont dit que Harris avait<br />
renvoyé les gens vers les catholiques et<br />
les protestants. Ce n’est pas vrai.<br />
Lorsque Jona Ahui est allé à Cape<br />
Palmas, Harris lui a dit : Je me suis fait<br />
avoir par le pasteur Benoît ; la photo et<br />
le texte était truqués. Cf. René Bureau,<br />
Op. Cit., p. 51.<br />
25 - John Ahui et Salomon Dagri sont<br />
originaires de Jacqueville. Ils présidaient<br />
le culte harriste dans le village<br />
de Petit Bassam. Gaston N’dri dirigeait<br />
par contre une communauté chez lui à<br />
Grand-Lahou, l’une <strong>des</strong> premières localités<br />
visitées par Harris.<br />
26 - Un prophète de Jacqueville, Bogui<br />
Aké, créa ainsi en 1926, un mouvement<br />
se réclamant du prophète Harris.<br />
27 - Récépissé n° 3050 UCAB/AG du<br />
22 déc. 1960.<br />
28 - L’Alsace et la Moselle, pour <strong>des</strong><br />
raisons historiques, ne sont pas concernées<br />
par cette loi. Elles sont encore<br />
sous le régime concordataire.<br />
29 - Toute personne a droit à la liberté<br />
de pensée, de conscience et de religion ;<br />
ce droit implique la liberté de changer<br />
de religion ou de conviction ainsi que la<br />
liberté de manifester sa religion ou sa<br />
conviction individuellement ou collectivement,<br />
en public ou en privé, par le<br />
culte, l’enseignement, les pratiques et<br />
l’accomplissement <strong>des</strong> rites<br />
(Convention européenne de sauvegarde<br />
<strong>des</strong> Droits de l’homme et <strong>des</strong> libertés<br />
fondamentales. 4.11.1950, art. 9, § 1)<br />
30 - Haut Conseil de l’intégration,<br />
Conditions juridiques et culturelles de<br />
l’intégration, mars 1992, p. 37. 32<br />
juridique du fait religieux en France.<br />
La Constitution française de 1958 définie<br />
en son article 2, le cadre juridique<br />
du fait religieux : La France est une<br />
République laïque. Elle assure l’égalité<br />
de tous les citoyens devant la loi, sans<br />
distinction d’origine, de race ou de religion.<br />
Elle respecte toutes les croyances.<br />
Cette affirmation du caractère laïque de<br />
la République française est en fait<br />
l’aboutissement d’une longue évolution<br />
politique marquée par trois gran<strong>des</strong> lois<br />
considérées comme les textes fondateurs<br />
de cette laïcité. Les deux premières<br />
lois dites de Jules Ferry – 28<br />
mars 1882 et 30 octobre 1886 – proclament<br />
la neutralité confessionnelle de<br />
l’école publique et font dépendre de l’État<br />
son personnel enseignant. La troisième<br />
loi du 9 décembre 1905 sur la séparation<br />
<strong>des</strong> Églises et de l’État dégage<br />
l’État français de tout lien à un culte 28 .<br />
Mais en même temps, elle le fait garant<br />
de la liberté de conscience et de croyance<br />
: La République assure la liberté de<br />
conscience. Elle garantit le libre exercice<br />
<strong>des</strong> cultes sous les seules restrictions<br />
édictées ci-après dans l’intérêt de<br />
l’ordre public (art. l er ). Une fois affirmée<br />
cette liberté de conscience, il revient<br />
maintenant à l’État de prendre toutes les<br />
dispositions juridiques pour rendre effective<br />
et protéger cette liberté inscrite<br />
par ailleurs dans la Convention<br />
Européenne <strong>des</strong> Droits de l’Homme 29 .<br />
La loi pénale (française) réprime ainsi<br />
la diffamation, l’injure publique, la provocation<br />
à la haine ou à la violence<br />
contre toute personne du fait de son appartenance<br />
à une religion. Il en va de<br />
même <strong>des</strong> troubles ou désordres apportés<br />
au déroulement <strong>des</strong> cultes. De même<br />
est illégale toute forme de discrimination<br />
fondée sur les croyances ou convictions<br />
religieuses 30 .<br />
C’est dans cette volonté de protéger<br />
et de rendre effective cette liberté religieuse<br />
que le législateur a institué – loi de<br />
1901– dans le cadre de l’exercice <strong>des</strong><br />
cultes, les associations culturelles <strong>des</strong>til’arbre<br />
à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
19
D OSSIER<br />
31 - Haut Conseil de l’intégration, Op.<br />
Cit., p. 37.<br />
32 - Haut Conseil de l’intégration, Op.<br />
Cit., p. 44.<br />
33 - L’actuel Suprême de l’Église harriste<br />
est Cessi Koutouan et le Secrétaire général,<br />
Dogbo Jules. Le nouveau Patriarche<br />
n’a pas été encore officiellement installé<br />
après le décès de l’ancien, Yacé Akré<br />
Barthelemy en août 2000.<br />
nées à prendre en charge tous les aspects<br />
matériels de cette activité 31 . Le régime<br />
de la loi de 1905 s’applique en principe à<br />
<strong>des</strong> associations véritablement représentatives<br />
d’une religion donnée ; mais<br />
lorsque ce point est difficile à apprécier<br />
– comme c’est le cas de l’Église harriste<br />
et bien d’autres Églises africaines –,<br />
l’autorité compétente est parfois paralysée<br />
par la crainte de donner une investiture<br />
officielle à une simple tendance minoritaire.<br />
La loi de 1901 permet de<br />
contourner cette difficulté et offre en<br />
outre l’avantage, pour <strong>des</strong> associations à<br />
objet culturel ou social déclaré, de ne pas<br />
cloisonner les financements 32 . L’Église<br />
harriste a donc bénéficié d’un code juridique<br />
favorable au fait religieux avec notamment<br />
la loi du ler juillet relative aux<br />
associations pour s’implanter en France.<br />
Elle jouit d’une capacité juridique qui<br />
permet à ses fidèles de vivre et d’exprimer<br />
leur foi, dans un cadre légal.<br />
L’organisation de l’Église harriste, rappel<br />
historique. L’Église du Christ -<br />
Mission Harris dite Église harriste a son<br />
siège spirituel en Côte-d’Ivoire à Abia-<br />
Gnambo (Petit Bassam) dans la commune<br />
d’Abidjan précisément à Port-Bouët.<br />
C’est le village natal du Prédicateur John<br />
Ahui, premier successeur et légataire<br />
universel du prophète William Wadé<br />
Harris. Son siège administratif est situé à<br />
Bingerville dans la banlieue abidjanaise.<br />
C’est, en effet, à Bingerville, alors capitale<br />
de la Côte-d’Ivoire que Harris fut reçu<br />
officiellement par les autorités politiques<br />
et administratives coloniales à la<br />
fin de l’année 1914.<br />
L’Église harriste est organisée en deux<br />
structures autonomes : une structure institutionnelle<br />
et une structure de type associatif<br />
appelée AFRAH (<strong>Association</strong> <strong>des</strong> Frères<br />
Résidents Harristes). Ces deux structures<br />
dépendaient auparavant d’un organe central,<br />
le Comité National Harriste qui a vu le<br />
jour en 1960. En août 1994, a ensuite été<br />
crée, lors d’un Congrès international de<br />
l’Église harriste à Ouidah au Bénin, le<br />
Comité International Harriste (COMIHA) regroupant<br />
les harristes du Bénin, du Ghana,<br />
du Burkina Faso et de la Côte-d’Ivoire. Ces<br />
deux comités (national et international) ont<br />
été présidés par Thotche Mel Félix avant<br />
d’être dissous en août 2000 laissant ainsi la<br />
gestion de l’Église harriste aux deux premières<br />
structures susmentionnées.<br />
Au niveau institutionnel, l’Église harriste<br />
a à sa tête un chef spirituel appelé le<br />
Patriarche. Son institution remonte à<br />
Harris lui-même : sa canne et sa Bible ont<br />
été remises à John Ahui comme signe de<br />
la légitimité et de l’orthodoxie de son action.<br />
Le Patriarche est donc issu du rang<br />
<strong>des</strong> Prédicateurs du village de John Ahui,<br />
Abia-Gnambo ou Petit Bassam. En cas<br />
de vacance du siège, c’est le second prédicateur<br />
supérieur qui le remplace directement.<br />
La fonction principale du<br />
Patriarche est la nomination <strong>des</strong><br />
Prédicateurs supérieurs sur proposition<br />
de leurs pairs. Il est en outre chargé de la<br />
confection et de l’attribution <strong>des</strong> cannes.<br />
II est secondé par un vice-président qui<br />
est le Prédicateur supérieur de l’Église<br />
appelé communément le Suprême. Il aide<br />
le Patriarche dans l’exercice de ses fonctions<br />
et le représente en cas d’empêchement.<br />
Vient ensuite le Secrétaire général<br />
de l’Église qui est un Prédicateur supérieur<br />
nommé par le Patriarche. Il remplit<br />
sa fonction avec un certain nombre de secrétaires<br />
adjoints ayant en charge plusieurs<br />
services (Affaires religieuses et<br />
spirituelles, Administration et départements,<br />
Affaires financières) 33 .<br />
Une autre structure qui participe à la<br />
vie de l’Église harriste est l’AFRAH. C’est<br />
une association qui regroupe tous les<br />
sympathisants de l’Église harriste dans<br />
une localité donnée. Il y a ainsi autant<br />
d’AFRAH que de sympathisants dans les<br />
différents villes et communes de la Côted’Ivoire.<br />
Toutes les AFRAH de Côted’Ivoire<br />
sont cependant regroupées dans<br />
un organe central appelé AFRAH-Côted’Ivoire.<br />
Si tous les fidèles de l’Église<br />
harriste sont <strong>des</strong> membres de l’AFRAH,<br />
tous les membres de l’AFRAH en re-<br />
20<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
vanche ne sont pas <strong>des</strong> fidèles de l’Église<br />
harriste. La foi harriste n’est pas exigée<br />
pour être membre de l’AFRAH. Il suffit<br />
d’avoir une sympathie pour le harrisme<br />
et se rendre disponible pour faire<br />
connaître l’action du prophète William<br />
Wadé Harris. L’AFRAH est en somme la<br />
structure missionnaire de l’Église harriste.<br />
Elle est chargée de la mise en place<br />
<strong>des</strong> communautés harristes dans <strong>des</strong> localités<br />
où elles n’existent pas. Elle procède<br />
à une évaluation pour voir si la présence<br />
<strong>des</strong> fidèles harristes dans la localité<br />
est suffisante pour former une communauté.<br />
C’est ainsi qu’a été créée, en 1996,<br />
une branche de l’AFRAH en France (loi<br />
1901) : AFRAH-France. Elle regroupe les<br />
sympathisants harristes vivant en France<br />
par distinction de ceux de Côte-d’Ivoire<br />
regroupés dans l’AFRAH- CI. C’est<br />
l’AFRAH-France qui s’est ensuite chargée<br />
de mettre en place la communauté harriste<br />
de France. Une <strong>des</strong> prérogatives de<br />
l’AFRAH est aussi de trouver <strong>des</strong> lieux de<br />
cultes pour les communautés mises en<br />
place et <strong>des</strong> fonds pour la vie de l’Église.<br />
C’est ce à quoi s’attelle 1’AFRAH-France<br />
pour les communautés harristes de<br />
France.<br />
La hiérarchie. Comme toute communauté<br />
harriste, l’Église harriste de<br />
France a une structure tripartite comprenant<br />
les Apôtres, les Doyens et les<br />
Prédicateurs.<br />
- Les Apôtres : Ce sont les dirigeants<br />
de l’Église. Ils sont tous laïcs. Ils s’occupent<br />
de l’organisation administrative et<br />
financière de l’Église. Ils gèrent les dons,<br />
les collectes et les biens de l’Église. Ils financent<br />
les fêtes, les cérémonies, le mobilier<br />
et le matériel nécessaire au culte.<br />
Ils fournissent au Prédicateurs leurs attributs<br />
(soutanes blanches, bretelles...) et<br />
les moyens de leur mission. Ils sont chargés<br />
de la location de salles pour le culte<br />
ou la construction <strong>des</strong> temples. Au niveau<br />
administratif, ils sont les représentants<br />
de l’Église locale auprès <strong>des</strong> autorités<br />
et veillent à défendre les intérêts de<br />
D OSSIER<br />
Jean-Baptiste Dago, le premier Prédicateur de la communauté harriste<br />
de France, a été consacré en 1987. Sa consécration reste l’une <strong>des</strong> plus<br />
extraordinaires de l’Église puisqu’elle a été décidée dès sa naissance.<br />
Après douze mois de grossesse passés, sa mère, Djesero Rosalie n’arrivait<br />
pas à accoucher. Son père, Dago Jacques qui était un Apôtre<br />
demanda ainsi à un Prédicateur supérieur (Dago Gnamien Jean-<br />
Baptiste) qui était de passage dans la région de prier pour elle. C’est<br />
après cette prière que Jean-Baptiste vint au monde mais avec une particularité<br />
: son cordon ombilical était en forme de pectoral (attribut distinctif<br />
<strong>des</strong> Prédicateurs harristes). Le Prédicateur supérieur demanda<br />
alors que le nouveau-né soit consacré pour l’œuvre du prophète Harris.<br />
C’est donc très jeune que Jean-Baptiste (qui tient son nom de ce<br />
Prédicateur supérieur) se mit au service de ses frères à la suite du prophète<br />
Harris avant d’être consacré comme Prédicateur.<br />
Le deuxième Prédicateur, Michel Goubo a été consacré en août 2002 en<br />
Côte d’Ivoire et présenté officiellement à la communauté harriste de<br />
France le 17 nov. 2002 lors d’une cérémonie très riche en couleur et en<br />
émotion.<br />
34 - Le Collège <strong>des</strong> Apôtres de l’Eglise<br />
harriste de France se compose de Achiepo<br />
Aké (Chef-Apôtre), Anoma Camille (son<br />
adjoint qui est aussi Président de l’AFRAH-<br />
France), Aboua Philippe, Goprou Patrice,<br />
Yapo Victor, Yapi Francis, Aboumou<br />
Alexandre et Abby Léon qui est aussi<br />
Chef-apôtre de Cocody-village à Abidjan.<br />
35 - Il s’agit de Tienan Joseph , Yapi Yapo,<br />
Agbotcha Marcel et Mobio Jules.<br />
l’Église.<br />
Les Apôtres ont aussi un rôle spirituel<br />
très important. Ils peuvent en effet faire<br />
<strong>des</strong> prières et conduire les cultes en l’absence<br />
<strong>des</strong> Prédicateurs. Ils reçoivent les<br />
confessions <strong>des</strong> fidèles et décident de la<br />
pénitence à donner. Ils sont enfin <strong>des</strong><br />
agents de paix et de réconciliation dans la<br />
communauté. Ils règlent les conflits et les<br />
litiges dans les familles et les couples. Ils<br />
sont généralement douze personnes à<br />
former le Collège <strong>des</strong> Apôtres dans<br />
chaque Église de base avec un chef<br />
Apôtre comme pour signifier les douze<br />
apôtres de Jésus. Ils sont cependant dix à<br />
remplir ce rôle dans la communauté harriste<br />
de France 34 .<br />
- Les Doyens ou Anciens : Ils veillent<br />
sur l’orthodoxie de la foi harriste transmise<br />
dans les enseignements, les prédications<br />
et les exhortations. Ce sont en général<br />
<strong>des</strong> personnes qui ont une grande<br />
connaissance de l’enseignement du prophète<br />
Harris. Leur rôle consiste à assurer<br />
la fidélité actuelle de l’Église à l’enseignement<br />
du prophète. L’Église harriste<br />
de France dispose de quatre doyens très<br />
respectés dans les communautés 35 .<br />
- Les prédicateurs : ce sont les ministres<br />
du culte de l’Église harriste. Ils<br />
ont en charge la vie spirituelle de la coml’arbre<br />
à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
21
D OSSIER<br />
William Wadé Harris<br />
36 - Le Prédicateur ordinaire a deux bretelles<br />
sur sa soutane. Le Prédicateur-chef<br />
en a trois. Le Prédicateur supérieur ou<br />
Porte-canne se différencie par sa canne. Le<br />
Suprême a deux broderies sur les manches<br />
de sa soutane alors que le Patriarche en a<br />
trois sur le bas de sa soutane.<br />
munauté : prières, formation spirituelle et<br />
doctrinale <strong>des</strong> fidèles, administrations<br />
<strong>des</strong> sacrements, célébrations <strong>des</strong> funérailles.<br />
Ils sont désignés parmi les<br />
Apôtres et partagent ainsi avec ces derniers<br />
les mêmes exigences de vie.<br />
Contrairement aux autres membres de la<br />
communauté, le Prédicateur et l’Apôtre<br />
ne peuvent avoir plus d’une femme. Le<br />
célibat leur est aussi interdit. Ils doivent<br />
en outre mener une vie exemplaire selon<br />
les lois de l’Église harriste. Les prédicateurs<br />
sont repartis en cinq groupes. Il y a<br />
le Patriarche, le Suprême, le prédicateur<br />
supérieur ou Porte-canne, le Prédicateurchef<br />
et le Prédicateur auxiliaire. Chaque<br />
Prédicateur a <strong>des</strong> attributs spéciaux en<br />
fonction de son rang qui permet de le distinguer<br />
36 . Après sa consécration, le prédicateur<br />
ordinaire peut accéder au rang<br />
de prédicateur chef en fonction de l’importance<br />
de la communauté dont il a la<br />
charge spirituelle. Il devient ensuite prédicateur<br />
supérieur ou Porte-canne s’il<br />
22<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
éussit à agrandir la communauté harriste<br />
en gagnant de nouveaux fidèles à l’Église.<br />
La canne lui est alors offerte, à<br />
l’image du prophète Harris, comme une<br />
reconnaissance pour son effort d’apostolat.<br />
L’Église harriste de France qui est<br />
une jeune communauté a, pour sa direction<br />
spirituelle, deux prédicateurs ordinaires<br />
: Michel Dogbo et Jean-Baptiste<br />
Goubo (voir encadré ci-<strong>des</strong>sous).<br />
D’autres services non moins importants<br />
participent aussi à la vie de la communauté<br />
harriste de France. Ce sont la<br />
chorale avec ses joueurs de castagnettes,<br />
les Filles d’honneur, les Gardiens et<br />
l’Allumeur de bougie. La chorale accompagne<br />
les processions et soutient les<br />
prières. Elle joue un rôle très important<br />
dans le culte harriste 37 . Les chants très<br />
rythmés par les castagnettes sont en<br />
langues vernaculaires notamment Attié,<br />
Dida, Bété, Ébrié et Adjoukrou. Les<br />
Filles d’honneurs, vêtues d’une bretelle<br />
aux couleurs du drapeau de la Côted’Ivoire<br />
(orange, blanc, vert), précèdent<br />
les Prédicateurs dans les processions.<br />
Elles exécutent <strong>des</strong> pas de danse très harmonieux<br />
au rythme <strong>des</strong> castagnettes et<br />
jettent <strong>des</strong> fleurs au passage <strong>des</strong><br />
Prédicateurs. En général un culte harriste<br />
commence et se termine par une procession.<br />
La procession se déroule depuis le<br />
domicile du Prédicateur jusqu’au temple.<br />
La communauté va chercher le<br />
Prédicateur chez lui à la maison et le ramène<br />
après le culte. Il s’agit de mettre le<br />
Prédicateur dans une atmosphère de<br />
prière dira Jean-Baptiste Dago. Ces processions<br />
ont leur sens dans les communautés<br />
harristes en Côte-d’Ivoire où le<br />
domicile du Prédicateur est proche du<br />
temple harriste. Mais la situation est différente<br />
en France. Ce qui n’empêche pas<br />
la communauté harriste de France de<br />
continuer à faire les processions sur place<br />
avec le même entrain tant de la chorale<br />
que <strong>des</strong> Filles d’honneur. Les gardiens<br />
jouent le rôle d’agents d’ordre 38 . Ils<br />
veillent sur la discipline pendant les processions<br />
et les cultes. Munis d’un long<br />
bâton, ils rappellent à l’ordre les fidèles<br />
qui ne respectent pas les consignes de silence<br />
ou de bonne tenue pendant les<br />
prières. L’Allumeur de bougie représente<br />
en quelque sorte le sacristain de l’Église<br />
harriste. Il prépare le mobilier et les objets<br />
nécessaires au culte notamment l’autel,<br />
le crucifix, les fleurs, la bougie, l’horloge<br />
de bureau (pour chronométrer les<br />
prières et exhortations). Il veille au bon<br />
déroulement <strong>des</strong> cultes. Certains services<br />
de l’Église harriste ont perdu leur pertinence<br />
dans la communauté harriste de<br />
France. Ce sont notamment les sonneurs<br />
ou carillonneurs et les balayeurs d’Église.<br />
D OSSIER<br />
37- Les responsables de la chorale sont<br />
Gbate Angèle, Dabe Fabrice, Lobognon<br />
Louis et Deli Jocelyne.<br />
38 - Ce sont N’Gando Samuel, Zadi<br />
Pierre, Gopou Philippe, Niangoran<br />
Donatien.<br />
39 - La Gold Coast (Côte de l’or), le<br />
Soudan et la Haute Volta sont les anciennes<br />
dénominations respectivement du<br />
Ghana (changement de nom en 1957), du<br />
Mali (1960) et du Burkina Faso (1984).<br />
40 - Les Neyo et les Dida appartiennent au<br />
groupe Krou. Il y a en fait quatre groupes<br />
linguistiques qui composent la Côte<br />
d’Ivoire : Les Akan, les Krou, les Gour et<br />
les Mande. Ces quatre groupes linguistiques<br />
sont composés de sous groupes ou<br />
ethnies. Le Groupe Akan en compte 18<br />
(Abbey, Abouré, Abron, Adioukrou, Agni,<br />
Abidji, Ahizi, Alladian, Appolo (ou<br />
N’Zima), Attié, Avikam, Baoulé, Ebrié,<br />
Ega, Ehotilé, Essouma, M’batto et<br />
Krobou, le groupe Krou, 15 (Bakwe, Bété,<br />
Dida, Gnaboua, Godié, Guré, Kodia,<br />
Kouyo, Kouzié, Kroumen, Neyo,<br />
Niedeboua, Oubli, Wané, Wobé), le groupe<br />
Mande <strong>13</strong> (Bambara, Dioula, Gagou<br />
(ou Gban), Gbin, Gouro, Malinké, Mana,<br />
N’gain, Nigbi, Ouan, Toura, Yacouba (ou<br />
Dan), Yaouré), le groupe Gour 14 (Birifor,<br />
Gondja, Degha (ou Deya), Gouin ,<br />
Kamara, Komono, Koulango, Lobi,<br />
Lohron, Nafana, Samogho, Senoufo, Siti,<br />
Toonie).<br />
La Communauté harriste. La présence<br />
de la communauté harriste en<br />
France est liée au flux migratoire <strong>des</strong> fidèles<br />
de cette Église en provenance de la<br />
Côte-d’Ivoire notamment du littoral ivoirien.<br />
Harris s’est en effet adressé aux populations<br />
du littoral de la Côte-d’Ivoire,<br />
une région qui s’étend du sud-ouest au<br />
sud-est du pays. Elle est délimitée au sud<br />
par l’océan atlantique, à l’ouest par le<br />
Liberia et la Guinée, à l’est par la Gold<br />
Coast. Au nord s’étendent les régions du<br />
centre et du nord de la Côte-d’Ivoire<br />
frontalières de la Haute Volta et du<br />
Soudan 39 . Parti ainsi de Garaway, sa ville<br />
natale au Liberia, Harris a longé les régions<br />
côtières de la Côte-d’Ivoire de<br />
l’ouest à l’est jusqu’à Axim en Gold<br />
Coast. On dénombre dans cette population<br />
du littoral une douzaine d’ethnies :<br />
les Abidji, les Abouré, les Adioukrou, les<br />
Ahizi, les Agni, les Alladian, les Avikam<br />
(ou Brignan), les Dida, les Neyo, les<br />
Ébrié, les Fanti, les M’batto, les N’zima<br />
(ou Appoloniens). Ces ethnies, à part les<br />
Dida et les Neyo, appartiennent au groupe<br />
linguistique appelé Akan 40 .<br />
La communauté harriste de France<br />
regroupe en son sein les ressortissants de<br />
ces différentes ethnies notamment les<br />
Ébrié et les Dida. On les retrouve à Paris,<br />
Lille, Bordeaux, Toulouse et Rouen. De<br />
douze personnes en 1996, la communauté<br />
est forte aujourd’hui d’environ 500 fil’arbre<br />
à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
23
D OSSIER<br />
dèles pratiquants. Ce sont ceux qui se regroupent<br />
régulièrement pour les cultes et<br />
participent pleinement à la vie communautaire<br />
de l’Église. Certains n’hésitent<br />
pas à faire de grands déplacement d’une<br />
ville à une autre à l’occasion d’une cérémonie<br />
religieuse. La foi harriste fait partie<br />
en somme de leur identité. C’est elle<br />
qui donne sens à leur vie, à leur manière<br />
d’agir, de penser et d’être. Le nombre <strong>des</strong><br />
jeunes parmi ces harristes pratiquants<br />
reste très élevé. La communauté harriste<br />
de France est en fait composée majoritairement<br />
de jeunes qui sont l’objet d’une<br />
formation et d’un encadrement spécial de<br />
la part de l’AFRAH-France. La chorale de<br />
l’Église harriste est une émanation du<br />
Groupe <strong>des</strong> Jeunes Harristes de France.<br />
Moins nombreux mais très dynamiques<br />
sont les sympathisants de l’Église harriste<br />
de France. Ce sont en général <strong>des</strong> personnes<br />
issues de familles ou de régions<br />
harristes mais qui se sont converties au<br />
catholicisme ou au protestantisme. Ce<br />
qui n’a pas entamé pour autant leur ardeur<br />
pour l’action du prophète William<br />
Wadé Harris. L’implantation de l’Église<br />
harriste en France est en grande partie<br />
l’œuvre de ces sympathisants. Il y a enfin<br />
les harristes non pratiquants. Souvent<br />
installés dans <strong>des</strong> villes qui n’ont pas de<br />
communauté harriste, ces derniers, peu<br />
nombreux, se retrouvent coupés de l’Église<br />
harriste. Certains n’hésitent pas à<br />
fréquenter les Églises catholique ou protestante.<br />
D’autres venus se chercher en<br />
France se trouvent confrontés à la dure<br />
réalité de la vie française et finissent par<br />
perdre la foi.<br />
Le culte harriste, la prière. La prière<br />
est dans le culte harriste, objet d’une<br />
réglementation spéciale. Des temps de<br />
prière précis sont prévus pour chaque<br />
jour de la semaine en dehors du lundi<br />
avec une durée moyenne d’une demiheure<br />
: le mardi soir de 19h 30 à 20h, le<br />
mercredi matin de 5h 30 à 6h, le jeudi<br />
soir de 19h 30 à 20h, le vendredi matin de<br />
5h 30 à 6h et le dimanche de 5h 30 à 6h,<br />
de 9h à 11h et de 15h 30 à 16h. La prière<br />
rythme la semaine du fidèle. Elle a la particularité<br />
d’être avant tout communautaire.<br />
Toute la communauté est appelée à se<br />
retrouver au temple. Du nouveau-né au<br />
vieillard, tous vêtus d’habits blancs, participent<br />
aux différentes cérémonies, les<br />
hommes d’un côté et les femmes de<br />
l’autre. L’importance de la vie communautaire<br />
dans la société traditionnelle se<br />
retrouve dans les manifestations cultuelles<br />
de l’Église harriste. La vie communautaire<br />
reste en effet le lieu où la société<br />
traditionnelle, tout comme l’Eglise<br />
harriste qui est à son image, puise sa force,<br />
son dynamisme et sa survie, dans ce<br />
qu’on pourrait appeler une spiritualité de<br />
la vie communautaire. Les différents<br />
rites d’initiation permettent à l’individu<br />
de se découvrir comme un être avec les<br />
autres. Il n’est rien sans les autres, sans la<br />
communauté. Dans cette expression<br />
communautaire de la foi en Dieu, le fidèle<br />
harriste ne cherche pas avant tout à<br />
vivre une expérience mystique extraordinaire<br />
ou à entrer en contact avec la divinité.<br />
Sa prière se veut concrète et réaliste.<br />
C’est une prière qui va à l’essentiel et<br />
dans laquelle s’exprime sa volonté de<br />
vivre heureux sur la terre. Harris n’était<br />
pas venu offrir d’abord le ciel à ses fidèles<br />
mais les moyens de vivre heureux<br />
sur la terre à l’abri de la hantise <strong>des</strong> fétiches<br />
et de la sorcellerie. Son enseignement<br />
s’inscrit à ce niveau dans la mouvance<br />
d’une spiritualité de bien-être général<br />
professée dans les religions traditionnelles<br />
où la divinité est bien souvent<br />
invoquée pour avoir la pluie, une bonne<br />
récolte, une bonne chasse ou la santé.<br />
Cette spiritualité s’exprimera de manière<br />
originale dans la prophétie d’une vie<br />
semblable à celle <strong>des</strong> Blancs.<br />
Si la prière harriste a gardé en France<br />
toute sa dimension communautaire et son<br />
réalisme, elle a cependant connue<br />
quelques adaptations consécutives au<br />
nouveau cadre de vie. Le temps de prière<br />
communautaire n’est plus ainsi quotidien<br />
mais hebdomadaire. Il a lieu le dimanche<br />
24<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
de l0h à 12h. Cet aménagement horaire a<br />
l’avantage de permettre à la communauté<br />
harriste de réunir assez de fidèles pour<br />
la prière commune. Mais il est aussi révélateur<br />
<strong>des</strong> difficultés rencontrées par la<br />
communauté dans l’expression de sa foi<br />
notamment l’absence d’un lieu de culte<br />
qui lui soit propre. La communauté est<br />
obligée de louer <strong>des</strong> salles pour son culte.<br />
C’est une situation très difficile pour<br />
l’organisation du culte lorsqu’on sait que<br />
dans un temple harriste, le décor et la disposition<br />
<strong>des</strong> fidèles sont très importants<br />
pour le déroulement de la cérémonie 41 .<br />
La communauté de France ne peut pas<br />
ainsi organiser ses cultes comme elle le<br />
ferait dans un temple harriste.<br />
La célébration <strong>des</strong> sacrements. Le catéchisme<br />
harriste définit le sacrement<br />
comme l’acte par lequel le prédicateur<br />
sanctifie le fidèle 42 . A la différence de<br />
l’Église catholique et <strong>des</strong> Églises protestantes,<br />
l’Église harriste retient trois sacrements<br />
: le baptême, la sainte Cène et<br />
le mariage 43 .<br />
Le baptême est le sacrement qui fait<br />
entrer dans la communauté <strong>des</strong> fidèles<br />
harristes. II existe deux sortes de baptêmes<br />
: le baptême ordinaire et le baptême<br />
nominal. Le baptême ordinaire se fait<br />
par instruction <strong>des</strong> candidats sur les commandements<br />
de Dieu et de l’Église harriste.<br />
Ils expriment ensuite leur volonté<br />
de recevoir le sacrement. Le baptême est<br />
administré par le Prédicateur. Le candidat<br />
au baptême se met à genoux. Le<br />
Prédicateur pose sa Bible sur sa tête. II<br />
lui verse ensuite de l’eau sur son front et<br />
lui trace un signe de croix de son pouce<br />
sur le front en faisant une prière. Le nouveau<br />
baptisé médite un instant puis dit le<br />
Notre Père. La cérémonie de présentation<br />
d’un nouveau-né à l’Église donne<br />
lieu à un autre baptême appelé le baptême<br />
nominal. Il est en effet demandé aux<br />
fidèles de présenter leur enfant à la communauté<br />
huit jours après la naissance. La<br />
communauté accueille alors dans la joie<br />
le nouveau-né qui est ensuite béni par le<br />
Prédicateur au cours d’un culte. Cette cérémonie<br />
constitue une première étape du<br />
baptême en tant que tel car ce n’est que<br />
vers 16 ans ou 18 ans que le jeune homme<br />
ou la jeune fille recevra le baptême<br />
définitif, s’il remplit les conditions et s’il<br />
le demande.<br />
La communauté harriste commémore<br />
aussi, à travers la Sainte Cène, le dernier<br />
repas du Christ avec ses apôtres la veille<br />
de sa passion. C’est un repas communautaire<br />
pris à l’extérieur du temple à <strong>des</strong><br />
moments précis de l’année : Noël,<br />
Rameaux, Vendredi Saint, Pâques,<br />
Ascension, Pentecôte, la Fête du déluge<br />
ou de l’environnement.<br />
On a enfin le mariage. Le mariage religieux<br />
harriste nous donne un aperçu de<br />
la morale sexuelle de l’Église harriste.<br />
Elle se présente comme un exemple de<br />
syncrétisme avec la fusion de plusieurs<br />
éléments venant de l’enseignement chrétien<br />
et <strong>des</strong> croyances traditionnelles.<br />
L’Église harriste définit le mariage à la<br />
suite de l’Église catholique comme l’acte<br />
par lequel un homme et une femme<br />
s’unissent devant l’Église 44 . Mais le mariage<br />
ainsi défini est assorti de plusieurs<br />
lois puisées dans la société traditionnelle.<br />
Le mariage harriste reste dissoluble avec<br />
la possibilité de contracter un nouveau<br />
mariage. Le catéchisme harriste affirme à<br />
cet effet : On ne peut pas, on ne doit pas<br />
obliger les êtres humains incompatibles,<br />
à rester unis indéfiniment. Car Dieu a<br />
crée l’homme libre et toute contrainte qui<br />
n’est pas écrite va contre la volonté de<br />
Dieu 45 . C’est dans ce contexte que s’inscrit<br />
la polygamie dans l’Église harriste.<br />
Harris après la mort de sa première femme<br />
se retrouvera avec trois femmes 46<br />
comme l’avait annoncé l’ange Gabriel<br />
lors de sa vision : Je te demande le sacrifice<br />
de ta femme. Elle mourra mais je t’en<br />
donnerai d’autres qui t’aideront dans<br />
l’œuvre que tu dois fonder 47 . La vision de<br />
l’ange Gabriel vient confirmer une pratique<br />
courante dans la société traditionnelle.<br />
La monogamie serait ainsi faite<br />
pour les Blancs. Aux Noirs, il importe<br />
D OSSIER<br />
41 - Un temple harriste comprend deux<br />
gran<strong>des</strong> parties, le chœur et la nef séparés<br />
par une barrière. Le chœur est occupé par<br />
les Anciens à gauche, les Apôtres à droite<br />
et les Prédicateurs au centre avec un autel<br />
sur lequel est posée une Croix. La nef est<br />
divisée en deux rangées de bancs, les<br />
femmes et les enfants à droite et les<br />
hommes à gauche. La chorale est placée<br />
entre le chœur et la nef.<br />
42 - René Bureau, Op. Cit., p. 85.<br />
43 - L’Église catholique et les Église orientales<br />
reconnaissent sept sacrements (le<br />
baptême, l’eucharistie, la confirmation, la<br />
pénitence, le mariage, l’ordre, le sacrement<br />
<strong>des</strong> mala<strong>des</strong>) et les Églises protestantes,<br />
deux (le baptême et la sainte Cène).<br />
44 - René Bureau, Op. Cit., p. 93.<br />
45 - René Bureau, Op. Cit., p. 93.<br />
46 - Le nombre de ses femmes varie suivant<br />
les sources. On parle ainsi de trois à<br />
six femmes.<br />
47 - René Bureau, Op. Cit., p. 12.<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
25
D OSSIER<br />
48 - René Bureau, Op. Cit., p. 94.<br />
seulement de ne pas préférer une de ses<br />
femmes aux autres. Le catéchisme harriste<br />
précise encore : Un homme peut se marier<br />
à autant de femmes qu’il veut à<br />
condition de servir toujours Dieu, d’établir<br />
l’équité entre ses femmes 48 . Le séjour<br />
de John Ahui et Salomon Dagri à<br />
Garaway en 1928 a été l’occasion pour<br />
Harris de confirmer la loi sur la polygamie<br />
en citant Is 4, 1-6 : Ce jour-là, sept<br />
femmes s’arracheront un seul homme. Il<br />
convient cependant de noter que les<br />
Apôtres et les Prédicateurs, comme nous<br />
l’avons mentionné plus haut , sont soumis<br />
à la monogamie. La célébration du<br />
mariage se fait par une simple bénédiction<br />
nuptiale du Prédicateur pendant un<br />
culte qui a lieu le dimanche.<br />
Sans avoir le statut de sacrement, les<br />
funérailles constituent aussi un grand<br />
moment de la vie de la communauté. Le<br />
rituel funéraire harriste est très complexe.<br />
La famille qui perd un de ses<br />
membres informe d’abord le chef Apôtre<br />
qui réunit le Collège <strong>des</strong> Apôtres. Il s’agit<br />
à travers cette rencontre, de voir si le défunt<br />
est un harriste fervent et s’il paie ses<br />
cotisations. Le Collège <strong>des</strong> Apôtres décide<br />
ensuite si le défunt peut être enterré<br />
par l’Église harriste. Une fois l’accord<br />
obtenu, le carillonneur annonce officiellement<br />
le décès. L’enterrement se fait<br />
dans les jours qui suivent après une<br />
veillée funèbre sans le corps et un culte<br />
au temple. Une cérémonie funéraire a ensuite<br />
lieu 7 jours après lorsqu’il s’agit<br />
d’un homme et 8 jours pour une femme.<br />
Les funérailles dans l’Église harriste de<br />
France sont à situer à deux niveaux. Si le<br />
décès a eu lieu en Côte-d’Ivoire, c’est<br />
une solidarité spontanée <strong>des</strong> fidèles pour<br />
la famille éplorée : on organise <strong>des</strong><br />
prières au domicile de la famille et l’on<br />
apporte une aide financière aux membres<br />
de la famille désireux de faire le déplacement<br />
en Côte-d’Ivoire pour les funérailles.<br />
Cette solidarité s’exprime de la<br />
même manière lorsque le défunt est un<br />
membre de la communauté en France. La<br />
famille a l’obligation, avec le soutien de<br />
26<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003
la communauté, d’organiser le rapatriement<br />
du corps au pays.<br />
En définitive, l’Église harriste de<br />
France reste une Église très jeune et très<br />
dynamique qui a su s’intégrer dans le<br />
paysage religieux français même si elle<br />
souffre encore d’un déficit de légitimité<br />
et d’une ambiance d’indifférence. Elle<br />
s’est cependant affirmée dès le départ<br />
comme une Église chrétienne ayant pour<br />
fondation Jésus-Christ et la Bible pour<br />
seule référence comme l’a enseigné et recommandé<br />
le prophète William Wadé<br />
Harris. Elle commémore les différents<br />
événements chrétiens notamment Noël,<br />
Rameaux, Vendredi Saint, Pâques,<br />
Ascension et Pentecôte. Mais elle a aussi<br />
ses fêtes propres : Fête de l’environnement<br />
(27 juil.), fête <strong>des</strong> Prédicateurs<br />
(3 janv.), fêtes du prophète Harris (23<br />
avril) et de John Ahui (3 déc.) 49 . L’Église<br />
harriste se défend ainsi d’être une secte.<br />
Elle a su établir <strong>des</strong> relations fraternelles<br />
avec la communauté Saint-Egidio de<br />
Rome, le Comité Inter-foi du Liberia, le<br />
Conseil chrétien du Ghana. Elle a été admise<br />
au sein de l’organisation <strong>des</strong> Églises<br />
indépendantes d’Afrique (OEIA) et<br />
membre du conseil Oecuménique <strong>des</strong><br />
Églises (COE). L’Église harriste se présente<br />
comme une Église chrétienne qui<br />
veut vivre sa foi chrétienne sans renier<br />
pour autant les valeurs culturelles africaines.<br />
Le grand message de William<br />
Wadé Harris est d’avoir montré qu’il<br />
était possible à l’Africain d’être chrétien<br />
sans se renier comme Africain.❏<br />
D OSSIER<br />
49 - La foi en la Vierge Marie et les célébrations<br />
mariales restent cependant absentes<br />
aujourd’hui encore.<br />
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE<br />
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et de progrès, Abidjan, N.E.A,<br />
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d’Ivoire (1914-1924), Paris, S.M.E, 1984,<br />
1924, 40 p.<br />
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12 avril 1961, Paris : Présence africaine,<br />
1962, 240 p.<br />
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noir. Instrument d’un puissant reveil en<br />
Côte d’Ivoire, Paris, Privas, 1931, 198 p.<br />
DOZON Jean-Pierre, La cause <strong>des</strong><br />
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TRICHET Pierre, Harris vu par les<br />
missionnaires, La Nouvelle n° 23, sept.-<br />
oct. 1992, p. 20-22.<br />
l’arbre à <strong>Palabres</strong><br />
# <strong>13</strong> - Mai 2003<br />
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