Dossier pédagogique - Pinacothèque de Paris
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VINCENT VAN GOGH ET LE JAPON : UNE HISTOIRE D’AMOUR (EXTRAITS) 1<br />
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Inuence <strong>de</strong> l’art japonais sur la peinture<br />
<strong>de</strong> Van Gogh<br />
Vers la n <strong>de</strong>s années 1890, Van Gogh commence<br />
à adopter <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> composition typiquement<br />
japonais. Les graveurs nippons utilisaient<br />
souvent d’étonnantes échappées d’une pièce<br />
vers une autre ou d’une pièce vers l’extérieur.<br />
Utagawa Kunisada, dont Van Gogh détient<br />
quelque cent soixante estampes, applique<br />
régulièrement ce procédé intéressant, comme<br />
le montrent plusieurs gravures <strong>de</strong> la collection.<br />
L’une d’entre elles représente <strong>de</strong>ux femmes dans<br />
un intérieur, d’où une échappée sur le jardin laisse<br />
apercevoir un prunier en eur – le véritable sujet<br />
<strong>de</strong> l’estampe. Van Gogh associe <strong>de</strong> manière comparable<br />
<strong>de</strong>s scènes d’intérieur et d’extérieur dans<br />
une peinture et un <strong>de</strong>ssin <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>.<br />
Des couleurs vives, parfois en grands aplats,<br />
<strong>de</strong>s éléments audacieusement placés en repoussoir<br />
et une perspective singulière, comme dans<br />
les tableaux où l’objet représenté paraît renversé<br />
vers l’avant : tels sont les procédés <strong>de</strong> composition<br />
que Van Gogh va désormais utiliser <strong>de</strong> manière<br />
récurrente. Si l’inuence <strong>de</strong>s maîtres japonais ne<br />
se manifeste pas partout avec la même netteté,<br />
elle est en revanche évi<strong>de</strong>nte dans certaines<br />
œuvres ou certains groupes d’œuvres.<br />
Van Gogh admire beaucoup la facilité apparente<br />
avec laquelle les artistes nippons introduisent<br />
dans leurs scènes <strong>de</strong> petits personnages, et<br />
la façon dont lui-même intègre les gures dans<br />
ses aquarelles y est très apparentée.<br />
En octobre-novembre <strong>de</strong> la même année,<br />
Van Gogh réalise un groupe <strong>de</strong> trois œuvres<br />
très japonisantes, <strong>de</strong>s copies, dotées <strong>de</strong> cadres<br />
décoratifs peints à même la toile, d’estampes<br />
<strong>de</strong> maîtres japonais. Il réalise <strong>de</strong>ux d’entre elles<br />
d’après <strong>de</strong>s gravures <strong>de</strong> Hiroshige appartenant<br />
à sa collection et la troisième d’après une illustration<br />
<strong>de</strong> magazine qui reproduit (en miroir)<br />
une estampe d’Eisen.<br />
Les copies japonaises <strong>de</strong> Van Gogh associent<br />
à la fois <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> ses premières séances<br />
<strong>de</strong> copie et d’autres issus <strong>de</strong> ses interprétations<br />
ultérieures. Quoique son œuvre ait <strong>de</strong>puis quelque<br />
temps déjà intégré <strong>de</strong>s traits japonisants, Van<br />
Gogh a dû ressentir le besoin d’expérimenter<br />
très concrètement les audacieux procédés <strong>de</strong><br />
composition artistique <strong>de</strong>s estampes.<br />
Ces exercices d’assouplissement artistique<br />
avaient permis à Van Gogh <strong>de</strong> se mettre en quelque<br />
sorte dans l’esprit <strong>de</strong>s artistes japonais, en<br />
y ajoutant <strong>de</strong>s éléments personnels. Il ne refera<br />
jamais plus d’œuvres <strong>de</strong> ce genre, mais les acquis<br />
<strong>de</strong>s maîtres nippons allaient constituer, tant<br />
durant les <strong>de</strong>rniers mois <strong>de</strong> son séjour à <strong>Paris</strong><br />
que par la suite dans le Midi <strong>de</strong> la France, une<br />
caractéristique indissociable <strong>de</strong> son œuvre.<br />
Le Japon dans le Midi<br />
Dans le Sud <strong>de</strong> la France, Van Gogh s’attendait<br />
à trouver un reet du Japon. On ne sait pas très<br />
bien comment lui est venue cette idée, même<br />
si certaines comparaisons faites entre le Japon<br />
et l’Italie lui ont peut-être fait supposer que le<br />
Midi <strong>de</strong> la France dégageait une atmosphère<br />
comparable. Son intérêt pour cette région a<br />
aussi été éveillé par son admiration pour l’œuvre<br />
du peintre Adolphe Monticelli, qui avait vécu et<br />
travaillé à Marseille, où il était mort en 1886.<br />
Le 19 février 1888, Van Gogh part pour Arles,<br />
où il arrive le len<strong>de</strong>main.<br />
Selon plusieurs lettres, la ville semble justier<br />
son espoir que la Provence puisse constituer une<br />
alternative valable au Japon. Peu après son arrivée,<br />
rempli d’enthousiasme, il écrit à Émile Bernard :<br />
« Le pays me paraît aussi beau que le Japon pour la<br />
limpidité <strong>de</strong> l’atmosphère et les effets <strong>de</strong> couleur<br />
gaie. Les eaux font <strong>de</strong>s taches d’un bel émerau<strong>de</strong><br />
et d’un riche bleu dans les paysages ainsi que nous<br />
le voyons dans les crepons. Des couchers <strong>de</strong> soleil<br />
1. Sjraar van HEUGTEN, « Van Gogh et le Japon : une histoire d’amour », in Van Gogh, rêves <strong>de</strong> Japon, catalogue <strong>de</strong> l’exposition, Éditions<br />
<strong>de</strong> la <strong>Pinacothèque</strong> <strong>de</strong> <strong>Paris</strong> / Éditions Gourcuff Gra<strong>de</strong>nigo, <strong>Paris</strong>, 2012, pp. 34-55.<br />
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