Les forêts - Our Planet

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11.05.2014 Views

Le magazine du PNUE pour les jeunes pour les jeunes · sur les jeunes · par des jeunes Les forêts De vrais sauvages Comment faire la différence ? L’argent pousse sur les arbres Les héros de la forêt L’échange dette-forêts Planter pour la Planète : La campagne pour un milliard d’arbres

Le magazine du PNUE pour les jeunes<br />

pour les jeunes · sur les jeunes · par des jeunes<br />

<strong>Les</strong> forêts<br />

De vrais sauvages<br />

Comment faire<br />

la différence ?<br />

L’argent pousse<br />

sur les arbres<br />

<strong>Les</strong> héros de la forêt<br />

L’échange dette-forêts<br />

Planter pour la Planète :<br />

La campagne pour un milliard d’arbres


TUNZA<br />

le Magazine du PNUE<br />

pour les Jeunes<br />

www.ourplanet.com<br />

et www.unep.org<br />

Programme des<br />

Nations Unies pour<br />

l’environnement (PNUE)<br />

PO Box 30552, Nairobi, Kenya<br />

Tél. (254 20) 7621 234<br />

Fax (254 20) 7623 927<br />

Télex 22068 UNEP KE<br />

uneppub@unep.org<br />

www.unep.org<br />

ISSN 1727-8902<br />

Directeur de la publication Eric Falt<br />

Coordination Wondwosen Asnake<br />

Rédacteur en chef Geoffrey Lean<br />

Rédactrices invitées Karen Eng et Claire Hastings<br />

Coordination à Nairobi Naomi Poulton<br />

Directeur de la diffusion Manyahleshal Kebede<br />

Jeunes collaborateurs Julia Butterfly Hill, Etats-Unis ;<br />

Monir Bu Ghanem, Liban ; Michael Chan, Hong Kong<br />

(Chine) ; Marina Mansilla Hermann, Argentine ; Nadia<br />

Ramos, Pérou ; Shane Recalde, Equateur ; Waranya Mei<br />

Roekpoorita, Thaïlande ; Joao Felipe Scarpelini, Brésil ;<br />

Nikolaos Theofilidis, Grèce<br />

Autres collaborateurs Karl Ammann ; Maria Beckett,<br />

Religion, Science and the Environment ; Michelle<br />

Dépraz, WWF ; Daryl Hannah ; Cecilia Kibare ; Ivonne<br />

Higuero ; Elaine Marshall ; Stéfane Mauris, WWF ;<br />

Martin et Vicky Palmer, ARC ; Rosey Simonds et David<br />

Woollcombe, Peace Child International ; Erika Vohman<br />

Maquette Edward Cooper, Equateur<br />

Traduction Anne Walgenwitz/Ros Schwartz<br />

Translations Ltd<br />

Rédacteur web Graham Barden<br />

Production Banson<br />

Responsable du service Enfance et Jeunesse/Sport<br />

et Environnement du PNUE Theodore Oben<br />

Imprimé au Royaume-Uni<br />

<strong>Les</strong> opinions exprimées dans le présent magazine ne<br />

reflètent pas nécessairement celles du PNUE ou des responsables<br />

de la publication, et ne constituent pas une<br />

déclaration officielle. <strong>Les</strong> termes utilisés et la présentation<br />

ne sont en aucune façon l’expression de l’opinion du PNUE<br />

sur la situation juridique d’un pays, d’un territoire, d’une<br />

ville ou de son administration, ni sur la délimitation de ses<br />

frontières ou limites.<br />

Tout article du présent magazine qui n’est pas protégé<br />

par copyright peut être reproduit gratuitement à condition<br />

que TUNZA et l’auteur ou le photographe concernés soient<br />

informés par écrit et reçoivent un justificatif de publication.<br />

TUNZA recevra avec plaisir les articles, comptes rendus,<br />

illustrations et photographies qui lui seront envoyés, mais<br />

ne peut cependant pas garantir leur parution. <strong>Les</strong> manuscrits,<br />

photographies et illustrations non sollicités ne seront<br />

pas retournés.<br />

Abonnement Pour recevoir TUNZA régulièrement et<br />

figurer sur notre liste de diffusion, renseignez-vous auprès<br />

de Manyahleshal Kebede, Directeur de la diffusion, TUNZA,<br />

en indiquant vos nom et adresse, et la langue de votre<br />

choix (français, anglais, chinois, coréen, espagnol,<br />

japonais).<br />

Changement d’adresse Veuillez envoyer l’étiquette<br />

portant votre adresse ainsi que votre nouvelle adresse à :<br />

Manyahleshal Kebede, TUNZA, UNEP, PO Box 30552,<br />

Nairobi, Kenya ; email : manyahleshal.kebede@unep.org.<br />

Le PNUE encourage les pratiques écophiles, dans<br />

le monde entier et au sein de ses propres<br />

activités. Ce magazine est imprimé avec des<br />

encres végétales, sur du papier entièrement<br />

recyclé et ne comportant pas de chlore.<br />

Editorial 3<br />

Des arbres de vie 4<br />

Une histoire d’arbres 5<br />

TUNZA répond à tes questions 6<br />

Que du bonheur avec Tunza ! 7<br />

<strong>Les</strong> héros de la forêt 8<br />

De vrais sauvages : 1 10<br />

L’échange dette-forêts 10<br />

Rien de neuf sous la canopée 11<br />

<strong>Les</strong> forêts en danger 12<br />

Savoir prendre et savoir donner 14<br />

Un style guérilla 15<br />

De vrais sauvages : 2 16<br />

L’argent pousse sur les arbres 16<br />

Le retour du panda 18<br />

Jungles de béton : oasis de verdure 18<br />

<strong>Les</strong> champions de la Terre 19<br />

Comment faire la différence ? 20<br />

Des noix magiques 21<br />

De vrais sauvages : 3 21<br />

Sept merveilles de la forêt 22<br />

Le PNUE et Bayer, multinationale allemande,<br />

spécialiste de la santé, de l’agrochimie et<br />

des matériaux de hautes performances, se<br />

sont associés pour sensibiliser les jeunes<br />

aux questions environnementales et encourager<br />

les enfants et les adolescents à se<br />

prononcer sur les problèmes mondiaux de<br />

l’environnement.<br />

Le PNUE et Bayer, qui collaborent sur des<br />

projets en Asie et dans la zone du Pacifique<br />

depuis presque dix ans, ont passé un nouvel<br />

accord de partenariat en vue d’accélérer<br />

l’avancement des projets en cours, faire profiter<br />

d’autres pays des initiatives fructueuses<br />

Sommaire<br />

et développer de nouveaux programmes<br />

pour la jeunesse. Au nombre de ces projets<br />

figurent le magazine TUNZA, le Concours<br />

international de peinture sur l’environnement<br />

pour les jeunes, la désignation d’un<br />

Délégué spécial commun à Bayer et au<br />

PNUE pour la jeunesse et l’environnement,<br />

l’organisation de la Conférence internationale<br />

Tunza du PNUE, la mise en place de<br />

réseaux de la jeunesse pour l’environnement<br />

en Asie-Pacifique, le Forum « Eco-<br />

Minds » en Asie-Pacifique et un Concours<br />

international de photographie en Europe de<br />

l’Est intitulé « Ecology in Focus » (Objectif<br />

Ecologie).<br />

2 TUNZA Vol 4 No 3


UN MILLIARD D’ARBRES EN 2007 !<br />

C’est l’objectif du PNUE. Avec le soutien de personnalités comme Wangari<br />

Maathai, lauréate du prix Nobel de la Paix, la campagne du PNUE intitulée<br />

« Planter pour la Planète » met au défi les pays, les sociétés, les associations,<br />

les quartiers et les gens ordinaires – c’est-à-dire toi et moi – de planter un<br />

milliard d’arbres. Chaque arbre planté aidera à préserver nos sols et la qualité<br />

de nos eaux, à absorber le dioxyde de carbone, à encourager la faune et la<br />

flore… et plus généralement à créer un monde meilleur.<br />

Si tu veux participer activement à cette campagne, envoie tes propositions<br />

– ou celles de ton école, de ton lycée ou de ton groupe de copains – sur<br />

www.unep.org/billiontreecampaign. Le site te donnera également des conseils<br />

pratiques sur la manière de planter, la bonne période et les soins à apporter aux<br />

arbres. Il t’indiquera aussi quelles sont les essences endémiques et les mieux<br />

adaptées à ta région.<br />

Tu pourras également suivre les progrès de la campagne du PNUE, diffuser des<br />

photos de « planteurs » en pleine action et t’informer de ce que font les autres.<br />

www.unep.org/billiontreecampaign<br />

Viens<br />

`<br />

nous rejoindre,<br />

prends ta bêche<br />

et commence<br />

à planter.<br />

Editorial<br />

Nous sommes des êtres de la forêt<br />

– et pas seulement parce que nos<br />

ancêtres vivaient dans les arbres.<br />

Sans les arbres, nous ne pourrions pas<br />

survivre. Ils nous protègent de la fureur de<br />

la nature et de nos propres folies. Sur les<br />

montagnes, les bassins versants boisés<br />

régulent les ressources en eau d’un tiers des<br />

humains. Le long des côtes, les forêts de<br />

palétuviers protègent la terre des tempêtes et<br />

des tsunamis, et servent de nourriceries aux<br />

poissons. Partout, les arbres absorbent une<br />

partie du dioxyde de carbone qui autrement<br />

accélérerait le réchauffement mondial.<br />

Pourtant, dès que l’humanité a commencé<br />

à labourer la terre, elle a traité les<br />

arbres en ennemis plutôt qu’en amis. Ils<br />

nous gênaient et occupaient des terrains que<br />

nous souhaitions cultiver ou habiter. Pire<br />

encore, ils semblaient servir de refuge aux<br />

sorcières et aux bêtes féroces, et aux voleurs<br />

et guerriers susceptibles de nous attaquer.<br />

Alors, on a très vite considéré qu’il valait<br />

mieux les couper : lorsque les Anglo-saxons<br />

conquirent l’Angleterre au 5 e siècle, la<br />

moitié des forêts sauvages qui couvraient<br />

autrefois 80 % du territoire britannique<br />

furent déboisées.<br />

Depuis quelques décennies, cette<br />

politique se retourne contre nous. Le déboisement<br />

des bassins versants provoque<br />

l’assèchement des ressources en eau, la<br />

pluie dévale les coteaux mis à nu et<br />

provoque des inondations. <strong>Les</strong> mangroves,<br />

déracinées et aménagées en élevages piscicoles<br />

ou en complexes touristiques, exposent<br />

les populations à la violence de la<br />

mer. Et en brûlant les forêts, on libère du<br />

dioxyde de carbone qui accélère et aggrave<br />

le changement climatique.<br />

Pourtant, certains peuples n’ont jamais<br />

adopté cette approche destructrice. Dans<br />

la forêt, des cultures indigènes ont appris<br />

à exploiter leur environnement tout en le<br />

préservant. Si nous voulons vivre en harmonie<br />

avec la nature, nous avons beaucoup<br />

à apprendre de ces peuples. Notre génération<br />

doit mettre fin à cette agressivité visà-vis<br />

de la forêt. Elle doit s’inspirer de la<br />

sagesse des cultures indigènes. Si elle ne le<br />

fait pas, l’avenir des forêts actuelles et le<br />

nôtre se présentent bien mal.<br />

Si tu as des idées, des nouvelles ou une<br />

opinion à nous communiquer, n’hésite<br />

pas à écrire à TUNZA par e-mail :<br />

tunza@ourplanet.com<br />

<strong>Les</strong> forêts 3


Des arbres de vie !<br />

Autrefois, bien avant qu’apparaisse l’agriculture, les arbres<br />

couvraient environ la moitié de la superficie de la Terre. Aujourd’hui,<br />

il ne reste plus que la moitié environ de ces forêts anciennes, et elles ont<br />

généralement été brûlées, reboisées ou affectées d’une manière ou d’une autre<br />

par la présence humaine. Et la destruction se poursuit : chaque année, quelque<br />

130 000 kilomètres carrés boisés – une superficie comparable à celle du Nicaragua,<br />

de la Grèce ou de l’Etat d’Alabama aux Etats-Unis d’Amérique – sont coupés.<br />

Abattre une forêt, c’est s’automutiler. <strong>Les</strong> forêts sont absolument essentielles au<br />

bien-être des humains – voire à leur survie – puisqu’elles régulent le climat et<br />

les ressources en eau. Pourtant, les forêts ont été parmi les premières victimes<br />

de la civilisation : il y a plus de 3 000 ans, le déboisement entrepris par les<br />

Mésopotamiens avait rapidement transformé la région en désert.<br />

De nos jours, les pays développés ont pratiquement perdu leurs forêts. En<br />

dehors de la Fédération de Russie, il ne reste plus que 1 % de l’ancienne<br />

couverture forestière européenne. Et 95 % des forêts des Etats-Unis<br />

continentaux ont été déboisés depuis l’arrivée des colons européens.<br />

De nombreux pays en développement ont connu le même sort, du<br />

Bangladesh à Haïti, du Nigéria aux Philippines, en passant par la Thaïlande<br />

et la Côte d’Ivoire. Ces pays ont pratiquement perdu toutes leurs forêts et<br />

c’est désormais sous les tropiques que l’abattage est le plus rapide, car<br />

c’est dans cette région que sont situés la majorité des pays en<br />

développement.<br />

Pourtant, nous avons plus que jamais besoin des arbres. Plus de<br />

2 milliards de personnes sont tributaires de bassins versants boisés<br />

pour leur eau potable. <strong>Les</strong> arbres régulent efficacement la<br />

pluviométrie : ils interceptent les pluies, leur permettent d’infiltrer<br />

lentement la terre et d’alimenter ainsi les rivières et les sources.<br />

<strong>Les</strong> arbres servent également à lier la terre au sol. Lorsque l’on<br />

déboise, la terre se trouve mise à nu et la surface arable est<br />

emportée par les pluies. <strong>Les</strong> rendements agricoles baissent.<br />

L’eau de pluie n’étant conservée puis libérée progressivement,<br />

elle dévale les coteaux dénudés, provoquant des inondations<br />

suivies de pénuries.<br />

La couche arable érodée se dépose dans le lit des rivières,<br />

dont ils relèvent le niveau. <strong>Les</strong> torrents d’eau forcent<br />

alors la rivière à sortir de son lit. C’est exactement ce qui<br />

se passe avec le fleuve Jaune en Chine : non loin de<br />

l’embouchure de la mer, il chemine de 3 à 10 mètres<br />

au-dessus de la campagne environnante. Quant aux<br />

alluvions, ils s’accumulent derrière les barrages<br />

dont ils réduisent considérablement la durée<br />

de vie.<br />

Plus important encore, les forêts sont un<br />

frein vital au réchauffement mondial : on<br />

considère qu’elles absorbent un tiers<br />

de toutes les émissions de dioxyde de<br />

carbone, principal responsable du<br />

changement climatique. Quand on<br />

coupe une forêt pour exploiter son<br />

bois, c’est comme si on enlevait<br />

le frein. Quand on la brûle,<br />

on appuie sur l’accélérateur<br />

puisqu’on libère encore<br />

plus de gaz nocifs<br />

4 TUNZA Vol 4 No 3


Une histoire<br />

d’arbres<br />

dans l’atmosphère.<br />

En plantant<br />

des arbres, on<br />

peut atténuer ces<br />

impacts. D’ailleurs, le<br />

reboisement est en<br />

train de s’accélérer :<br />

dans le monde entier,<br />

Environ 57 000 kilomètres<br />

carrés sont replantés<br />

chaque année, ce qui permet<br />

de limiter la perte globale à<br />

73 000 kilomètres carrés – une<br />

superficie de la taille de la<br />

Sierra Leone ou de Panama.<br />

Mais le reboisement ne permet<br />

pas de remplacer exactement ce qui<br />

a disparu. <strong>Les</strong> forêts coupées sont<br />

généralement luxuriantes et très<br />

anciennes, et à l’échelle mondiale,<br />

elles abritent plus de la moitié des<br />

espèces de la Terre. Mille hectares de<br />

forêt ombrophile tropicale, par exemple,<br />

peuvent contenir jusqu’à 1 500 espèces<br />

de fleurs, 740 essences d’arbres, 400 espèces<br />

d’oiseaux, 100 de reptiles, 60 d’amphibiens<br />

et 150 de papillons. Quant aux<br />

insectes en général, ils sont bien trop nombreux<br />

pour qu’on puisse les comptabiliser.<br />

Cette incroyable diversité est généralement<br />

remplacée par de vastes étendues plantées<br />

d’une ou deux espèces qui attirent une faune<br />

restreinte. L’impact est immense – sur la faune<br />

et la flore mondiales, sur l’extinction d’espèces<br />

qui auraient pu fournir d’importants aliments et<br />

médicaments nouveaux, et sur les populations<br />

locales qui tirent plus d’un cinquième de leurs<br />

maigres ressources de la richesse des forêts.<br />

Dans l’une de leurs histoires<br />

de la création du monde, les<br />

Maoris reconnaissent l’importance<br />

des arbres.<br />

Rangi, le père du ciel, et Papa, la mère de<br />

la terre, s’enlacèrent. Ils se serrèrent si<br />

forts qu’ils empêchèrent les rayons du<br />

soleil de pénétrer. Leurs enfants furent<br />

obligés de vivre dans la pénombre,<br />

écrasés entre la terre et le ciel.<br />

Finalement, les enfants en eurent<br />

assez de vivre dans l’obscurité. Ils<br />

discutèrent entre eux de la meilleure<br />

façon d’accéder à la lumière du soleil.<br />

Tuma, l’enfant le plus féroce, voulait tuer<br />

ses parents, mais Tane, le gardien des<br />

forêts s’y opposa.<br />

« Séparons-les : le ciel sera loin<br />

au-dessus de nous et la terre se trouvera<br />

sous nos pieds. Que le ciel nous<br />

soit étranger, mais que la terre reste<br />

proche de nous, qu’elle soit notre mère<br />

nourricière. »<br />

Chacun à son tour, les enfants<br />

essayèrent de séparer Rangi de Papa,<br />

mais leurs parents étaient trop étroitement<br />

enlacés.<br />

Tane fut le dernier à tenter sa chance.<br />

Allongé sur le dos, les épaules contre la<br />

terre, il parvint à glisser ses pieds contre<br />

le ciel. Il commença à pousser de toutes<br />

ses forces en grondant sous la tension.<br />

Dans un effort surhumain, Tane parvint<br />

à briser les tendons qui reliaient ses<br />

parents. Très vite, à l’aide de grands<br />

arbres provenant de ses forêts, il étaya<br />

son père, pour que le ciel et la terre ne<br />

puissent plus jamais se réunir.<br />

Il est bien plus sage de conserver les forêts<br />

anciennes. Il est un pays – le minuscule royaume du<br />

Bhutan dans l’Himalaya – qui montre la voie.<br />

Mesurant le succès de ses politiques à l’échelle du<br />

« Bonheur National Brut » plutôt que du Produit<br />

National Brut, le Bhutan a décidé, il y a plus de<br />

trente ans, que 60 % de son territoire conserverait sa<br />

couverture forestière. Aujourd’hui, il est couvert de<br />

forêts à 74 %, ce qui fait de lui la plus grande étendue<br />

boisée d’une chaîne de montagne de plus en plus<br />

dénudée. Un chiffre qui fait honte au reste du monde et<br />

que nous ferions bien de méditer.<br />

J. Burton/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts 5


Q Lorsqu’on coupe une forêt ombrophile, peut-on par la suite la replanter et retrouver la<br />

biodiversité initiale ?<br />

R L’évolution de la biodiversité de la forêt ombrophile s’est faite sur des millénaires. Nous<br />

commençons seulement maintenant à bien comprendre les liens qui existent entre les<br />

différentes espèces, dont beaucoup n’ont pas encore été identifiées et encore moins étudiées.<br />

En reboisant, il est peu probable que nous arrivions à retrouver toutes les espèces qui auront<br />

disparu.<br />

Q On n’entend plus beaucoup parler des pluies acides en ce moment. Continuent-elles à décimer<br />

des forêts à travers le monde ?<br />

Q<br />

&<br />

R<br />

TUNZA<br />

répond à<br />

tes questions<br />

Si tu as des QUESTIONS<br />

sur l’environnement et<br />

le développement, tu<br />

peux les poser aux<br />

spécialistes du PNUE.<br />

Envoie un e-mail à<br />

uneppub@unep.org, et<br />

nous essayerons de te<br />

répondre dans les<br />

prochains numéros.<br />

R <strong>Les</strong> pluies acides résultent des émissions de combustibles fossiles, en particulier de dioxyde<br />

d’azote et de soufre. Associés à la vapeur d’eau, à la lumière du soleil et à l’oxygène de<br />

l’atmosphère, ces produits chimiques se transforment en acide sulfurique et en acide nitrique<br />

dilués. Ces acides retombent sur la terre avec la pluie et la neige, souvent très loin de leur point<br />

de pollution initial, et ils sont particulièrement nocifs pour les forêts et les lacs. Aujourd’hui, le<br />

problème est moins grave en Europe de l’Ouest – grâce à l’action des Nations Unies – et en<br />

Amérique du Nord, mais il persiste en Europe de l’Est et en Russie, de même qu’en Chine, où un<br />

rapport parlementaire vient de conclure qu’un tiers de cet immense pays est concerné.<br />

Q Existe-t-il une législation internationale pour protéger les forêts vierges du déboisement ? Estelle<br />

efficace ?<br />

R<br />

Il n’existe pas de lois mondiales empêchant le déboisement des forêts vierges, mais des<br />

Principes concernant la forêt ont été négociés lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992.<br />

Aujourd’hui, le Forum des Nations Unies sur les forêts (UNFF), constitué de tous les Etatsmembres<br />

des Nations Unies et de ses organismes spécialisés, s’efforce de remplir la mission<br />

qu’il s’est donnée de promouvoir « la gestion, la conservation et le développement durable de<br />

tous les types de forêts ».<br />

Q Dans certaines régions, on commence à voir des cultures forestières. Est-ce une bonne idée ?<br />

R Le bois et d’autres produits, alimentaires notamment, peuvent être cultivés dans des plantations<br />

et forêts gérées de manière durable, qui devraient réduire la pression sur les forêts anciennes<br />

naturelles. L’UNFF est très favorable à l’exploitation durable, qui permet de gérer tous les<br />

types de forêts, y compris les plantations, tout en atteignant des objectifs socioéconomiques<br />

et environnementaux.<br />

Q Est-ce qu’il ne faudrait pas essayer de ne JAMAIS couper d’arbres ?<br />

R Le bois a de très nombreux usages – matériel de construction, papier, pinceaux et autres outils,<br />

et son utilisation durable est bénéfique aux populations locales, aux peuples indigènes et à<br />

l’ensemble de l’industrie. Certaines forêts peuvent être exploitées de manière à répondre aux<br />

besoins humains et socioéconomiques. Ce qui pose problème, c’est l’exploitation non durable<br />

des forêts. Il constitue un risque pour les espèces et pour les biens et services<br />

environnementaux, comme la régulation du climat ou la protection des bassins versants, et<br />

cause donc des dommages irréversibles à la santé et au bien-être des populations et de<br />

notre planète.<br />

Q On sait que certaines espèces sont transplantées aux quatre coins du globe – on plante des<br />

hévéas d’Amérique latine en Malaisie et en Indonésie, et des eucalyptus d’Australie en Afrique.<br />

Est-ce vraiment une bonne chose ?<br />

R La plupart des experts se montrent extrêmement réservés en matière d’introduction à grande<br />

échelle d’espèces non indigènes, dans la mesure où elles risquent de détruire les écosystèmes<br />

locaux et de provoquer des dommages économiques et environnementaux considérables.<br />

<strong>Les</strong> espèces étrangères envahissantes constituent une menace considérable et peuvent être<br />

préjudiciables aux espèces indigènes et à l’environnement local.<br />

Q Comment les jeunes peuvent-ils aider à préserver les forêts ? En plantant des arbres ?<br />

R <strong>Les</strong> jeunes peuvent planter des arbres, bien sûr, et ils peuvent également participer à la<br />

promotion de la gestion durable des forêts. <strong>Les</strong> organisations qui favorisent la plantation<br />

d’arbres utilisent généralement des essences locales indigènes appropriées. Renseigne-toi<br />

dans ta région pour savoir comment tu peux les aider – ou participe activement à la campagne<br />

de plantation d’arbres organisée par le PNUE (www.unep.org/billiontreecampaign).<br />

6 TUNZA Vol 4 No 3


PNUE<br />

PNUE<br />

PNUE<br />

PNUE<br />

te trouvais par hasard dans le parc naturel de Taman Nagara à Putrajaya en<br />

Malaisie le 28 août 2006, tu as sûrement été surpris de voir des centaines de<br />

Situ<br />

personnes occupées à planter des arbres. Ce n’est pas tous les jours que<br />

250 enfants de 60 pays se retrouvent pour planter une forêt ! Pourtant, ce reboisement<br />

n’était qu’une des nombreuses activités organisées pour les délégués participant à la<br />

Conférence internationale des enfants Tunza 2006 parrainée par le PNUE.<br />

Sur le thème « Sauvons un arbre, sauvons nos poumons », la Conférence s’est tenue<br />

à Putrajaya, du 26 au 30 août dernier. <strong>Les</strong> participants, âgés de dix à quatorze ans,<br />

avaient été choisis sur la base de leur participation à des clubs d’environnement dans<br />

leur propre pays. La Conférence était pour eux l’occasion de rencontrer d’autres jeunes<br />

du monde entier, de discuter et de s’informer de leurs droits et responsabilités en matière<br />

d’environnement. <strong>Les</strong> participants ont présenté les activités de leur club, parlé de leurs<br />

inquiétudes et partagé leurs idées sur l’environnement, la conservation et la durabilité.<br />

C’est Son Altesse Raja Permaisuri Agong Tuanku Fauziah Binti Al-Marhum Tengku<br />

Abdul Rashid, Reine de Malaisie, qui présidait la cérémonie d’ouverture. Elle a conseillé<br />

aux jeunes de passer ces quelques jours à se faire des amis et à s’informer<br />

mutuellement. Toutes les personnes présentes ont beaucoup apprécié les spectacles<br />

offerts par des enfants malais, notamment une pièce intitulée <strong>Les</strong> larmes des arbres.<br />

D’éblouissants costumes rendaient l’histoire encore plus poignante. Le message était<br />

simple : il faut permettre aux arbres de pousser et de se reproduire si nous voulons<br />

préserver l’écosystème de notre Mère la Terre.<br />

<strong>Les</strong> quatre journées bien remplies étaient placées sous le signe de la bonne humeur.<br />

Des ateliers ont abordé des sujets aussi divers que variés : « Comment devenir<br />

écojournaliste », « Comment fabriquer du papier à partir de déchets » et « Comment<br />

sauver la tortue marine ». Chaque matin, un petit groupe de délégués présentait<br />

brièvement des projets environnementaux auxquels ils participent. Plusieurs excursions<br />

ont conduit les jeunes aux tours PETRONAS, aux jardins botaniques de Putrajaya, et au<br />

centre de recherche de la forêt, particulièrement en pointe – sans oublier, bien sûr, la<br />

plantation de la forêt.<br />

<strong>Les</strong> participants, leurs accompagnateurs et des bénévoles ont planté au moins un<br />

arbre chacun au nom de leur pays. Couverts de boue mais parfaitement heureux, les<br />

enfants ont continué à travailler bien après avoir planté l’arbre représentant leur pays,<br />

dans un effort de coopération véritablement mondiale. La nouvelle forêt a été baptisée<br />

Rimba Tunza Taman Wetland Putrajaya – ce qui signifie, en gros, « Forêt Tunza ».<br />

La Conférence a pris fin après quatre jours aussi sympas qu’instructifs. Le dernier<br />

jour s’est terminé en apothéose ! <strong>Les</strong> élections au Conseil junior ont eu lieu le matin, et<br />

en début d’après-midi, on connaissait déjà les noms des nouveaux élus (voir cadre). Ces<br />

jeunes dynamiques vont travailler très dur au cours des deux prochaines années pour<br />

organiser et décider des grands thèmes de la Conférence internationale des enfants<br />

Tunza 2008 qui se tiendra en Norvège. <strong>Les</strong> cérémonies de clôture ont commencé par un<br />

défilé de mode hors du commun : les délégués, les accompagnateurs et les bénévoles<br />

portaient tous d’incroyables tenues réalisées à partir de déchets recyclés. Avant de se<br />

quitter, tous les délégués ont signé un contrat qui les engage, de même que le PNUE, à<br />

continuer à participer activement à la protection de l’environnement et à la promotion<br />

des questions écologiques.<br />

Nikolaos Theofilidis, quatorze ans, qui était venu de Grèce, a parfaitement résumé<br />

l’intérêt que présente la Conférence : « Avant la Conférence des enfants Tunza, je<br />

connaissais uniquement les problèmes d’environnement de la Grèce. Mais ici, j’ai appris<br />

ce qui se passe ailleurs dans le monde. Il faut tous que nous changions d’attitude vis-àvis<br />

de l’environnement. La Terre, c’est chez nous, et quand on fait du mal à la Terre, on<br />

se fait du mal à soi-même. »<br />

Que du<br />

bonheur<br />

avec Tunza !<br />

Conseil junior Tunza 2008<br />

Amérique latine et Caraïbes<br />

Daniela Meléndez (Colombie)<br />

Asie de l’Ouest<br />

Ammar Hussain Ali (Bahreïn)<br />

Afrique<br />

Nayle Nagda (Kenya)<br />

Guy Nindorera (Burundi)<br />

Europe<br />

Nathan Sutcliffe (Royaume-Uni)<br />

Amérique du Nord<br />

Clara Simpson (Canada)<br />

Asie et Pacifique<br />

Michael Bradley Lewis (Australie)<br />

Membre du Conseil junior<br />

choisi par le PNUE<br />

Juan Samuel Loyola (Philippines)<br />

Représentants de la Norvège,<br />

prochain pays d’accueil<br />

Helga Anfinsen<br />

Hanna Eikas<br />

Hakon Haaland<br />

Kristian Oion<br />

<strong>Les</strong> forêts 7


<strong>Les</strong> héros de la<br />

L. Hrinivasan/PNUE/Topham<br />

Tout au long de l’histoire de l’humanité, il y a toujours<br />

eu des gens conscients de l’importance vitale des<br />

arbres et qui étaient prêts à mourir pour les défendre.<br />

Voici quelques exemples de héros de la forêt.<br />

1485<br />

Au Rajasthan, en Inde, le gourou Jambheshwar fonde<br />

la secte des Bishnoi qui interdit de nuire aux arbres et<br />

aux animaux.<br />

1730<br />

Amrita Devi, une femme de la secte des Bishnoi,<br />

enlace un arbre pour empêcher que celui-ci soit coupé<br />

par le maharadja local. Elle est tuée, mais 362 autres<br />

villageois se sacrifient ensuite de la même manière.<br />

Honteux, le maharadja interdit alors l’abattage des<br />

arbres dans les villages bishnoi. Ces villages sont<br />

aujourd’hui des oasis de vie dans un désert de<br />

sécheresse.<br />

Début des années 1800<br />

John Chapman, plus connu sous le nom de Johnny<br />

Appleseed, parcourt l’Ohio, l’Indiana et l’Illinois aux<br />

Etats-Unis et plante des pommiers à cidre qu’il vend<br />

pour quelques centimes aux nouveaux colons. Il favorise<br />

ainsi la mise en place d’une économie et améliore<br />

la vie des populations dans ces régions sauvages.<br />

1922<br />

Après avoir vu l’érosion des sols provoquée par le<br />

déboisement au Canada et en Afrique du Nord,<br />

Richard St Barbe Baker fonde le mouvement Watu<br />

wa Miti (Hommes des arbres) avec des Kikuyu pour<br />

procéder au reboisement du Kenya. L’organisation,<br />

précurseur des groupes écologiques modernes,<br />

devient par la suite l’International Tree Foundation, qui<br />

possède des ramifications dans plus de cent pays.<br />

A travers le monde, on évalue à plus de 26 milliards<br />

le nombre d’arbres plantés avec le concours d’organisations<br />

fondées ou parrainées par lui.<br />

1973<br />

<strong>Les</strong> habitants de villages proches de la forêt de Mandal<br />

dans l’Uttar Pradesh, en Inde, protestent contre<br />

Participez !<br />

Chaque année en Australie, des milliers de bénévoles<br />

et d’étudiants participent à la Journée<br />

nationale de l’arbre durant laquelle ils plantent des<br />

arbres et des arbustes. Plus de 10 millions d’arbres<br />

ont été ainsi plantés dans les dix dernières années.<br />

l’abattage de frênes par un fabricant d’articles de<br />

sport. S’inspirant des Bishnoi, ils décident d’enlacer les<br />

arbres pour empêcher le travail des bûcherons et<br />

fondent un mouvement non violent baptisé « Chipko »,<br />

terme hindi qui signifie « enlacer ». Ils savent que le<br />

déboisement provoque l’érosion des sols et des<br />

inondations dévastatrices. D’autres manifestations ont<br />

lieu dans tout l’Etat pour empêcher le travail des<br />

bûcherons. <strong>Les</strong> femmes sont particulièrement actives<br />

car elles ont besoin du bois de chauffage et du<br />

fourrage que leur procurent les arbres. Après des<br />

années de résistance, le Gouvernement finit par<br />

interdire l’abattage commercial dans l’Uttar Pradesh.<br />

Aujourd’hui, les mouvements Chipko concentrent leurs<br />

efforts sur le reboisement.<br />

1976<br />

Chico Mendes, un saigneur d’hévéas de la forêt<br />

amazonienne, a commencé par se joindre aux<br />

empates – manifestations non violentes – organisées<br />

pour empêcher le déboisement. <strong>Les</strong> manifestants<br />

demandaient aux bûcherons d’arrêter l’abattage<br />

prévu pour faire place à des élevages bovins. Par la<br />

suite, il est devenu un des pionniers du mouvement<br />

qui prône la création de réserves forestières gérées<br />

par des communautés traditionnelles exploitant de<br />

manière durable les richesses de la forêt, comme les<br />

noix du Brésil et le caoutchouc. En 1987, il a réussi<br />

à convaincre la Banque interaméricaine de développement<br />

de stopper et renégocier un projet de<br />

route menaçant la forêt et les moyens d’existence<br />

de ses habitants, ce qui lui a valu un des tout<br />

premiers prix Global 500 décernés par le PNUE.<br />

L’année suivante, il a été assassiné sur l’ordre<br />

d’un propriétaire de ranch bien décidé à déboiser<br />

une forêt.<br />

1976<br />

Le célèbre sportif Alexander Peal, ancien gardien<br />

de but de l’équipe de foot nationale du Libéria, a<br />

commencé à lutter pour la protection de la dernière<br />

étendue importante de forêt ombrophile d’Afrique de<br />

l’Ouest. Sept ans plus tard, il réussit à faire établir<br />

un parc national. En 1989, il doit fuir son pays<br />

Depuis l’an 2000, l’organisation à but non lucratif<br />

Cultiva aide des étudiants de la région de Santiago,<br />

au Chili, à reboiser les contreforts andins fortement<br />

érodés.<br />

Le Gouvernement du Newfoundland et du<br />

Labrador a lancé un programme pilote de petits<br />

8 TUNZA Vol 4 No 3


forêt<br />

lorsqu’éclate la guerre civile, suivie de la mise en place<br />

d’un régime très violent. En exil à l’étranger, il continue<br />

à se battre pour la forêt et lorsque la paix revient, il<br />

rentre au pays pour poursuivre son travail.<br />

1977<br />

En voyant la destruction provoquée par le déboisement<br />

et la désertification dans son pays, la professeur<br />

d’université Wangari Maathai fonde le mouvement<br />

Ceinture Verte après avoir planté une pépinière dans<br />

son jardin. Elle commence également à faire campagne<br />

pour la protection des forêts africaines. Malgré des<br />

persécutions répétées, son mouvement et elle-même<br />

ont déjà permis aux femmes pauvres du Kenya et de<br />

toute l’Afrique de l’Est de planter plus de 20 millions<br />

d’arbres. Elles luttent ainsi contre l’érosion des sols et<br />

créent une source durable de fruits, et de bois de<br />

chauffage et de construction. Le mouvement a pris a<br />

des dimensions internationales et, en 2004, Wangari<br />

Maathai a été la première femme africaine à recevoir le<br />

prix Nobel de la Paix.<br />

1994<br />

Après les incendies qui détruisent les forêts proches de<br />

leur village, Monir Bu Ghanem et quatre de ses<br />

camarades de Ramlieh, au Liban, se consacrent à la<br />

prévention et à la lutte contre le feu, à la plantation<br />

d’arbres et à la protection de la forêt. Aujourd’hui, le<br />

petit groupe de jeunes est devenu une organisation<br />

nationale de jeunes activistes, l’Association pour le<br />

développement et la conservation de la forêt. Elle<br />

favorise aussi la conservation des forêts anciennes,<br />

l’écotourisme et l’éducation environnementale. En<br />

2006, elle a accueilli des réfugiés fuyant le conflit entre<br />

Israël et le Hezbollah.<br />

1997<br />

Julia Butterfly Hill grimpe dans un séquoia de<br />

55 mètres de haut, vieux de 600 ans. Elle y restera<br />

deux ans et parviendra finalement à sauver l’arbre<br />

et la petite étendue de forêt ancienne environnante<br />

d’un projet d’abattage commercial. Grâce à elle,<br />

l’Amérique entière prendra conscience du problème<br />

du déboisement.<br />

1997<br />

Durant sa première année en tant que juriste<br />

professionnelle, Anne Kajir réussit à obliger les<br />

exploitants forestiers à dédommager les populations<br />

indigènes de Papouasie Nouvelle Guinée. Malgré<br />

plusieurs agressions, elle continue à se battre pour les<br />

forêts et n’hésite pas à révéler la corruption , qui permet<br />

à l’abattage illégal de détruire le dernier bloc intact de<br />

forêt tropicale ombrophile d’Asie Pacifique.<br />

1998<br />

Rodolfo Montiel Flores, petit cultivateur mexicain de<br />

l’Etat du Guerrero, fonde un mouvement de paysans<br />

pour essayer de mettre fin au déboisement qui<br />

dévaste la région. L’année suivante, en compagnie d’un<br />

collègue, il est arrêté, emprisonné et torturé. En l’an<br />

2000, il reçoit un prix Goldman*, et une campagne<br />

internationale s’organise pour la libération des deux<br />

hommes. Ils recouvrent finalement la liberté en 2001.<br />

1999<br />

Fatima Jibrell prend la tête d’une manifestation contre<br />

l’abattage des acacias. <strong>Les</strong> arbres sont transformés<br />

en charbon de bois, qui est ensuite exporté vers la<br />

Somalie – à l’époque, pays anarchique dirigé par des<br />

seigneurs de guerre. Malgré les menaces dont elle<br />

est constamment victime, elle parvient à persuader<br />

les autorités de la région somalienne du Puntland à<br />

interdire les exportations de charbon de bois. Avec ses<br />

camarades, elle incite les populations à utiliser des<br />

cuisinières solaires, éliminant ainsi le besoin de<br />

combustible.<br />

2004<br />

Trois activistes s’installent sur des plateformes<br />

ménagées dans des Eucalyptus regnans à 65 mètres<br />

du sol, pour protéger du déboisement l’ancienne<br />

forêt tasmanienne du Styx. Cinq mois plus tard, le<br />

Gouvernement de Tasmanie s’engage à protéger<br />

18 700 hectares boisés.<br />

* Wangari Maathai, Alexander Peal, Fatima Jibrell, et Anne Kajir ont<br />

également reçu des prix Goldman.<br />

boulots d’été destinés aux lycéens dans le cadre<br />

duquel ils replanteront quelque 900 000 arbres.<br />

La Fédération des jeunes de tout le Pakistan,<br />

qui chapeaute 392 associations, parraine des campagnes<br />

de plantation d’arbres.<br />

Tree For All, parrainé par l’association<br />

britannique Woodland Trust, a aidé plus de<br />

350 000 jeunes à planter 3 millions d’arbres.<br />

N’attendez pas !<br />

www.unep.org/billiontreecampaign<br />

Shane Recalde<br />

<strong>Les</strong> forêts 9


De vrais sauvages !<br />

Le singe de Bili<br />

Est-ce un chimpanzé ? Est-ce un gorille ?<br />

On s’est longtemps posé la question. Ce<br />

grand singe vit au sol comme un gorille<br />

mais il se nourrit de fruits comme un<br />

chimpanzé. <strong>Les</strong> récentes analyses d’ADN<br />

ont confirmé que le singe de Bili, qui vit<br />

dans les forêts reculées de la République<br />

Démocratique du Congo, était bien une<br />

sous-espèce de chimpanzé – malgré sa<br />

taille et sa bizarre crête de gorille sur<br />

le crâne.<br />

La plectanie noirâtre<br />

La plectasine – un puissant antimicrobien<br />

qui permet de lutter contre la pneumonie<br />

et la méningite – vient d’être extraite<br />

de ce champignon qui pousse dans les<br />

forêts de pins du nord de l’Europe. Il reste<br />

sans doute de nombreux médicaments<br />

et aliments à base d’espèces sauvages<br />

à découvrir.<br />

L’orchidée vanille<br />

Ce goût que nous connaissons tous vient<br />

de la gousse d’une orchidée des forêts<br />

ombrophiles du Mexique qu’avait découverte<br />

l’ancien peuple Totonac. L’orchidée<br />

vanille est fécondée par le mélipone, une<br />

minuscule abeille qui ne peut survivre<br />

qu’au Mexique. Pour cultiver commercialement<br />

la vanille, on est donc obligé<br />

d’effectuer la pollinisation à la main, ce<br />

qui rend le produit cher.<br />

Le serpent de Kapuas<br />

Ce « serpent caméléon », que les écologistes<br />

du WWF viennent de découvrir<br />

dans les forêts ombrophiles de Bornéo,<br />

est de couleur brun rouge le jour mais il<br />

devient blanc dans le noir. <strong>Les</strong> chercheurs<br />

pensent que cela lui permet de réguler<br />

sa température, puisqu’une peau sombre<br />

absorbe la chaleur du soleil. Quelque<br />

360 espèces ont été découvertes à<br />

Bornéo au cours des dix dernières<br />

années, mais les forêts de l’île sont<br />

extrêmement menacées.<br />

Karl Ammann/www.karlammann.com Biopix.dk/www.biopix.dk<br />

BIOS Hazan Muriel/Still Pictures Mark Auliya/WWF<br />

L’échange dette-forêts<br />

A. Mbabazi/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> luxuriantes forêts tropicales du Cameroun vont bientôt<br />

bénéficier d’une protection bien nécessaire. Dans le cadre<br />

d’un accord historique conclu avec la France, le pays pourra<br />

en même temps réduire sa dette extérieure. En effet, le Cameroun<br />

s’engage à réinvestir dans l’environnement 25 millions de dollars<br />

au moins de sa dette envers la France. Au lieu de la rembourser,<br />

il utilisera ces fonds pour protéger sa partie du Bassin du Congo,<br />

qui abrite de rares éléphants des forêts, des centaines d’espèces<br />

d’oiseaux et des peuples indigènes comme les Ba’Aka.<br />

C’est le biologiste et écologiste américain Thomas Lovejoy qui<br />

le premier a eu l’idée de cet échange de type « dette/nature ». Il<br />

s’est rendu compte que les régions à la faune la plus riche sont<br />

généralement situées dans des pays en développement, pays qui<br />

supportent la dette la plus lourde et qui ont les plus grandes<br />

difficultés à investir dans la protection de leur environnement.<br />

Le programme prévoit d’effacer la dette internationale d’un<br />

pays, à condition que celui-ci utilise les fonds pour financer la<br />

protection de son environnement. Ce sont souvent des organisations<br />

de protection de l’environnement qui rachètent la dette<br />

à un tarif préférentiel (mais oui, on peut racheter les dettes des<br />

autres !) et qui l’encaissent ensuite dans la devise locale. L’argent<br />

sert alors à financer un projet de conservation sur place. Parfois,<br />

l’accord est conclu directement entre gouvernements, comme<br />

pour cet échange France-Cameroun. Dans ce cas, un organisme de<br />

conservation se charge généralement de chapeauter la transaction<br />

et d’aider à identifier les secteurs à protéger et les modalités de<br />

la protection. Cela permet de toute façon à la nation en développement<br />

d’économiser de précieuses devises étrangères tout en<br />

gérant durablement ses ressources naturelles, pour son propre bien<br />

comme pour celui de la planète.<br />

Le premier échange de ce type a eu lieu en 1987 : Conservation<br />

International a racheté une dette de 650 000 dollars, que la Bolivie<br />

devait à un créancier commercial, pour seulement 100 000 dollars,<br />

et l’organisation a utilisé les fonds pour gérer la Réserve de<br />

biosphère de Beni et pour créer de nouvelles zones protégées. En<br />

1996, seize pays bénéficiaient d’échanges similaires, dont le Costa<br />

Rica, l’Equateur, le Guatemala, les Philippines et la Zambie.<br />

En 1998, les Etats-Unis ont voté une loi autorisant les échanges<br />

dette-nature pour protéger les forêts tropicales. De nombreux autres<br />

accords ont suivi. En 2002, par exemple, le Pérou a remboursé<br />

6,6 millions de dollars de sa dette envers les Etats-Unis<br />

d’Amérique, avec le concours de The Nature Conservancy, de<br />

Conservation International et du WWF. Cet échange a permis de<br />

protéger dix des forêts ombrophiles les plus riches en biodiversité<br />

de l’Amazone péruvien – couvrant 110 000 kilomètres carrés – qui<br />

se trouvaient particulièrement menacées.<br />

Bien entendu, ce système ne permettra pas d’effacer la totalité<br />

des dettes du monde en développement, mais il aide les pays à<br />

investir dans des ressources naturelles qui risquaient de disparaître<br />

pour rembourser les créanciers. L’idée de Thomas Lovejoy a fait<br />

son chemin et celui-ci a grand plaisir à rappeler que les échanges<br />

dette-nature représentent aujourd’hui le plus important financement<br />

de la protection de l’environnement !<br />

10 TUNZA Vol 4 No 3


Quand on pense aux forêts, on imagine tout de suite leur faune<br />

et leur flore mais rarement leurs habitants. Pourtant, des<br />

millions de gens à travers le monde habitent dans les<br />

forêts, et leur mode de vie est intimement lié à leur environnement.<br />

Il est d’ailleurs probable qu’il existe dans les forêts d’Amérique latine<br />

de nombreux peuples qui n’ont pas encore eu de contact avec le<br />

monde extérieur.<br />

La plupart des populations forestières sont des minorités<br />

indigènes vivant dans de petites communautés très fermées qui<br />

auraient beaucoup à apprendre au reste du monde.<br />

Le respect occupe une place prépondérante dans leur vie. Au<br />

Congo, les Bambuti, par exemple, parlent de la forêt en termes de<br />

père ou de mère et la considèrent comme sacrée : c’est une divinité<br />

qu’on appelle à l’aide et que l’on remercie. Au Venezuela et au Brésil,<br />

les Yanomami croient que les mondes naturel et spirituel sont unis :<br />

le destin de tous les humains et celui de l’environnement sont<br />

inexorablement liés. Ainsi, la destruction de l’environnement par les<br />

populations équivaut au lent suicide de l’humanité.<br />

<strong>Les</strong> peuples des forêts utilisent leur environnement avec<br />

parcimonie car c’est lui qui couvre leurs besoins fondamentaux<br />

– aliments, abri, eau, médicaments, combustible et vêtements. A<br />

Bornéo, les Penan coupent le sagou, un palmier à croissance rapide<br />

dont le tronc contient beaucoup d’amidon qu’ils utilisent comme<br />

farine. Ils ne coupent que les troncs les plus gros et laissent les<br />

autres pousser pour la fois suivante. C’est le principe du molong,<br />

qui consiste à ne jamais prélever dans la nature plus que ce qui<br />

est nécessaire.<br />

Au Canada, les Haida utilisent l’écorce du cèdre rouge pour<br />

fabriquer un textile qui sert à confectionner des vêtements, des cordes<br />

et des voiles. Avec le bois proprement dit, ils fabriquent des pirogues,<br />

des masques de cérémonie et des caisses, et construisent leurs<br />

longues cabanes communes. <strong>Les</strong> branches plus fines servent à fumer<br />

le saumon.<br />

La vie au sein des forêts n’est pas nouvelle. <strong>Les</strong> archéologues ont<br />

découvert qu’une population de Haida vivait déjà sur Haida Gwaii<br />

(les îles de la Reine Charlotte) au large de la côte ouest du Canada<br />

il y a 5 000 ans. Il y a 4 500 ans, les Egyptiens mentionnaient déjà<br />

les peuples des forêts du Congo. Et les scientifiques pensent<br />

qu’en Amazonie, 10 % au moins de ce qu’on qualifie souvent de<br />

forêt « vierge » étaient en réalité cultivés avec soin. <strong>Les</strong> peuples qui<br />

vivaient là plantaient toute une variété d’essences – fruitiers, noyers<br />

et palmiers.<br />

Pour bien vivre dans la forêt, il faut transmettre les informations de<br />

génération en génération. <strong>Les</strong> Bambuti et les Bagyeli du Cameroun se<br />

servent de contes, de chants, de danses et de mimes pour transmettre<br />

leurs connaissances. Ainsi, chaque génération acquiert le savoir-faire<br />

de ses ancêtres, et les enfants savent comment on faisait les choses<br />

autrefois et comment on les fait maintenant.<br />

<strong>Les</strong> peuples des forêts vivaient rarement dans un isolement total,<br />

et ceux qui étaient coupés du monde ont désormais des contacts<br />

avec l’extérieur. La plupart des Penan se sont installés dans des<br />

habitations qui bordent les fleuves mais ils reprennent souvent le<br />

chemin de la forêt pour chasser. <strong>Les</strong> Bambuti vivent toujours dans la<br />

forêt, mais ils font du commerce avec les villages : ils vendent de<br />

la viande de brousse et du miel et achètent du manioc et d’autres<br />

produits agricoles. <strong>Les</strong> rapports entre les Haida et le Gouvernement<br />

canadien sont régis par l’Accord Haida, qui autorise le Conseil de<br />

la nation Haida à représenter sa population auprès des autorités<br />

provinciales et fédérales quand il s’agit de régler des questions liées<br />

aux terres et aux ressources.<br />

Mais en fin de compte, c’est leur détachement – spirituel plus que<br />

géographique – qui est si précieux pour le reste du monde.<br />

Rien de neuf<br />

sous la canopée<br />

C.B. Hansen/PNUE/Topham


5<br />

6<br />

John Cancalosi/Still Pictures<br />

<strong>Les</strong> forêts sèches mexicaines (1)<br />

Un tiers des espèces endémiques du<br />

Mexique sont présentes dans ces immenses<br />

forêts tropicales sèches situées<br />

au nord de l’équateur. Elles abondent<br />

en plantes grasses, arbustes, steppes<br />

de cactées et feuillus, qui abritent une<br />

précieuse faune – tarentules à pattes<br />

rouges, monstres de Gila, papillons tigrés,<br />

pumas et jaguars.<br />

Il reste moins de 2 % des anciennes<br />

forêts sèches d’Amérique centrale et elles<br />

sont mal protégées de l’élevage et du<br />

développement économique.<br />

H. Them/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts inondées de<br />

l’Amazone (2)<br />

Chaque année, les pluies font déborder<br />

l’Amazone, et une région de la taille du<br />

Venezuela se retrouve alors sous<br />

9 mètres d’eau. L’eau du fleuve fertilise<br />

les plaines environnantes et régénère les<br />

lacs. Des espèces aquatiques – poisons<br />

et reptiles, dauphins d’eau douce et<br />

lamantins – évoluent entre les arbres<br />

pour se nourrir et se reproduire. Cet écosystème<br />

unique et stable est toutefois<br />

menacé par la surpêche, la pollution<br />

d’effluents et la construction de barrages.<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

<strong>Les</strong> forêts<br />

La moitié des forêts du monde ont<br />

déjà disparu, et sur chaque continent,<br />

le déboisage se poursuit à raison<br />

de 130 000 kilomètres carrés par an<br />

– soit l’équivalent de 35 terrains de<br />

foot par minute. Mais même si la<br />

7<br />

M. Schneider/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts du sud-ouest de<br />

l’Amazone (3)<br />

Ces forêts tropicales isolées, savanes<br />

inondées et étendues de bambous sont<br />

un refuge vital pour la plus grande<br />

diversité au monde d’oiseaux, poissons<br />

d’eau douce et papillons, de même<br />

que pour le jaguar et plusieurs primates.<br />

Cette région de la forêt amazonienne<br />

ombrophile, un peu moins vaste que le<br />

Mexique, est intacte à 94 %, mais elle<br />

est menacée, notamment par le déboisement<br />

et la prospection pétrolière.<br />

<strong>Les</strong> forêts de nuages<br />

Gunter Ziesler/Still Pictures<br />

La forêt tropicale sèche du<br />

Chiquitano (4)<br />

Au sud de la forêt ombrophile amazonienne,<br />

les steppes de cactées du<br />

Chiquitano, habitat peu connu, mais à la<br />

biodiversité très riche, sont en grave<br />

danger. L’élevage, la culture du soja et<br />

les projets énergétiques menacent des<br />

essences qui se sont adaptées aux<br />

incendies, aux inondations et aux hivers<br />

secs. Le Chiquitano est la plus grande<br />

forêt sèche du monde mais il n’occupe<br />

plus que 20 % de son territoire initial. Le<br />

tatou géant fait partie des nombreuses<br />

espèces présentes.<br />

J.M. Ahrtal/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts mixtes de la Baltique (5)<br />

<strong>Les</strong> fleuves côtiers forment des terres<br />

humides au sein de ces forêts tempérées,<br />

créant ainsi le parfait habitat pour de nombreux<br />

oiseaux, rapaces principalement.<br />

Ce sont des forêts de hêtres, de chênes,<br />

de charmes communs d’Europe, de pins<br />

d’Ecosse et de tilleuls. Parmi les espèces<br />

menacées qu’elles abritent se trouvent<br />

notamment le vison européen et deux<br />

espèces de grenouilles. Couvrant encore<br />

de vastes étendues en Allemagne, au<br />

Danemark, en Pologne et en Suède, elles<br />

sont exploitées depuis longtemps et<br />

doivent être protégées du tourisme, de<br />

l’agriculture et de la chasse.<br />

LEUR NOM POETIQUE les décrit bien :<br />

alors que l’air chaud monte des basses<br />

terres tropicales et subtropicales vers les<br />

montagnes plus froides, la condensation<br />

envahit les forêts montagneuses à feuilles<br />

persistantes. Emaillées d’orchidées, de fougères<br />

et de mousses, elles abritent des espèces<br />

menacées comme l’ours à lunettes<br />

et le gorille des montagnes. Environ 80 %<br />

de leur riche faune n’ont pas encore été<br />

catalogués et on continue à découvrir de<br />

nouvelles espèces, notamment des variétés<br />

sauvages de pommes de terre et de<br />

tomates. Des millions de gens comptent<br />

sur ces forêts pour obtenir quotidiennement<br />

une eau non polluée : une fois recueillie<br />

par la forêt, l’eau des nuages fournit toute<br />

l’eau potable et l’hydroélectricité de Dar es<br />

Salaam (Tanzanie) durant la saison sèche,<br />

par exemple.<br />

<strong>Les</strong> 3 % des anciennes forêts de<br />

nuages qui subsistent aujourd’hui sont encore<br />

menacés, notamment par l’agriculture,<br />

l’élevage et le réchauffement mondial – une<br />

hausse de température de 2°C risquerait<br />

d’assécher les nuages.<br />

B.L. Christiansen/PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts boréales<br />

L’ETENDUE DES FORETS BOREALES<br />

– 12 millions de kilomètres carrés – rivalise<br />

avec celle des forêts ombrophiles tropicales.<br />

Ces forêts n’ont pas bénéficié jusqu’ici de<br />

la même couverture médiatique, pourtant,<br />

elles sont tout aussi importantes pour<br />

l’écosystème mondial.<br />

Formant un cercle à l’extrémité de<br />

l’hémisphère nord, juste en dessous du<br />

cercle polaire arctique, ces forêts connaissent<br />

des hivers froids et des étés courts<br />

et doux, qui ont favorisé la présence des<br />

conifères. Le feuillage persistant vert foncé<br />

12 TUNZA Vol 4 No 3


8<br />

9<br />

10<br />

PNUE-WCMC<br />

en danger<br />

couverture forestière a beaucoup régressé,<br />

il reste de magnifiques forêts<br />

à préserver.<br />

Voici un rapide tour d’horizon des<br />

plus importants types de forêts et<br />

régions boisées du monde.<br />

John Cancalosi/Still Pictures<br />

<strong>Les</strong> forêts méditerranéennes (6)<br />

<strong>Les</strong> nombreux types de forêts – pins,<br />

oliviers sauvages, caroubiers et chênes<br />

divers et variés – du bassin méditerranéen<br />

abritent la biodiversité la plus riche<br />

d’Europe et la plus importante concentration<br />

d’espèces inconnues ailleurs,<br />

comme le lynx ibérien et l’ibex espagnol.<br />

Après des siècles d’exploitation, 85 %<br />

environ de la couverture forestière a<br />

disparu et les écologistes s’efforcent<br />

aujourd’hui de protéger certains sites<br />

exceptionnels pour la biodiversité.<br />

Martin Harvey/Still Pictures<br />

<strong>Les</strong> forêts humides du Congo (7)<br />

Une jungle impénétrable et les moustiques<br />

préservent l’intégrité d’une des plus vastes<br />

régions encore totalement sauvages de<br />

l’Afrique. Elle est particulièrement difficile<br />

d’accès et les chercheurs n’ont pas encore<br />

réussi à cataloguer sa biodiversité. On sait<br />

cependant qu’elle abrite des gorilles des<br />

plaines, des souimangas du Congo, des<br />

bonobos et des éléphants des forêts.<br />

Comme la majeure partie de la région est<br />

uniquement accessible par bateau, le<br />

déboisement ne pose pas encore de<br />

problème, mais le braconnage représente<br />

un danger pour les espèces menacées.<br />

S. Kiyohiro/PNUE/Topham<br />

Jean-Léo Dugast/Still Pictures<br />

<strong>Les</strong> forêts sèches de l’ouest de<br />

Madagascar (8)<br />

Ces forêts abritent des centaines<br />

d’espèces endémiques, dont la tortue à<br />

soc, extrêmement menacée, et six des<br />

huit espèces de baobabs du monde. <strong>Les</strong><br />

arbres ont su s’adapter à la saison<br />

sèche : ils perdent leurs feuilles pour conserver<br />

l’humidité – dans son tronc, le baobab<br />

peut stocker jusqu’à 120 000 litres<br />

d’eau. La plupart de ces forêts ont<br />

déjà été déboisées pour le bois de<br />

chauffage, l’agriculture et l’élevage, et<br />

elles restent menacées.<br />

permet aux essences de commencer leur<br />

photosynthèse dès qu’apparaissent les<br />

premiers rayons du soleil et la forme conique<br />

des arbres empêche les branches de se<br />

casser. Le sol est riche en lichens et<br />

mousses, et les nombreuses rivières,<br />

tourbières et lacs peu profonds constituent<br />

un habitat important pour les grands<br />

mammifères comme le caribou, l’ours et<br />

le loup. Aujourd’hui, ces forêts sont menacées<br />

par les pluies acides, la pollution de<br />

l’air et l’exploitation énergétique, pétrolière<br />

et hydroélectrique.<br />

A.V. Singh/PNUE/Topham<br />

Le plateau du Deccan oriental (9)<br />

Grand nombre des tigres du Bengale<br />

vivent dans ces forêts balayées par la<br />

mousson, en compagnie d’autres grands<br />

mammifères comme les guars, plus gros<br />

bovins sauvage du monde. Dominée par<br />

le sal, un feuillu apprécié pour son bois<br />

de construction, sa résine odorante et<br />

ses fruits producteurs de graisse, la forêt<br />

ne couvre plus qu’un quart de sa superficie<br />

initiale, et seuls 4 % sont protégés.<br />

La fragmentation liée à l’exploitation de<br />

carrières et de mines et à la production<br />

d’hydroélectricité menace la forêt et<br />

ses tigres.<br />

ZONE TAMPON ESSENTIELLE entre la<br />

terre et la mer, les mangroves couvrent<br />

150 000 kilomètres carrés de zones côtières<br />

tropicales et subtropicales. Leurs arbustes<br />

et arbres à feuilles persistantes sont parfaitement<br />

adaptés au sol marécageux,<br />

pauvre en oxygène et à l’eau salée de la<br />

zone intertidale – les racines aériennes<br />

absorbent directement l’oxygène de l’air et<br />

tolèrent le sel, qui est par ailleurs excrété par<br />

PNUE/Topham<br />

PNUE/Topham<br />

<strong>Les</strong> forêts ombrophiles des plaines<br />

de Bornéo (10)<br />

Leur faune et leur flore sont aussi riches<br />

que celles de l’Amazone, mais elles sont<br />

encore plus vulnérables. La moitié de ces<br />

forêts a déjà disparu, et le déboisement,<br />

la culture d’huile de palme et d’hévéa et<br />

la construction de barrages risquent<br />

d’éliminer le reste dans les dix années<br />

à venir. <strong>Les</strong> 10 000 espèces de plantes,<br />

les 13 espèces de primates et les<br />

380 espèces d’oiseaux sont donc menacées,<br />

sans compter toutes celles qui<br />

n’ont pas encore été découvertes. <strong>Les</strong><br />

espèces les plus vulnérables sont l’orang<br />

outang de Bornéo, l’éléphant d’Asie et le<br />

rhinocéros de Sumatra.<br />

<strong>Les</strong> mangroves<br />

les feuilles. La végétation dense abrite la<br />

vie marine, empêche l’érosion côtière et<br />

protège le littoral des vents et des vagues, et<br />

même des tsunamis. <strong>Les</strong> terres humides<br />

peu profondes et riches en nutriments sont<br />

une nourricerie essentielle pour les poissons<br />

et crustacées, dont se nourrissent aussi les<br />

oiseaux. <strong>Les</strong> lamantins, singes mangeurs de<br />

crabes et poissons amphibies sont également<br />

tributaires de cet habitat. Pourtant,<br />

20 % des mangroves du monde ont disparu<br />

depuis 1980, en partie parce qu’on les considérait<br />

comme des terres inutilisables. Elles<br />

sont vulnérables aux marées noires et au<br />

développement côtier, et la crevetticulture<br />

est responsable de la disparition de 38 %<br />

d’entre elles.<br />

<strong>Les</strong> forêts 13


<strong>Les</strong> forêts : teste tes<br />

connaissances !<br />

1 Quelle est la part des forêts anciennes de la Terre ayant<br />

conservé leur beauté et leur santé d’origine ?<br />

a. 1/2<br />

b. 3/4<br />

c. 1/5<br />

d. 1/8<br />

2 Où se trouve la plus vaste forêt ombrophile<br />

tempérée ?<br />

a. en Alaska<br />

b. au Pakistan<br />

c. en Uruguay<br />

d. en Russie<br />

3 Combien de kilos de matière vivante (biomasse) un<br />

mètre carré de forêt ombrophile peut-il faire vivre ?<br />

a. 60-100 kilos<br />

b. 45-80 kilos<br />

c. 120-170 kilos<br />

d. 20-30 kilos<br />

4 <strong>Les</strong> forêts ombrophiles africaines abritent plus de la<br />

moitié des espèces de faune et de flore du continent.<br />

Quel pourcentage de la superficie totale de l’Afrique<br />

couvrent-elles ?<br />

a. 20-25 %<br />

b. 70 %<br />

c. 60-65 %<br />

d. 5-7 %<br />

5 Quelle est l’essence la plus souvent coupée dans la<br />

forêt de Budongo en Ouganda ?<br />

a. le tek<br />

b. l’acajou<br />

c. le châtaignier<br />

d. le palmier<br />

6 Combien trouve-t-on d’espèces de champignons dans<br />

les forêts boréales du monde ?<br />

a. 5 000<br />

b. 650<br />

c. 1 000 000<br />

d. 700 500<br />

7 Dans quelle langue le terme « orang outang » signifie-til<br />

« personne de la forêt » ?<br />

a. arabe<br />

b. mandarin<br />

c. malais<br />

d. urdu<br />

8 Le bambou est une herbe à croissance très rapide. De<br />

combien peut-il pousser par jour ?<br />

a. 38 cm<br />

b. 2 mètres<br />

c. 10 cm<br />

d. 84 cm<br />

9 Dans quel type de forêts trouve-t-on les arbres dont<br />

l’écorce permet d’extraire la quinine, médicament<br />

utilisé contre le paludisme ?<br />

a. les forêts de bambous<br />

b. les forêts ombrophiles de l’Amazone<br />

c. les forêts de nuages<br />

d. les forêts tempérées de feuillus<br />

Savoir prendre et<br />

savoir donner<br />

Waranya Mei Roekpoorita, Conseillère<br />

jeunesse Tunza pour l’Asie-Pacifique,<br />

parle de son combat en faveur des forêts<br />

dans le cadre du Réseau environnement<br />

des jeunes Thaïlandais.<br />

La forêt, c’est la vie. Elle est source d’aliments, d’abri et<br />

même de médicaments. Et toute la création en profite,<br />

pas seulement les êtres humains. En Thaïlande, nous<br />

sommes confrontés à un déboisement considérable. Autrefois,<br />

70 % du territoire était couvert de forêts. Durant les années<br />

1960, ce chiffre était tombé à 50 % et dans les années 1990,<br />

la couverture forestière ne représentait plus que 15 %.<br />

Naturellement, la biodiversité et la biomasse des forêts ont<br />

beaucoup souffert et les écosystèmes sont fortement perturbés.<br />

Le Réseau environnement des jeunes Thaïlandais (ThaiYEN)<br />

est convaincu que c’est en travaillant avec les cultivateurs<br />

que les jeunes peuvent lutter le plus efficacement contre le<br />

déboisement. En Thaïlande, les pratiques agricoles ne sont<br />

pas toujours très durables. Comme les agriculteurs cultivent<br />

les mêmes plantes chaque année, le sol s’épuise et perd de<br />

sa fertilité. Alors, ils déboisent pour trouver de nouvelles terres<br />

plus productives.<br />

Un des projets de ThaiYEN consiste à inciter les villageois<br />

à mettre en place des méthodes agricoles adaptées et<br />

écologiquement durables. Nous faisons circuler l’idée qu’il ne<br />

suffit pas de prendre à la forêt, il faut aussi lui rendre. Il faut<br />

rendre au sol les nutriments qu’on lui a pris. En pratiquant une<br />

rotation saisonnière des cultures, on préserve la productivité<br />

des terrains existants pendant de nombreuses années et on<br />

évite ainsi de sacrifier de nouvelles forêts. ThaiYEN préconise<br />

également la consommation durable – comme le prône aussi<br />

notre roi, Sa Majesté Bhumibol Adulyadej – et la diversification<br />

des terres, qui doivent être utilisées pour l’élevage, la culture et<br />

les potagers familiaux.<br />

Depuis que je fais partie de ThaiYEN, je sais combien il est<br />

important d’être en rapport avec des réseaux de jeunes. J’ai<br />

rencontré de nombreux jeunes écologistes d’Asie du Sud et du<br />

monde entier grâce à des organisations comme Tunza et à des<br />

événements comme la Retraite mondiale des jeunes. En tant<br />

que Conseillère jeunesse Tunza, je participe à des programmes<br />

d’éducation de pair à pair. Je trouve qu’ils sont formidables<br />

parce que les jeunes sont têtus : ils n’aiment pas qu’on leur<br />

dise ce qu’ils doivent penser, ils préfèrent participer à des<br />

actions concrètes.<br />

Worawit Netrachad/PNUE/Topham<br />

REPONSES : 1c, 2a, 3b, 4d, 5b, 6a, 7c, 8a, 9c<br />

14 TUNZA Vol 4 No 3


John D. Canning<br />

UN STYLE GUERILLA<br />

En mai 2006, l’actrice américaine Daryl Hannah – la<br />

célèbre sirène du film Splash – a élu domicile dans un<br />

noyer. L’arbre se trouvait dans une luxuriante<br />

exploitation agricole de South Central, un des quartiers les<br />

moins verts de Los Angeles. Daryl, qui milite depuis longtemps<br />

en faveur de l’environnement, était là pour empêcher<br />

le travail des pelleteuses des promoteurs immobiliers.<br />

Elle s’était installée dans l’arbre pour soutenir une<br />

communauté de cultivateurs immigrés venus du Mexique et<br />

d’Amérique centrale. Ces immigrés s’occupaient de cette<br />

oasis de 5,6 hectares – la plus vaste ferme urbaine du pays –<br />

depuis 1992, après avoir obtenu l’autorisation de cultiver un<br />

terrain vague. Ils faisaient pousser 150 espèces de légumes et<br />

de fruits, dont des avocats, des mangues, du maïs et d’autres<br />

variétés héritées de leurs terres d’origine. Ces produits frais<br />

bios permettaient de nourrir 350 familles pauvres. <strong>Les</strong><br />

agriculteurs avaient institué le système mexicain « ejido »<br />

– avec culture en commun de la terre – et marchés et événements<br />

culturels ouverts au public. Le site absorbait également<br />

une partie des vastes quantités de dioxyde de carbone émises<br />

par Los Angeles.<br />

En 2003, la ville a vendu la terre à un promoteur qui<br />

s’est empressé d’obtenir un ordre d’expulsion. Pour attirer<br />

l’attention du public sur la situation, Daryl Hannah a passé<br />

trois semaines dans l’arbre en compagnie des militants Julia<br />

Butterfly Hill et John Quigley. « Je suis convaincue du<br />

bien-fondé moral de ce geste de solidarité en faveur des<br />

cultivateurs », a déclaré l’actrice.<br />

Le combat qu’elle a mené pour protéger la ferme s’inscrit<br />

dans la croisade personnelle de Daryl Hannah en faveur de<br />

l’environnement. Actrice bien connue, elle a plus de 60 films<br />

à son actif. Quand elle n’est pas sur un tournage, elle se<br />

consacre à la promotion d’un mode de vie plus vert. Depuis<br />

peu, elle produit chaque semaine un petit vidéoblog de<br />

cinq minutes (disponible en ligne sur dhlovelife.com), qu’elle<br />

décrit elle-même comme « de style guérilla », sans sponsor<br />

commercial et sans équipe de tournage. Ses minidocumentaires<br />

mettent en scène des gens qui s’efforcent dans<br />

leur vie quotidienne de faire des choix respectueux de la<br />

planète, dans des domaines aussi divers que les cosmétiques,<br />

l’architecture durable, le biodiésel, les gorilles menacés du<br />

Rwanda et, bien sûr, les cultivateurs de South Central.<br />

Daryl met en pratique sa philosophie : sa maison des<br />

Rocheuses du Colorado fonctionne à l’énergie solaire, elle<br />

cultive son propre potager et elle roule au biodiésel. « Ce n’est<br />

pas une question politique ou écologique, c’est simplement<br />

une question de bon sens », confie-t-elle.<br />

Malheureusement, le bon sens et la célébrité ne peuvent<br />

pas tout résoudre. L’occupation du noyer de South Central<br />

ayant fait la une des journaux, d’autres célébrités comme<br />

les acteurs Martin Sheen et Leonardo di Caprio sont venus<br />

soutenir leur camarade. Malgré cela, les forces de l’ordre<br />

sont intervenues au mois de juin pour déloger et arrêter les<br />

militants, et les pelleteuses ont rasé la ferme.<br />

Mais les cultivateurs ne s’avouent pas vaincus. Ils<br />

continuent à occuper le site et cherchent un moyen de recréer<br />

la ferme, légalement et financièrement. En attendant, ils<br />

cultivent un autre jardin urbain sur 3 hectares de terrain<br />

fournis par la ville. Daryl Hannah continue à les soutenir.<br />

« Ces cultivateurs font partie d’une communauté particulièrement<br />

pauvre », explique-t-elle. « Leur ferme devrait<br />

servir de modèle d’agriculture urbaine durable. Il faut la<br />

copier, pas la supprimer. »<br />

<strong>Les</strong> forêts 15


De vrais sauvages !<br />

L’I’iwi des îles Hawaii<br />

Bien qu’il soit rare ou totalement absent<br />

de certaines îles suite à la perte de son<br />

habitat et au paludisme aviaire, cet oiseau<br />

très friand de nectar s’observe encore<br />

dans plusieurs îles Hawaii. Il était autrefois<br />

très recherché pour son magnifique plumage<br />

qui devient rouge vif à l’âge adulte :<br />

les plumes d’I’iwis servaient à confectionner<br />

des manteaux et des coiffures<br />

pour la royauté hawaïenne.<br />

L’ayahuasca<br />

En langue quechua, son nom signifie<br />

« vigne de l’âme ». Traditionnellement bu<br />

en infusion par les peuples des forêts<br />

et prisé pour ses vertus hallucinogènes<br />

lors de rites sacrés, l’ayahuasca est aussi<br />

un médicament qui provoque des vomissements<br />

et des diarrhées intenses<br />

permettant de purger le corps des<br />

parasites tropicaux.<br />

L’éléphant pygmée<br />

Haut de 2,5 mètres, il n’est guère plus<br />

grand qu’un être humain. <strong>Les</strong> recherches<br />

effectuées par le WWF et l’Université de<br />

Colombia ont permis d’établir qu’il s’agit<br />

d’une sous-espèce de l’éléphant d’Asie<br />

– il est plus dodu que celui-ci, avec des<br />

oreilles plus grandes et une queue plus<br />

longue. Ces éléphants sont encore 1600<br />

environ dans leur habitat, à la pointe<br />

nord-est de Bornéo, et ils sont menacés<br />

par les braconniers et les plantations<br />

commerciales.<br />

La reine Alexandra<br />

Avec une envergure d’aile de 28 centimètres,<br />

le plus grand papillon du monde vit<br />

uniquement dans les forêts littorales<br />

ombrophiles de Nouvelle-Guinée. Il se<br />

fait de plus en plus rare à cause des<br />

collectionneurs d’insectes et du déboisement<br />

au profit des plantations de palmiers<br />

à huile. Il est particulièrement vulnérable<br />

car la survie de ses larves dépend totalement<br />

d’une seule plante – l’aristoloche ou<br />

arbre à pipes dont il tire un poison qui<br />

éloigne les prédateurs.<br />

Doug Cheeseman/Still Pictures Dr Morley Read/Science Photo Library<br />

A. Christy Williams/WWF-Canon Francois Gilson/Still Pictures<br />

L’argent pousse sur<br />

les arbres<br />

C<br />

’est bien connu, la meilleure façon de rentabiliser une<br />

forêt est de déboiser et de vendre le bois. N’est-ce pas ?<br />

Eh bien, contrairement à ce que l’on pense souvent, les études<br />

montrent que les arbres, et la faune et la flore qui les entourent,<br />

sont beaucoup plus rentables exploités « sur pied ». Lorsque<br />

l’on récolte tous les produits d’une forêt vivante et que l’on<br />

cultive des denrées appropriées, on peut gagner neuf fois plus<br />

d’argent qu’en déboisant – et ce revenu se renouvelle<br />

indéfiniment. En plus, ces chiffres ne tiennent pas compte<br />

du potentiel croissant que représente l’écotourisme et des<br />

précieux services fournis par la forêt en termes de production<br />

d’eau douce et de régulation du climat. Voici quelques<br />

exemples des richesses présentes dans la forêt.<br />

Le neem<br />

Ce feuillu à croissance rapide, très résistant à la sécheresse, est<br />

originaire d’Asie du Sud. Ses utilisations sont si nombreuses qu’on<br />

le surnomme « l’arbre aux merveilles ». Il fournit un ingrédient<br />

antiseptique et fongicide utilisé dans les crèmes pour la peau et<br />

dans les savons. Ses graines constituent une source importante<br />

d’azadirachtin, pesticide très efficace mais inoffensif pour les<br />

mammifères et les insectes utiles. <strong>Les</strong> Kenyans le cultivent pour le<br />

sculpter, ce qui leur assure des revenus sans faire appel aux<br />

essences exotiques déjà surexploitées comme l’ébène. En plus, cela<br />

permet de préserver l’habitat d’espèces comme le petit-duc d’Irène.<br />

Le matsutake<br />

Ce champignon sauvage aussi rare que cher est originaire des<br />

forêts de pins rouges du Japon. Il est considéré comme un mets<br />

si délicat que les spécimens les plus beaux sont souvent offerts<br />

en cadeau. La demande est telle que le matsutake est également<br />

importé de pinèdes étrangères comme celle de Santa Marta<br />

Latuvi, au Mexique, où les petits cultivateurs qui le cueillent<br />

peuvent espérer en obtenir jusqu’à 30 dollars le kilo.<br />

Enrico Bartolucci/Still Pictures<br />

Marisela Zamora<br />

16 TUNZA Vol 4 No 3


AUTREFOIS, les peuples des forêts pratiquaient souvent une culture de rapport en harmonie avec les arbres, et cela<br />

reste le cas en Amérique centrale, en Tanzanie ou en Thaïlande, par exemple. Deux des produits forestiers les plus<br />

appréciés peuvent être cultivés commercialement à grande échelle de manière similaire :<br />

Le cacao<br />

Plus de la moitié du chocolat produit au Brésil –<br />

cinquième producteur mondial de cacao – était autrefois<br />

cultivé selon le système « cabruca », qui consiste à<br />

éclaircir la forêt tropicale sans pour autant déboiser. Le<br />

cacaotier s’accommode de la proximité des arbres car<br />

il supporte bien l’ombre. Le système cabruca est<br />

actuellement en baisse, mais les écologistes espèrent<br />

renverser la tendance grâce à des investissements<br />

internationaux. Cela permettrait de protéger la forêt<br />

atlantique du pays – un des habitats les plus riches du<br />

monde, aujourd’hui menacé.<br />

Le café<br />

Le café est lui aussi originaire de la forêt et il pousse bien<br />

parmi les arbres. D’ailleurs, le café cultivé à l’ombre<br />

– sur de modestes exploitations plantées d’arbres<br />

fruitiers et d’essences exotiques qui fournissent d’autres<br />

revenus – est de plus en plus apprécié. Il coûte un peu<br />

plus cher mais il permet de lutter contre le déboisement,<br />

de préserver la faune, de conserver au sol son humidité<br />

et de limiter l’érosion. <strong>Les</strong> plants de café d’ombre sont<br />

productifs sur une cinquantaine d’années, contrairement<br />

aux plants cultivés en plein soleil après déboisement, qui<br />

ont une durée de vie de dix à quinze ans.<br />

Sean Sprague/Still Pictures<br />

Le chêne-liège<br />

<strong>Les</strong> forêts à feuilles persistantes de chênes-lièges fournissent un<br />

matériau biodégradable naturel aux multiples utilisations (sols et<br />

tableaux d’affichage, isolation et bouchons de bouteille, par<br />

exemple). Elles couvrent 27,000 kilomètres carrés du bassin<br />

méditerranéen et abritent des espèces protégées comme le lynx<br />

ibérien. Prélevé tous les dix ans environ sur le chêne vivant, le<br />

liège repousse par la suite. Il assure ainsi un revenu durable à plus<br />

de 100 000 personnes.<br />

L’hévéa<br />

Avant même que Colomb ne traverse l’Atlantique, les populations<br />

d’Amérique du Sud recueillaient déjà la sève de l’hévéa. Grâce<br />

à lui, l’Amazonie connut un essor extraordinaire à la fin du<br />

19 e siècle, essor qui prit fin lorsque les Européens exportèrent<br />

illégalement des hévéas pour créer des plantations en Asie du Sud-<br />

Est. Suite à l’avènement du caoutchouc synthétique, l’Amazonie<br />

ne couvre désormais qu’une toute petite partie de la demande<br />

mondiale. L’hévéa reste cependant un moyen d’existence et une<br />

source importante de revenus pour les populations locales.<br />

Luiz C. Marigo/Still Pictures<br />

Markus Dlouhy/Still Pictures<br />

La noix du Brésil<br />

La noix du Brésil, ce produit désormais bien connu issu de forêts<br />

tropicales, est totalement tributaire d’un écosystème très complexe.<br />

Son arbre est pollinisé par des abeilles dont la survie dépend d’une<br />

orchidée poussant dans la forêt. De plus, il a besoin d’un rongeur,<br />

l’agouti, pour disperser ses graines. Par conséquent, ses noix qui<br />

sont très appréciées pour leur huile et leurs nutriments, ne peuvent<br />

pas faire l’objet d’une culture commerciale en plantation.<br />

<strong>Les</strong> pignons<br />

<strong>Les</strong> pignons étaient autrefois un des aliments de base des Indiens<br />

d’Amérique – qui en faisaient de la farine. Aujourd’hui, on les<br />

trouve surtout dans le pesto italien. Ils proviennent de plusieurs<br />

essences qui poussent à l’état sauvage en Europe, en Asie et en<br />

Amérique du Nord. Riches en protéines, fibres et autres nutriments,<br />

ils sont également l’aliment de prédilection de nombreuses<br />

espèces sauvages, allant des oiseaux aux ours grizzly.<br />

Walter H. Hodge/Still Pictures<br />

TopFoto/ImageWorks<br />

<strong>Les</strong> forêts 17


Le retour du<br />

panda !<br />

En 1961, lorsque le WWF, l’organisation mondiale de<br />

protection de la nature, cherchait un symbole susceptible<br />

de la représenter, il a choisi le panda géant, parce que<br />

l’espèce était fortement menacée et reconnaissable au premier<br />

coup d’œil. Aujourd’hui, grâce au reboisement, il semble que le<br />

panda soit en train de faire son comeback.<br />

L’existence du panda dépend de celle des forêts de bambous :<br />

il mange chaque jour entre 12 et 38 kilos de pousses, et un couple<br />

a donc besoin au minimum d’une trentaine de kilomètres carrés<br />

de forêt pour vivre et se reproduire. Tout déboisement – au<br />

profit de l’exploitation forestière, de la construction de routes<br />

ou du développement urbain – peut se révéler catastrophique<br />

pour l’espèce.<br />

Depuis 1998, le Gouvernement chinois s’efforce de préserver<br />

ses forêts, en étroite collaboration avec le WWF et d’autres<br />

organisations de protection de l’environnement. Une étude effectuée<br />

en 2004 a dénombré 1600 pandas, soit une augmentation de<br />

40 % depuis les années 1980.<br />

Ce succès s’explique en grande partie par la création de<br />

50 nouvelles réserves et de « couloirs verts » qui permettent aux<br />

pandas d’atteindre les îlots de verdure coupés du reste de la forêt<br />

par les routes, les exploitations agricoles et les villes. C’est ainsi<br />

que deux importantes populations de pandas ont récemment été<br />

reliées par un couloir vert de 200 hectares, aménagé en faisant<br />

passer une grande route sous un tunnel.<br />

Le Gouvernement chinois a promis de réhabiliter 1275 kilomètres<br />

carrés supplémentaires de forêts, pour le plus grand bien<br />

des pandas, et également de préserver certains marais, forêts et<br />

zones arides, ainsi que l’habitat du léopard des neiges.<br />

Jason Kian Hwa/PNUE/Topham<br />

Jungles de béton :<br />

FREDERICK OLMSTED, créateur de Central Park, à New York,<br />

considérait ce parc comme le poumon de la ville. Il avait raison.<br />

<strong>Les</strong> espaces verts ne sont pas seulement des oasis de verdure<br />

dans une jungle de béton, mais aussi des organes vivants<br />

indispensables à la santé des citadins.<br />

<strong>Les</strong> infrastructures vertes de la ville filtrent les eaux polluées<br />

avant qu’elles ne se déversent dans les rivières, limitent les<br />

Beijing, Chine<br />

Alors qu’elle se prépare à accueillir les Jeux olympiques de 2008, la<br />

ville de Beijing a planté plus de 800 000 arbres sur les 680 hectares<br />

du parc de la Forêt olympique, au nord de la ville. Conçue pour<br />

évoquer l’art traditionnel chinois des « eaux de montagne », le site<br />

comprendra une énorme montagne artificielle et un lac olympique<br />

de 122 hectares, de même que des plantes et animaux indigènes<br />

choisis avec le plus grand soin. Après avoir accueilli les<br />

compétitions de tennis et d’autres sports, le parc deviendra un<br />

havre de paix et d’air pur pour des citadins à la vie trépidante.<br />

Barcelone, Espagne<br />

C’est depuis le parc de Collserola qu’on a la plus belle vue de<br />

Barcelone. Cette oasis de 8000 hectares de pins, de chênes et<br />

de sources vives occupe les montagnes qui bordent la ville. La ville<br />

a planté cette forêt en 1987 et en vingt ans, elle a doublé la<br />

superficie de ses parcs et jardins. En plus, les rues de Barcelone<br />

sont bordées de 150 000 arbres.<br />

Michel Gunther/WWF-Canon<br />

Río de Janeiro, Brésil<br />

Avec ses 3300 hectares, la Floresta da Tijuca est la plus vaste<br />

forêt urbaine du monde. Elle abrite de nombreuses espèces rares<br />

ou endémiques. En 1844, elle était si dégradée par les plantations<br />

<strong>Les</strong> animaux aussi ont besoin de se déplacer…<br />

18 TUNZA Vol 4 No 3


<strong>Les</strong> Champions<br />

de la TERRE<br />

En aval de Manaus, au cœur de la forêt ombrophile<br />

amazonienne, les immenses fleuves Amazone et Negro<br />

se rejoignent, offrant un spectacle hors du commun. <strong>Les</strong><br />

eaux noires du fleuve Negro rencontrent les eaux brunes et<br />

boueuses de l’Amazone, mais elles ne se mélangent<br />

pas immédiatement : elles cheminent d’abord côte à côte<br />

pendant huit kilomètres.<br />

oasis de verdure<br />

quantités d’eau apportées par les pluies torrentielles,<br />

oxygènent l’air, réduisent la consommation d’énergie (en<br />

abritant les immeubles du soleil), et absorbent le dioxyde de<br />

carbone et autres gaz. <strong>Les</strong> forêts urbaines font baisser la<br />

température de la ville, qui est normalement plus élevée que<br />

dans la campagne environnante. Et bien entendu, elles jouent<br />

aussi le rôle d’aires de loisirs et d’habitat pour la faune.<br />

de café et de canne à sucre qu’on commença à craindre pour les<br />

réserves en eau de la ville. En douze ans, Manuel Gomes Archer,<br />

l’administrateur de la forêt, parvint à replanter 72 000 arbres<br />

originaires de la forêt ombrophile atlantique, réussissant pratiquement<br />

seul cette réhabilitation.<br />

Nairobi, Kenya<br />

Comme la forêt ne couvre plus que 2 % du Kenya, les 600 hectares<br />

de la réserve forestière de Ngong à Nairobi sont une ressource<br />

particulièrement précieuse. Puits de carbone, stabilisateur de la<br />

nappe phréatique, la forêt abrite aussi 190 espèces d’oiseaux et<br />

plus de 300 espèces de plantes. Ses nombreux insectes et<br />

araignées sont en train d’être répertoriés.<br />

Louisville, Kentucky<br />

Située à 25 kilomètres du centre ville et couvrant 2400 hectares, la<br />

Jefferson Memorial Forest est la plus vaste forêt urbaine des Etats-<br />

Unis. Elle fut plantée en 1946 en hommage aux soldats du<br />

Kentucky morts durant la Seconde Guerre mondiale. Ses chênes,<br />

fougères et fleurs sauvages font la joie des randonneurs, campeurs<br />

et amateurs de pique-niques, qui peuvent également observer de<br />

nombreux oiseaux dont des grands hérons et des hiboux striés.<br />

En juillet dernier, leur point de rencontre a été le théâtre<br />

d’un événement tout aussi remarquable. Le patriarche<br />

œcuménique de l’Eglise orthodoxe, Bartholomée 1 er , deux<br />

cardinaux de l’Eglise catholique et d’autres chefs religieux<br />

se sont joints à un shaman indigène pour bénir les eaux<br />

des fleuves.<br />

En direct à la télévision, tout le Brésil a pu voir le<br />

shaman – coiffé de plumes de perroquet et de héron, et<br />

portant une lance et une crécelle sacrée – accomplir un rite<br />

ancestral de purification, suivi de la bénédiction des chefs<br />

religieux chrétiens. Il s’agissait d’un acte extraordinaire de<br />

réconciliation et d’engagement commun car c’est à l’arrivée<br />

du christianisme qu’avaient commencé les persécutions et<br />

l’extermination massive des peuples de l’Amazone.<br />

Et ce jour-là, des chrétiens de haut rang venaient<br />

s’inspirer du mode de vie de ces mêmes peuples, dans le<br />

cadre de la sixième rencontre d’une série de symposiums<br />

environnementaux flottants organisée par le Patriarche –<br />

surnommé « le Patriarche vert ».<br />

Un des collègues les plus<br />

éminents du Patriarche, le<br />

métropolite Ioannis de Pergamon,<br />

a résumé la rencontre<br />

en ces termes : « Nous sommes<br />

ici pour nous demander<br />

pourquoi les populations indigènes<br />

ont mieux réussi que<br />

nous à protéger l’environnement.<br />

Ecoutons avec respect<br />

ces cultures qui sont parvenues<br />

à survivre malgré les conquêtes<br />

de nos ancêtres qui allèrent<br />

pratiquement jusqu’à l’extermination<br />

totale. »<br />

Nikos Manginas<br />

nous pouvons les y aider<br />

<strong>Les</strong> forêts 19


Choosak Khemtai/PNUE/Topham<br />

Comment faire la difference ?<br />

Si tu veux sauver les forêts du monde, commence par<br />

t’intéresser à ce qui se passe dans ton centre commercial.<br />

Dans les régions forestières, il n’est pas toujours facile de<br />

protéger les arbres, surtout dans les pays en développement où les<br />

fonds sont rares. Mais si les consommateurs exigent que le bois<br />

qu’ils achètent – qu’il s’agisse de crayons, de meubles, de bois de<br />

construction ou de charbon de bois pour le barbecue – provienne<br />

de forêts gérées de manière durable et non de sites déboisés sans<br />

aucune pitié, la demande de plus en plus forte permettra de<br />

conserver les forêts et non de les détruire.<br />

Mais comment faire la différence ? Après tout, les morceaux<br />

de bois d’une même essence se ressemblent tous. C’est là<br />

qu’intervient le Conseil international de gestion forestière (FSC).<br />

C’est lui qui fixe les normes en tenant compte de la protection de<br />

l’environnement et qui octroie les certificats qui permettent au<br />

consommateur de s’y retrouver.<br />

Le FSC est né en 1993 à Toronto, d’une rencontre entre<br />

130 personnes – exploitants forestiers, habitants des forêts,<br />

organisations environnementales comme Greenpeace et le WWF,<br />

et grands détaillants comme la chaîne suédoise IKEA et le géant<br />

britannique du bricolage B&Q. Le FSC s’est donné pour mission<br />

de protéger les arbres et les populations vivant à proximité des<br />

forêts. Ses principes et critères sont conçus pour « promouvoir<br />

une gestion écologiquement saine, socialement bénéfique et<br />

économiquement viable des forêts du monde ».<br />

Le FSC protège les forêts anciennes naturelles et accorde<br />

uniquement son certificat au bois issu d’une exploitation légale.<br />

Et comme il s’est rendu compte que la protection des forêts<br />

implique aussi de protéger les populations locales, il a adopté des<br />

normes qui respectent les droits de propriété, les travailleurs et les<br />

peuples indigènes.<br />

Ce n’est pas lui qui accorde directement le label FSC, mais il<br />

incite d’autres organisations à le faire en effectuant des<br />

inspections et en accordant son certificat. Cela lui permet de ne<br />

pas avoir de contacts directs avec les producteurs – qui peuvent<br />

être privés de leur agrément s’ils ne respectent plus les normes<br />

en vigueur. Il assure aussi la traçabilité des produits : on peut<br />

remonter jusqu’aux premières étapes de production de tout article<br />

portant le label FSC.<br />

Dix ans après la création du FSC, près de 500 000 kilomètres<br />

carrés de forêts (une superficie supérieure à celle de l’Espagne)<br />

dans 62 pays bénéficiaient déjà de la certification. <strong>Les</strong> détaillants<br />

sont de plus en plus nombreux à vendre du bois et des produits<br />

en bois portant le label FSC. Des détaillants aussi connus que<br />

Asda (une division britannique du géant américain Wal-mart),<br />

Castorama en Italie, Migros en Suisse et Home Depot aux Etats-<br />

Unis constituent des groupements d’acheteurs qui s’engagent<br />

à stocker uniquement du bois et des produits à base de bois<br />

ayant fait l’objet d’une certification indépendante. Ils incitent<br />

ainsi leurs fournisseurs à obtenir le label FSC. Quant au<br />

consommateur, il est de plus en plus soucieux de faire le bon<br />

choix : en Europe, par exemple, la production de papier portant le<br />

label FSC a quadruplé en 2003.<br />

Il faut noter cependant que la majeure partie des produits<br />

certifiés provenaient de forêts tempérées d’Europe et d’Amérique<br />

du Nord et non des régions tropicales qui sont souvent beaucoup<br />

plus vulnérables. Seuls quelque milliers de kilomètres carrés<br />

de forêts sur les 7 millions que compte l’Amazonie ont reçu<br />

la certification FSC. Et il n’y a que deux forêts accréditées<br />

en Afrique tropicale, dont une, au Congo, vient juste de l’être.<br />

Aujourd’hui, le FSC concentre donc de plus en plus ses efforts sur<br />

cette partie du monde.<br />

20 TUNZA Vol 4 No 3


Equilibrium<br />

Fund<br />

Des noix magiques<br />

Il y a 2000 ans, la grande civilisation maya d’Amérique centrale se<br />

nourrissait de noix extrêmement nutritives poussant sur un arbre<br />

de la forêt tropicale. Cette noix étant l’aliment de base des Mayas,<br />

ils plantaient des millions de noyers dans des forêts cultivées, en<br />

compagnie d’autres essences portant des fruits comme l’avocat et<br />

le cacaoyer.<br />

<strong>Les</strong> noyers des Mayas sont les plus grands arbres de la forêt et<br />

ils dominent souvent les ruines de cette ancienne civilisation. Après<br />

l’effondrement de la société maya, il semble que leur noix favorite ait<br />

été plus ou moins ignorée : les noix jonchaient le sol de la forêt mais<br />

les villageois ne s’y intéressaient qu’en période de famine. D’ailleurs,<br />

ils avaient tendance à couper les noyers pour créer des champs de<br />

maïs, beaucoup moins productifs.<br />

Aujourd’hui, les descendants modernes des Mayas ont réhabilité<br />

la noix de leurs ancêtres : elle les nourrit et leur assure une relative<br />

prospérité, tout en préservant la forêt.<br />

Tout a commencé au Guatemala, un jour où la biologiste<br />

américaine Erika Vohman récoltait des noix avec un habitant de la<br />

région pour nourrir les perroquets et les singes d’un refuge pour<br />

animaux. L’homme lui raconta que ses ancêtres avaient coutume de<br />

manger ces fruits et il lui cuisina une délicieuse soupe de noix. De<br />

retour dans son pays, Erika Vohman se mit à étudier la noix des<br />

Mayas, et elle s’aperçut qu’elle contenait plus de protéines et autres<br />

nutriments que le maïs, le blé et le riz. Elle décida de retourner au<br />

Guatemala pour inciter les peuples de la forêt à la consommer.<br />

Il y a cinq ans, elle se rendit d’abord à La Benedición, un village<br />

où vivaient de nombreux réfugiés qui n’avaient ni nourriture ni<br />

champs à cultiver. Elle leur parla des bienfaits de la noix des Mayas,<br />

et ils s’en nourrirent pendant des mois. Aujourd’hui, toutes les<br />

familles du village continuent à consommer cette noix. Ils ont même<br />

planté de nouveaux noyers et montré aux habitants d’autres villages<br />

– principalement aux femmes – à utiliser au mieux cette ressource.<br />

La plupart des noyers restants se trouvent dans les zones les plus<br />

inaccessibles où les populations ont beaucoup de mal à se nourrir.<br />

<strong>Les</strong> arbres sont si productifs qu’en deux semaines à peine, une<br />

famille peut récolter suffisamment de noix pour survivre pendant<br />

toute une année. « <strong>Les</strong> femmes sont sidérées d’apprendre qu’elles<br />

peuvent manger un aliment qu’elles se contentaient jusque-là de<br />

piétiner », explique Erika Vohman. « Elles font sécher les noix pour<br />

les manger entières et en font également de la farine. Dans certaines<br />

régions, elles confectionnent et vendent des produits à base de noix<br />

des Mayas, comme des biscuits, par exemple. »<br />

Selon elle, les habitants de plus de 400 villages du Guatemala,<br />

d’El Salvador, du Honduras, du Nicaragua et du Mexique ont déjà<br />

redécouvert la noix des Mayas, mais elle admet qu’elle a « bien du<br />

mal à suivre », car les villageois se transmettent spontanément<br />

l’information. Nombreux sont ceux qui ont créé de petites entreprises<br />

pour commercialiser la noix : l’argent gagné leur permet d’atténuer<br />

leur pauvreté.<br />

<strong>Les</strong> noyers n’ont besoin ni de pesticides ni d’engrais, et le bétail<br />

– chèvres et bovins – peut également s’en nourrir. Et dès que les<br />

populations comprennent l’importance de l’arbre, elles ne le coupent<br />

plus. Le déboisement s’arrête et le sol et les ressources en eau se<br />

trouvent ainsi protégés.<br />

Grâce au prix St Andrews pour l’environnement 2006 qui vient de<br />

lui être décerné, Erika Vohman va pouvoir poursuivre son travail. Elle<br />

confie : « Il semble que nous ayons redécouvert le noyer des<br />

Mayas juste à temps ! ».<br />

De vrais sauvages !<br />

La fourmi arboricole<br />

Cette fourmi – découverte en 2004 dans<br />

les forêts amazoniennes inondées de la<br />

région d’Iquitos – vit dans la canopée.<br />

Véritable acrobate, elle est capable<br />

d’éviter les chutes en exécutant un salto<br />

de 180° et en retombant en toute sécurité<br />

sur le tronc de l’arbre. Elle peut mesurer<br />

jusqu’à un centimètre de long, et on<br />

pense qu’elle se sert de signaux visuels<br />

et de mouvements de ses pattes pour<br />

exécuter ses spectaculaires cascades.<br />

Le ginkgo<br />

Cet arbre chinois, à feuilles caduques<br />

en forme d’éventail, est un véritable<br />

fossile vivant. Ces ancêtres étaient<br />

nombreux dans les zones tempérées il y<br />

a 270 millions d’années. Aujourd’hui, on<br />

le cultive dans toute l’Asie pour ses<br />

graines aux propriétés alimentaires et<br />

médicinales. Majestueux et résistant –<br />

quatre gingkos ont survécu à la bombe<br />

d’Hiroshima – il est également très<br />

apprécié dans les villes.<br />

Le kangourou arboricole<br />

Plus de 50 espèces de kangourous arboricoles<br />

vivent dans les forêts ombrophiles<br />

de Nouvelle-Guinée et du Queensland en<br />

Australie. Comme leurs cousins terrestres,<br />

ils possèdent de puissants membres<br />

postérieurs. Par contre, leur corps est<br />

court et rond, et leurs pattes à plante<br />

caoutchouteuse sont dotées de griffes<br />

plus longues. <strong>Les</strong> pattes postérieures, qui<br />

bougent indépendamment, leur permettent<br />

de grimper, de sauter d’arbre en arbre<br />

et d’atterrir au sol en toute sécurité.<br />

Le dauphin de<br />

l’Amazone<br />

Merveille de l’Amazone, on l’aperçoit qui<br />

nage entre les arbres des forêts inondées<br />

durant la saison humide, se nourrissant de<br />

petits poissons et de crabes. Certaines<br />

légendes prétendent que ce boto gris rose<br />

personnifie l’esprit de ceux qui se sont<br />

noyés et les protège des chasseurs. Ce<br />

dauphin risque notamment l’empoisonnement<br />

au mercure provenant de l’exploitation<br />

des mines d’or.<br />

Steve Yanoviak BIOS MG de Saint Venant/Still Pictures<br />

Martin Harvey/Still Pictures Norbert Wu/Still Pictures<br />

<strong>Les</strong> forêts 21


Adrian Arbib/Still Pictures Martin Wyness/Still Pictures<br />

Hartmut Jungius/WWF-Canon<br />

Michael Chan/www.flickr.com/photos/ahsup<br />

7<br />

merveilles de la forêt<br />

Le parc national de Manú, Pérou<br />

La forêt du Styx, Tasmanie<br />

La forêt de Bialowieza, Belarus/Pologne<br />

Fondé en 1961 avec le soutien du WWF, Le Parc Manú est probablement<br />

la zone protégée la plus riche de la Terre : un seul hectare<br />

de sa forêt virginale contient plus de 200 essences d’arbres. Comme<br />

l’altitude du parc s’échelonne de 365 mètres à 4 000 mètres au<br />

dessus du niveau de la mer, on y dénombre au moins 14 types de<br />

forêts différentes : forêt de nuages, forêt ombrophile montagnarde et<br />

forêt ombrophile tropicale de plaine, notamment. La majeure partie<br />

de la faune du parc n’a pas encore été découverte, mais on a déjà<br />

recensé 800 espèces d’oiseaux et 200 de mammifères, dont la très<br />

rare loutre géante et le tatou géant. Autrefois habitée par les Incas,<br />

elle abrite aujourd’hui quatre peuples indigènes connus. Fort difficile<br />

d’accès, elle a jusqu’ici été protégée de l’invasion des touristes.<br />

Dans la mythologie, le fleuve Styx entourait neuf fois les enfers. <strong>Les</strong><br />

écologistes craignent que son homonyme de Tasmanie – un des treize<br />

fleuves du monde portant le nom qui signifie « haine » en grec – risque<br />

un jour de traverser des territoires tout aussi désolés. En effet, la<br />

magnifique forêt qui entoure le fleuve tasmanien est progressivement<br />

coupée pour être transformée en copeaux de bois et en papier.<br />

Pourtant, elle abrite le plus grand feuillu du monde, l’Eucalyptus<br />

regnans, qui peut vivre plus de 400 ans et dépasser 90 mètres de<br />

hauteur – seul le séquoia géant de Californie (un conifère) le supplante.<br />

Il ne reste plus que 13 % des anciens bouquets d’eucalyptus, et<br />

chaque année, jusqu’à 600 hectares de la forêt du Styx sont déboisés.<br />

Ancien terrain de chasse des rois de Pologne, l’ancienne forêt de<br />

Bialowieza – à cheval sur la frontière Belarus/Pologne – est la dernière<br />

étendue de forêt primitive tempérée des plaines européennes. Elle<br />

s’étend sur 10 500 hectares, dont la moitié est constituée en réserve. Là,<br />

la faune est une des plus riches du continent. On y trouve notamment<br />

plusieurs centaines de wisents ou bisons d’Europe : ils avaient disparu<br />

en Pologne en 1919 mais ont été réintroduits dix ans plus tard après<br />

reproduction en captivité. En tout, 11 500 espèces de faune ont élu<br />

domicile dans cette forêt – dont 250 d’oiseaux et 54 de mammifères.<br />

Quant à la flore, elle compte plus de 3 000 espèces de champignons et<br />

5 000 espèces de plantes, dont 200 de mousses et 277 de lichens.<br />

Beaucoup d’entre eux poussent uniquement dans des forêts primitives.<br />

22 TUNZA Vol 4 No 3


La forêt impénétrable de Bwindi, Ouganda<br />

Christian Slanel/PNUE/Topham Michael Chan/www.flickr.com/photos/ahsup Doris Wiese/PNUE/Topham J. E. Cozari/PNUE/Topham<br />

Si l’on qualifie « d’impénétrable » la grande forêt primitive du sudouest<br />

de l’Ouganda, ce n’est pas pour rien ! L’enchevêtrement de<br />

plantes rampantes, d’arbustes et d’herbes du sous-bois la rend très<br />

difficile d’accès – à moins d’être un gorille des montagnes, car c’est là<br />

que vit la moitié de la population de cette espèce menacée. L’altitude<br />

de la forêt s’échelonne de 1200 à 2 600 mètres à l’extrémité de la<br />

vallée du Rift occidental. Abritant à la fois des plantes de plaine et des<br />

plantes de montagne, la région possède une des diversités biologiques<br />

les plus variées de la Terre. On y trouve au moins 120 espèces<br />

de mammifères, 350 d’oiseaux, 200 de papillons et plus de 100 de<br />

fougères. Parmi les 200 essences d’arbres présentes, 12 ne poussent<br />

nulle part ailleurs.<br />

La forêt vierge de Komi, Fédération russe<br />

La vallée du Jiuzhaigou, Chine<br />

La forêt de séquoias côtiers, Californie<br />

Froide et inhospitalière, cette forêt de conifères s’étend sur près<br />

de 500 kilomètres de toundra, sur le versant européen des monts<br />

<strong>Our</strong>al qui séparent l’Europe de l’Asie. Immense et vierge, Komi est la<br />

plus vaste étendue de forêt primitive restant en Europe. Avec ses<br />

33 000 kilomètres carrés, elle est plus étendue que la Belgique.<br />

Premier site russe à être inscrit au Patrimoine mondial, en 1995, elle<br />

est désormais protégée d’un déboisement à grande échelle. Une<br />

partie de la forêt est constituée en réserve fédérale de biosphère, mais<br />

elle reste menacée par les mines d’or et le déboisement illégal. Ses<br />

grands mammifères, comme l’ours brun et l’élan, constituent des<br />

proies de choix pour les braconniers.<br />

<strong>Les</strong> hauts sommets et les vallées encaissées de cette réserve sont<br />

émaillés de lacs aux eaux bleu-vert et de cascades spectaculaires. <strong>Les</strong><br />

72 000 hectares de forêts de nuages, forêts mixtes de montagne et<br />

végétation subalpine, abritent notamment deux célèbres espèces parmi<br />

les plus menacées de Chine : le singe doré à nez camus et le panda<br />

géant. Mais la réserve est victime de sa beauté. Chaque jour, quelque<br />

7 000 touristes n’hésitent pas à faire dix heures d’autocar pour venir<br />

l’admirer. Et l’amélioration des conditions de transport et d’hébergement<br />

risquent fort de multiplier le nombre de visiteurs. Aujourd’hui, la vallée<br />

est doublement menacée : d’une part par la pollution et l’érosion liées<br />

à un développement médiocre et, d’autre part, par le déboisement de la<br />

forêt au profit de l’agriculture et du bois de chauffage.<br />

<strong>Les</strong> dinosaures évoluaient autrefois parmi les immenses séquoias<br />

côtiers (Sequoia semperviren), fossiles vivants vieux de 160 millions<br />

d’années, qui restent les plus grands arbres du monde. Une graine pas<br />

plus grande que celle d’un plant de tomate peut produire un arbre de<br />

122 mètres de haut (la taille d’un gratte-ciel de 35 étages) dont le tronc<br />

atteint les 7 mètres de diamètre. Ils sont capables de vivre plus de<br />

2000 ans dans le climat frais et humide du nord de la Californie et du<br />

sud de l’Oregon, notamment parce qu’ils se clonent à partir de leur<br />

souche ou de leurs racines. Ils résistent au feu, aux insectes et aux<br />

maladies, ce qui rend leur bois particulièrement intéressant pour la<br />

construction. Ces qualités ont contribué à la disparition progressive du<br />

séquoia : la forêt d’origine a été déboisée jusqu’à 95 %.<br />

<strong>Les</strong> forêts 23


ABRI<br />

EAU<br />

VETEMENTS<br />

OXYGENE<br />

ALIMENTS<br />

FOI<br />

MEDICAMENTS<br />

JEUX<br />

Kitprempool Natta/PNUE/Topham<br />

...pas simplement des bûches

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