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Quels enjeux genre et développement dans le Pérou d'aujourd'hui?

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Investir <strong>dans</strong> l’égalité des droits <strong>et</strong> des chances des<br />

femmes <strong>et</strong> des hommes, c’est investir <strong>dans</strong> <strong>le</strong><br />

<strong>développement</strong> – 15 ans de la CFD<br />

Rapport de l’atelier du 17 décembre 2008 :<br />

<strong>Quels</strong> <strong>enjeux</strong> <strong>genre</strong> <strong>et</strong> <strong>développement</strong><br />

<strong>dans</strong> <strong>le</strong> <strong>Pérou</strong> d’aujourd’hui ?<br />

Intervenante:<br />

Jeanine Anderson, Professeure à l’Université Catholique de Lima, <strong>Pérou</strong><br />

Modératrice :<br />

Isabel Yépez del Castillo<br />

Rapportrice :<br />

Sylvie Grol<strong>et</strong><br />

L’atelier a débuté par une présentation de Mme Jeanine Anderson sur son<br />

parcours <strong>et</strong> son travail au <strong>Pérou</strong>. Actuel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> <strong>Pérou</strong> tend vers une plus<br />

grande égalité entre femmes <strong>et</strong> hommes, <strong>le</strong>s personnes sont plus sensibilisées <strong>et</strong><br />

conscientisées qu’auparavant, <strong>le</strong> <strong>genre</strong> est à l’agenda de beaucoup<br />

d’organisations. C<strong>et</strong>te situation est amorcée depuis une dizaine d’années, des<br />

préoccupations liées à l’égalité hommes/femmes sont apparues <strong>et</strong> l’intérêt pour<br />

ces questions n’a cessé de croître. Beaucoup de p<strong>et</strong>its proj<strong>et</strong>s locaux tentent<br />

d’améliorer l’égalité <strong>dans</strong> des régions reculées du <strong>Pérou</strong>.<br />

Situation actuel<strong>le</strong> au <strong>Pérou</strong> : c’est un pays moyennement développé, peu<br />

d’ONG sont présentes <strong>et</strong> ce, depuis <strong>le</strong>s années 90, lorsque la situation politique<br />

ne perm<strong>et</strong>tait pas d’y travail<strong>le</strong>r. Il existe des problèmes de classes, <strong>le</strong>s<br />

préoccupations par rapport aux inégalités <strong>et</strong>hniques (personnes d’Amazonie)<br />

sont un suj<strong>et</strong> important <strong>dans</strong> la coopération. Mais l’agenda de tous <strong>le</strong>s<br />

organismes étrangers est très éloigné de l’agenda interne du <strong>Pérou</strong>. Tout ce qui a<br />

trait à l’égalité entre femmes <strong>et</strong> hommes est passé au second plan, <strong>le</strong>s étudiants<br />

pensent qu’il faut à présent passer à un autre défi : la réduction des inégalités<br />

<strong>et</strong>hniques.<br />

1


En ce qui concerne la coopération au <strong>développement</strong>, <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s années 80,<br />

nous avons fait pas mal d’erreurs <strong>dans</strong> nos tentatives de lutte contre la pauvr<strong>et</strong>é<br />

<strong>et</strong> lorsque nous tentions de par<strong>le</strong>r avec ces femmes si différentes à propos de<br />

santé reproductive. Mais nous étions présent-es <strong>et</strong> tentions de dialoguer,<br />

exprimions notre volonté de coopérer.<br />

<strong>Quels</strong> sont <strong>le</strong>s impacts d’un p<strong>et</strong>it proj<strong>et</strong> de <strong>développement</strong> 20 ans plus tard ?<br />

Nous devrions faire plus d’études, de recherches là-dessus. Lorsqu’une<br />

organisation disparaît, <strong>le</strong>s objectifs du proj<strong>et</strong> se diluent p<strong>et</strong>it à p<strong>et</strong>it mais <strong>le</strong>s<br />

femmes ayant participé à ce proj<strong>et</strong> s’approprient certaines ressources ; certains<br />

concepteurs de proj<strong>et</strong>s ne comprennent pas quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s ressources<br />

importantes pour ces femmes. Des rencontres ont lieu <strong>et</strong> <strong>le</strong> message<br />

d’empowerment offre un nouveau modè<strong>le</strong> considéré comme uti<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s deux<br />

parties. Nous devons voir quels sont <strong>le</strong>s impacts réels, analyser <strong>le</strong>s impacts que<br />

nous n’avions pas prévus <strong>et</strong> constater que <strong>le</strong>s gens s’approprient ces processus<br />

<strong>et</strong> avancent. Les ONG spécialisées <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s activités de promotion des<br />

femmes se centrent de plus en plus sur la promotion des droits des femmes ce<br />

qui ouvre un champ très large (droit au travail, à la santé,…) mais laisse<br />

beaucoup d’autres aspects de côté éga<strong>le</strong>ment.<br />

Un gouvernement, des institutions publiques <strong>et</strong> des programmes publics ont<br />

été mis en place au <strong>Pérou</strong> mais <strong>le</strong>s institutions politiques ne sont pas vraiment<br />

fortes. Il y a des changements constants, tous <strong>le</strong>s 3 ans, il faut chaque fois<br />

recommencer. Cela a été terrib<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s femmes, <strong>le</strong> Ministère de la femme a<br />

mis en place beaucoup de programmes pour <strong>le</strong>ur venir en aide mais ces<br />

programmes ne concernent pas l’empowerment des femmes, ils fournissent des<br />

aliments <strong>et</strong> font ce que <strong>le</strong> gouvernement <strong>le</strong>ur dit de faire. Le programme qui a<br />

probab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> plus d’impact est celui qui vise la réduction des vio<strong>le</strong>nces<br />

domestiques <strong>et</strong> familia<strong>le</strong>s car <strong>le</strong> taux de c<strong>et</strong>te vio<strong>le</strong>nce de <strong>genre</strong> est très é<strong>le</strong>vé au<br />

<strong>Pérou</strong>. Des études montrent que certaines zones du <strong>Pérou</strong> ont un taux de<br />

vio<strong>le</strong>nce extrême (exemp<strong>le</strong> : vio<strong>le</strong>nce envers <strong>le</strong>s femmes enceintes), <strong>le</strong> plus<br />

é<strong>le</strong>vé en comparaison aux taux de vio<strong>le</strong>nces au sein d’une dizaine d’autres pays.<br />

La croissance économique du <strong>Pérou</strong> était importante dernièrement mais cela<br />

n’a pas eu de répercussion sur <strong>le</strong>s personnes <strong>le</strong>s plus pauvres. De nombreux<br />

investissements <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s mines, la construction,… viennent de l’étranger mais<br />

suite à la crise, ces investissements risquent de se réduire. Que vont faire <strong>le</strong><br />

gouvernement, la société civi<strong>le</strong> par rapport aux secteurs <strong>le</strong>s plus touchés ? Le<br />

gouvernement va probab<strong>le</strong>ment augmenter son programme d’assistance<br />

alimentaire aux famil<strong>le</strong>s en zone rura<strong>le</strong>. Les programmes concernent simp<strong>le</strong>ment<br />

l’assistance aux personnes <strong>et</strong> la promotion de l’égalité entre femmes <strong>et</strong> hommes<br />

sans utiliser <strong>le</strong>s femmes comme vecteurs pour lancer d’autres secteurs<br />

d’activités. Les femmes continuent à s’occuper des plus pauvres <strong>et</strong> des plus<br />

vulnérab<strong>le</strong>s, beaucoup de progrès restent à faire.<br />

Plusieurs participant-es à l’atelier ont fait part de <strong>le</strong>urs expériences <strong>et</strong> ont posé<br />

des questions à Mme Jeanine Anderson, voici <strong>le</strong>s points abordés lors de ces<br />

échanges :<br />

• Le <strong>Pérou</strong> a réorganisé son système politique <strong>et</strong> d’administration publique,<br />

notamment <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s domaines de l’éducation <strong>et</strong> de la santé. Des<br />

collaborations entre la coopération belge <strong>et</strong> <strong>le</strong> domaine de la santé au<br />

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<strong>Pérou</strong> existent <strong>et</strong> apportent de très bonnes expériences. Dans <strong>le</strong> domaine<br />

de l’éducation, des activités de coopération intéressantes sont présentes<br />

au niveau de la formation des cadres, des entrepreneurs. Il existe un<br />

forum éducation <strong>et</strong> un forum santé, la coopération belge pourrait soutenir<br />

ce <strong>genre</strong> de mécanisme qui a la capacité de réunir différents acteurs.<br />

• Travail des ONG par rapport au <strong>genre</strong> : la professionnalisation par<br />

rapport aux questions d’égalité entre hommes <strong>et</strong> femmes augmente mais<br />

ces questions sont présentées comme des problèmes techniques, il n’y a<br />

pas spécia<strong>le</strong>ment de mobilisation de la population, d’éducation par rapport<br />

à ça. Les problèmes d’égalité sont réduits à des problèmes de droits, cela<br />

entraine une perte au niveau culturel, trouver de nouveaux modè<strong>le</strong>s est<br />

important mais il faut surtout mobiliser <strong>le</strong>s gens. Il existe de nombreux<br />

proj<strong>et</strong>s destinés aux jeunes par rapport au problème des inégalités<br />

<strong>et</strong>hniques qui entrainent une mobilisation importante mais il n’en va pas<br />

de même de la question de <strong>genre</strong>. Pourtant il existe des ONG féministes<br />

au <strong>Pérou</strong> qui font un travail remarquab<strong>le</strong>.<br />

• Les chiffres du PNUD montrent que l’égalité de <strong>genre</strong> au <strong>Pérou</strong> est<br />

très bonne comparée aux autres pays d’Amérique latine, <strong>le</strong>s femmes sont<br />

bien représentées au gouvernement, <strong>le</strong> taux de scolarisation des fil<strong>le</strong>s est<br />

é<strong>le</strong>vé. Beaucoup d’indicateurs sont analysés par <strong>le</strong> PNUD <strong>et</strong> il est vrai, si<br />

on m<strong>et</strong> <strong>le</strong> problème de la vio<strong>le</strong>nce entre parenthèses, que la situation au<br />

<strong>Pérou</strong> est bonne. Mais des p<strong>et</strong>its soucis quotidiens rencontrés par <strong>le</strong>s<br />

femmes au niveau de l’accès aux services publics, l’accès à la<br />

contraception,…vont s’accumu<strong>le</strong>r <strong>et</strong> devenir des problèmes énormes. Les<br />

p<strong>et</strong>ites inégalités quotidiennes sont considérées comme n’étant rien,<br />

comment <strong>le</strong>s rendre visib<strong>le</strong>s ? Par exemp<strong>le</strong>, la qualité de l’enseignement<br />

pour <strong>le</strong>s femmes est différente, à l’université la division du travail se<br />

reproduit (presque pas de femmes ingénieures). Comme beaucoup<br />

d’autres statistiques, <strong>le</strong>s chiffres du PNUD perm<strong>et</strong>tent de classer <strong>le</strong>s pays<br />

mais <strong>le</strong> problème des moyennes <strong>et</strong> des extrêmes est toujours présent.<br />

D’autres études montrent la persistance d’inégalités de salaires par<br />

exemp<strong>le</strong> : <strong>le</strong>s hommes ont des salaires plus é<strong>le</strong>vés que <strong>le</strong>s femmes.<br />

• Selon <strong>le</strong>s statistiques, la pauvr<strong>et</strong>é rura<strong>le</strong> est plus importante que la<br />

pauvr<strong>et</strong>é urbaine, mais c<strong>et</strong>te dernière est très grave éga<strong>le</strong>ment, beaucoup<br />

de personnes pauvres venant des campagnes migrent vers <strong>le</strong>s vil<strong>le</strong>s ou<br />

vers d’autres pays. Les priorités économiques présentées par <strong>le</strong> <strong>Pérou</strong><br />

sont, entres autres, tout ce qui a trait aux micro-entreprises <strong>et</strong> la<br />

responsabilité socia<strong>le</strong> des entreprises. Le gouvernement seul ne peut<br />

éradiquer la pauvr<strong>et</strong>é, toutes <strong>le</strong>s dernières tentatives ont été un échec car<br />

il faut tenir compte des impôts, de la politique fisca<strong>le</strong>,… au niveau de<br />

l’état. La solution pourrait être trouvée via <strong>le</strong>s entreprises, il faut pouvoir<br />

soutenir <strong>le</strong>s entreprises <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s secteurs en p<strong>le</strong>in essor pour qu’el<strong>le</strong>s<br />

m<strong>et</strong>tent en place des proj<strong>et</strong>s, des actions de solidarité viab<strong>le</strong>s.<br />

• Un héritage des proj<strong>et</strong>s des années 80 subsiste : il existe toujours des<br />

associations de femmes <strong>et</strong> des syndicats de femmes (pas mixtes car idée<br />

persistante que <strong>le</strong>s hommes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s femmes ne peuvent discuter autour de<br />

la même tab<strong>le</strong>) très présents <strong>dans</strong> certains secteurs. Beaucoup de proj<strong>et</strong>s<br />

de c<strong>et</strong>te époque ont séparé <strong>le</strong>s deux sexes en se basant sur la littérature<br />

anthropologique relative à la division sexuel<strong>le</strong> du travail, c’était une erreur<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s secteurs sont toujours divisés entre <strong>le</strong>s femmes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s hommes.<br />

• De nombreuses études montrent <strong>le</strong> peu d’opportunités existantes pour <strong>le</strong>s<br />

femmes <strong>dans</strong> <strong>le</strong> monde du travail au <strong>Pérou</strong>, il y a plus de possibilités à<br />

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l’étranger, ce qui peut en partie expliquer (avec la présence importante de<br />

vio<strong>le</strong>nce de <strong>genre</strong>) <strong>le</strong> taux de migration plus é<strong>le</strong>vé chez <strong>le</strong>s femmes<br />

qui veu<strong>le</strong>nt échapper aux inégalités.<br />

• Le taux é<strong>le</strong>vé de vio<strong>le</strong>nce devrait être mieux analysé, qu’est-ce qu’il se<br />

cache derrière ces chiffres, d’où viennent-ils, comment peut-on <strong>le</strong>s<br />

comprendre ? Par exemp<strong>le</strong>, une des dimensions de ce problème qui n’est<br />

pas toujours prise en compte est l’alcoolisme très présent au <strong>Pérou</strong>.<br />

• Les proj<strong>et</strong>s de coopération au <strong>développement</strong> présents à long terme<br />

se basent surtout sur <strong>le</strong>s témoignages de femmes <strong>et</strong> de quelques<br />

hommes, il faut prendre <strong>le</strong> temps d’écouter ces personnes qui ont pensé<br />

qu’ils pouvaient changer, acquérir de nouvel<strong>le</strong>s compétences <strong>et</strong> faire autre<br />

chose. Des proj<strong>et</strong>s avec des objectifs économiques vont avoir des impacts<br />

sociaux <strong>et</strong> vice-versa, ils présentent des résultats que l’on n’avait pas<br />

prévus. Les coopérants viennent avec une offre, <strong>le</strong>ur compétence, la<br />

population péruvienne se dit que ce n’est pas exactement ce dont el<strong>le</strong> a<br />

besoin mais <strong>le</strong>s péruvien-nes vont voir comment utiliser tout cela en <strong>le</strong><br />

modifiant pour que ça puisse <strong>le</strong>ur servir.<br />

• Travail des femmes en milieu rural : <strong>le</strong> marché de l’artisanat est<br />

important, <strong>le</strong>s productrices doivent rester attentives aux nouvel<strong>le</strong>s<br />

demandes <strong>et</strong> el<strong>le</strong>s utilisent très bien <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s techniques, <strong>le</strong>s<br />

nouvel<strong>le</strong>s matières,…<br />

• Les jeunes vont au-delà des barrières stéréotypées des activités<br />

typiquement masculines/féminines, par exemp<strong>le</strong>, beaucoup d’hommes<br />

sont formés pour promouvoir la santé (comprenant <strong>le</strong> problème de<br />

mortalité maternel<strong>le</strong>), rô<strong>le</strong> traditionnel<strong>le</strong>ment féminin.<br />

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