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Revue-Ro-4

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invisible pour tout autre que la petite orpheline. Un jour ses ombres l’ont<br />

quittée et, sa vie durant, dit-elle, elle a gardé les stigmates de sa chute sur la<br />

terre (p. 24). La préceptrice à qui Agnès s’était attachée lui préfère sa sœur,<br />

démissionne et l’abandonne. Seul le grand-père, Bernard Pierrefeu, la protège<br />

des « forces de destructions qui rôdaient à l’entour de la maison », des<br />

« démons qui cherchent à dévorer ». Mais il meurt lui aussi (p. 33). Pierre<br />

Crivellien ensuite, marié, deux enfants, à qui la rumeur prête bien des<br />

aventures féminines. Il dit aimer Agnès Pierrefeu. La jeune fille croit à ses<br />

serments jusqu’au jour où elle surprend Pierre en compagnie de Christine,<br />

sœur aînée d’Agnès. Il faut dire que Christine, cruelle, y a mis du sien, elle a<br />

voulu être vue dans les bras de Pierre et que Jeanne Dumoitel, amie de<br />

Christine, a guidé les pas d’Agnès vers le lieu de rendez-vous. Et plus tard,<br />

quand Christine tue Pierre, Agnès 122 paiera à Jeanne le prix de son silence<br />

(« un prix bien haut », « une liasse de billets », p. 54). La belle Christine<br />

Pierrefeu – ses cheveux, « leur couleur de soleil », ses yeux « d’un bleu<br />

introuvable dans nos pays », son corps élancé, son type celte, son aisance,<br />

son intelligence, sa liberté passionnée… – conduit Agnès à la jalousie, à la<br />

haine, au désespoir alors qu’elle est la seule famille qui lui reste. La première<br />

fois qu’Agnès avait vu Pierre, en compagnie de Christine et de Jeanne, un<br />

fatidique symbole prémonitoire s’affichait : l’enseigne sang-de-bœuf de<br />

l’épicier, image lancinante d’une blessure qui ne se referme jamais (pp. 26-<br />

27). Quant au père Hubert Segrais, curé de Téthondes, il trahit sa vocation de<br />

prêtre, et surtout son ouaille, Agnès, qu’il avait encouragée dans sa vocation<br />

de religieuse, mais qu’il renonce à conseiller. Sans doute un psychanalyste<br />

l’aidera-t-il à se « sauver » en mettant en évidence son sentiment de<br />

culpabilité mais le prêtre défroqué ne survivra pas à la révélation (pp. 133-<br />

134). Au bout du compte, de son cloître, Agnès pourrait empêcher l’exécution<br />

de sa sœur qui est partie se battre aux côtés des Républicains, contre l’Église<br />

espagnole, ce « clan de factieux » qui « a trahi sa mission » (p. 115). Un<br />

mystérieux évanouissement l’en empêche. Le visage de Christine avec son<br />

« grain de beauté ovale et très noir […] près de l’oreille gauche » (p. 123) a<br />

beau lui apparaître en songe, il est trop tard pour éviter qu’elle soit fusillée,<br />

non sans les réconforts de la religion. Agnès, elle, survit, malgré les remords,<br />

jusqu’à ce que, lors d’un séjour en Suisse, une avalanche de neige<br />

l’ensevelisse, sans sacrement pour apaiser le feu de son âme. Une postface<br />

122 « Christine était vivante en moi, criminelle en moi. » avoue-t-elle, p. 53.<br />

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