533 textes.indd - Tribune Bulletin Côte d'Azur
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Actualité<br />
2060 : et si Nice<br />
devenait italienne ?<br />
Côté créations d’entreprises, nos voisins transalpins ont définitivement<br />
gagné le match : s’ils sont nombreux à s’installer en France, et en<br />
particulier à Nice, nous nous montrons bien plus frileux pour franchir<br />
la frontière dans l'autre sens. Et les raisons sont multiples.<br />
Champions<br />
d’Europe, les<br />
Italiens, dès<br />
qu’il s’agit d’investir<br />
hors de<br />
leurs naturelles<br />
limites territoriales. Dernier<br />
exemple en date :<br />
la reprise de WIPRO, à<br />
Sophia, par Accent, transalpin<br />
spécialisé dans l’intégration<br />
de technologie<br />
de communication dans<br />
les semi-conducteurs.<br />
Et les exemples ne manquent<br />
pas. Au contraire<br />
des Français qui s’expatrient,<br />
les Italiens, eux, ne<br />
regardent pas à la «taille»<br />
de l’entreprise : petites ou<br />
grandes, ils sont partout<br />
et investissent, là où seuls<br />
les grands groupes français<br />
tentent leur chance,<br />
en particulier dans le<br />
secteur de la grande<br />
distribution, en pleine<br />
expansion de l’autre côté<br />
de la frontière. Résultat :<br />
loin des marchés immobiliers<br />
ou du sacro-saint<br />
shopping, près de 1.600<br />
groupes italiens (plus de<br />
100.000 salariés) ont traversé<br />
la Roya. Ils s’appellent<br />
Mondadori, Borletti<br />
(récent acquéreur du<br />
Printemps), Autogrill, et<br />
viennent chercher chez<br />
nous des entreprises à «redresser». Comme Boscolo<br />
à Nice, qui en pleine crise, ouvre son Exedra,<br />
fleuron de l’hôtellerie sur Victor Hugo, pour 20 Ma<br />
d’investissement. La même somme sera remise sur<br />
la table pour la rénovation prochaine du Plaza.<br />
Dans le département, Imminence (immobilier), les<br />
jardineries Nova ou Ansaldo Breda, racheteur in<br />
extremis de STB à La Bocca, guettent les créneaux<br />
porteurs. Augier, filiale du groupe italien OCEM,<br />
spécialiste mondial de l’éclairage public, s’est installée<br />
à Carros, avec 75 emplois à la clef.<br />
«Niveau travail, les Italiens ont beaucoup de<br />
compétences, mais dans un système sans réelles<br />
garanties, et c’est cela qui les pousse à venir en<br />
France» : Agostino Pesce, président de la Chambre<br />
de commerce italienne, invoque une «tradition»<br />
d’exportation vers la France qui ne se révèle pas<br />
forcément réciproque. Première incriminée : la<br />
structure-même de l’entreprise. Si la France se<br />
lance à l’étranger avec force capitaux ou de rares<br />
TPE, l’Italie, elle, exporte des PME-PMI. «En Italie,<br />
les capitaux des banques sont souvent contrôlés<br />
par des établissements français, mais ça ne se<br />
voit pas… Pareil pour les grosses sociétés, dans le<br />
BTP par exemple: les Italiens travaillent plutôt en<br />
sous-traitrance.» Leclerc, BNP, Adecco ou Société<br />
Générale, la «pieuvre française» (sans connotation<br />
sinistre aucune…) ne se montre pas.<br />
Combien d’entreprises italiennes dans les<br />
Alpes-Maritimes ? «Difficile de le savoir», avoue le<br />
président Pesce. «Ce que nous savons, c’est que la<br />
France est le second pays d’accueil pour les investisseurs<br />
transalpins, après les Pays-Bas, mais devant<br />
les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne. Et que les<br />
similitudes entre l’Italie et notre région rendent la<br />
Côte d’Azur particulièrement<br />
attractive.»<br />
Avec 28.000 résidents<br />
inscrits au Consulat<br />
général (soit quelque<br />
probables 200.000<br />
habitants), l’Italie a<br />
choisi, et se défend<br />
souvent en appuyant<br />
sur le côté «cœur»<br />
de la démarche. Car<br />
en ses frontières, les<br />
inconvénients s’accumulent<br />
: immobilier<br />
plus cher, lois changeantes<br />
et compliquées,<br />
organisations<br />
professionnelles<br />
comme partenaires<br />
obligés pour éviter<br />
les tracas administratifs…<br />
«Rien ne marche<br />
là-bas, alors que nous<br />
avons l’un des pays<br />
les plus réactifs au<br />
monde, où l’on peut<br />
lancer une production<br />
en moins d’une<br />
semaine ! En France,<br />
c’est complètement<br />
impossible.» Mode,<br />
mécanique, ameublement,<br />
si l’économie<br />
souffre d’une<br />
concurrence avec<br />
des pays émergents<br />
comme la Chine, elle<br />
garde ses atouts dans<br />
le segment de la soustraitance<br />
de qualité ou le développement de prototypes.<br />
Pour Agostino Pesce, si la France représente un attrait<br />
économique pour les entrepreneurs italiens, ce n’est<br />
pas la seule raison qui les poussent à s’exporter, familles<br />
comprises. Une histoire de cœur, qui dure depuis des<br />
générations en Provence. Nos grands noms du BTP<br />
local, célèbres au siècle dernier, ne sont-ils pas issus des<br />
vallées piémontaises ?<br />
Signe des temps : la signature cette semaine d’une<br />
convention de partenariat entre la CCItal et la BPCA,<br />
avec pour objectif de capter une clientèle italienne de<br />
particuliers. Retraités et familles d’entrepreneurs…<br />
La crise passe et les Italiens se surpassent :<br />
l’importation de produits alimentaires a grimpé en<br />
flèche, et les entreprises à secourir se bousculent<br />
au portillon. «Nous sommes un vrai peuple d’entrepreneurs.<br />
Petite ou grande, l’entreprise fait partie de<br />
la famille. C’est… sentimental.»<br />
La France, un Eldorado pour l’Italien<br />
économiquement correct ? «Oui, bien sûr, et depuis<br />
toujours. En Italie, les salaires sont bas, il n’y a pas<br />
de solution-chômage, il n’y a même pas de contrats<br />
de travail garantis. C’est sans filet, avec une législation<br />
que personne ne maîtrise.» Côté charges et<br />
impôts ? «C’est à peu près la même chose, mais les<br />
assurances par exemple y coûtent jusqu’à quatre fois<br />
plus cher.» S’il passe volontiers par la Chambre de<br />
commerce pour trouver un local, des aides financières,<br />
pour choisir un statut, l’entrepreneur en<br />
ressort tout étonné. «Et puis, la France, c’est chic!»<br />
A l’inverse, la TPE française a bien du mal à se faire<br />
aux règles italiennes, et préfère la collaboration<br />
plutôt que l’exil. Pour elle, peu de place pour des<br />
secteurs innovants, si ce n’est peut-être l’industrie<br />
du parfum. Et si la clientèle hexagonale, hormis<br />
agro-alimentaire et ameublement, se montre souvent<br />
méfiante à l’égard des «étrangers», et bien qu’à<br />
cela ne tienne, les PME-PMI à l’accent chantant ont<br />
une parade : le rachat d’une enseigne, en conservant<br />
personnel et clientèle. De quoi faire passer<br />
la pilule en douceur. Et gagner quelques parts de<br />
marché à la force du poignet. En 10 ans, même si<br />
le chiffre n’est pas officiel, elles seraient plus de<br />
2.000 entreprises à avoir colonisé le département.<br />
Isabelle Auzias<br />
Quoi de neuf<br />
cette semaine ?<br />
➔ LE CHIFFRE<br />
22,5%<br />
C’est la hausse en termes de créations<br />
d’entreprises enregistrée au premier trimestre<br />
2010 sur le département par rapport<br />
à la même période en 2009. 5.688<br />
créations d’entreprises ont été enregistrées<br />
par l’INSEE dans les Alpes-Maritimes.<br />
Le département fait cependant<br />
moins bien que la moyenne régionale,<br />
21.085 entreprises ayant été fondées sur<br />
la période en PACA (+25,7%) et que le<br />
département voisin des Alpes-de-Hautes<br />
Provence (+30,1%, 540 créations), mais<br />
mieux que le Var (+12,9%, avec 4.199<br />
créations). A l’échelon national, 182.511<br />
entreprises ont été fondées sur les trois<br />
premiers mois de l’année, soit 33,8% de<br />
plus qu’un an auparavant. Avec 110.788<br />
déclarations, le statut de l’auto-entrepreneur<br />
représente 60,7% des créations en<br />
France.<br />
➔ LE SITE<br />
DE LA SEMAINE<br />
L’économie monégasque en ligne<br />
Edité par la division des statistiques et<br />
des études économiques de la direction<br />
de l’expansion économique, un bulletin<br />
trimestriel de «santé» est désormais<br />
disponible sur le site du gouvernement<br />
(rubrique dossiers/rapports et statistiques).<br />
On y retrouve les chiffres clés, les<br />
principaux indicateurs économiques sur<br />
les secteurs du tourisme, de l’immobilier,<br />
des transports, du commerce extérieur,<br />
des finances et de l’emploi. Petit plus : ces<br />
données sont cumulées et comparées à<br />
la même période de l’année précédente,<br />
commentaires à l’appui. A noter que<br />
les bulletins trimestriels pour 2009 sont<br />
d’ores et déjà en ligne, et que le prochain<br />
point est prévu début juin 2010.<br />
www.gouv.mc<br />
➔ L’INITIATIVE<br />
L’ADIE, premier opérateur de microcrédit<br />
en France, a organisé à Nice le<br />
lancement de son nouveau projet Créa-<br />
Jeunes, programme spécifique pour les<br />
18-32 ans désireux de créer leur propre<br />
entreprise. Pour les y aider au mieux, ils<br />
bénéficieront d’un accompagnement de<br />
deux mois en amont, et d’un autre de 18<br />
mois après création pour maximiser leurs<br />
chances de pérennisation. L’ADIE, dont le<br />
fonctionnement repose sur de nombreux<br />
bénévoles, recherche actuellement les<br />
membres de l’équipe dédiée à ce projet.<br />
Contact 06.74.89.58.38 – www.adie.org<br />
➔ LE COUP DE GUEULE…<br />
D’un élu du haut-pays, lors de la dernière<br />
assemblée de l’Association des maires<br />
des Alpes-Maritimes, qui s’est offusqué<br />
du fait que certaines communes littorales<br />
organisent des manifestations en s’appropriant<br />
des thématiques propres à nos<br />
montagnes. «Une commune du littoral<br />
programme sans complexe une fête de la<br />
châtaigne… sans avoir l’ombre d’un châtaignier<br />
sur son territoire. En revanche, on<br />
passe allègrement sous silence ce type<br />
de fêtes quand elles se passent dans un<br />
village où elles ont pleine légitimité.» Va<br />
comprendre, Charles…<br />
● Vendredi 23 avril 2010 ● <strong>Tribune</strong> <strong>Bulletin</strong> Côte d’Azur ● 3 ●