olivier strelli - Pr Jean-Yves Hayez
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littérature<br />
LES GENS NORMAUX<br />
N’ONT RIEN<br />
D’EXCEPTIONNEL,<br />
SAUF PEUT-ÊTRE EN<br />
TEMPS DE GUERRE…<br />
Le nouveau roman de l’anglais Joseph Connolly,<br />
Jack l’Epate et Mary pleine de grâce est plus grave,<br />
plus dense que ceux qui l’ont fait connaître.<br />
On y voit, à travers quelques personnages attachants,<br />
complexes, comment pendant la deuxième guerre<br />
mondiale des vies ordinaires sont devenues, jour après<br />
jour, de véritables tragédies.<br />
WHAT IS LOVE ?<br />
On l’a attendu longtemps, ce deuxième roman de Mian<br />
Mian, l’auteure des Bonbons chinois. Il est enfin là. Si les<br />
ingrédients sont les mêmes – sexe, amour, branchitude,<br />
Shanghai – la quête est différente (la vérité sur l’amour,<br />
l’existence) et la forme plus sophistiquée (le cut up).<br />
<strong>Pr</strong>opos recueillis par Michel Zumkir<br />
Pourquoi y a-t-il eu huit années entre Les bonbons chinois et<br />
Panda sex ? Les bonbons chinois ont été un grand succès, après cela<br />
j’ai été très stressée car je me devais d’écrire quelque chose d’aussi<br />
bien. J’ai passé beaucoup de temps à réfléchir à ce que je ferais.<br />
Quand j’ai eu l’histoire de Panda sex, ce fut difficile de l’écrire aussi<br />
clairement et profondément que je le voulais. J’ai passé sept ans à finir<br />
le livre. Je crois qu’il est plus pur que Les bonbons chinois car je n’étais<br />
plus embarrassée par ce que les gens penseraient de moi, la starification,<br />
je ne pensais qu’à réussir le livre.<br />
Pourquoi avoir choisi cette forme fragmentaire ? Elle est adéquate à<br />
notre monde actuel. Dans leur quotidien, les gens reçoivent beaucoup<br />
d’informations, ils sont stressés, pressés et ne prennent pas le temps<br />
d’aller dans le détail. Si je voulais leur dire des choses importantes et<br />
profondes sur la vie, je devais aller à l’essentiel. De plus, je souhaitais<br />
une manière juste pour parler de l’amour, tout comme les gens cherchent<br />
une manière parfaite d’aimer. Cette forme m’a permis de montrer<br />
plusieurs manières de vivre le désir et de chercher l’amour. A la fin, j’ai<br />
compris que la relation amoureuse n’est pas l’amour, l’amour y est une<br />
fiction, l’imagination y joue un grand rôle… L’amour vrai est un achèvement,<br />
il est généreux, il est dans le bonheur de l’autre.<br />
© DAVID WARREN<br />
<strong>Pr</strong>opos recueillis par Michel Zumkir<br />
Comment en êtes-vous arrivé à écrire sur la guerre ? Mes premiers<br />
romans étaient tous contemporains. L’amour est une chose étrange,<br />
mon avant-dernier livre, est le premier dans lequel j’ai remonté le temps,<br />
j’y abordais les années 50 et 60 que je connais bien. Cette fois, j’ai<br />
voulu parler de ce qui leur a donné naissance. Tout le monde sait qu’à<br />
Londres, pendant la guerre, une sorte de solidarité unissait les gens.<br />
Ce qui m’a intéressé, c’était d’aborder le crime sous-jacent à cette<br />
période, montrer comment une personne plus ou moins innocente peut<br />
être corrompue par un événement qu’elle n’avait pas prévu.<br />
Cela se marque bien à travers deux de vos personnages, Dickie et<br />
Jackie. Dickie et Jackie sont très différents l’un de l’autre. Le premier,<br />
médecin né dans une classe sociale élevée, veut vivre dans un quartier<br />
pauvre pour aider les gens. S’il n’y avait pas eu la guerre, il ne se serait<br />
pas rendu compte que, fondamentalement, il est un lâche, il serait peutêtre<br />
resté quelqu’un de normal. Jackie, lui, au début, est plus ou moins<br />
correct, mais dès qu’arrive la guerre, il cherche à s’en sortir d’une<br />
manière égoïste, il devient un membre notoire du crime organisé à<br />
Londres, il serait resté Jack l’Epate.<br />
Vous faites confiance à votre lecteur, à ce qu’il sait de la guerre,<br />
vous ne lui dictez pas sa manière de penser. En tant qu’écrivain, j’ai<br />
un rôle invisible. J’apprends à connaître les personnages au fur et à<br />
mesure que je les construis. Je ne juge pas, c’est comme si j’avais une<br />
caméra, je montre. Mes personnages ne sont pas des marionnettes, des<br />
jouets, parfois ce sont même eux qui me guident vers leur propre<br />
construction… et je suis même quelquefois surpris de ce qu’ils disent,<br />
tellement ils sont réels à mes yeux.<br />
Joseph Connolly, Jack l’Epate et Mary pleine de grâce, Flammarion<br />
Il y a l’amour, le désir dans votre roman, mais il est aussi travaillé<br />
par la mort. Quand j’ai commencé ce livre par des funérailles, je ne<br />
savais pas pourquoi. Puis mon père est devenu très malade et il est<br />
mort. Sa mort rôdait autour de moi pendant que j’écrivais. Je croyais<br />
que la mort était quelque chose de simple – des yeux qui se referment<br />
–, qu’elle était effrayante aussi – tout disparaissait avec elle. Mais avec<br />
le décès de mon père, j’ai commencé à lire des livres bouddhistes et j’ai<br />
compris que je me trompais. Alors ma vie a changé, je ne bois plus, je<br />
ne me drogue plus, je veux être plus forte dans la vie pour enseigner<br />
aux gens comment s’arranger avec la souffrance.<br />
Mian Mian, Panda sex, Au diable vauvert<br />
—44—<br />
Vous pouvez lire la totalité de l’entretien sur www.essentielle.be<br />
© ARNAUD FÉVRIER / FLAMARION