olivier strelli - Pr Jean-Yves Hayez

mode
Propos recueillis par Isabelle Blandiaux
Classe et bonnes manières hautement british, Paul Smith balade sa
silhouette de grand adolescent depuis plus de trente ans sur la planète
mode. Son mix de classique aux lignes simples, de détails raffinés
et d’humour est devenu un hit. Rencontre avec un chic type à l’optimisme
communicatif dans sa première boutique belge, à Anvers.
Cinq espaces – dont une librairie – et cinq
atmosphères complètement différentes sur deux
niveaux. Paul Smith aime faire s’entrechoquer
tradition et modernité, et cela se voit, dans son
nouvel antre anversois. Photos, tableaux, dessins,
reproductions de tickets d’entrée et autres
souvenirs perso recouvrent entièrement le mur
de la cage d’escalier. Au centre d’une pièce aux
panneaux en chêne foncé XIX e , un cube rose
fluo sert de cabine d’essayage. Le créateur nous
attend dans un canapé à la rayure emblématique
et entre dans le vif du sujet sans se faire prier.
Considérez-vous que le tailoring demeure
la base de votre travail ? Oui. C’est mon histoire.
Je suis d’abord connu pour cela autour du
monde. Depuis deux ou trois ans, les robes, les
jupes et la maille pour femmes fonctionnent bien
aussi. J’ai lancé ma collection féminine voici
douze ans et cela m’a pris un peu de temps
pour comprendre cette approche, beaucoup
plus versatile. Certains designers font du décoratif;
ma force, c’est la simplicité : les bonnes
coupe et forme, la construction.
L’influence du vestiaire masculin reste de
toute façon importante sur la garde-robe
féminine... Nous avons une ligne que nous
appelons Men Only, pour femmes, et qui remporte
beaucoup de succès. Spécialement à
Paris. Les chaussures de style masculin sont
nos best-sellers au Bon Marché.
Qu’est-ce qui a inspiré vos collections
printemps-été 09 ? L’inspiration peut venir de
toute part, l’essentiel étant d’utiliser ses yeux.
Un voyage dans une Inde saturée de couleurs.
Un livre trouvé sur un marché londonien. Pour
ce printemps, je me suis basé sur une magnifique
exposition à la Tate de Londres : Les
Orientalistes. Des peintures magnifiques de
femmes dans des harems, habillées en djella-
bas… Tous ces vêtements m’ont parlé, avec
leurs broderies, leurs encolures. J’en ai intégré
des éléments aux codes Paul Smith : une très
belle ligne, des couleurs et des détails originaux
(boutons…). Mes collections sont faciles à porter
mais il y a toujours un esprit.
En plus de 30 ans, votre approche du
métier a-t-elle beaucoup évolué ? L’univers
de la mode change plus vite aujourd’hui. Une
heure après un défilé, les images se trouvent
sur Internet, à la disposition des grandes
chaînes bon marché. Nous devons être plus
rapides, plus conscients de notre image à travers
nos boutiques notamment. C’est pour cela
que nous voulons des espaces de vente non
standardisés et amusants avec des livres, des
objets chinés. J’ai envie de faire sourire les
gens, de les rendre curieux.
Paul Smith représente aujourd’hui 12 collections
– dont une de meubles – vendues
dans 35 pays. Comment continuez-vous à
gérer tout cela et comment voyez-vous
l’avenir ? Le problème financier actuel vient en
grande part du fait que beaucoup d’entreprises
dans le monde ont emprunté trop d’argent pour
grandir trop vite. Notre croissance a été lente et
naturelle, sur fonds propres. Je peux donc mieux
garder le contrôle et appréhender le futur avec
confiance. Mon rôle principal reste le design : je
signe personnellement les deux premières collections
de la marque, féminine et masculine, et je
suis les autres avec mes assistants. Mais je suis
aussi un chef d’entreprise; je dois être très flexible,
ce qui n’est pas toujours facile. Fondamentalement
heureux et optimiste, je me sens privilégié
parce que je travaille avec 180 jeunes qui amènent
une super énergie dans la société.
Boutique Paul Smith à Anvers :
Kelderstraat 2-3. Tél. 03 221 51 11.
Infos : www.paulsmith.co.uk
GENTLEMAN DESIGNER
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