Téléchargement gratuit(PDF 17 Ko) - Irsst

IRSST
Institut de recherche en
santé et en sécurité
du travail du Québec
Profil-recherche 120
Système informatisé de recueil et d'analyse des données d'accidents du
personnel soignant
Responsables :
Marie St-Vincent, Francine Ouellette et Chantal
Tellier, Programme sécurité-ergonomie, IRSST
Monique Lortie, Université du Québec à Montréal
Groupe de travailleurs concerné :
Le personnel soignant en milieu hospitalier
Problème de sécurité :
Les accidents et les maux de dos
L’origine et le contexte
Les membres du personnel soignant dans les centres
hospitaliers sont victimes de nombreux accidents de
travail. Ceux-ci surviennent pour une large part lors de la
manutention d'un bénéficiaire, et ils entraînent souvent
des lésions musculosquelettiques, en particulier des maux
de dos.
Pour prévenir efficacement ces accidents, il faudrait
savoir comment et pourquoi ils se produisent.
Malheureusement, les données recueillies sont d'une
précision variable et présentent des lacunes importantes.
Il est alors difficile d'analyser le processus accidentel à
des fins de prévention. Aussi, les responsables de la
santé et de la sécurité du travail en milieu hospitalier
souhaitaient mettre en place des procédures pour
recueillir, compiler et analyser les données d'accidents,
afin de mieux connaître ceux qui se passent dans leur
propre établissement et d'utiliser cette connaissance pour
orienter la prévention.
Les objectifs
Développer et valider un système informatisé de recueil
et d'analyse de données d'accidents destiné au secteur
hospitalier.
Plus précisément :
• Décrire les circonstances d'accidents. « Développer
et valider un outil d'analyse pratique pour les
intéressés du secteur hospitalier, qui puisse les aider
à mieux comprendre les accidents et à les prévenir.
• Standardiser et améliorer la fiabilité des données
d'accidents.
• Créer une banque de données considérable pouvant
être utilisée dans une perspective de recherche plus
fondamentale, afin de mieux cerner les facteurs de
risque reliés au travail du personnel soignant.
• Implanter et valider le logiciel dans des centres
hospitaliers.
La démarche
Cette recherche s'est déroulée en deux phases : le
développement d'un prototype de logiciel destiné au
personnel soignant, puis son implantation dans trois
centres hospitaliers.
Les chercheures ont d'abord élaboré un questionnaire
pour recueillir les données sur les victimes, le lieu, le
moment et les circonstances des accidents. Pour
documenter les circonstances, le questionnaire a été
développé suivant une forme arborescente, avec des
questions précises adaptées aux différents types
d'accidents. À cette fin, il a été séparé en deux parties
majeures, selon que la blessure était ou non reliée à
l'effort. La catégorie reliée à l'effort comprend la plupart
des accidents de manutention, alors que l'autre regroupe
notamment les accidents de type «frappé par» et «frappé
sur», les piqûres d'aiguille et les agressions.
Ce questionnaire et les analyses sélectionnées ont
ensuite été informatisés suivant cinq grands principes :
l'intégration de l'information pertinente au contexte de
travail en milieu hospitalier; l'utilisation d'une grille
d'analyse prédéterminée; la convivialité de l'interface du
système informatique; la limite du nombre de questions
pour que le questionnaire puisse être rempli rapidement
et, enfin, une conception de traitement de données qui
permette aussi bien des analyses individuelles des
accidents que d'autres portant sur un ensemble
d'accidents.
Le logiciel obtenu peut produire deux grands types
d'analyses : un résumé d'accident conçu pour une lecture
facile, et six modules qui permettent respectivement de
produire un bilan général de l'ensemble des accidents en
rapport avec la fréquence et la gravité pour tout le centre
ou pour chaque unité, une description factuelle d'un
groupe choisi d'accidents, un examen détaillé des
circonstances d'accidents reliés ou non à l'effort, l'analyse
des données de la population et celle des données
temporelles.

Ce prototype de logiciel a été implanté et validé dans
trois centres hospitaliers représentatifs de l'ensemble du
réseau. Chacun avait été ciblé par la CSST lors de son
opération «moins 10 %». Cette implantation s'est déroulée
en suivant des procédures très rigoureuses. L'utilisation
du logiciel a ainsi fait l'objet d'une entente entre les
représentants syndicaux et patronaux et les chercheures
de l'IRSST. L'information entourant l'opération a été
largement diffusée auprès du personnel, et une attention
particulière a été portée à la formation des usagers. La
validation du logiciel a été réalisée dans les trois centres à
l'aide d'un comité constitué d'un représentant patronal et
de représentants syndicaux.
Les résultats
L'évaluation de ce système informatisé de recueil et
d'analyse portait sur quatre éléments : la qualité du
questionnaire développé, la pertinence des systèmes de
traitement de données produits, l'aspect opérationnel de
l'ensemble de la démarche et l'intégration des résultats
des activités de prévention concrètes.
Cette évaluation a montré que le questionnaire permet
de bien décrire la plupart des accidents du personnel
soignant et que, pour la majorité des variables, les choix
de réponses sont adéquats. Mais il est mal adapté aux
accidents dans des contextes d'agression et permet
difficilement de caractériser les problèmes rencontrés
avec le patient au moment de l'accident.
La révision systématique de tous les résumés
d'accidents et la comparaison des réponses aux questions
fermées et ouvertes ont fait ressortir les principales
erreurs de codification. Celles-ci concernent le choix du
problème vécu (en regard du patient, de l'équipement, de
l'environnement ou du travail d'équipe) dans le cas des
accidents d'origine musculaire d'une part, et la catégorie
et les types d'accidents en ce qui a trait aux accidents
d'origine non musculaire.
La comparaison de l'information obtenue à l'aide du
système informatisé et des «rapports maison» a d'autre
part permis de constater que le questionnaire apporte un
gain d'information substantiel pour la majorité des
variables de la catégorie des accidents d'origine
musculaire et permet d'améliorer de façon marquée le
contenu des descriptions d'accidents. Pour les accidents
d'origine non musculaire, ce gain réside principalement
dans la systématisation de l'information et dans la facilité
du traitement statistique.
En plus des avantages sur le plan de la cueillette de
l'information, ce logiciel offre une base d'analyse
intéressante. Les six modules d'analyse ont été présentés
séquentiellement aux comités de suivi de chaque centre
hospitalier. De façon générale, le résumé d'accident et la
somme des données contenues dans les modules ont
donné satisfaction aux usagers. Les membres des
comités ont toutefois manifesté le besoin de précisions
additionnelles sur les caractéristiques des patients
déplacés, l'information relative aux accidents se
produisant dans des contextes d'agression et la
description des activités précédant l'accident.
Concernant l'aspect opérationnel de la procédure de
cueillette de données et d'analyse, les chercheures ont pu
vérifier que les usagers étaient à l'aise après une
formation de deux demi-journées et que le système ne
posait aucune difficulté majeure aux opérateurs. Le seul
inconvénient noté a été le délai plus long que prévu entre
l'accident et la déclaration.
Enfin, l'implantation du prototype de logiciel s'est
effectuée harmonieusement dans trois centres hospitaliers
Les principales conclusions
Les résultats de la validation du questionnaire montrent
donc que celui-ci est bien adapté au secteur hospitalier et
qu'il permet, à quelques rares exceptions près, de
documenter tous les accidents du personnel soignant.
Quelques améliorations pourraient être apportées
concernant l'information sur les patients déplacés et les
accidents de la catégorie des agressions. Enfin, de façon
générale, les modules d'analyse proposés satisfont les
besoins des usagers. Tous ont cependant manifesté le
désir d'étendre le système aux autres groupes de
travailleurs que le personnel soignant.
L'applicabilité des résultats et le
prolongement de la recherche
Au terme de la première année de validation, les trois
centres ont manifesté la volonté d'utiliser le logiciel pour
une deuxième année et d'intégrer les résultats d'analyse
d'accidents à leurs activités de prévention. Par ailleurs, les
principales lacunes du logiciel ont été corrigées et les
chercheures ont cédé le prototype à une firme privée.
Celle-ci projette de procéder aux améliorations
nécessaires à une diffusion plus large et se propose de
commercialiser cette version améliorée dans le réseau
hospitalier.
Finalement, les données d'accidents recueillies dans les
trois centres durant l'année de validation feront sous peu
l'objet d'une analyse approfondie.
L’IRSST, novembre 1990