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IRSST<br />
Institut de recherche en<br />
santé et en sécurité<br />
du travail du Québec<br />
Profil-recherche 51<br />
Stratégie d'évaluation exploratoire d'un milieu de travail<br />
Responsables :<br />
Luc Ménard, Yves Cloutier, Nicole Goyer, Direction des laboratoires, IRSST<br />
L’origine et le contexte<br />
L'évaluation de l'environnement de travail est de première<br />
importance dans le cadre d'une démarche de surveillance<br />
de la santé des travailleurs ou lors de la mise en oeuvre<br />
de mécanismes de réduction à la source de contaminants.<br />
Les hygiénistes et techniciens en hygiène des CLSC,<br />
DSC et bureaux régionaux de la CSST privilégient les<br />
modèles simples, logiques et efficaces d'évaluation d'un<br />
milieu de travail qui correspondent à leurs objectifs de<br />
prévention.<br />
Dans le cadre de son mandat d'expertise, la Direction<br />
des laboratoires de l'IRSST a décidé de confier à trois<br />
chercheurs l'élaboration d'une stratégie d'évaluation<br />
préliminaire d'un milieu de travail et la production d'un<br />
guide expliquant cette stratégie, destiné à tous les<br />
intervenants en santé et en sécurité du travail.<br />
L'objectif<br />
Proposer aux intervenants en santé et en sécurité du<br />
travail une démarche leur permettant de faire une<br />
évaluation préliminaire d'un milieu de travail et ainsi de<br />
voir quels sont les contaminants et les postes de travail<br />
susceptibles d'exposer les travailleurs à des<br />
concentrations ou à des niveaux excessifs.<br />
La démarche<br />
L'inventaire des stratégies utilisées en hygiène<br />
industrielle a amené les chercheurs à concevoir un guide<br />
de stratégie d'évaluation exploratoire.<br />
Les résultats<br />
La stratégie proposée comporte sept étapes:<br />
1 - Connaissance du mode de fonctionnement et du<br />
type de gestion de l'établissement. Première étape de<br />
toute évaluation d'un milieu de travail, elle comprend<br />
l'examen des dossiers des CLSC et DSC, des rapports<br />
environnement aux et d'hygiène industrielle ainsi que des<br />
rapports d'expertise de la CSST.<br />
2. Connaissance des procédés de fabrication. Cette<br />
étape, la plus importante, permet, avant même la visite à<br />
l'usine, d'identifier les contaminants potentiels, leur niveau<br />
habituel à différentes phases d'un procédé.<br />
3. Connaissance des modes d'exposition et des<br />
habitudes de travail. En plus d'établir les voies d'entrée<br />
d'un contaminant, cette étape tente de faire ressortir<br />
l'importance des habitudes de travail en relation avec les<br />
niveaux d'exposition.<br />
4. Connaissance des risques associés aux<br />
contaminants identifiés. L'intervenant se documente de<br />
façon générale sur la toxicité des contaminants qui ont<br />
été identifiés comme étant habituellement présents dans<br />
le milieu de travail qui fera l'objet d'une évaluation<br />
préliminaire.<br />
5. Utilisation d'indices sensoriels lors d'une visite. Indice<br />
olfactif: l'odorat permet de détecter des substances<br />
présentes à des concentrations pouvant atteindre dans<br />
certains cas le centième d'une partie par billion. Il s'agit<br />
d'un outil précieux qui a cependant ses limites puisque<br />
certains produits toxiques sont inodores ou difficilement<br />
détectables à des concentrations voisines de la norme.<br />
Indice auditif: l'oreille, si elle est le moindrement<br />
exercée, permet de vérifier rapidement les zones<br />
susceptibles d'exposer des travailleurs à des niveaux<br />
dommageables pour l'ouïe. En complément, un<br />
sonomètre de type II est couramment utilisé pour évaluer<br />
des niveaux instantanés.<br />
Indices visuels: ils sont plus difficilement applicables car<br />
l'éclairement et la nature de la poussière varient beaucoup<br />
d'une usine à l'autre. L'observation attentive de l'état des<br />
lieux fournit néanmoins de bons indices de l'exposition<br />
potentielle des travailleurs.<br />
6. Utilisation d'indices empiriques. Dans le cas de<br />
plusieurs contaminants, il est possible de qualifier le<br />
niveau d'exposition des travailleurs de façon empirique.<br />
Cette classification permet par la suite, lors de la mesure,<br />
de sélectionner les groupes de travailleurs potentiellement<br />
à risque d'exposition.<br />
7. Utilisation de méthodes rapides de mesure. Très<br />
utilisés en hygiène industrielle, les instruments à lecture<br />
directe permettent de mesurer les concentrations d'un<br />
contaminant, de localiser et d'évaluer l'importance des<br />
sources d'émission et d'établir le profil d'exposition à un<br />
poste de travail. Plusieurs types d'instruments<br />
fonctionnant selon différents principes sont disponibles.<br />
Instruments à lecture directe pour les aérosols: Ils sont<br />
de précieux outils de travail dont l'utilisation est cependant<br />
compliquée par certains facteurs. La granulométrie, la<br />
forme, la densité ou l'opacité des particules peuvent
influencer la réponse de ces instruments. Il est donc<br />
important de calibrer ces instruments pour chaque type<br />
particulier d'aérosol. Ces appareils mesurent les<br />
concentrations des aérosols selon des méthodes<br />
photométriques et gravimétriques.<br />
Les photomètres sont simples d'utilisation et d'entretien,<br />
mais par contre, ils ne mesurent pas directement la masse<br />
de l'aérosol. Ils fonctionnent soit par transmission soit par<br />
diffusion de la lumière.<br />
Les techniques gravimétriques (ex.: la piezo-balance)<br />
évaluent directement la concentration d'un aérosol et ne<br />
dépendent pas de la densité, de la forme ou de la<br />
grosseur des particules formant l'aérosol.<br />
Instruments à lecture directe pour les gaz et les<br />
vapeurs: Ces instruments permettent de mesurer la<br />
concentration de différentes substances. Ils fonctionnent<br />
selon divers principes de détection.<br />
Les instruments qui fonctionnent selon le principe de la<br />
combustion, détectent les gaz ou vapeurs qui se<br />
combinent avec l'oxygène de l'air. Ces instruments sont<br />
non spécifiques: ils répondent à tous les gaz qui brûlent<br />
en présence d'oxygène.<br />
L'applicabilité des résultats et le<br />
prolongement de la recherche<br />
L'évaluation préliminaire des milieux de travail selon la<br />
démarche développée par les chercheurs de l'IRSST<br />
permettra:<br />
. de structurer et d'uniformiser le mode d'intervention en<br />
milieu de travail;<br />
. d'identifier de façon systématique les contaminants et les<br />
postes de travail à risques d'exposition;<br />
. d'identifier les groupes de travailleurs qui devront<br />
faire l'objet d'une investigation plus poussée;<br />
. de rationaliser l'utilisation des ressources en santé et en<br />
sécurité du travail;<br />
. d'utiliser tous les outils disponibles de façon efficace.<br />
Cette démarche, qui constitue en fait une première<br />
phase d'évaluation, a l'avantage d'identifier les travailleurs<br />
potentiellement exposés à des contaminants, qui<br />
devraient faire l'objet d'une surveillance plus complète.<br />
Ces travailleurs seraient par la suite évalués selon les<br />
méthodes de référence afin d'infirmer ou de confirmer le<br />
diagnostic établi à l'aide de l'approche exploratoire.<br />
Les instruments fonctionnant selon la spectroscopie<br />
d'absorption infrarouge / ultraviolet détectent tous les gaz<br />
et vapeurs qui absorbent de l'énergie dans les régions de<br />
l'infrarouge ou de l'ultraviolet du spectre<br />
électromagnétique.<br />
Les appareils fonctionnant à l'aide d'une cellule<br />
électrochimique mesurent les substances pouvant être<br />
oxydés ou réduites à partir d'un courant électrique. La<br />
chimiluminescence mesure l'ozone et les oxydes d'azote<br />
par émission d'énergie de réaction sous forme de lumière<br />
tandis que le mercure se détecte par amalgamation sur un<br />
film d'or ou d'argent.<br />
Dispositifs colorimétriques à lecture directe: Pour<br />
mesurer la concentration de contaminants dans l'air, il<br />
existe trois types de dispositifs colorimétriques à lecture<br />
directe: les réactifs liquides, les papiers imprégnés et les<br />
réactifs solides ou tubes colorimétriques. Ces derniers<br />
sont les plus utilisés. La majorité des tubes<br />
colorimétriques ne sont pas spécifiques. Plusieurs gaz et<br />
vapeurs réagissent avec un même produit à cause de<br />
propriétés chimiques semblables. Les tubes<br />
colorimétriques sont néanmoins des outils à favoriser du<br />
fait de leurs avantages majeurs: simplicité, rapidité<br />
d'utilisation, faible coût, instantanéité du résultat.<br />
Leur utilisation est préconisée comme outil d'exploration<br />
ou de dépistage pour connaître et identifier les<br />
contaminants lorsqu'il ne s'agit pas de mélanges<br />
complexes; pour localiser et évaluer les sources<br />
d'émission ainsi que pour évaluer les variations de<br />
concentrations des contaminants dans le temps et<br />
l'espace.<br />
L’IRSST, mai 1986