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Les valeurs de la musique - Observatoire de la Musique - Cité de la ...

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Deuxièmement, le marketing musical constitue un changement<br />

important qui n’est pas incompatible avec une gran<strong>de</strong> créativité<br />

bien que l’on reproche souvent aux acteurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> leur<br />

manque <strong>de</strong> créativité : en l’occurrence, <strong>la</strong> capacité <strong>de</strong> produire un<br />

artiste à partir d’un logiciel marketing. C’est une innovation qui a<br />

produit <strong>de</strong> vrais succès commerciaux dont l’on peut dire qu’ils ont<br />

probablement financé un certain nombre d’autres choses qui<br />

étaient moins fabriquées. Ce<strong>la</strong> alimente l’idée qu’il y a une interchangeabilité<br />

assez profon<strong>de</strong> entre les artistes, les <strong>musique</strong>s, etc.,<br />

qu’une vague recouvre l’autre et donc qu’à nouveau, en tout cas<br />

l’œuvre elle-même, voire l’artiste, perd <strong>de</strong> sa valeur unitaire.<br />

Troisièmement, le numérique, qui arrive après tout ça et non<br />

avant, n’en est pas <strong>la</strong> source mais favorise <strong>la</strong> massification <strong>de</strong><br />

l’échange et le passage à une distribution au coût marginal ou à<br />

peu près, ce qui conduit au sens propre à une véritable dévalorisation<br />

<strong>de</strong>s coûts <strong>de</strong> production. À cet égard, les internautes n’ont<br />

pas seulement une culture <strong>de</strong> <strong>la</strong> gratuité mais une culture économique<br />

et perçoivent <strong>la</strong> valeur <strong>de</strong> coûts marginaux nuls et <strong>de</strong>s<br />

coûts fixes. Cependant, il y a un moment où il faut produire cette<br />

<strong>musique</strong> !<br />

Autre phénomène important qui est, à mon avis, <strong>la</strong> source, l’origine<br />

possible du retour <strong>de</strong> <strong>la</strong> valeur, y compris économique, dans<br />

ce secteur et que je ne vais pas développer maintenant : c’est l’industrialisation<br />

du bouche-à-oreille.<br />

II – Réévaluation : usages et goûts<br />

Plus que <strong>de</strong> dévaluations <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong>, c’est un dép<strong>la</strong>cement ou<br />

un rep<strong>la</strong>cement <strong>de</strong> <strong>la</strong> valeur <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> qui serait à l’œuvre,<br />

redonnant aux usages, à <strong>la</strong> variété <strong>de</strong>s goûts, à <strong>la</strong> diversité <strong>de</strong>s<br />

investissements individuels et sociaux une valeur que les industries<br />

musicales auraient banalisée.<br />

Hervé GLEVAREC<br />

Sociologue, CNRS<br />

Il faut d’abord observer une situation <strong>de</strong> « rotation <strong>de</strong> <strong>la</strong> valeur<br />

musicale » pour les générations <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 50 ans, et a fortiori<br />

pour celles <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 40 ans. La situation contemporaine <strong>de</strong><br />

notre rapport à <strong>la</strong> <strong>musique</strong> est une situation <strong>de</strong> pluriréalisations<br />

extrêmement fortes du champ musical : c’est-à-dire que <strong>de</strong>puis<br />

l’après-guerre, pour prendre cette référence, nous vivons dans un<br />

univers musical où les genres se sont multipliés et où <strong>la</strong> <strong>musique</strong><br />

est à disposition plus facilement, donc avec un agissement et une<br />

facilité d’accès musical inédits.<br />

Il s’agit d’une question sociologique très importante qui peut sembler<br />

un peu incongrue parce que <strong>la</strong> question <strong>de</strong> <strong>la</strong> légitimité et <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> valeur sociologique <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>musique</strong> ne se pose plus. La question<br />

c<strong>la</strong>ssique <strong>de</strong> <strong>la</strong> légitimité culturelle consiste à dire « j’aime<br />

l’opéra » ou « j’aime le rap » sur un marché social, dans ses interactions<br />

avec ses camara<strong>de</strong>s, etc. Domine, selon cette approche<br />

initiée par Pierre Bourdieu, l’idée que <strong>la</strong> <strong>musique</strong> est avant tout<br />

un produit qui a une certaine valeur pour le mélomane, valeur qu’il<br />

va afficher vers l’extérieur.<br />

À présent, il y a une profon<strong>de</strong> ré-articu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> <strong>la</strong> table <strong>de</strong>s<br />

<strong>valeurs</strong> musicales. Ce n’est plus le modèle unitaire selon lequel il<br />

y avait « tout en haut » <strong>la</strong> <strong>musique</strong> c<strong>la</strong>ssique, <strong>la</strong> <strong>musique</strong> légitime<br />

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