Les actes des rencontres d'Evreux.pdf - Irma

nous avons créé notre pro p re association. Mais, nous
nous sommes un peu plantés parce que nous n'avions
pas de suivi et nous étions un peu jeunes. Pour nous, une
association, c'était le moyen de pouvoir faire une facture.
Ce qui est important, c'est d'être accompagné, qu'il y
ait des gens qui sachent ce qu'ils doivent faire et que
l'artiste, en lui même, prenne conscience de tout cela.
Nous sommes allés enre g i s t rer une cassette démo à la
MJC de Rezé parce que comme tout groupe, pour tro u-
ver des scènes, il faut un petit produit, faire parler de
soi. Puis le Printemps de Bourges en 96 par la FFMJC,
La citoyenneté ce n'est pas seulement aller voter,
c'est aussi garder un œil critique sur la société
cela a vraiment été des conditions professionnelles pour
m e t t re en œuvre d'autres concerts.
En termes de pédagogie, nous avons utilisé le
support rap comme support pédagogique, pour perm
e t t re aux jeunes de se “réapproprier" l'écrit. Le hiphop
est tellement large qu'on ne peut plus le ra t t a c h e r
aux milieux urbains, aux cités, à la “racaille”. Il y a des
jeunes de cité qui s'organisent et nous c'est un peu le
message que l'on fait passer à tra v e rs nos stages. Nous
faisons des ateliers d’écriture, des ateliers M.A.O., ce qui
est vraiment valorisant pour nous. Nous n'avons pas
l ' i m p ression de faire du vent parce que les jeunes re p a r-
tent avec une composition, repartent avec un texte et
repartent avec des idées. Nous transmettons notre
conception du hip-hop. Comme le relate la vidéo sur
Mantes-la-Jolie, le hip-hop est né sous le signe du re s-
pect. Pour moi, la citoyenneté ce n'est pas seulement
aller voter, c'est aussi garder un œil critique sur la
s o c i é t é .
Alain Leprest : C'est voter !
David Leyondre - Ultim Power : C'est voter, c'est clair
mais c'est aussi pouvoir garder un œil critique. A tra v e rs
ces stages que nous organisons, les échanges m'ont
beaucoup apporté. En fait, les jeunes nous apportent
deux fois plus ! En gros, nous avons commencé en 1996
par une année un peu confidentielle pour nous former
par rapport à la pédagogie, tra n s m e t t re notre savoir. Et
en 1997, nous avons touché une centaine de jeunes. Le
hip-hop peut devenir un support pédagogique pour
“réapproprier". C'est même parfois à la limite du thérapeutique.
Au départ, notre champ d'intervention était
dans les Maisons de Quartier, dans les MJC, et maintenant,
cela s'est élargi et nous travaillons aujourd'hui sur
des projets liés à la santé, la toxicomanie, les maisons
d'arrêt... Nous ressentons la satisfaction personnelle de
nous épanouir dans notre passion. La musique reste une
passion. Nous ne disons pas aux jeunes qu’ils vont devenir
des stars parce que, comme disait Little Bob, attention
nous sommes 100 % underg round ! C'est-à-dire que
nous gardons le côté hip-hop d'origine. Enfin, ce que
nous appelons l'underg round, c'est en fait être autonomes.
Je re g rette que dans le hip-hop, nous ne bénéficions
presque uniquement que de financements sociaux.
N o t re association “RAPAC ITÉ" a plusieurs objectifs.
Il y a les stages, l'artistique, et le collectif. Nous
re g roupons des danseurs - par exemple la compagnie
HB2 - des gra f e u rs et des musiciens. En fait, nous
utilisons tout le support hip-hop qui réunit ces
t rois disciplines pour aller vers les jeunes mais surtout
pas pour leur dire qu'ils vont être des stars .
Au départ, c'est pour leur donner un moment de plaisir.
Ensuite, c'est à eux de voir s’ils doivent s'accro c h e r.
N o t re but est que les jeunes s'organisent. Donc, à
chaque fois que nous voyons des jeunes, nous leur
disons la façon dont nous avons évolué depuis 1990.
Cela leur remet un peu les pieds sur terre, loin de tout
ce star système. Il ne faut pas se leurrer : il y a en Fra n c e
7 groupes de rap qui s'en sortent et pourtant il y a une
panoplie de groupes de rap. Ce qui est important, c'est
que les jeunes ensuite puissent échanger. Demain à
Nantes, nous organisons toute une journée hip-hop et
ce sont tous nos stagiaires de France qui se réunissent et
qui jouent. Imaginez la richesse de cette journée ! Enfin ,
le plus valorisant pour moi, dans ce travail, c'est d'arriver
à quelque chose de concret et d'arrêter de pro p o s e r
du vent parce que les jeunes, ils en ont marre du vent.
Là, on leur donne le support pour travailler et après c'est
à eux de s'org a n i s e r, c'est à eux de faire des budgets.
Bien sûr, c'est aussi aux animateurs de les accompagner,
mais les jeunes doivent arrêter de tout attendre .
Alain Leprest : C'est formidable ce que tu viens de dire !
Pour ma part, ce sont des ateliers d'écriture tout à fait d’un
autre genre, ludiques ou parfois payés ou payants. Ce que
j'ai retenu, c'est que j'avais le sentiment de recevoir plus
que l'on donne ! Nous sommes des pilleurs, des voleurs !
Jean Djemad : Absolument, c'est vrai que cela nous
apporte plus que ce que nous leur apportons. Et par
extension de cela, ayant observé durant toutes ces
années l'ensemble du circuit culturel français et européen,
je me suis rendu compte d'une chose, c'est que
partout - et c'est là sans doute l'intérêt de son rôle -
l’artiste est capable d'être cette personne qui fait
l'échange humain. Dans ce sens, il existe les réseaux
d'échange par le savoir, ce sont des endroits où véritablement
il se construit quelque chose. Il est intére s s a n t
8 5