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Les actes des rencontres d'Evreux.pdf - Irma

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neté c'est-à-dire à cette capacité reconnue, mutuelle, de<br />

faire partie du groupe, d'en jouir et de veiller aussi à exercer<br />

sa propre responsabilité au sein de ce groupe.<br />

Black Blanc Beur, c'est l'expérience d'une compagnie<br />

de danse qui est née du mouvement hip-hop et qui<br />

a la particularité de n'avoir pas fait que <strong>des</strong> spectacles<br />

pur sucre hip-hop. Nous avons par exemple tra v a i l l é<br />

Si on pose un acte et si on développe une<br />

expérimentation, à ce moment-là, on a accès au droit<br />

et sans doute à la citoyenneté<br />

avec <strong>des</strong> musiciens qui font de la musique électroa<br />

c o u stique. Il est évident pour tout le monde que le<br />

terme que l'on met à l'expression importe seulement<br />

pour la défin i r. Je pense que notre génération vit cette<br />

c u l t u re imprégnée d’Afrique différemment <strong>des</strong> générations<br />

précédentes mais il est probable que ces étapes<br />

étaient nécessaires. Nous ne la vivons plus comme victime<br />

de l'histoire mais comme ayant le sentiment de pouvoir<br />

apporter quelque chose à la boucle d'une sorte de<br />

colonialisme, une sorte de façon d'être, en France ou en<br />

E u rope, qui a quand même duré un certain temps et<br />

dont on vit encore pas mal de conséquences. Une fois<br />

que cet acte d'existence est posé, fondamental pour<br />

moi, nous avons ensuite besoin de survivre. On ne sait<br />

même pas pourquoi on est obligé de faire ce truc-là et<br />

c'est vrai que c'est de la nature de notre survie. Sans<br />

évacuer notre plaisir.<br />

L o rsque nous nous sommes adressés à 600 jeunes<br />

de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, à<br />

t ra v e rs notamment le réseau <strong>des</strong> MJC, pour faire une<br />

v raie formation professionnelle, un vrai moment de vie<br />

en commun qui devait déboucher sur un vrai spectacle<br />

qui devait vraiment être montré : ce fut extrêmement<br />

motivant. Lorsque nous avons écho de ce qui se passe<br />

dans les lieux tampons de la société, comme les missions<br />

locales, comme tous ces lieux où il y a <strong>des</strong> gens<br />

qui stagnent avec <strong>des</strong> sigles qui changent régulièrement.<br />

Quand on repasse les reportages sur 68 ou même<br />

sur 36, on se rend compte qu'il y a une espèce de récurrence<br />

incroyable : les gens ne veulent pas faire <strong>des</strong><br />

trucs d’idiots, ils ne veulent pas faire n'importe quoi, ils<br />

ne veulent pas être <strong>des</strong> robots, ils veulent avoir la sensation<br />

d'exister, avoir une entité qui soit probante dans<br />

tous les rapports qu'ils entretiennent avec les autres. Je<br />

pense qu'il est en train de se préparer quelque chose de<br />

nouveau et que cette chose, c'est “do it !”, c'est-à-dire<br />

que ce n'est pas l'État qui va nous le filer. Est-ce que l'on<br />

doit pousser pour obtenir une subvention pour faire de<br />

la subversion… Par nature, évidemment, non. L'État et<br />

les collectivités, ce n'est pas dans leur nature, ce ne<br />

s e ra jamais possible ! Il n'y aura jamais du fric pour que<br />

l'on fasse de la subversion. Je crois donc qu'il y a là une<br />

malice citoyenne qui est de se re n d re compte que ce ne<br />

sont pas les États qui sont les mieux placés pour faire<br />

l ' E u rope ni pour faire une relation entre l'Europe et la<br />

M é d i t e r ranée mais c'est nous. Nous les gens. Et le plus<br />

dingue c'est que l'histoire le prouve à chaque fois : une<br />

fois qu'on l'aura fait, et bien l'État suivra, les<br />

institutions se modifiero n t .<br />

Alain Leprest : E t re révolutionnaire aujourd ' h u i ,<br />

ce n'est pas de se battre pour institutionnaliser<br />

les artistes et les faire re n t rer dans le moule… On leur<br />

re n t re dedans mais on reste toujours au dehors …<br />

Jean Djemad : Et puis nous, on le fait, c'est tout !<br />

Parfois, on ne sait même pas pourquoi ! On sait qu'on<br />

est obligé de le faire, on ne sait pas si c'est bien, on ne<br />

sait pas si cela va plaire mais on le fait. À partir du<br />

moment où nous sommes constitués, qu'une parole circule<br />

entre nous, que nous arrivons à poser trois ou<br />

q u a t re <strong>actes</strong> avec quelques mouvements, à se sentir<br />

h e u reux de l'avoir bien fait, il y a une deuxième période<br />

qui est celle où l'on va donner à voir, à sentir, etc.<br />

Le danseur de hip-hop n'a pas envie de se faire valoir<br />

a i l l e u rs que dans son cercle pour la seule valeur de son<br />

identité au sein de ce cercle. Ce n'est pas du tout la<br />

même démarche que d'aller sur une scène. Quand cette<br />

conscience du monde extérieur social commence à être<br />

v raiment efficace, il y a un engagement politique au<br />

sens du travail dans la cité qui, lui, est de plus en plus<br />

conscient chez l'artiste. Celui-ci sent qu'il fait partie<br />

d'un tout qui transforme <strong>des</strong> choses. Est-ce que c'est<br />

important pour lui de savoir ce qu'il transforme, comment<br />

il le transforme ? Je ne pense pas mais je pense<br />

que c'est intéressant pour lui en tant que citoyen de se<br />

poser la question à ce titre, mais quand il est là en tant<br />

qu'artiste, je pense que ce n'est pas la question.<br />

Jacques Turpin, directeur MJC Altitude 500 de<br />

Grasse : Je suis à peu près d'accord avec l'essentiel de<br />

ce que dit Jean Djemad sauf sur un point qui me fait<br />

violemment réagir. Quand tu dis que ce n'est pas<br />

l'État qui va financer la subversion, je ne peux pas être<br />

d ' a c c o rd avec cela.<br />

Alain Leprest : Druon disait : “On ne peut pas avoir le<br />

cocktail Molotov dans le dos et puis tendre la sébile".<br />

Jacques Turpin, directeur MJC Altitude 500 de<br />

Grasse : Si nous sommes tous d'accord, y compris les<br />

artistes, sur le fait que si le pouvoir politique - quel qu'il<br />

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